CES 2019 : Amazon et la santé

Apple absent, mais snobant ses concurrents sur la vie privée des utilisateurs, Google venant y faire la promotion de son assistant intelligent, et Amazon, de plus en plus présent dans le monde de la Santé.

Après le rachat de PillPack, la start-up de vente de médicaments en ligne en juin dernier pour un montant avoisinant le milliard de dollars, et l’investissement dans Grail, une start-up qui travaille sur la détection et le développement d’un test sanguin pour détecter les cancers avant l’apparition des symptômes, la création d’une équipe « Santé et Bien-être » pour développer des applications concernant les diabétiques, mères/enfants et personnes âgées pour l’assistant domestique Alexa, le service vocal dans le Cloud, Amazon annonce un service d’analyse utilisant la machine learning : Amazon Comprehend Medical. Cette technique aurait l’avantage de réduire le temps d’étude d’un dossier à quelques secondes et de faciliter ainsi le travail des professionnels de santé en identifiant automatiquement les « états de santé, termes anatomiques, détails de tests médicaux, traitements et procédures ». Le service sera également utilisable par les patients afin de les aider dans leurs traitements.

Enfin, un partenariat a été fait entre Amazon et Omron Healthcare, (filiale d’Omron connu pour ses tensiomètres numériques), pour introduire dans Alexa, l’assistant vocal du géant du net, une application afin de mesurer la tension artérielle, lire ses derniers relevés médicaux, les comparer, proposer des solutions… Les propriétaires d’un tensiomètre Omron Healthcare vont donc pouvoir interagir directement avec l’assistant vocal.




De Toumai à Homo ergaster-erectus [1]

Depuis le discours demeuré célèbre, en 1860, de Jacques Boucher de Perthes « De l’Homme antédiluvien et de ses œuvres », nos connaissances sur l’évolution de l’homme n’ont cessé de progresser. Les découvertes, le 19 juillet 2001, par l’équipe dirigée par Michel Brunet dans le désert du Djourab au Nord du Tchad, ont fait de Toumai notre « ancêtre » le plus ancien et sont venues infirmer la théorie de l’East side story d’Yves Coppens. (1)

Dès le début du XVIIe siècle, l’italien Lucilio Cesare Vanini (1585-1619) finit sur le bucher pour athéisme. Ce philosophe et naturaliste osa insinuer que l’homme descendait du singe. En disséquant un orang-outang, le docteur Edward Tyson (1650-1708), affirma qu’il avait quarante points de ressemblance avec l’homme, mais aussi trente quatre points de différence. 

Charles Darwin (1802-1882) dans sa « Filiation de l’homme et la sélection liée au sexe » en 1871, leur reconnaissait un ancêtre commun et une origine africaine. Le XXe et XXIe virent les recherches progresser à « pas de géant ». Ainsi, le génome du chimpanzé et de l’homme ne diffère que de 1,26%. 

Leur séparation, à partir d’un individu identique probablement africain, pourrait intervenir vers 8 millions d’années, voire entre 6,3 et 5,4 Ma (2) en étudiant le génome, avec une période de métissage qui dura 4 millions d’années. 

Toumaï, Orrorin

La découverte du crâne complet d’un mâle, de fragments de mandibules et de dents couvertes d’émail (absent chez les grands singes) correspondant à six individus (sahelanthropus tchadensis) datant de 7,2 à 6,8 Ma, (3) remit en cause nos précédentes théories : un « ancêtre » de l’homme avait vécu à l’Ouest du rift ! Les treize fossiles (Orrorin tugenensis), datant de 6,1 à 5,7 Ma, trouvés au Kenya, en 2000 par Brigitte Senut et Martin Pickford, furent jusqu’à Toumaï les restes du plus ancien « ancêtre » de l’homme. La forme de son fémur lui autorisant une bipédie « fréquente » et l’existence d’émail dentaire lui donnent des traits humains. Ces trouvailles suggèrent que la dichotomie entre les grands singes et l’homme doit être au delà de 7 millions d’années.

Reconstitution de Sahelanthropus tchadensis. Jardin de D’jamena, Tchad.

Les ardipithèques

Trouvés en 1992 dans la vallée de l’Awash en Éthiopie, ces fossiles d’ardipithécus ramidus (dénommés d’abord australopithécus ramidus) datent de 4,5 à 4,4 Ma. Le squelette assez complet d’une femelle, dénommée Ardi, put être reconstitué. 

L’étude des os de trente deux individus, notamment ceux du bassin et des mains prouvent la pratique de la bipédie et le déplacement dans les arbres. Le knucle-walking inconnu d’Ardi, au contraire des chimpanzés et des gorilles, démontre que ce mode de locomotion fut précédé par la station debout érigée bipède : « le schéma évolutif classique, l’homme descend du singe se trouve sinon inversé du moins bouleversé ! » (4). En 2001, un nouveau représentant d’ardipithécus, ardipithécus kadabba dégagé au Nord-Est de l’Éthiopie daterait de 5,8 à 5,2 Ma. Serait-il l’ancêtre commun tant recherché ?

La série des australopithèques et des paranthropes

Les australopithèques évoluèrent entre 4,4  et 2,2 Ma, en Afrique du Centre, du Sud et de l’Est. Sont distingués par les découvreurs les australopithécus : anamensis (« du lac ») de 4,2 à 3,9 Ma, afarensis (« de l’Afar ») de 4,1 à 2,9 Ma, africanus (« africain ») de 3,5 à 2,5 Ma, bahrelghazali (« de la rivière des gazelles ») de 3,5 à 3 Ma, gahri (surprise) 2,5 Ma, sediba (de la source ») 2 Ma. Tous possédèrent une bipédie non exclusive, une denture éloignée de celle des grands singes avec un prognathisme moins marqué. Lucy (femelle australopithécus afarensis) dont le squelette (40 %), extrait dans la vallée de l’Awash en 1974 et conservé au musée d’Addis-Abeba, reste certainement le fossile le plus connu au monde. Une chute d’un arbre (?) à l’origine de fractures multiples, serait la cause de son décès. L’étude du squelette presque complet d’une enfant de trois ans, Selam, plus âgée de 150 000 ans que Lucy, mis au jour à quatre kilomètres d’Hadar, apporte la preuve qu’au delà de cet âge, la croissance des individus était rapide. 

Tête de Lucy, 3,2 Ma. Addis-Abbeba, Musée national d’Ethiopie.

Raymond Dart créa en 1924 le taxon australopithécus africanus pour l’enfant de Taung dont la mandibule et le calvarium furent découverts à 150 km de Kimberley en Afrique du Sud. Cette dénomination tarda à être admise par ses collègues, car ces fossiles étaient considérés comme trop proches des grands singes. Abel (australopithécus bahrelghazali) découvert en 1995, à l’Ouest du Rift, a contredit le premier la théorie de l’East side story, alors que l’équipe d’Yves Coppens cherchait à la confirmer. 

Quant aux deux squelettes partiels d’Australopithécus sediba coincés à l’intérieur d’une grotte sans avoir pu en ressortir, certains chercheurs les donnent comme précurseurs du genre homo (habilis ou erectus). Une étude détaillée de ces fossiles leur attribue une mixité de caractères, soit typiques des grands singes ou d’autres espèces d’australopithèques, soit très humains. 

Pour Yves Coppens, « cet australopithèque sud-africain atteint à peine 2 Ma. Je vois mal comment l’homme pourrait avoir un ancêtre plus jeune que lui ! Pour moi, nous sommes tout simplement en présence d’un nouveau parallélisme évolutif, ce qui est déjà passionnant ». L’existence de sutures métopiques visibles sur le crâne de l’enfant de Taung et de ses successeurs est conciliable avec un accouchement facilité et un fort développement cérébral. (5) Le Kenyanthropus Platyop repose sur un seul fossile (crâne déformé) trouvé au Nord du Kenya. Il vécut, il y a 3,5 Ma, sur les bords du Turkana. Objet de discussions parmi les savants, il serait un spécimen d’australopithecus afarensis ou l’un des ancêtres d’homo rudolfensis.

Les premiers paranthropes (« à côté de l’homme ») apparaissent il y a 2,4 Ma en Afrique du Sud (Swartkrans et Sterkfontein), au Kenya (Olduvai) et dans la vallée de l’Omo en Éthiopie. Ils comprennent trois espèces : robustus (regroupant cent trente individus dont le mâle Orphée et la femelle Eurydice), aethiopicus et boisei (appelé d’abord zinjanthrope), le plus grand et le plus corpulent. Contemporain d’homo habilis, ils ont un dimorphisme sexuel très important (taille : 1,45 m, poids : 45 kg pour les mâles ; taille : 1,15 m, poids : 30 kg pour les femelles) supérieur à celui de l’homme.

Petite taille et faible capacité crânienne

La taille et la capacité crânienne des espèces progressèrent lentement pendant des milliers d’années. Toumaï, Orrorin et Ardi mesuraient entre 1,20 m. et 1,30 m. pour un poids de l’ordre de 30 à 50 kg. La capacité crânienne du premier avoisinait 320-380 cm3, et 300-350 cm3 pour Ardi, légèrement inférieure à celle des australopithèques et des chimpanzés. Celle d’autralopithécus afarensis atteint 380 à 430 cm3, d’africanus 450 à 530 cm3, de sediba 450 cm3. Leur taille était de l’ordre de 1,40-1,50 m pour un poids entre 40 et 50 kg. Tous ces paramètres évoluèrent chez les paranthropes : taille voisine de 1,50 m, poids de 50 kg, capacité crânienne de 420 cm3 pour aethiopicus et de 500-600 cm3 pour boisei.




Domaine Hegarty-Chaman – Minervois Les Dames 2014

Que diable est venu faire un Pair du Royaume Sir John Hegarty, anobli par la reine d’Angleterre pour services rendus à l’industrie publicitaire, dans un petit bled du Minervois sur le versant sud de la Montagne Noire ? Et bien pour produire de grands vins, après avoir acheté en 2002 le domaine de Chamans, 50 ha de terres d’un seul tenant comprenant un vignoble de 15 ha, certifié bio et biodynamie depuis 2010, dans un vallon entre 150 et 300 m d’altitude isolé des autres vignobles qui lui permet d’exprimer la qualité d’un terroir d’exception.

Symbole sur les étiquettes des bouteilles, le mouton noir est là pour rappeler que le Languedoc offre l’opportunité d’élaborer des vins de haut niveau, si on se démarque des traditions et des habitudes locales productivistes.

Le terroir de Chamans se compose essentiellement de calcaire et d’argile qui retient l’humidité, vertu essentielle dans la région, avec une parcelle de schistes. Le cers, vent prédominant, assèche l’humidité sur les raisins et réduit les traitements, tisanes et préparations bios spécifiques. En accord avec son approche biodynamique, le domaine s’efforce de rétablir un équilibre naturel entre la vigne et son environnement, du sol à la faune et la flore locale, au rythme des planètes. Les machines sont très peu utilisées, des oliviers, de la lavande, des ruches créent de la biodiversité, un troupeau de moutons élimine les mauvaises herbes et assure une fertilisation naturelle par engrais organiques.

Tous les raisins sont cueillis et soigneusement triés manuellement, puis descendus par gravité dans des cuves partiellement enterrées. La vinification, assurée par Jessica Servet, s’effectue en séparant chaque cépage, les rouges sont égrappés et foulés.

La cuvé « les Dames » 2014 assemble 60 % de syrah et 40 % de carignan issus de vignes âgées de 30 à 60 ans avec un rendement faible de 25 hl/ha. La fermentation est menée en cuves époxy pendant 4 semaines grâce aux seules levures indigènes naturelles. Le vin est élevé pendant 18 mois en barriques, dont 30 % neuves. Le soufrage est minimal. Les interventions sont réduites à quelques remontages et délestages. L’embouteillage, lorsque le vin est stable à la lune descendante, s’effectue après légère filtration.

Un élevage parfaItement maîtrisé

Jessica Servet, épaulée par un œnologue et un biodynamicien, met tout en œuvre, pour privilégier la finesse, l’expression aromatique, la pureté du fruit et obtenir la texture la plus suave et les tanins les plus fins possibles grâce à cet élevage parfaitement maîtrisé.

La cuvée « les Dames » 2014 dégage, à l’ouverture, une désagréable odeur de réduction (œuf pourri, pet) qui nécessite obligatoirement un vigoureux carafage, afin de bien l’oxygéner et le report, au lendemain, de la dégustation.

Sous ces conditions, le vin, paré d’une robe pourpre amarante presque opaque, dévoile un nez sanguin et complexe de fruits rouges : fraise, framboise, d’épices et de garrigue : thym grillé, romarin, sauge, de thé noir soulignés par une touche de graphite et de balsamique. En bouche, ce vin est plus juteux et séveux que confituré. Les nuances aromatiques s’expriment dans un registre réglissé donnant une impression crémeuse et veloutée. L’équilibre entre les tanins concentrés mais veloutés, les baies vibrantes et la vive minéralité ajoutent de la complexité à sa finale incroyablement longue.

