Précontentieux

299 – Décret du 1er février 2007

Toute procédure de contentieux émanant du contrôle médical des caisses débute par un entretien préalable.

Un décret récent (cf. en fin d’article) améliore les conditions de défense du médecin mis en cause lors de cet entretien.

Il comporte trois innovations : – le médecin contrôlé peut se faire assister par un confrère lors de l’entretien à la caisse ; – avant l’entretien, le contrôle médical doit communiquer au médecin incriminé l’ensemble des éléments sur lesquels portera cet entretien ; – cet entretien doit faire l’objet par le médecin- conseil d’un compte-rendu adressé dans les quinze jours au médecin contrôlé, qui a quinze jours pour adresser d’éventuelles réserves, faute de quoi ce compte-rendu est réputé approuvé.

à l’issue de ces délais, la caisse a alors trois mois pour informer des suites qu’elle entend donner. à défaut, elle est réputée avoir renoncé à toute poursuite.

Ces dispositions sont élémentaires en matière de droits de la défense. Il aura pourtant fallu l’opiniâtreté de nos organisations professionnelles, et notamment de la C.S.M.F., pour enfin les obtenir.

Elles permettront d’aborder dans de meilleures conditions la période du précontentieux.

Définition du précontentieux

Le précontentieux peut être défini comme la période qui a comme point de départ une étude d’activité engagée par le contrôle médical de la caisse et qui se termine par l’entretien préalable.

C’est une étape qu’il faut prendre très au sérieux et savoir gérer au mieux car : – il est exceptionnel que cela n’aboutisse pas à une procédure ; – il reste possible de limiter le nombre de dossiers en cause ; – cette période détermine le type de procédure qui sera choisie (contentieux général, contentieux des pénalités, contentieux disciplinaire ou contentieux conventionnel).

Droits du contrôle médical des caisses

La législation et le code de la Sécurité Sociale donnent au médecin-conseil un certain nombre de droits afin de contrôler l’activité d’un médecin : – le contrôle médical porte sur tous les éléments d’ordre médical qui commandent l’attribution et le service de l’ensemble des prestations de l’assurance maladie ; – le médecin-conseil peut se faire communiquer, l’ensemble des documents, actes, prescriptions, et éléments relatifs l’activité du médecin contrôlé ; – il peut aussi consulter les dossiers médicaux des patients soignés par le médecin au cours de la période couverte par l’analyse ; – il peut également entendre et examiner des patients mais à condition d’informer le médecin de ces auditions.

Informations reçues par le médecin mis en cause

Le médecin est informé par la caisse à l’occasion de deux étapes :

1. un premier courrier lui annonce que le contrôle médical va procéder à une étude de son activité. _ Ã ce stade, il n’y a en général rien d’autre à faire qu’attendre, mais cette période est habituellement vécue de façon désagréable, notamment quand des malades sont interrogés par la caisse. On peut néanmoins déjà informer le syndicat régional ; _ 2. à l’issue de cette analyse, le contrôle médical informe l’intéressé de ses conclusions et lui précise qu’il peut se faire entendre dans un délai de un mois. _ C’est à partir de ce moment là qu’il convient rapidement de prendre les initiatives pour assurer sa défense.

Que doit faire le cardiologue mis en cause ?

– Prévenir son syndicat régional, et ceci le plus rapidement possible compte tenu des délais de forclusion. En effet, vos responsables syndicaux ont le même emploi du temps professionnel que vous, de sorte que ce type d’affaire ne peut s’étudier que lors d’un dimanche sans garde, ce qui ne permet pas toujours une réponse immédiate. L’appel au syndicat doit s’accompagner d’un dossier complet, avec ses points forts mais aussi ses points faibles. Le syndicat n’est pas là pour juger, mais pour vous aider à apprécier lucidement la situation. – Prévenir l’assurance professionnelle quand celle-ci est assortie d’une clause de défense juridique.

Quel soutien apportera le syndicat régional au stade de précontentieux ?

– D’abord un soutien psychologique. L’expérience montre en effet que le cardiologue mis en cause par sa caisse est souvent très affecté et qu’il convient de relativiser les choses. – Une première analyse du dossier avant l’entretien avec le contrôle médical. Il convient à ce stade d’apprécier si la caisse a tort, ce qui dans notre pratique est la situation la plus fréquente, ou si l’on s’est trompé, par exemple dans une cotation, ce qui peut arriver, auquel cas il vaut mieux l’admettre et être prêt à rembourser. – Une vérification de la procédure suivie par la caisse : -* il peut y avoir des irrégularités dans l’enquête préalable, notamment quand elle a été faite par des agents administratifs assermentés ; -* après une analyse d’activité, le raisonnement suivi par la caisse doit être précisé conformément à l’article 3 de la loi informatique et libertés ; -* les faits reprochés doivent être précisés ; -* la liste complète des patients concernés doit être mentionnée.

– Préparation de l’entretien avec le contrôle médical et élaboration d’un argumentaire. – « Debriefing » après l’entretien. – Analyse du compte-rendu de l’entretien adressé par la caisse et aide à la rédaction de la réponse. – Éventuellement, courrier syndical adressé au contrôle médical pour préciser la réglementation et la jurisprudence et bien montrer que le cardiologue attaqué n’est pas seul et qu’il est soutenu.

Par contre, il faut être clair : vos responsables syndicaux ne ménageront pas leur temps et leur énergie pour vous conseiller, vous écouter, travailler sur votre dossier le soir ou le dimanche, mais il ne leur sera pas toujours possible d’être présents lors des entretiens avec les médecins-conseil. Ceux-ci ont lieu en effet à des horaires « administratifs », et, compte tenu du poids croissant des charges des cabinets et de ce que sont devenus les délais de rendez-vous des cardiologues, vos responsables qui, rappelons le, vous aident bénévolement, ne peuvent pas se permettre de supprimer régulièrement des journées de consultations.

En fait, l’expérience a montré que nos adhérents sont toujours très motivés et se défendent d’autant mieux qu’ils savent se prendre en charge, après avoir été « armés » par leur syndicat. C’est de cette façon qu’ont pu être menés à bien la majorité des contentieux.

Précontentieux : quelques règles

– Tout ce qui est écrit par le médecin, même par maladresse peut se retourner contre lui à un moment donné de la procédure – Éviter les arguments du style organisation personnelle, malade difficile, etc. – Mettre en avant : -* les textes réglementaires ; -* les recommandations professionnelles ; -* les soins nécessités par l’état du malade. – Exiger une analyse du contentieux dossier par dossier. – Demander pour chaque point litigieux sur quel texte le médecin-conseil s’appuie pour justifier sa position. – Les circulaires de sécurité sociale ne sont pas opposables aux médecins, ni aux patients, ni même aux juridictions saisies à l’occasion d’un litige (Cour de Cassation- 11 mai 1988).

Vincent Guillot