Rien ne sera plus comme avant

340 – Il est indéniable que le tsunami médiatique provoqué par l’affaire benfluorex va considérablement modifier l’approche pour tout ce qui touche de près ou de loin le médicament.

Le médecin se doit d’informer le patient sur l’intérêt de la prescription, ses éventuels effets secondaires, en démontrant un bénéfice à attendre supérieur au risque. Une nouveauté serait notre obligation d’information sur ses droits en cas de préjudice ! Pour avoir une attitude critique objective, nous devons avoir une formation initiale et postuniversitaire adéquate. La place dans l’enseignement de la pharmacologie est pratiquement anecdotique. Les publications des recommandations, la présentation des grandes études lors des congrès, les actions de FMC destinées à remettre à niveau nos connaissances sont conçues et réalisées par des experts dont l’indépendance est remise en question du fait de leur lien avec l’industrie. Les prescriptions hors AMM sont montrées du doigt. Xavier Bertrand veut solutionner tous ces problèmes. Il faut revoir la formation des professionnels de santé, notamment sur la culture du risque. Le retard de la parution des décrets sur le DPC en est une conséquence (une réflexion est centrée notamment sur le mésusage). Une autre problématique et pas des moindres, 700 millions d’euros seraient injectés chaque année par l’industrie pharmaceutique, alors que l’Etat ne finance la FMC qu’à hauteur de 70 millions d’euros !

Reste à revoir tout « le circuit » de la déclaration des effets secondaires des médicaments, en termes de morbi-mortalité. Un bénéfice démontré et supérieur au risque est la règle majeure. Ne pas prescrire les antithrombotiques dans certaines pathologies auraient des conséquences dramatiques, pourtant ils ne sont pas exempts de complications, parfois elles aussi dramatiques. La publication par l’Afssaps de la liste des 77 médicaments sous surveillance, sans information au préalable du corps médical, peut avoir des conséquences désastreuses sur l’arrêt intempestif de certaines molécules. A la suite du rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS), Xavier Bertrand a décidé d’engager les « assises du médicament », une concertation très large et intense sur la refonte du système de sécurité sanitaire des produits de santé. Les conclusions sont attendues début juin. La cardiologie libérale souhaite être aux côtés des patients dans les futures commissions de l’Afssaps pour les décisions à prendre concernant sa spécialité. Ne sommes-nous pas en première ligne pour connaître la iatrogénie liée à tel ou tel produit ? A ce jour, aucun cardiologue libéral n’est présent dans le comité de suivi du benfluorex. Pourtant, près de 10 % de nos consultations sont aujourd’hui vouées au dépistage des valvulopathies et de l’HTAP liées à cette thérapeutique. La cardiologie libérale a répondu immédiatement, dans les limites de ses possibilités de rendez-vous, à ce surcroît d’activité. Le faible remplissage des fiches de pharmacovigilance n’est-il pas lié en grande partie à leur complexité ? La prescription en DCI va-t-elle faciliter l’observance ? Les mésusages ne sont-ils pas une conséquence d’une communication mal adaptée ? Enfin, comment résoudre les conflits d’intérêts ? Autant de questions auxquelles il faudra bien un jour répondre.

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