Une aspiration à l’excellence

Ce vin généreux, doté d’une agréable finesse avec ses arômes sudistes, se marie harmonieusement avec bien des recettes du Midi, surtout si elles font une large place aux herbes aromatiques : lapin aux olives, poivrons farcis à l’agneau, daube de bœuf aux olives noires, canard rôti au miel, colombo de poulet, agneau au romarin, cargolade : escargots servis avec un aïoli. Cette cuvée « les Dames » s’accorde particulièrement avec le porc : noix aux pruneaux, rôti aux herbes, travers grillés avec figues rôties. Dans un registre marin, un accord savoureux sera réalisé avec un filet de cabillaud rôti avec un jus d’huile d’olives et tomates concassées. Plus rustiquement, il mettra en valeur une terrine de volaille, un jambon de montagne ou un ballota espagnol accompagnés d’une salade de crudités. Il peut accompagner certains fromages : pélardon ou chabichou avec un pain aux olives. Avec quelques années de plus, ce Minervois épousera avec plaisir des gibiers : daube ou civet de sanglier à la purée de marrons, lièvre en saupiquet.

C’est grâce à des vins comme celui-là que le vignoble languedocien surmontera sa crise en aspirant à l’excellence.

Hegarty John
Chamans, 11160 Trausse-Minervois

Les Dames 2014 AOP Minervois 11160 Trausse-Minervois

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération




lkb Cardiologie vasculaire 8e édition 2018

Le succès, faut-il le rappeler, ne se dément pas pour cette conférence KB de Cardiologie-maladies vasculaires entièrement dédiée à la préparation de l’ECN, autrement dit de l’examen classant national. Voilà que la 8e édition, toujours très attendue, est désormais disponible.

Trois ans se sont écoulés depuis la mouture précédente (dont nous avions déjà rendu compte ici), 3 ans pendant lesquels sont survenus beaucoup de changements au sein de la spécialité qui ont motivé une mise à jour de près de 60 % du contenu de l’ouvrage. 

Depuis, ont été publiées en effet les dernières recommandations européennes et françaises sur des items majeurs tels que l’insuffisance cardiaque, l’HTA, la prévention cardiovasculaire, les valvulopathies, les SCA, l’arrêt cardiaque, les AOMI, la syncope, la FA, etc.

Cette édition, pilotée comme les précédentes par le Dr David Attias et le Pr Nicolas Lellouche, a été réalisée avec la collaboration scientifique du Collège National des Cardiologues Français (CNCF) ; elle a été rédigée par une équipe pédagogique composée de 19 médecins, dont 8 PU-PH qui se sont attachés à donner une vision claire, didactique et consensuelle, dans le but d’éviter les pièges de certains QCM qui ciblent parfois des points de détail.

Le grand atout de cette édition est un support online inédit et unique. Sur le site dédié au livre seront ainsi disponibles :

  • des vidéos pédagogiques « coup de pouce » portant sur des points précis bénéficiant d’une iconographie expliquée,
  • des mises à jour régulières en fonction de la parution de nouvelles recommandations ou de nouveaux traitements,
  • des QCM et des fiches de cours « pour en savoir plus »,
  • de la bibliographie pour ceux qui veulent approfondir les sujets traités au-delà de l’examen classant,
  • des échanges avec l’équipe rédactionnelle via un blog.

Comme le rappelle le Pr D. Messika-Zeitoun qui  en a assuré l’une des  préfaces, cet ouvrage est devenu au fil des années « la référence » dans le domaine de l’enseignement de la cardiologie et de la pathologie vasculaire ;  mais son intérêt déborde largement ce cadre et l’on ne saurait trop conseiller au cardiologue en activité désireux de parfaire sa pratique d’en faire l’un de ses livres de chevet.

Les spécifications du livre
Auteurs : Dr David Attias et le Pr Nicolas Lellouche avec la collaboration du CNCF
Editeur : Editions Vernazobres-Grego
Pagination : 732 pages
Prix public : Livre : 39,00 €




Domaine Hauvette Dolia 2011 – IGP Alpilles

Derrière le brillant écran du rosé provençal se cachent des vins blancs d’excellence, ne représentant malheureusement plus que 3,5 % de la production, qui, pour certains, méritent d’être comparés aux plus grands blancs de l’hexagone, tel ce Dolia incroyablement aromatique.

Dominique Hauvette d’origine lorraine a, au gré des vicissitudes, suivi ses parents à Val d’Isère, Paris avec déjà, toute jeune, deux passions, la terre et les chevaux. Elle en fera ses métiers : vigneronne et éleveuse de chevaux. En 1980, un peu par hasard, elle descend pour des vacances dans les Alpilles. Elle tombe amoureuse de cette magnifique région et n’en est jamais repartie. En 1987, son père l’aide à acheter un petit mas entouré de 2,5 ha de vignes. C’était sûr, elle voulait vivre de la vigne, sans, pour autant, négliger son élevage équestre. Il lui a donc fallu se former, entamer à mi-temps le diplôme national d’œnologie, suivre une formation pratique auprès des très réputés Laurent Vaillé du domaine de la Grange des Pères et d’Éloi
Durrbach de Trévallon. Mais comme elle l’avoue, « J’ai surtout appris sur le tas ». Sa haute exigence vigneronne se traduit par son choix immédiat de la culture biologique et biodynamique certifiée dès 2003.

Aujourd’hui, Dominique cultive 17 ha sur le piémont nord des Alpilles bénéficiant d’un magnifique terroir argilocalcaire riche en coquillages fossiles près de Saint-Rémy-de-Provence.

Point de clones, point de chimie dans les plantations protégées des trop fortes chaleurs et soumises au mistral grâce à leur exposition nord, où la vigneronne recherche prioritairement l’expression de cépages permettant d’allier finesse, élégance et complexité. Ainsi, guidée par son goût et son intuition, elle décide, il y a 25 ans, de complanter des cépages blancs rhodaniens qui, effectivement, trouveront les conditions idéales, pour se révéler superbement.

Madame Hauvette, à la vigne comme dans la cave, travaille, en empathie avec l’environnement, toujours avec une grande douceur. Les raisins, récoltés manuellement à petits rendements, sont pressés délicatement en grappes entières. Après études et réflexions, elle a choisi de vinifier, puis d’élever la totalité de sa cuvée Dolia dans des cuves en béton en forme d’œuf le plus naturellement possible, sans aucune intervention, l’homogénéisation parfaite grâce à ce contenant permet de ne pas filtrer le vin. L’élevage s’étend au minimum sur 1 an pour le Dolia qui assemble 40 % de vieille clairette, 30 % de roussanne comme de marsanne similaire aux grands blancs du Rhône type Hermitage ou Châteauneuf, loin des habituels rolle et ugni de Provence.

Un véritable nectar

Ce Dolia 2011, dont la robe or pale limpide brille dans le verre, est un nectar prodigieux alliant les qualités de ses cépages rhodaniens à celles de son terroir méditerranéen. Le nez est envahi d’arômes de fruits jaunes : orange miellée, physalis, melon, abricot, mais aussi de fenouil, chèvrefeuille, amande fraîche, avant que le terroir n’apporte des senteurs de truffe blanche, de roche concassée, de terre chaude. En bouche, ce vin, incroyablement racé, est un véritable élixir de générosité, de tension, de minéralité. La puissance est parfaitement maîtrisée, les tanins remarquablement intégrés. La très, très longue finale est portée par de beaux amers revigorants. A l’évidence, ce vin, promis à une très longue garde, reste encore dans le charme et la vigueur de son adolescence.

Ce Dolia, vin complexe et solaire, enrobe magnifiquement les riches plats marins : turbot aux champignons sauce hollandaise, dorade royale, lotte au safran, homard thermidor, langouste en aigre-doux d’Alain Passard. Ce vin a, de plus, le privilège d’accompagner, sans fausse note, la truffe et l’ail, et s’ouvrir ainsi à bien des recettes méridionales : brandade de morue, Saint-Jacques à la provençale. 

Un accord sur truffe blanche ou noire suivant son âge

Jeune, ce Dolia s’accorde avec les saveurs de la truffe blanche dans pâtes ou risottos, plus âgé, c’est la truffe noire qui le magnifie sur des chaussons ou ravioles. Son opulente rondeur accueillera avec plaisir des viandes blanches généreuses, telles ris de veau, asperge verte et morille, blanquette ou poularde truffée. Il remplace avec avantage bien des rouges sur certains fromages : Saint-Marcellin et Saint-Félicien crémeux.

Dominique Hauvette, qui, outre le Dolia, élabore d’autres merveilles, tant en blanc : Jaspe (moins onéreux) qu’en rouge : Améthyste et Cornaline, me souffle la conclusion : « Élever des chevaux, élever de la vigne, élever du vin, au fond c’est s’élever…».

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération

En savoir plus
Nombre de bouteilles par an : 40000
Surface plantée : 16,25 hectares (Rouge : 13,00, Blanc : 3,25)
Mode de vendange : Manuelle
Âge moyen des vignes : 30 ans
Cépages rouges : Cabernet-Sauvignon (5 %), Carignan (8 %), Cinsault (22 %), Grenache noir (50 %), Syrah (15 %)
Cépages blancs : Roussanne (51 %), Clairette (39 %), Marsanne (10 %)
Coordonnées : Dominique Hauvette – 2946, voie Aurélia, 13210 Saint-Rémy-de-Provence – Tél : 04 90 92 08 91
Contact email
Vente : A la propriété ou par correspondance




L’Ecole de Crozant et les Eaux Semblantes [2]

Une pléiade d’artistes paysagistes ont cherché entre 1850-1950 l’inspiration le long de la vallée de la Creuse et de ses affluents. Ils confrontèrent leur talent à un paysage complexe, dans un laps de temps assez court sur une aire géographique très restreinte, avant que la mise en eau (1926) du barrage hydro-électrique d’Eguzon ne vienne submerger, en partie, les gorges pittoresques.

Fernand Maillaud (1862-1948)

Fernand Maillaud, originaire de l’Indre, est « plus paysan que peintre ». Après des années de galère à Paris, il fait partie des peintres impressionnistes et symbolistes avec Maurice Denis (1870-1943) Paul Sérusier (1864-1927) et Gauguin avec lequel il ne sympathise pas ; son goût de l’indépendance l’incite à poursuivre une carrière en solitaire et il finit par accéder à la notoriété. 

De 1894 à 1902, il passe plusieurs étés à Fresselines où il voit souvent Maurice Rollinat. Son adage favori était « je peins comme je prie, avec ferveur » et il est celui pour qui « la poésie des chemins creux serait incomplète sans la notion utilitaire » ; c’est ainsi qu’il peint les jours de marchés et les foires à bestiaux, les laboureurs, le cornemuseux et les maîtres sonneurs. 

En 1897, il installe son atelier à Paris, au n°3 de la rue de l’Estrapade, la maison où vécut Diderot. Il y finira sa vie après des séjours en Provence et en Afrique du Nord, et après une carrière « jalonnée d’honneurs et de charrettes à bœufs » en recevant la Légion d’honneur « comme on reçoit un bouquet de fleurs ».

Autres peintres

La place manque pour être exhaustif ; citons Léon Detroy (1857-1955) qui découvre la vallée de la Creuse vers 1885, bien avant Guillaumin ; à peine arrivé, il rencontre Maurice Rollinat qui lui dédicacera son livre Paysages et Paysans en 1899 ; en retour le peintre ajoutera parfois la silhouette du poète dans ses vues de Fresselines. 

C’est en solitaire et peu soucieux d’être reconnu que « l’ermite de Gargilesse » y restera soixante ans, fréquentant en alternance Gargilesse, Crozant et Fresselines en « ayant eu toutes les chances, la longévité, la peinture et la Creuse ». Il fera connaître Crozant à Henri Charrier (1859-1950) qui, peintre académique ignorant le monde paysan, peuplera la Creuse de personnages allégoriques et d’apparitions symboliques. 

Paul Madeline (1863-1920) découvre la Creuse en 1894 avec Maurice Rollinat et Léon Detroy. Il est « le dandy de l’arrière-saison » qui se consacre entièrement à la peinture dont il peut vivre à partir de 1902 et vient plusieurs mois par an dans la Creuse, habituellement à l’automne. 

Il s’inspire de la palette et de la technique de Guillaumin qui initie aussi Eugène Alluaud (1866-1947) issu d’une famille de porcelainier de la Haute Vienne et qui est céramiste mais aussi peintre de telle sorte que sa vie se partage « entre l’huile et le kaolin » alternant des séjours à Limoges et à Crozant qu’il découvre en 1887. II y fera construire une maison où il s’installe chaque été à partir de 1905. 

