Quatre leviers pour améliorer la pertinence des soins

Pour la présidente de la HAS, Dominique Le Guludec, qui pilote le chantier sur la pertinence des soins, la sous-consommation médicale est tout aussi contraire à la pertinence des soins que la sur-prescription. 

A l’occasion des « Contrepoints de la Santé » organisés à Paris et qui étaient consacrés à « l’autorité et la pratique médicale », un débat a réuni la présidente de la haute Autorité de Santé (HAS), Dominique Le Guludec, et Jean-Paul Ortiz, le président de la CSMF. La première, qui s’est vu confier début mars par la ministre de la Santé le chantier relatif à la pertinence des soins dans le cadre de la stratégie de transformation du système de santé, a exposé ses vues sur la pertinence et indiqué plusieurs pistes pour l’améliorer. Elle a tout d’abord affirmé la nécessité de distinguer « la pertinence individuelle dans l’acte », « la prise en charge du malade », et « l’efficience globale du système ». « Je pense que les deux se rejoignent très souvent, mais il faut bien faire attention à distinguer les deux », souligne Dominique Le Guludec. La présidente de la HAS a également insisté sur l’importance de ne pas uniquement pointer la sur-prescription lorsque l’on parle de pertinence, mais de prendre aussi en considération la sous-consommation, « au moins aussi délétère ». « Quand on ne fait pas assez de dépistage du cancer, quand on ne fait pas de vaccination de la rougeole, quand on sous-consomme, on soigne des patients à des stades plus tardifs et on arrive à des complications, ça obère la qualité des soins et ça coûte très cher aussi », a souligné Dominique Le Guludec. 

Pour la présidente de la HAS, il y a quatre leviers d’action possibles pour pousser la communauté médicale à accompagner la pertinence des soins :

1. La formation continue des médecins, avec la contrainte de la « recertification des professionnels de santé ».

2. Les incitations financières à la qualité.

3. La prise en compte du regard des patients, responsabilisant pour les médecins.

4. L’intérêt des professionnels de santé dans la connaissance et l’évolution de leurs pratiques par rapport à leurs collègues et aux recommandations.

Concernant ce dernier levier, Domnique Le Guludec a mentionné qu’il devrait bénéficier, d’une part de l’amélioration des indicateurs existants et d’autre part, de l’élaboration de nouveaux « indicateurs de qualité des parcours » que prévoit la lettre de mission d’Agnès Buzyn aux animateurs de ce chantier de la pertinence des soins. 

« Aujourd’hui, l’ensemble des médecins est imprégné de ces éléments qui ont pris toute leur place, estime Jean-Paul Ortiz. Et nous sommes passés d’une culture des process à une culture plus anglo-saxonne du résultat ». Pour autant, s’il juge que « la situation est mûre pour évoluer », il exhorte les autorités de tutelle à « ne pas aller trop vite ». «  Je pense que la problématique des indicateurs doit rester aux mains des professionnels », a souligné le président de la CSMF qui a déclaré avoir « un peu de mal à se retrouver dans la HAS ». Une façon de rappeler au passage qu’avec les dernières nominations intervenues, le collège de la HAS ne compte plus aucun représentant des médecins libéraux dans ses rangs. 

Message reçu par Dominique Le Guludec : « La HAS n’est pas un endroit de lobbying, le but de la HAS est le bénéfice du patient, donc ça peut heurter de temps en temps des intérêts catégoriels, mais on ne fait rien sans les professionnels », a-t-elle répondu, en mentionnant notamment l’élaboration de futurs indicateurs de qualité des soins.

Les deux débatteurs ont également échangé sur les modalités de développement de la télémédecine et de la téléexpertise. Dominique Le Guludec a rappelé que la HAS avait estimé « qu’aucune situation clinique ne peut être exclue a priori », pourvu qu’elle soit pratiquée dans de bonnes conditions, avec notamment « un outillage adéquat ». Elle a aussi rappelé que la haute Autorité de Santé devait publier « un guide sur le bon usage et la qualité des pratiques de téléconsultation et de téléexpertise » d’ici la fin de l’année.

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