Que reste-t-il de la Convention médicale ?

337 – CardioNews – Le CAPI (Contrat d’Amélioration des Pratiques Individuelles) va donc faire son entrée dans la marmite conventionnelle. Ainsi en a donc décidé le Parlement. Lequel est, à l’inverse, resté sourd aux exhortes (exhortations, invites, appels…) de la profession qui aurait souhaité lui voir entamer « le nettoyage » de la loi HPST (Hôpital, Patients, Santé, Territoires) et des diverses LFSS (Loi de Financement de la Sécurité Sociale) qui ont accumulé les sédiments antilibéraux : stabilisateurs économiques (imposant un sursis de six mois à l’application de tout accord tarifaire), ONDAM de ville désespérément aligné sur l’hôpital, obligation humiliante de déclarer ses absences à l’institution ordinale, rôle de police exorbitant consenti aux directeurs de caisses … Et le même Parlement n’entend rien changer, pour l’heure, à la gestion de la RCP, qui mine les vocations en gynécologie, ni à celle de la retraite qui interpelle toute la profession… Disons-le nettement : c’est désormais dans la navette parlementaire entre le Palais Bourbon, qui héberge les députés, et le Palais du Luxembourg, siège du Sénat, que se décidé l’essentiel de la politique de santé, y compris dans sa composante conventionnelle censée pourtant reposer sur le dialogue du syndicalisme médical et des caisses.

Dans les premières années de la vie conventionnelle, dans le courant des années 70, les interlocuteurs discutaient, se mettaient éventuellement d’accord et – lorsqu’ils avaient paraphé un compromis – se tournaient ensemble vers l’État en lui demandant de consacrer – par le règlement, voire la loi – l’accord qui n’était encore que « conventionnel ».

Depuis quelques années – et à dire vrai, depuis la « grande fâcherie » des années 1995-2005 – c’est l’inverse qui se produit : le législateur balise le chemin que doivent emprunter les partenaires. La mécanique tourne dans l’autre sens ! Quand ce n’est pas le Président de la République en personne qui stipule pour tout le monde, partenaires et Parlement. Il a ainsi annoncé, personnellement, la réforme qu’il envisage pour la rémunération, à trois niveaux, des médecins libéraux même s’il consent à donner l’illusion d’une concertation confiée au ministre de la santé…

On parlait, par le passé de la « main invisible » de l’État sur toute la vie professionnelle médicale. Il faut rendre hommage à Nicolas Sarkozy pour avoir consenti à la transparence : il décide seul désormais, ou avec son entourage immédiat, mais sans faire grand cas des apparences conventionnelles. Quitte à se renier comme il avait dû s’y résoudre, au début de son quinquennat, quand il avait annoncé un peu vite la fin de la liberté d’installation … Une menace de grève des internes et des chefs avait suffi à le ramener au pragmatisme.

A s’exposer de la sorte en première ligne comme un vulgaire ministre, fut-il omnipotent, l’hyper Président a pris le risque de décevoir son électorat naturel. Et il n’est pas acquis que l’opération déséduction en cours lui ramène tous les suffrages médicaux dont il aura besoin dans 18 mois.

La situation a aussi, pour les médecins, un avantage inédit : ils sont convoqués pour négocier une convention, théoriquement sans calendrier précis vu que la dernière (2005-2010) est déjà en coma prolongé … C’est-à-dire qu’ils peuvent obtenir beaucoup de cette négociation à peine amorcée. Sous condition d’achever le processus avant le printemps 2012.

Sans signature avant cette échéance, ce qui reste de légitimité à la fiction conventionnelle aurait définitivement vécu !

Jean-Pol Durand