Il se lie d’amitié avec Maurice Rollinat dont il va « peindre la poésie avec la technique de Guillaumin ». Clémentine Ballot (1879-1964) est « la version féminine du paysagisme creusois d’Armand Guillaumin » dont elle fait la connaissance en 1906. A la Piscine de Roubaix (Musée d’Art et d’Industrie de Roubaix), est visible une « Vue des ruines de Crozant » par Henri Pailler (1876-1954) qui fut l’élève de Léon Bonnat (1833-1922). 

On y verra aussi Emile-Othon Friesz (1879-1949) qui viendra voir de près Guillaumin en 1901 et qui « joue les fauves dans les bruyères » préludant au Fauvisme qui « brise le joug de l’impressionnisme » et Francis
Picabia (1879-1953) dont « la fougue indomptable l’amène aux frontières d’un royaume vertigineux : l’abstraction ». 

C’est après la guerre, alors que la Creuse avait retrouvé toute sa solitude, qu’il reviendra à Gaston Thiery (1922-2013) de reprendre le flambeau de la grande tradition du pleinairisme en ayant été convaincu dès 1940 par Léon Detroy de s’installer définitivement à Fresselines en 1948 où il pourra « peindre au village et vendre à Paris »

Le terme « impressionnisme » nait sous la plume du critique Louis Leroy commentant avec dérision, dans la revue satirique « Le Charivari » du 25 avril 1874, le tableau de Claude Monet montrant une vue du Havre noyée dans un brouillard bleuté au dessus duquel se lève un soleil orange se reflétant dans la mer et qui fut dénommé « Impression, soleil levant » (1872). 

Les peintres impressionnistes choisissent souvent leurs sujets dans les paysages et c’est dans ce contexte que se situe, entre 1883 et 1903, autour du poète Maurice Rollinat, héritier littéraire de George Sand, la période la plus créative de l’histoire des peintres de la Vallée de la Creuse. L’Ecole de Crozant regroupe alors des peintres paysagistes qui travaillent sur les rives des deux Creuse et de ses affluents. Claude Monet y effectua un court séjour au printemps 1889 mais c’est à un autre impressionniste, Armand Guillaumin, que fut dévolu le rôle de faire le lien entre la vallée de la Creuse et les aspirations nouvelles de nombreux artistes qui suivront pendant environ un siècle (1850-1950). 

Les peintres postimpressionistes profiteront de ce paysage d’exception qui finira en partie submergé par la mise en eau, en 1926, du barrage d’Eguzon qui changea radicalement les proportions de la rivière. L’athmosphère poétique n’a cependant pas totalement disparu et il suffit d’y aller pour s’en convaincre.

Detroy

Boucles de la Creuse – Léon Detroy

Madeline

Moulin de la Folie – Paul Madeline

Le Bloc – Claude Monet

Alluaud

Le pont au-dessus de la Creuse – Eugène Alluaud

Monety

Soleil levant sur la Petite Creuse – Claude Monet

Références bibliographique
  • Atkins, Robert. Petit Lexique de l’Art Moderne 1848-1945 Abbeville. 1997
  • Brion, Marcel. Les peintres en leur temps. Ed. Philippe Lebaud. 1994
  • Brodskaïa, Nathalia.. Impressionnisme et post-impressionnisme. GEOART 2015
  • Clark, Kenneth. L’Art du paysage. Arléa. 2010
  • Ferrer, Jean-Marc. La photographie dans la Vallée de la Creuse au temps de l’impressionnisme (1875-1920) Les Ardents Editeurs. 2013
  • Laneyrie-Dagen, Nadeije. Le métier d’artiste ; dans l’intimité des ateliers. Larousse 2012
  • Les peintres du Bas-Berry 1800-1950 Exposition Châteauroux – Les Cordeliers 1982
  • Rameix, Christophe. Impressionnisme et postimpressionnisme dans la Vallée de la Creuse. The Crozant School. Ed. Christian Pirot. 2012
  • Rameix, Christophe. L’Ecole de Crozant. Les peintres de la Creuse et de Gargilesse 1850-1950 Ed. Lucien Souny 1991
  • Sand, George. Promenades autour d’un village. Ed. Christian Pirot 1992



IA-VR-RA : les mots du FUTUR

Intelligence artificielle, réalité augmentée, réalité virtuelle… des mots qui paraissaient il y a encore peu de temps dans le domaine de la fiction, sont devenus des  mots communs. Chacun dans leur espace, ils sont les précurseurs du devenir de la science et, pour ce qui nous concerne, de la médecine.

Les trois entités que sont l’intelligence artificielle (IA), la réalité virtuelle (VR) et augmentée (RA), ont chacune leurs référents et leurs spécialités.

La start-up marseillaise Volta Medical a conçu un logiciel d’intelligence artificielle pour guider les cardiologues durant leurs interventions chirurgicales. 

La FDA (Food and Drug Administration) a approuvé pour la première fois en septembre dernier l’usage d’un dispositif de visualisation médicale basé sur HoloLens au bloc opératoire.

Osso VR, autre start-up, mais cette fois-ci américaine, développe une solution d’apprentissage en réalité virtuelle, avec à son actif huit partenariats avec des écoles de médecine.

AIFib, l’IA et la FA

Nos commençons ce tour d’horizon des technologies avec une medtech française, Volta Medical, tout juste créée en 2016, qui a mis au point un algorithme qui s’appuie sur une collection de 800 000 signaux électriques de l’activité cardiaque. Le but du logiciel d’intelligence artificielle AIFib qui gère cette base de données est de guider les chirurgiens cardiaques dans la complexité de la procédure médicale du traitement de la FA en modélisant et en automatisant cette technique afin de la rendre accessible au plus grand nombre d’opérateurs.

Ces données permettent au chirurgien cardiaque de comparer en temps réel les zones malades et détecter ainsi efficacement et simplement les foyers électriques difficile à détecter par l’œil humain.

Pour rappel, la fibrillation atriale touche environ 11 millions de personnes en Europe avec une estimation de 14 à 17 millions d’ici 2030. (1)(2)

Cette solution tire surtout un profit de dix ans de recherche et d’expériences auprès des cofondateurs (trois médecins et un ingénieur) dans les signaux intracardiaques.

En automatisant le process de repérage des signaux électriques, Volta Medical compte améliorer la qualité des traitements de 50 à 85 %. (3)

Une première levée de fonds avait été faite en 2017 (400 000 euros), mais c’est surtout la somme de 2,3 millions d’euros annoncée fin octobre 2018, en grande partie apportée par Pasteur Mutualité, qui contribuera à financer une étude européenne multicentrique afin de démontrer les performances au bloc opératoire.

De simples données à l’autoapprentissage

L’atout d’AIFib est de s’enrichir par autoapprentissage, les algorithmes étant en mesure d’optimiser leurs calculs au fur et à mesure qu’ils effectuent des traitements.

Son expertise a été présentée lors de la dernière Heart Rhythm Society à Boston. Sur un test réalisé auprès de 28 cardiologues, les créateurs ont permis de démontrer les performances spectaculaires du logiciel qui ont surpassé la supériorité de l’intelligence artificielle sur l’œil humain, y compris celle de… leurs auteurs ! 

Des études sont en cours pour confirmer ces données préliminaires spectaculaires telle celle menée depuis juillet dernier à l’hôpital Saint-Joseph à Marseille et qui devrait être publiée dans les premiers mois de 2019.

Une étude clinique multicentrique doit maintenant permettre d’obtenir l’autorisation de mise sur le marché, visée en 2020.

Pascal Wolff

(1)  2017 ESC Guidelines for the management of atrial fibrillation developed in collaboration with EACTS. European Heart Journal. 2016;37:2893–2962.doi:10.1093/eurheartj/ehw210

(2) Calkins, Hugh, et al. “HRS/EHRA/ECAS expert consensus statement on catheter and surgical ablation of atrial fibrillation: recommendations for personnel, policy, procedures and follow-up: a report of the Heart Rhythm Society (HRS) task force on catheter and surgical ablation of atrial fibrillation. Developed in partnership with the European Heart Rhythm Association (EHRA) and the European Cardiac Arrhythmia Society (ECAS); in collaboration with the American College of Cardiology (ACC), American Heart Association (AHA), and the ….” Heart rhythm 4.6 (2007): 816-861

(3) JACC




Réalité virtuelle : attention danger !

Si les dangers de la réalité virtuelle sont plutôt faibles dans les secteurs professionnels, ils peuvent impacter fortement les utilisateurs grand public avec de réels effets secondaires.

Nausée (motion sickness ou mal des transports), vertige, crise d’épilepsie, perte de l’orientation dans l’espace, sécheresse oculaire et troubles de la vision. Les effets secondaires recensés sont nombreux. La réalité virtuelle peut enfermer un utilisateur dans une situation d’extrême malaise.

L’impact social trouve également ses limites avec une utilisation massive et prolongée de la VR : tous connectés à un monde irréel sans volonté d’en sortir.

A long terme, les effets sont encore inconnus par manque de recul.

Il ne faut pas considérer la réalité virtuelle comme une télévision améliorée

L’interdire aux enfants de moins de 12 ans.

Pascal Wolff




IA-VR-RA, de quoi parlons-nous exactement ?

Intelligence artificielle

Expertise humaine versus intelligence artificielle, la difficile équation de l’équilibre.

Pour faire simple, l’intelligence artificielle (IA) est un ensemble de théories et  de techniques (algorithmes) pour simuler l’intelligence humaine. Pensée en 1950, la technique n’a cessé d’évoluer pour arriver aujourd’hui aux capacités d’apprentissage des logiciels : les algorithmes apprennent maintenant tout seuls à partir de zéro.

On ne compte plus les domaines ou l’intelligence artificielle est présente ou est en passe de le devenir. S’il est une technique qui est en passe de devenir une pièce maîtresse de notre avenir, c’est bien celle-ci. Toutes les applications que nous connaissons aujourd’hui vont être modifiées par l’intelligence artificielle : transport, communication, commerce, industrie, santé…

Dans le domaine de la santé, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) (1) s’est récemment penché sur l’IA et reconnaît que « le recours à l’intelligence artificielle peut être bénéfique au niveau du diagnostic » et observe que « la machine est capable d’opérations de calcul extrêmement plus complexes que l’être humain et sa mémoire est quasiment infinie ». Elle peut travailler sans relâche et produire un diagnostic « plus rapide, plus précis » dans une variété très large de champs d’application.

L’intelligence artificielle, qui peut « accumuler un nombre de schémas d’interprétation médicale sans commune mesure avec les capacités d’un médecin », soulève des questions autour de la responsabilité : « Faut-il et, si oui, comment, rendre indispensable et responsable l’expertise humaine ? », et cela même si l’IA prend une place de plus en plus importante dans la décision finale ? En d’autres termes, où trouver l’équilibre machine/homme ?

Dans un domaine plus prosaïque, le gouvernement chinois a mis en scène un présentateur de télévision sorti tout droit d’un ordinateur. Si la silhouette souffre encore de quelques rigidités, le résultat est (presque) convaincant, d’autant que l’IA travaille 24 h/24 h, ne touche pas de salaire et ne part pas en congé…

L’impact pour notre société ne va faire que croître dans l’avenir avec un marché estimé à 90 milliards de dollars en 2025 (200 millions en 2015).

La réalité augmentée

L’ajout des éléments virtuels dans un environnement réel.

La réalité augmentée (RA) est la superposition de la réalité et d’éléments (sons, images 2D, 3D, vidéos, etc.) calculés par un système informatique en temps réel. Elle associe le monde réel et les données numériques en temps réel, est interactive en temps réel entre l’utilisateur et le monde réel et utilise un environnement en 3D. Cette technologie utilise le mot « réalité », ce qui n’est pas réellement justifié puisque c’est notre propre perception de la matière et de l’environnement proposé qui fait le jeu de la réalité augmentée.

La méthode consiste à incruster de façon réaliste des objets virtuels dans une séquence d’images. Elle s’applique aussi bien aux perceptions visuelles (superposition d’images virtuelles et réelles) que tactiles ou auditives. Les applications de RA touchent quasiment tous les domaines, et particulièrement les jeux vidéo, les industries, le champ médical. La RA est également un atout pour les sites patrimoniaux qui les fait en quelque sorte ressusciter virtuellement et la santé où elle est un outil d’apprentissage particulièrement performant.

La réalité virtuelle

La création virtuelle d’un environnement réel ou imaginaire.

La réalité virtuelle (ou VR pour Virtual Reality) est un univers parallèle où la technologie informatique simule la présence physique d’un utilisateur qui évolue et interagit avec les éléments dans un univers virtuel généré par une machine (ordinateur, jeu, smartphone). L’utilisateur peut interagir dans l’environnement de la VR avec une impression sensorielle qui peut inclure jusqu’à quatre de nos sens : la vue, le toucher, l’ouïe et l’odorat (visuelle, sonore ou haptique).

Le premier casque de réalité virtuelle a été créé à l’Université de l’Utah dans les années 1970 et s’est popularisé dans les années 1990 avec les jeux vidéos. 

Dans le domaine professionnel, la réalité virtuelle offre la possibilité de tester des savoirs et des compétences. C’est un outil de formation incontournable – ou qui va le devenir – dans des secteurs comme l’avionique par exemple, ou celui de la santé. Les formations médicales vont permettre d’exposer les élèves à une plus grande variété de pathologies et d’améliorer leur vitesse de travail à compétence égale.

La médecine utilise la VR pour la rééducation de la maladie de Parkinson ou le traitement de la douleur. 

La VR permet également d’agir en téléopération grâce à un robot virtuel. Les actions sont effectuées en environnement virtuel avant d’être envoyées à l’exécutant de l’opération, permettant ainsi de tester la manœuvre avant qu’elle ne soit exécutée. Les élèves peuvent également assister à des opérations chirurgicales en direct.

Enfin, la thérapie par réalité virtuelle pour le traitement des phobies est une méthode utilisée dans nombre d’hôpitaux à travers le monde. En partant de données simples (comme un cube), le jeu se complexifie au fur et à mesure (les cubes deviennent de plus en plus nombreux) pour arriver à la phobie elle-même (les cubes se matérialisent et deviennent, par exemple, une araignée). On retrouve la VR dans la phobie des avions, des autoroutes…

Pascal Wolff

(1) Numerama




Domaine de Vaccelli – Cuvée granit 2014

Pour nous remémorer nos récentes vacances, particulièrement pour les chanceux qui les ont passées en Corse, dégustons un grand vin rouge de l’Ile de Beauté, considéré comme l’un des meilleurs flacons du vignoble : la cuvée Granit du domaine Vaccelli dans l’appellation Ajaccio.

Contrairement à la plupart des autres régions de Corse qui privilégient le cépage niellucciu, cette appellation fait la part belle au sciaccarellu qui procure au vin : élégance, finesse, richesses aromatique et gustative les faisant souvent comparer aux excellents pinots noirs des Côtes-de-Nuits.

Sis dans la vallée du Taravo au sud d’Ajaccio, le vignoble fut complanté par Roger Courrèges dès 1962 sur des coteaux d’arène granitique, restructuré en 1974 par son fils Alain en privilégiant des cépages insulaires, en creusant sa cave dans le granit qui permet bons vieillissements et conservation des vins. Après des études œnologiques à Nîmes et une formation au clos Capitoro, le petit-fils Gérard, désormais responsable des vinifications, s’orienta vers la culture biologique et les sélections parcellaires sur maintenant 17,5 ha.

La cuvée Granit provient d’une parcelle de vignes de 50 ans d’âge, sur un coteau orienté plein sud, qui atteignent la maturité phénolique la plus aboutie. Adossé aux montagnes de l’arrière-pays, ce vignoble profite des atouts du terroir : altitude relative (300 à 400 m), soleil méditerranéen, vents de brises marines, humidité importante, sols granitiques drainants.

La viticulture sur le mode bio non revendiqué, très soigneuse, évite tout intrant chimique et n’utilise que des traitements naturels, d’autant que les maladies cryptogamiques sont rares.

La vendange manuelle sélectionne les plus belles grappes qui sont éraflées. La macération et la fermentation par levurage indigène en cuves inox durent 6 à 9 jours. L’élevage pour un tiers en cuves béton en forme d’œuf empêchant les lies de se déposer et apportant gras et fraîcheur au vin, pour deux-tiers en demi-muids, neufs pour certains, s’étend sur
douze mois avec remontages et batonnages réguliers. Le soufrage est minimal. Mise en bouteille après deux ou trois soutirages sans collage avec une simple filtration sur plaque.

Une beauté sauvage étincelante

Cette cuvée, presqu’un pur sciaccarellu (95 % pour 5 % de niellucciu), exprime à merveille tant le cépage que le terroir granitique particulier révélant un vin d’une beauté sauvage étincelante alliant richesse aromatique, concentration et finesse admirable.

Ce Granit 2014 s’annonce par une robe brillante relativement claire rubis tirant sur la cerise reverchon, typique du cépage sciaccarellu, qui s’avère trompeuse orientant vers un vin léger voire dilué. En fait, les parfums à l’intensité mémorable dévoilent des arômes intenses de fruits rouges macérés, de fraises au sucre, de cerises à l’eau-de-vie, de noyaux de prunes. Des senteurs d’herbes du maquis, d’épices douces : menthe poivrée, thym, origan, des nuances animales, envahissent le palais. Ce vin explose dans la bouche qui est tapissée par la légère amertume du genièvre. La douceur des fruits rouges, la réglisse des tanins, dont la finesse, l’élégance, le soyeux, offrent un équilibre parfait, un riche volume, une mâche distinguée, une longueur et une persistance remarquables. En fermant les yeux, défilent quelques paysages des Côtes-de-Nuits : Chambolle, Vosne-Romanée !

Un grand vin ensoleillé

Ce grand vin ensoleillé épousera évidemment les délicieux mets de l’Ile de Beauté. Jeune, tel ce 2014, servi frais, il fera merveille avec les savoureuses charcuteries corses : coppa, lonzu, prisuttu, pancetta. Parvenu après quelques années à maturité, il s’épanouira sur des viandes rouges grillées : entrecôte, côte de bœuf persillée, mais plus encore avec des préparations locales plus élaborées : gigot ou souris d’agneau et tianu di fasgioli, cabri confit au romarin, tournedos mare é monti (morilles et coquilles Saint-Jacques), aiguillettes de canard caramélisées déglacées au balsamique et pour les piscivores : médaillons de lotte avec légumes anciens et riz safrané. Pendant la période de chasse, il fera fête à un civet de marcassin à la myrte ou aux girolles et, si vous avez ramené quelques bouteilles sur le continent, à tout gibier bien préparé.

Une rareté de l’île de beauté

Les amateurs s’arrachent ce vin produit en petite quantité (environ 5 000 bouteilles) malgré un prix conséquent proche de 40 euros. Quasi introuvable sur le continent, vous pourrez peut-être grappiller sur place quelques bouteilles auprès de certains cavistes corses avisés, tels le Chemin des Vignobles à Ajaccio ou l’Oriu à Porto-Vecchio. Mais quelle savoureuse carte postale de l’Ile de Beauté vous pourrez imprimer, si vous arrivez à accéder à ce nectar !

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération

Domaine de Vaccelli – Cuvée granit 2014 – Alain Courrèges et fils
20123 Cognocoli-Monticchi



Les patients et la télémédecine en France

« C’est simple, vous venez au cabinet et on vous prend tout de suite. » Cela pourrait être le credo de la révolution qui s’opère depuis que la Sécurité sociale rembourse les consultations de télémédecine depuis le 15 septembre dernier. Celles-ci sont prises en charge en respectant deux conditions : respecter le parcours de soins et voir le médecin sollicité dans les douze mois écoulés (voir notre article à la rubrique Nomenclature sur le sujet).

La télémédecine est un moyen de lutter contre les déserts médicaux, d’optimiser le temps médical, d’offrir une meilleure organisation de l’offre autour du patient, mais également de consulter de l’étranger…

Des entreprises, comme Hopi Medical ou Qare, sont déjà sur le terrain et parfaitement opérationnelles, mais les professionnels de santé libéraux équipés restent encore rares. Il faut acquérir une solution informatique auprès d’un prestataire spécialisé, se former à la sécurisation des échanges et des documents liés à la téléconsultation, comme le compte-rendu et l’éventuelle ordonnance. 

Reste à savoir quelle place les libéraux donneront à cette orientation dans les années à venir, la révolution ne se fera pas du jour au lendemain.

Et les patients, qu’en pensent-ils ?

Les trois principales raisons d’utiliser la télémédecine

 
Pascal Wolff

Source des graphiques : Ipsos BVA pour Statista




L’Ecole de Crozant et les Eaux Semblantes [1]

Il est probable que la notoriété de Louis Valton (1884-1958) ne dépassera pas, en tant que peintre amateur, le cadre du présent article, mais il nous donne l’opportunité de nous intéresser à une pléiade d’artistes paysagistes (plus de quatre cents…) qui, pendant environ un siècle (1850-1950), cherchèrent l’inspiration le long de la vallée de la Creuse et de ses affluents. Ils confrontèrent leur talent à un paysage complexe, dans un laps de temps assez court sur une aire géographique très restreinte, avant que la mise en eau (1926) du barrage hydro-électrique d’Eguzon ne vienne submerger, en partie, les gorges pittoresques. 

Louis Valton, mon grand-père, avait une entreprise de chemiserie à Argenton-sur-Creuse (Indre), jouxtant la rive droite de la rivière de telle sorte qu’il lui était aisé de consacrer ses loisirs à peindre des vues de la ville dénommée la « Venise du Bas-Berry » en référence à ses maisons à loggias, à balustrades et à ses « vieilles galeries » en bois surmontées d’ardoises et surplombant la Creuse près du Vieux Pont. 

Il s’inscrit ainsi, à son humble niveau non dépourvu de talent, dans un mouvement de la peinture de paysage qui s’est surtout intéressé à une portion de la Creuse en amont d’Argenton et dénommée, dès 1864, Ecole de Crozant du nom d’un promontoire rocheux situé entre la Creuse et son affluent la Sédelle et doté des ruines déchiquetées d’un château féodal.

La vallée de la Creuse et l’Ecole de Crozant

Les Vieilles Galeries d’Argenton-sur-Creuse (Indre) – Louis Valton (1884-1958) Huile sur toile – Collection privée.

C’est vers 1830, à la faveur de la peinture en tubes de zinc, de petites toiles déjà apprêtées et de légers chevalets de campagne, qu’apparaissent les premiers peintres de plein air (pleinairisme) et le développement du chemin de fer va leur faciliter l’accès à des sites inédits et éloignés, tels que la Bretagne avec son Ecole de Pont-Aven, mais aussi la Creuse avec son Ecole de Crozant.

Au même titre que Gustave Flaubert (1821-1880) et Maxime du Camp (1822-1894) ont pu contribuer à l’attractivité de la Bretagne après leur périple de 1847, la découverte de la vallée de la Creuse doit beaucoup à George Sand (1804-1876), la Dame de Nohant qui avait aussi une petite maison dans le village de Gargilesse (Indre) blotti dans sa petite vallée éponyme, et où elle appréciait les « promenades autour d’un village » (1857) dans la continuité de ses romans champêtres (1844).

C’est sur une cinquantaine de kilomètres d’une rivière tortueuse et encaissée, d’où la dénomination de Creuse, entre Anzême (Creuse) et Ceaulmont (Indre) qui domine la Boucle du Pin, que les peintres seront accueillis dans plusieurs villages dont Fresselines au confluent de la Petite et Grande Creuse. C’est là que séjourne en 1889 Claude Monet (1840-1926) à l’invitation du poète, musicien, chanteur et acteur Maurice Rollinat (1846-1903) qui, fuyant Paris et son tapage littéraire, s’y retire en 1883. 

C’est alors que, cantonnée dans le réalisme depuis 1850, la Creuse va être confrontée aux audaces impressionnistes consacrées par Armand Guillaumin (1841-1927). Les post-impressionistes suivront puis, en 1926, la mise en eau du barrage d’Eguzon va « étouffer les murmures, noyer les moulins, engloutir les escarpements abrupts et les grands rochers hiératiques » ; les artistes vont alors délaisser la vallée d’autant qu’à Paris les paysages ne sont plus au goût du jour. 

Claude Monet (1840-1926)

Les Eaux Semblantes, Effet de soleil – Claude Monet
Huile sur toile – Museum of Fine Arts Boston.

C’est à l’invitation de Maurice Rollinat que Monet arrive au bord de la Creuse en mars 1889 pour peindre « ce pays d’une sauvagerie terrible ». L’hiver creusois est encore là, le temps est exécrable mais Monet va s’acharner, comme il l’avait fait à Belle-Ile en 1886, à saisir les incessants changements de lumière qu’il pouvait rester des heures à observer en cherchant à « capter l’air et le vent ». Il produira ainsi des « séries », par analogie avec la photographie naissante. 

C’est depuis ses vues de la Gare Saint Lazare (1877) que Monet a compris l’intérêt pictural des séries, qu’il s’agisse de meules à Giverny (1891), des peupliers du bord de l’Epte (1892) ou de la cathédrale de Rouen (1894).

Il quitte la Creuse à la mi-mai 1889 pour n’y jamais revenir et sans avoir peint Crozant mais en emmenant avec lui au moins vingt trois toiles dont dix vues des Eaux-Semblantes correspondant au confluent des deux Creuse ; l’apparence tumultueuse de la rivière y est belle mais feinte et trompeuse, miroitante et changeante en permanence en fonction des heures de la journées de telle sorte que « les eaux vibrent et ne sont jamais traitées en peinture comme des masses désunies du paysage qui les domine ». C’est tout cela que Monet s’efforcera de représenter sous la forme d’un « papillotement lumineux » où « la forme se confond avec le coup de pinceau, les touches horizontales suggèrent le clapotis des flots ».

On peut y voir aussi, à l’angle du confluent, un gros rocher dénommé « le Bloc » peint par Monet qui fera en outre quatre vues d’un vieil arbre pour lequel il demanda au propriétaire d’enlever les jeunes pousses printanières afin que l’arbre garde son allure hivernale. Le temps que Monet cherchait à capturer avait été plus vite que lui.

Armand Guillaumin (1841-1927)

La Creuse et les ruines de Crozant – Armand Guillaumin
Huile sur toile, 72 x 99 cm. 1905 – Musée d’art et d’archéologie de Guéret.

D’origine modeste mais de caractère irascible et anarchiste, Armand Guillaumin côtoie Pissarro et Cézanne, se fâche avec Renoir, se lie d’amitié avec Paul Gauguin (1848-1903), Paul Signac (1863-1935) et Vincent Van Gogh (1853-1890) avant d’entrer en osmose avec la Creuse en 1892 après une expérience impressionniste d’une vingtaine d’année. En 1891, il gagne la somme énorme de cent mille francs à la loterie du Crédit Foncier. 

A partir de 1893, il loue régulièrement une maison à Crozant qui devient son site de prédilection puisqu’il en fera un demi-millier d’études et de tableaux au risque de lasser la demande et les marchands de tableaux inquiets des « sempiternelles Creuse ». 

Il produira des centaines de paysages de la Creuse, à toutes heures, sous tous les temps et à chaque saison. Guillaumin travaille selon des créneaux horaires très précis, tôt le matin et en fin d’après-midi et jamais au même endroit. Il lui arrivera d’inscrire au revers d’une toile le moment où elle a été exécutée comme Monet a pu le faire également sur des carnets de dessins. 

C’est ainsi que « les titres des œuvres précisent un lieu, une saison ou une heure du jour ». Il quitte à regret Crozant en 1924 et meurt, sans avoir cessé de peindre pendant soixante ans, près d’Orly sans revoir les gorges de la Creuse dont il redoutait qu’elles ne soient submergées par l’eau du barrage d’Eguzon, ce qui advint peu après sa mort.

Suite au prochain numéro



Mieux vaut guérir que prédire

Sans doute peut-on rappeler en préambule la remarquable carrière du Professeur Didier Raoult : Professeur de microbiologie à Marseille, il dirige actuellement le plus grand centre consacré aux maladies infectieuses, l’institut hospitalo-universitaire Méditerranée infection ; il est directeur de l’unité de recherche des maladies infectieuses et tropicales émergentes à la faculté de médecine de Marseille, il a été président de l’université de la Méditerranée de 1994 à 1999 ; chercheur internationalement reconnu, ses publications sont innombrables notamment dans les plus grandes revues scientifiques de notre temps, dont il est ou a été rédacteur en chef ou rédacteur adjoint.

Ce livre, pour son auteur, se veut un moyen de combattre la peur, attisée en permanence selon lui par des informations peu ou pas du tout étayées scientifiquement : « les peurs d’hier ne sont pas celles d’aujourd’hui mais elles ont un point commun : elles s’avèrent la plupart du temps infondées ».

« On nous prédit des épidémies terrifiantes qui ne se sont pas propagées, alors que les vrais tueurs sont toujours là, tels le paludisme et la tuberculose ; on nous affole avec les bactéries résistantes, alors que certains vieux antibiotiques restent actifs mais ne sont plus commercialisés ; à l’hôpital, on redoute les maladies nosocomiales, qui seraient beaucoup plus rares si
 les médecins se lavaient les mains et posaient moins de tuyaux ! En 1970, on nous promettait de mourir de froid, aujourd’hui c’est le réchauffement de la planète qui nous menace même si la terre ne s’est pas réchauffée pendant seize ans. On nous mobilise contre les OGM qui pourraient sauver le monde de la famine, occultant l’intervention de 100 prix Nobel qui ont affirmé leur innocuité. Face à une telle incohérence, la première réforme qui s’impose est celle de l’information »

C’est ainsi, avec des phrases choc basées sur des faits avérés, que le Professeur Raoult, tente de rétablir la vérité dans ce livre qui, loin d’être anxiogène, nous montre que tout ne va pas si mal !

L’ouvrage aborde ainsi les angoisses successives et soigneusement entretenues qui méritent, autant que faire se peut, d’être démenties ; les titres sont éloquents : « Ne tirez pas sur les antibiotiques », « Cessons de nous alarmer sur l’antibiorésistance », « Pourquoi sont-ils tous contre l’e-cigarette », etc.

L’auteur va d’ailleurs bien au-delà de son domaine de prédilection, en pourfendant les idées reçues, toujours preuves à l’appui sur les sujets les plus vastes, de l’alimentation au cancer en passant par la maladie d’Alzheimer et les antidouleurs.

C’est dans une deuxième partie tonitruante que sont proposées des pistes pour améliorer la gestion médicale et la politique de santé, de la formation initiale au fonctionnement de nos hôpitaux.

Et c’est dans une dernière partie futuriste que l’auteur traite ni plus ni moins de l’avenir de la planète abordant même le vivre ensemble et le terrorisme.

Rien d’emphatique ni incantatoire cependant, Didier Raoult se contente d’énoncer des faits et d’en tirer des conséquences et des propositions.

Ce livre, destiné avant tout à réapprendre à raisonner, sans tomber pour autant dans un optimisme béat ou un laisser faire coupable, est remarquable de logique et de concision.

A mettre entre toutes les mains, grand public certes mais aussi professionnels de santé motivés.

Les spécifications du livre
Auteur : Didier Raoult
Editeur : Michel Lafon
Pagination : 280 pages
Prix public : Livre (prix public) : 17,95 € – Format Kindle : 12,99 €




e-sim, le futur de la carte sim

L’e-Sim (abréviation de Embedded SIM1, en français Sim intégrée ou embarquée) est une évolution logicielle de la carte Sim pour les téléphones portables et les objets connectés. Après le format nano de la carte Sim, certains objets communicants, comme les montres connectées, n’ont plus la place pour intégrer une carte Sim. D’où la carte virtuelle e-Sim.

L’évolution de l’encombrement des cartes depuis la création de la carte à puce en 1974.

Les bénéfices constructeurs

  • L’e-Sim permet de gagner une place significative vu la miniaturisation des éléments et de l’évolution technologique. Chaque micro ou nano gagné est important. C’est d’autant plus criant sur les montres connectées.
  • Eliminer la carte Sim veut dire simplification de la conception du téléphone et baisse des coûts de fabrication.
  • Les géants de la tec aimeraient bien, même s’ils ne le disent pas, prendre la place des « telcoms ». Google avait lancé en 2015 son programme Fi pour 20 dollars avec une couverture mondiale sans frais d’itinérance.

Les privilèges opérateurs

  • Il y aura la possibilité de souscrire facilement un forfait lors d’un déplacement à l’étranger.
  • Facilité accrue d’une gestion de comptes pro/perso et donc d’un seul smarphone au lieu de deux.
  • De nouvelles phases d’abonnement.

Les avantages consommateurs

  • Plus de carte Sim à changer. Les mises à jour des données se feront de manière plus fluide.
  • Plus de fourniture par votre opérateur d’une nouvelle carte Sim.
  • Facilité de changement d’opérateur avec une transition qui pourrait se faire sans délai par une simple mise à jour des données. Cette facilité au changement pourrait faire grimper le churn (1).
  • L’e-Sim peut, techniquement, être multiopérateur ou multiforfait, tout dépendra des constructeurs.
  • Passer simplement d’un opérateur à un autre.
  • N’avoir qu’un seul smartphone pour autant de lignes que l’on veut.

Le bénéfice pour la planète

  • « Moins de plastiques, c’est contribuer à réduire notre impact environnemental » est la petite note inscrite sur les supports de cartes Sim.

Pascal Wolff

(1) Churn ou taux d’attrition est, au cours d’une période donnée, la proportion de clients perdus ou ayant changé de produit et service de la même entreprise.




Le réseau 5G ou l’avenir de la communication

On ne va pas s’attarder sur la présentation des nouveaux iPhone qui font tout en plus grand (cœurs plus rapides, écrans plus grands, capteur photo amélioré, reconnaissance faciale plus rapide), mais n’apportant guère d’innovation majeure. Au quotidien, ces évolutions mineures n’auront qu’un impact très limité, voire nul, auprès des utilisateurs.

Apple continue donc son petit bonhomme de chemin sans tenir compte des utilisateurs. Ce n’est pas nouveau me direz vous, mais cette Keynote a été, sur ce point encore, plus forte que les précédentes. Une récente étude montrait l’importance des caractéristiques souhaitées par les consommateurs (voir figure ci-contre), celles-ci étant bien loin des considérations de la firme à la pomme. 

Ce que l’on pourra retenir de cette keynote est le signe technologique tangible de la carte Sim virtuelle, appellée e-Sim (voir article) qui permettra d’ouvrir deux lignes téléphoniques. La première étant créée avec la carte Sim, la seconde avec la e-Sim. Apple n’a jamais caché se placer au milieu du jeu des opérateurs « telcoms » ou FAI (1).

Il faut avoir à l’esprit qu’il existe aujourd’hui une stagnation technologique des smartphones. Le contraste est d’ailleurs saisissant avec la progression quasi constante de la technologie depuis des années. Les smartphones sont arrivés à maturité, mais manque de technologie de réseaux pournpouvoir encore évoluer. La clé de la communication, c’est la 5G qui va être la nouvelle pierre angulaire d’un nouveau développement dans tous les secteurs d’activités.

Alors que la 4G n’a pas encore livré toutes ses ondes et que la fibre peine à entrer dans les habitations hors des grandes villes, voilà que l’on commence sérieusement à parler de la 5G. Mais en dehors des discours marketing, là où la 4G a pêché, la 5G pourrait bien le réaliser en éliminant la frontière entre l’internet fixe et l’internet mobile avec des débits considérables.

La 5G repose sur une architecture réseau virtualisée qui permet une « découpe » virtuelle d’un réseau de télécommunications en plusieurs tranches (appelé network slicing [2]). Chaque tranche de réseau correspondant à un usage particulier qui n’empiéterait donc pas sur les autres. Elle est composée de trois principaux cas d’utilisation :

5G mobile broadband. L’utilisation de la 5G sur les smartphones, grâce à son débit théorique de 100 Mbit/s à 20 Gbit/s, supprimera la latence lors des téléchargements vidéos 4K (la 8K n’est plus très loin), des conversations en visio, le cloud gaming (jeu à la demande), tout comme le streaming ou la réalité virtuelle…

5G massive IoT. Le deuxième usage, a contrario des débits importants, concerne les faibles débits de données et une longue autonomie de batterie. Il permettra le développement des villes intelligentes, l’automatisation industrielle (comptage, logistique), la surveillance environnementale intelligente…

On parle ici d’ultra connectivité et d’une densité d’appareils connectés très importante au km². En dehors des industries, le développement de la maison connectée bénéficiera de ce gain sans surcharger le réseau. L’objectif de ce deuxième usage est de pouvoir multiplier les appareils à basse consommation, et nécessitant des débits réduits, en très grand nombre sur une même zone. 

5G Ultra Low Latency High Reliability. C’est le Nouveau Monde. Ce troisième usage s’appuie sur des communications particulièrement fiables avec un échange très rapide de données (quelques millisecondes). c’est le domaine de la voiture connectée ou autonome avec une véritable sécurisation des flux. Le développement de la conduite autonome passe forcément par la 5G. Mercedes y travaille en Formule 1, en attendant la grande échelle de l’automobile grand public.

Le potentiel de la 5G est donc considérable. Elle apportera de réelles solutions dans la numérisation de la médecine ou de l’industrie. La téléchirurgie dont nous avons déjà parlé est l’un des principaux objectifs de l’Union Internationale des Télécommunications (UIT). La télémédecine, la médecine prédictive et l’IOT (internet of things ou internet des objets connectés) profiteront également de cette nouvelle ressource.

Plus concrètement, Bouygues Telecom a récemment fait une démonstration en temps réel de certaines utilisations qui deviendront possibles à distance grâce à la 5G. Il est question par exemple de conduire une voiture, d’effectuer des opérations de maintenance ou encore de soigner quelqu’un, le tout à des dizaines de kilomètres de distance.

Une nouvelle révolution est en marche.
Pascal Wolff

(1) FAI : Fournisseur d’Accès à Internet
(2) le network slicing est un concept qui permet une « découpe » virtuelle d’un réseau de télécommunications en plusieurs tranches (slices). Cela permet de fournir des performances différentes associées à chaque tranche, et donc d’allouer des ressources dédiées par type d’usage ou d’objet ; par exemple en termes de fiabilité, de bande passante, de latence… Chaque tranche de réseau correspond ainsi à un usage, sans empiéter sur les autres




iOS 12 – le nouvel OS d’Apple attendu comme le messie

Il n’y a pas eu de nouveau matériel lors de la keynote d’Apple au WWDC 2018, mais « seulement » une mise à jour du système d’exploitation de ses smartphones : iOS 12. Présentation des fonctions les plus marquantes, et notamment l’amélioration des performances des anciens modèles.

Les anciens plus rapides

Tiens donc… Après la révélation de la réduction des performances des anciens modèles et d’une enquête préliminaire pour « tromperie et obsolescence programmée », Apple semble signer un mea culpa avec une amélioration des performances des anciens modèles (iPhone 5S et SE, 6…) sur cette mise à jour avec un clavier deux fois plus réactif et le lancement de l’appareil photo 70 % plus rapide. Un iPhone 6 démarrerait jusqu’à 40 % plus vite. Si vous avez un de ces iPhone là, vous savez de quoi l’on parle !

Les notifications regroupées

Vous êtes inondés de notification ? Qu’à cela ne tienne, les messages seront désormais regroupés par application ou thématique. Il sera également possible de couper automatiquement les notifications des applications que l’on n’utilise jamais. 

Dis-moi où je vais

Un Siri (enfin) (un peu) plus intelligent. Vous regardez chaque matin combien de temps il vous faudra pour aller au travail ? Plutôt que de vous forcer à ouvrir l’application de navigation chaque matin, Siri affichera désormais un raccourci sur l’écran d’accueil en début de journée pour accéder directement à ce trajet. L’assistant intelligent d’Apple apprendra ainsi de toutes les habitudes de ses utilisateurs pour leur proposer des raccourcis. Chaque utilisateur pourra aussi en créer de lui-même. Pour être le plus complet possible, Siri puisera également dans l’agenda de l’utilisateur. S’il comprend que vous arriverez en retard à une réunion, il vous proposera par exemple d’envoyer un message à l’organisateur.

Le temps vous est compté

Savez-vous dire réellement combien vous passez de temps sur votre smartphone chaque jour ? Et bien Apple, tout comme Google avec son Android P, pense à votre bien-être (numérique) et vous le fera savoir. Avec le nouvel iOS 12, Screen Time vous avertira chaque semaine de l’usage que vous en faites en vous indiquant les applications les plus utilisées, celles qui envoient le plus de notifications et… le nombre de coups d’œil que vous aurez jeté sur votre écran en l’allumant puis en l’éteignant. Le système permet également de limiter à 15 minutes le temps que l’on souhaite passer sur Whatsapp avec un blocage jusqu’au lendemain si vous l’avez dépassée. De quoi énerver les accrocs… et les autres.

La nuit, l’on dort

Vous dormez avec votre appareil en veille (ce qui n’est pas bien !), et il se passe forcément des nuits où vous vous réveillez pour voir l’heure, et bien sûr, vous tombez sur ces notifications que vous consultez à 3 heures du matin. Le mode « Ne pas déranger la nuit » est donc fait pour vous en masquant toutes les notifications. Au réveil, ce sont juste l’heure et la météo qui s’afficheront. A noter que ce procédé existe lorsque vous conduisez en bloquant automatiquement le smartphone, vos correspondants recevant une notification comme quoi vous recevrez leurs messages une fois votre trajet terminé.

C’est mieux à plusieurs

Avec Face Time, il sera – enfin – possible de communiquer jusqu’à 32 personnes en simultané. Les vignettes des personnes en conversation seront plus ou moins importantes suivant la place dans la conversation.

Changez de look

Quand on parle chez Apple de passer moins de temps sur votre smartphone, ce n’est pas avec les nouveaux Memojis que vous en prendrez conscience. Vous pourrez ainsi créer votre propre (clone) emoji animé en sélectionnant couleur de peau, de cheveux ou d’yeux. Vous pourrez rajouter des lunettes, du maquillage ou bien un chapeau. Et vous pouvez envoyer votre clone à tous vos contacts. Le chic du chic : les Animojis pourront suivre les mouvements de la langue, de la tête et des yeux.

Measure

L’iPhone se rêve en mètre numérique. Avec la nouvelle application Measure, chaque utilisateur pourra, grâce à la réalité augmentée, mesurer les objets qui sont autour de lui. 
Pascal Wolff




Nicolas Régnier (v. 1588-1667), peintre à Rome au début du XVIIe siècle

La première rétrospective mondiale de l’artiste au musée des Beaux Arts de Nantes (1) nous donne l’occasion de retracer l’atmosphère artistique de la Rome du premier tiers du XVIIe siècle. 

Nicolas Régnier naquit entre 1588 et 1593 à Maubeuge, alors en territoire flamand (rattaché à la France en 1678). Formé à Anvers par le peintre Abraham Janssens (1575-1632), cet homme « d’une double culture, flamand par la naissance, français par la langue », séjourna, avant de rejoindre Rome, à Parme à la cour des Farnèse en 1616-1617. Inscrit sur les stati d’anime de 1620 (registre des personnes ayant effectué la communion pascale, établi par le curé de la paroisse), il était sans doute présent dans la Ville éternelle dès 1617. Il y resta une dizaine d’années. Il habitait dans la paroisse Sant’Andrea delle Fratte en 1620-1621, puis de 1621 à 1624 dans celle de Santa Maria Del Popolo, le quartier de résidence de tous les peintres étrangers. En 1626, à priori sollicité par son ami Johann Liss, il quitta Rome pour Venise où il s’imposa comme portraitiste et marchand collectionneur. En 1644 il obtint de Louis XIV le brevet de peintre du roi et mourut dans la Sérénissime le 20 novembre 1667.

Rome, La patrie des peintres

« La patrie des peintres » offrait aux artistes venus des quatre coins de l’Europe, l’occasion unique de se perfectionner en copiant les antiques, d’étudier de visu les grands maîtres de la peinture italienne de la Renaissance et de découvrir le renouveau de la peinture des grands Bolonais (Carrache, Guido Reni, Dominiquin), enfin de voir les derniers fastes de la peinture « révolutionnaire » de Caravage, un melting pot favorable à l’émulation artistique. La Contre-Réforme fut à l’origine du renouvellement du décor des églises, Rome était en perpétuel chantier. Les papes, surtout Paul V Borghèse (pape de 1605 à 1621) et Urbain VIII (pape de 1623 à 1644) voulaient la magnifier et en faire le centre fastueux de la chrétienté. Les aristocrates (Corsini, Pamphili, Chigi), les cardinaux (Borghèse, Barberini, Médicis) couvraient les murs de leurs palais de peintures. Les jeunes artistes pouvaient ainsi espérer des commandes et vivre de leur art. Cependant Rome restait une ville dangereuse, les rixes étaient fréquentes. Nicolas Régnier vivait « dans un climat de violence peu ordinaire », plusieurs de ses compagnons furent mortellement blessés. Objet lui-même d’une agression, il reçut « un jet de pierre à l’origine d’une cicatrice près de l’œil droit ». 

Le séjour romain de Nicolas Régnier

Dès son arrivée à Rome, il devint membre de la Bent., une association où les artistes surnommés les Benvueghels (« oiseaux de la bande ») trouvaient entraide et émulation. Placée sous l’égide de Bacchus, Dieu du vin, mais aussi de l’inspiration, elle regroupait les peintres du nord de l’Europe. Lors de leur intronisation, il recevait un surnom, Nicolas Régnier, celui d’« homme libre ». 

Il côtoya Dirck van Baburen (« mouche à bière ») et David de Haen (†1622), le « peintre domestique » du marquis Vincenzo Giustiniani. Ce dernier, grand amateur de Nicolas Poussin, possédait à sa mort en 1658 une collection d’art antique, quinze tableaux de Caravage, treize de Jusepe Ribera et neuf de Nicolas Régnier. 

Celui-ci devenu à son tour « peintre domestique » de cet aristocrate à la mort de David de Haen fut admis le 20 octobre 1622 à la célèbre Academia di San Luca (créée en 1594) où il refonda l’enseignement du dessin, puis le 12 novembre 1623 à la congrégation des Virtuosi al Pantheon. L’Academia di San Luca réunissait les peintres au talent reconnu. Ils ne pratiquaient aucune activité commerciale au contraire des Bottegari qui possédaient une boutique. Toujours en 1623, il épousa Cécilia Bezzi, âgée de dix-neuf ans, la fille d’un procurateur. « Ce changement de statut correspond à un tournant de son œuvre ». 

La peinture à Rome dans le premier tiers du XVIIe siècle

Après la mort de Caravage en 1610, l’art Dal naturale domine la scène artistique romaine, une pratique picturale où s’allient puissance du clair-obscur, effet du réel plus que pur naturalisme et codes inédits de représentation. Joachim von Sandrart (1606-1688) dans son ouvrage majeur sur l’histoire de l’art considérait Bartolomeo Manfredi comme l’héritier direct de Michelangelo Merisi à l’origine d’un mythe qui persista jusqu’au début des années 2000. 

L’identification par Gianni Papi, en 2002, du Maître du Jugement de Salomon (attribution de Roberto Longhi) à Jusepe Ribera modifia notre vision historique sur le caravagisme romain entre 1610 et 1620. Ce dernier se trouvait à Rome dès 1606 (2) au moment où Caravage fuyait à Naples suite à l’assassinat de Ranuccio Tomassoni. 

Aujourd’hui plus de soixante-dix toiles sont attribuées au peintre espagnol. Les œuvres caravagesques de Valentin de Boulogne présent à Rome dès 1614 (†1632), de Dirck Baburen (retour à Utrecht en 1620) et de David de Haen (†1622) se référencient aux compositions romaines de Jusepe Ribera qui occupe désormais une place centrale dans la diffusion de l’art de Caravage. 

Nous connaissons mal les débuts de Bartolomeo Manfredi (1582-1622). La Colère de Mars commandité par Giulio Mancini (son biographe) missionné par Agostino Chigi, est la deuxième œuvre dont nous avons avec certitude la date, 1613. Méconnu, il ne devint célèbre qu’après le départ de Jusepe Ribera pour Naples. Ce n’est qu’à partir de 1617 que « ses œuvres furent recherchées et imitées par les artistes franco-flamands attirés auparavant par Jusepe Ribera et ses imitateurs ». L’étude des compositions de Bartolomeo Manfredi montre qu’il ne fut pas insensible à l’art de l’espagnol.

Nicolas Régnier adepte de la pittura dal naturale puis de Guido Reni (1575-1642)

Nicolas Régnier adopta d’emblée la pittura dal naturale dans l’un de ses premiers tableaux, Soldats jouant aux dés la tunique du Christ (1620) : plusieurs personnages à mi-corps sont rassemblés dans un espace clos à la manière de Bartolomeo Manfredi. Le personnage de gauche fixe le spectateur. D’un geste de la main, il l’invite à participer à la scène et à réfléchir sur l’iconographie de l’œuvre. Le tissu brunâtre posé sur la table évoque la tunique du Christ. Ce n’est plus une simple partie de dés, mais un épisode de la Passion du Christ. En associant sacré et profane, il s’inspire de Caravage en ajoutant une note triviale par le soldat qui fait claquer son ongle avec ses dents. Avec Le Faune ou Le Bacchus faisant le geste de la fica (vers 1622-1623), le « doigt » d’aujourd’hui, dirigé vers le regardant, il porte l’injure à son paroxysme. Ce geste obscène doit son nom à la figue, l’un des attributs privilégiés de Bacchus. Son mariage, le rejet par Urbain VIII (élu pape en 1623) et la cour papale de l’art « vulgaire » du caravagisme, modifièrent sa manière de peindre. Le retour au « beau idéal » prôné par Guido Reni et les Bolonais fut à l’origine d’une « relecture du naturalisme caravagesque, le caravagisme de séduction » selon la formule de Jean-Pierre Cuzin : « un mélange de naturalisme et d’idéalisation déploie le nouveau vocabulaire du delectare » caractérisé par la recherche d’un lyrisme décoratif. L’Allégorie de la Vanité ou Pandore et L’Allégorie de la Sagesse en sont l’un des meilleurs exemples. 

Le 6 juin 1626, comme l’indique sa présence à la corporation des peintres de la ville, la Fragilia dei Pittori, il résidait à Venise pour ne plus la quitter. Pendant cette longue période de quarante ans après avoir introduit le naturalisme de Caravage et l’idéal classique de Guido Reni, Nicolas Régnier s’imposa comme un des acteurs majeurs du milieu artistique vénitien, à la fois peintre, expert et collectionneur.

(1) Nicolas Régnier, l’homme libre (1588-1667), Nantes, musée des Beaux-Arts, 1er décembre 2017 au 11 mars 2018.

(2) Jusepe Ribera dit alors qu’il se trouvait à Naples le 7 novembre 1616 : « Je laissais Valence ma patrie, je me rendis à Rome pour apprendre à peindre, j’y demeurais dix ans »

Les ouvrages de références

1/ Nicolas Régnier, l’homme libre (1588-1667), Annick Lemoine, dir., Adeline Collange – Perugi, dir., cat. expos. Nantes, musée des Beaux-Arts, 1er décembre 2017-11 mars 2018, Paris, Liénart, 2017, 271 p.
2/ Lemoine Annick, Nicolas Régnier (ca 1588-1667), Paris, Arthena, 2007, 448 p.
Pour compléter :
3/ Bonnefoy Yves, Rome 1630, Paris, Champs arts Flammarion, 2012 (1ère éd., 1970), 288 p.
4/ Haskell Francis, Mécènes et peintres. L’art et la société au temps du baroque italien, Paris, Gallimard, 1980, 800 p.
5/ Richefort Isabelle, Le métier, la condition sociale du peintre dans la première moitié du XVIIe siècle. Thèse de doctorat d’histoire de l’art, sous la direction d’Antoine Schnapper, Université de Paris IV- Sorbonne, 1989, 416 p.
6/ Thuillier Jacques, « Il se rendit en Italie…Notes sur le voyage à Rome des artistes français au XVIIe siècle », Il se rendit en Italie. Etudes d’histoire de l’art offerte à André Chastel, Paris, Rome, Flammarion, Edizioni dell’Elefante, 1987, p. 321-36.
7/ Valentin de Boulogne. Réinventer Caravage, Keith Christiansen, dir., Annick Lemoine, dir., cat. expos., New-York, Métropolitan Museum of Art, 7 octobre 2016-22 janvier 2017, Paris, musée du Louvre, 22 février-22 mai 2017, Paris, Louvre, 268 p. 




Manuel pratique de prévention et de réadaptation cardiovasculaire

Comme l’écrit le Professeur Jean-Paul Broustet en début d’ouvrage dans son remarquable historique sur le réentrainement à l’effort, « l’histoire de la thérapeutique par l’exercice physique est jeune » mais il est sûr que « la réadaptation au sens large du terme a considérablement amélioré la qualité de vie des malades atteints de cardiopathie ».

Ce manuel est à la fois une synthèse et un guide pratique des deux piliers de la réadaptation cardiaque que sont l’entrainement à type de renforcement musculaire et global en endurance et la prise en charge bio-psycho-sociale (c’est-à-dire l’éducation thérapeutique) qui permettra au patient de mieux connaître sa maladie et ses facteurs de risque.

Après un chapitre fort logiquement consacré aux dernières recommandations de la société française de cardiologie, les auteurs entrent dans le concret en définissant les méthodes d’organisation d’un centre de réadaptation cardiaque et les diverses procédures de l’ECG d’effort, du test de marche, de l’ergospirométrie et d’autres techniques de réentraînement.

Plus original, l’ouvrage fait la part belle au contrôle des facteurs de risque, avec un développement tout particulier sur le sevrage tabagique, et à l’éducation thérapeutique en y proposant des modèles de programmes pour la maladie coronarienne et l’insuffisance cardiaque.

Naturellement, les diverses pathologies susceptibles de relever du réentraînement sont abordées dans le détail, de l’insuffisance cardiaque à la coronaropathie en passant par la transplantation, la chirurgie cardiaque et l’angioplastie, la rééducation vasculaire ou encore les cardiopathies congénitales complexes ; les particularités à connaître dans la prise en charge des patients obèses, très âgés ou encore diabétiques font l’objet de chapitres spécifiques bien développés.

Bref, cet ouvrage est remarquable de simplicité tout en se voulant exhaustif et d’esprit didactique sans paraitre austère.

Il est édité sous la direction du Dr Mohamed Ghanem, cardiologue hospitalier et président de l’association francophone de cardiologie préventive, réadaptation cardiaque et cardiologie du sport, qui a fait appel à vingt-trois des meilleurs spécialistes – médecins et kinésithérapeutes – de cette discipline essentielle en cardiologie. Faute de pouvoir les citer tous, notons la présence, outre celle de Mohamed Ghanem et notre ami Jean-Paul Broustet déjà cités, de personnalités bien connues du Cardiologue, telles Richard Brion, François Carré, Jean Gauthier, Dany Marcadet, Catherine Monpère, ou encore Daniel Thomas et Jean-Claude Verdier.

Ce livre est le support de leur enseignement et la valorisation de leur engagement à mieux soigner les maladies cardiaques.




Mas Coris Rosé « Coulée Douce » 2017

Force est de faire mon mea culpa ! Il y a une dizaine d’années, dans cette même revue, j’avais exprimé mes réticences et mes préjugés à l’encontre des vins rosés. Depuis, la vague rosée submerge la France viticole : 24 M d’hl en 2014, 30 % des vins tranquilles, progression de 50 % sur 12 ans… Toutes les régions s’y sont mises, car les jeunes à 80 % les plébiscitent, et il faut reconnaître les remarquables progrès qualitatifs de ces vins.

Alors, l’été arrivant, je vous propose un très agréable rosé provenant non pas de Provence, où les prix deviennent excessifs, souvent au-delà de 20 euros, mais du Languedoc (qui talonne maintenant la Provence en volume produit) à un tarif très doux, inférieur à 10 euros.

Le Mas Coris a été créé en 2009 par Jean et Véronique Attard, lui de formation scientifique, puis journaliste féru en plongée sous-marine, elle graphiste et artiste peintre, qui, au tournant de la cinquantaine, décidèrent de changer radicalement de vie et, quoique totalement néophytes, de se lancer dans la viticulture, heureusement (bien) conseillés par de nombreux amis vignerons. Ils eurent le coup de cœur pour 2 petits ha de vignes en conversion bio dans l’appellation Languedoc-Cabrières. L’objectif était ambitieux : obtenir le meilleur vin bio possible dans les 3 couleurs. De très gros travaux furent entrepris, pour transformer un vieux bâtiment en chai, bien l’équiper avec cuves thermorégulées, barriques, acquérir progressivement quelques nouveaux ha…

Sur ce site classé Natura 2000, protégé par les premières pentes du pic du Vissou, le Mas Coris bénéficie d’un emplacement idéal sur le terroir de Cabrières, où les schistes gréseux affleurent partout donnant puissance, gourmandise, fraîcheur et équilibre au vin. Le domaine s’étend sur 8 ha, dont 5 plantés de vignes. L’environnement de chênes verts, de genêts, de genévriers, de cistes, de garrigues le protège et lui offre les meilleurs des arômes de la flore méditerranéenne. Avec une pente assez marquée sur la plupart des parcelles, une exposition dominante au sud-est, les atouts qualitatifs du vignoble sont nombreux : ensoleillement favorable, drainage naturel des eaux de pluie, altitude relativement élevée permettant des écarts thermiques jour-nuit importants, gage d’une meilleure préservation des qualités aromatiques des raisins.

La viticulture bio, comme les traitements, utilise, pour engrais, des composts et des bourbes de raisin. Le désherbage par labours exclut tout produit chimique. Les rendements sont maîtrisés par ébourgeonnage strict, taille courte, écimage, parfois vendange au vert. Les parcelles sont vendangées séparément au meilleur de leur maturité, exclusivement à la main permettant un 1er tri. Les raisins sont cueillis très tôt le matin, pour leur garder toute leur fraîcheur et éviter l’oxydation. La cuvée « Coulée Douce », assemblant 70 % de cinsault et 30 % de grenache, est un pur rosé de presse. Après rapide foulage, sans éraflage, les grappes triées sont immédiatement mises dans le pressoir. Le premier pressurage doux est suivi d’un autre pour mieux extraire le jus qui est mis en cuve thermorégulée et refroidi à 10°, pour entamer le débourbage, après lequel la température est maîtrisée entre 15° et 18° et la fermentation enclenchée pendant une dizaine de jours. L’élevage en cuve dure 6 mois. Le sulfitage est réduit au minimum.

Une bouche généreuse

La jolie couleur rose très pâle, « cuisse de nymphe » presque diaphane aux reflets brillants de cette cuvée « Coulée Douce » 2017, annonce une personnalité délicate et raffinée. Les arômes de fruits acidulés mariant la fraise des bois, le pomelo, la pêche de vigne et la cerise introduisent une bouche rafraîchissante, généreuse, exprimée par une caresse tendre et vive sur le palais. La finale énergique fait ressortir des notes d’épices, de poivre blanc, de fraise écrasée. Le degré alcoolique de 13,5° ne se ressent pourtant absolument pas !

Frais et gastronomique

Ce rosé du Mas Coris tonique et primesautier, servi bien frais, est un vin de vacances, de soleil, de barbecue, mais son ampleur lui permet aussi certaines rencontres gastronomiques. Il s’exprimera parfaitement en apéritif avec tapenade, anchoïade, poivrons marinés, feuilleté de sardines. Il accompagnera à ravir des poissons tout juste sortis de l’eau qui seront doucement grillés, tels rougets, daurade, loup, bien valorisés par une ratatouille. Et, bien sûr, il donnera une note festive et rafraîchissante à votre barbecue de saucisses, merguez, brochettes, etc. Mais vous pouvez, sans crainte, marier ce rosé avec des plats plus élaborés : un poulet fermier juteux aux herbes, une épaule de lapin confite. Curieusement, il trouvera un bel accord avec la fine cuisine thaïe, si elle n’est pas trop épicée, tel le « tigre qui pleure ». Lors des festins de vacances, il n’est nul besoin de mélanger les vins, cette « Coulée Douce » suivra tout votre repas avec des fromages de chèvre frais, type banon, et, en dessert, des tartelettes aux fraises ou aux cerises.

Véronique et Jean Attard ont remarquablement réussi leur nouveau projet de vie. En moins de 10 ans, leurs vins, non seulement le rosé « Coulée Douce », mais aussi leurs rouges, et plus encore leurs blancs, sont au sommet de l’appellation. Véronique a vaincu sa fibromyalgie malgré (ou grâce à) son travail forcené dans les vignes, Jean a conservé un petit souvenir de ses plongées sous-marines en dénommant son domaine : Coris, petit poisson méditerranéen vif et coloré.

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération

Vous pouvez continuez avec la visite du domaine Mas Coris.

Mas Coris Rosé « Coulée Douce » 2017 – Véronique et Jean Attard
34800 Cabrières



Recherche sur le net – l’heure des données a sonné

La protection des données personnelles dans la zone euro est devenue un sujet bien sensible depuis l’apparition du RGPD (1). Une réelle prise de conscience s’est opérée ces dernières semaines auprès des utilisateurs (nous le savons bien avec les demandes que nous avons eues sur lecardiologue.com), mais qu’en est-il réellement de leurs utilisations dans les moteurs de recherche ? L’écrasante domination de Google n’arrange pas le traitement des données, même si des challengers commencent à fourbir leurs armes, notamment le français Qwant, soutenu par la Banque Européenne d’Investissement (BEI).

Google : le mastodonte

Google, c’est tout d’abord 90 % des recherches mondiales, autant dire quasiment tout. Ecorné par plusieurs scandales (notamment le projet Maven [2]), qui visent également les GAFAM en général, Google applique, tout comme Facebook, l’adage on ne peut plus clair : « Gratuit c’est, produit tu es ». L’activité de l’utilisateur sur le web est non seulement fichée, mais également classée et répertoriée afin de cibler les résultats et les annonces publicitaires. 

Le fichage, nerf de la guerre

Ce fichage publicitaire atteint des proportions qui dépasse la recherche web pour s’immiscer dans tous les produits de la marque : Gmail, Google Maps, calendrier, sites web… Toutes les données sont ainsi dispersées dans les intérêts de la régie publicitaire de Google. Vous avez sûrement dû remarquer à quel point cette invasion est devenue une épidémie (jusqu’à sept annonces par page de résultats), à tel point qu’il est devenu difficile de distinguer les résultats naturels de la recherche.

L’efficacité, la pierre angulaire

Malgré tout, Google reste le moteur de recherche le plus populaire. Sa pertinence des résultats, grâce aux algorithmes du moteur de recherche utilisant un module d’intelligence artificielle, est particulièrement efficace. Le catalogue d’indexation des pages est également le plus vaste. Souvent, la réponse que vous cherchez se trouve dans la première page de résultat. Quant à l’autosuggestion, c’est un modèle du genre.

Enfin, l’interface de Google a relativement peu dévié depuis ses débuts : le moteur de recherche reste fidèle à un design minimaliste qui a fait école.

Qwant : l’ANti-google

Peut-on vivre sans la suprématie américaine sur le net ? Oui, c’est possible. Qwant en est une bonne illustration. Depuis plus de cinq ans, la start-up française Qwant essaie de prouver qu’un moteur de recherche peut être efficace et rentable tout en respectant la vie privée et l’anonymat des utilisateurs. 

Un air de liberté

En effet, le moteur de recherche ne traque pas ses utilisateurs avec des cookies, ne collecte aucune donnée personnelle de navigation ou de localisation et n’effectue aucun profilage. Le code source a d’ailleurs été mis à disposition de la CNIL pour prouver les bonnes intentions de ses concepteurs. Si la publicité est présente, elle est sans ciblage des utilisateurs. Nous avons fait le test sur des recherches identiques entre Google et Qwant et le résultat est bluffant. Un peu comme si l’on retrouvait un air de liberté…

Encouragée par la Banque Européenne d’Investissement qui a financé le projet à hauteur de 25 millions d’euros, Qwant est un moteur de recherche aussi européen qu’ambitieux. Il surfe sur le rejet du moteur de recherche américain en faisant de la protection des données privées son étendard. Jusqu’à mars dernier, sa croissance était de 20 % par mois, mais l’affaire Cambridge Analytica passant par là, la valse des chiffres a pris une autre tournure avec une augmentation de près de 20 %… par jour.

Les utilisateurs avant tout

Qwant se décline en trois versions : Qwant, Qwant Lite (destiné aux anciens navigateurs et connexions à faible débit) et Qwant Kids (pour les 3-12 ans). Vous pouvez même choisir une langue régionale directement dans votre navigateur (Corsu, Brezhoneg, Català, Euskara).

et les autres ?

Il existe bien d’autres moteurs de recherche, notamment DuckDuckGo, le site au canard anti-fichage, Bing, le concurrent propulsé par Microsoft et titillant Google quant au niveau de la qualité de ses résultats, Lilo, le moteur de recherche qui la joue collectif en finançant des projets de développement et de solidarité et Ecosia, solidaire comme Lilo, mais qui se charge de « planter des arbres pour vous ».
Pascal Wolff

(1) Règlement Générale sur la Protection des Données.

(2) Maven est le nom de code de l’un des projets du département de la défense américaine qui consiste à utiliser l’IA et le « deep learning » pour permettre aux drones militaires de reconnaître les images qu’ils filment. Ce projet nécessite donc de grandes compétences dans le domaine de la « vision par ordinateur » – domaine d’excellence de Google.




GAFA et les incursions santé

Associations, rachats, créations, les GAFA (voir encadré) s’activent dans le secteur de la santé, un mouvement qui va s’accentuer considérablement dans les années à venir. Il faut dire que les dépenses de santé représentent 18 % du PIB aux Etats-Unis (8,9 % dans le vieux continent).[1] Ces initiatives sont regardées de très près par les professionnels des secteurs de l’assurance et du monde de la santé. Petit récapitulatif des projets en cours.

Google Alphabet. Lire l’article

Amazon. Lire l’article

Facebook. Lire l’article

Apple. Lire l’article

 

 




C’est quoi le GAFA ?

Le mot GAFA est un acronyme qui désigne les quatre mastodontes que sont Google, Apple, Facebook et Amazon. Ces quatre entreprises représentent le passage à l’ère du digital de ce XXIe siècle.

Leurs pouvoirs économique et financier sont considérables. En 2015, les GAFA pesaient 1 675 milliards de dollars contre 1 131 milliards de dollars pour toutes les entreprises françaises cotées au CAC 40. En dix ans, les revenus cumulés ont été multipliés par sept, passant de 78 milliards de dollars à plus de 556 milliards.

On associe parfois Microsoft dans le groupe qui devient donc GAFAM.

Mais ces accumulations de chiffres ne sont qu’une façade face à un avenir fébrile. Rien n’indique que la croissance sera éternelle… comme le prouve le destin de Microsoft, leader il y a dix ans, et désormais numéro 4 des « GAFAM » – juste devant Facebook.

Apple a vu ses ventes reculer en 2017, mais compensées par une hausse du prix de ses appareils.

Facebook a également eu une année morose avec une baisse de ses abonnés et un vieillissement de son audience, les jeunes ringardisant le réseau social. Sans oublier bien sûr l’affaire Facebook-Cambridge Analytica qui a fait plonger le titre et l’accélération des désabonnements comme le retrait spectaculaire de Elon Musk, le patron de Tesla.

Amazon est plombé par ses investissements avec croissance « timide » de son bénéfice net à 3 milliards de dollars.

Alphabet (1) est la maison-mère de Google. Seul d’ailleurs Google est aujourd’hui rentable.
Pascal Wolff

(1) Alphabet Inc. a été créée lors de la restructuration de Google. Le but de cette structure serait de décharger la société historique des activités ne représentant pas son cœur de métier, à savoir les services Internet qui tirent des revenus de la publicité en ligne. Selon l’entreprise, les comptes de Google en ressortent clarifiés et les risques répartis entre les filiales.

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Google Alphabet – Amazon – Facebook – Apple




Facebook

Moves

Facebook s’est également lancé, dès 2014, dans le développement des applications destinées au suivi des activités physiques et de la santé avec l’acquisition de la start-up finlandaise ProtoGeo et son application Moves.

Oculus

Facebook a fait un pas dans la réalité virtuelle avec l’acquisition de Oculus VR pour un montant estimé à 2 milliards de dollars. De nombreux dispositifs en réalité virtuelle sont utilisés par des professionnels de santé, notamment pour la formation en chirurgie. Oculus travaille avec le Children’s hospital de Los Angeles sur des simulations d’interventions à risque pour les chirurgiens. (1)

Publicité

Le réseau social a créé un format publicitaire spécifique pour les laboratoires pharmaceutiques afin de leur permettre de promouvoir leurs médicaments tout en affichant les informations légales.
Pascal Wolff

Sources : Glossaire-international, Usine Nouvelle, Le Monde Informatique, L’Usine Digitale, cnbc.com, bfmbusiness, Le Monde

(1) http://lecardiologue.com/2017/12/08/la-realite-augmentee-en-chirurgie/

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Google Alphabet – Amazon – Apple




Google Alphabet

Verily

Verily est spécialisée dans la recherche sur les sciences de la vie. L’entreprise développe des outils afin de collecter et d’organiser les données de santé. Son but est de « disrupter » (2) le monde de la santé grâce à l’analyse de données, l’internet des objets et l’Intelligence Artificielle (IA). Cette filiale de Google travaille avec Novartis, Nikon, Sanofi et Dexcom sur des médicaments et des dispositifs destinés aux diabétiques, avec GlaxoSmithKline sur la bioélectronique, et sur de la robotique de chirurgie avec une filiale de Johnson & Johnson.

L’un des grands projets de Verily est Project Baseline, qui aura pour but de cartographier la santé humaine. 10 000 volontaires accepteront de partager leurs données de santé grâce à des objets connectés.

Calico

Calico n’est pas cette ville fantôme du désert de Mojave en Californie du Sud, mais une société de biotechnologies qui travaille sur l’allongement de l’espérance de vie (California Life Company) située sur le campus de Moutain View et plus précisément dans le complexe secret Google X Lab. Elle travaille notamment sur de nouveaux modes de prévention et de traitement du cancer avec le but avoué de se concentrer sur le défi de la lutte contre le vieillissement et les maladies associées.

Deepmind

Spécialisée dans l’intelligence artificielle, Deepmind a été fondée en 2010 et rachetée par Google en 2014. C’est le bras armé en matière de deep learning. L’entreprise aspire à doter des machines d’une intelligence artificielle performante, mais également de comprendre le fonctionnement du cerveau humain. L’un des défis est de réaliser une mémoire à court terme similaire à celle travaillant dans le cerveau humain, la technique s’appelant « Deep reinforcement learning ».

A noter que son partenariat avec le réseau d’hôpitaux londoniens NHS a été remis en cause, car il ne respectait pas les règlements sur le traitement des données personnelles. Tiens donc.

Cityblock

Sidewalk Labs, un groupe d’innovation urbaine de la société mère de Google Alphabet, a lancé une start-up avec des plans ambitieux pour repenser le système de santé. En effet, cette spin-off (3) souhaite mener des programmes de prévention et d’éducation à la santé et créer des centres médicaux dans les villes pour les plus démunis.

Selon la vision de Cityblock, chaque membre aura son « équipe personnalisée » avec personnel soignant, outils technologiques, nudges (4) de suivi et plan de santé. Des services offerts sans frais supplémentaires pour ceux qui sont couverts par une assurance. On comprend déjà mieux les prises de participation avec des start-ups d’assurance (voir ci-dessous).

Mais aussi

Google possède une participation chez Oscar Health et Clover Health (assurance santé), Vaccitech (vaccin), Quartet (santé mentale). Quant à l’éditeur d’applications mobiles de santé Seniosis Health, il est désormais dans son giron.

Il existe également Google Fit qui permet aux utilisateurs d’objets connectés de stocker leurs données liées à l’activité physique.
Pascal Wolff

Sources : Glossaire-international, Usine Nouvelle, Le Monde Informatique, L’Usine Digitale, cnbc.com, bfmbusiness, Le Monde

(1) Voir sur notre site le pdf de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees).
(2) « Disrupter », c’est bouleverser et déstabiliser les marchés vieillot et monopolistique, pour s’y introduire et y faire sa place, une spécialité des sociétés d’internet. Uber en est un bon exemple.
(3) Scission d’entreprise.
(4) Le nudge est une discipline émergente qui s’intéresse au comportement.

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Amazon – Facebook – Apple




Apple

Watch

Tout le monde connaît l’AppleWatch, la montre connectée d’Apple. Elle enregistre nombre de paramètres tels que le rythme cardiaque, la tension, l’hydratation… Des applications tierces se basent sur ces données pour proposer des services de prévention et de bien-être. Apple domine le marché des montres connectées avec 57 % des ventes, et son AppleWatch est la montre la plus vendue au monde. Nous sommes en pleine « disruption ». (1)

La marque a acheté la start-up Beddit, spécialiste du suivi du sommeil. Elle accède ainsi à des données sur des millions de nuits de sommeil d’utilisateurs, de quoi nourrir sa plate-forme Health Kit.

Le Californien a acheté en 2016 une jeune pousse spécialisée dans le partage de données de santé : Gliimpse. Proposée en particulier à ceux atteints du diabète ou d’un cancer, l’application permet de partager leurs informations médicales avec leur famille, leur médecin, les organismes de santé. En deux mots, un dossier médical partagé, assorti d’autorisations d’accès personnalisées et limitées dans le temps. Les chercheurs aussi peuvent avoir accès sous condition à ces informations. Une manière de rester dans la course face à Verily de Google.

Research Kit

Research Kit permet aux utilisateurs qui le souhaitent de partager leurs données d’activité et de santé avec des chercheurs

Mais le principe soulève beaucoup de questions et d’inquiétudes. A commencer par le respect de la vie privée et la sécurité des données. Qui pourra les consulter ? Ensuite, quid de la fiabilité des données recueillies ? Mal utilisé, l’iPhone peut potentiellement transmettre des données hasardeuses, voire inexactes. Enfin, uniquement disponibles sur iPhone, les applications développées avec ResearchKit font fi des utilisateurs d’autres marques et… de ceux qui ne disposent pas de smartphones. Les informations reçues concerneront donc principalement des personnes aisées, disposant donc d’un meilleur accès à la santé.

Health

Health Kit permet de partager ses données d’activité et de santé avec des applications tierces. D’autres fonctionnalités, telle « Health Records » qui va permettre d’importer ses données issues d’analyses médicales, vont apparaître.
Pascal Wolff

Sources : Glossaire-international, Usine Nouvelle, Le Monde Informatique, L’Usine Digitale, cnbc.com, bfmbusiness, Le Monde

(1) « Disrupter », c’est bouleverser et déstabiliser les marchés vieillot et monopolistique, pour s’y introduire et y faire sa place, une spécialité des sociétés d’internet. Uber en est un bon exemple.

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Google Alphabet – Amazon – Facebook




Amazon

Une assurance santé

Trois grands entrepreneurs américains, dont Jeff Bezos (1), vont créer une société indépendante à but non lucratif, ayant pour but de développer un système de protection sociale, tout d’abord pour leurs 960 000 employés puis serait potentiellement mis en place pour tous les Américains, une manière de réponse au démantèlement d’Obamacare et à l’explosion des coûts d’Assurance-santé.

Mais aussi

Amazon a investi dans Grail, une start-up qui travaille sur la détection et le développement d’un test sanguin pour détecter les cancers avant l’apparition des symptômes. En ce sens, Grail va exploiter les données de centaines de milliers de personnes.

Amazon lorgne le marché des pharmacies qui a représenté, rien qu’aux États-Unis, 300 milliards de dollars de dépenses en 2015. Outre un important catalogue de fournitures médicales, elle vend sur internet toutes sortes de médicaments sans prescription. En attendant de se déployer dans le monde, elle teste au Japon la vente en ligne et la livraison rapide de médicaments nécessitant une consultation auprès d’un pharmacien avant l’achat.
Pascal Wolff

Sources : Glossaire-international, Usine Nouvelle, Le Monde Informatique, L’Usine Digitale, cnbc.com, bfmbusiness, Le Monde

(1) Jeff Bezos, fondateur et PDG actuel d’Amazon.com

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Google Alphabet – Facebook – Apple




Meursault Village 2013 Pierre Boisson

Des saveurs tranchées, un parfum éblouissant, un équilibre entre texture onctueuse, vivacité, minéralité et, pour faire bonne mesure, une part de mystère, voilà ce qu’expriment les grands blancs bourguignons de chardonnay.

Et quand on demande aux vignerons de cette région à quoi tiennent ces remarquables qualités, la plupart répondent « C’est le terroir évidemment » en oubliant (par modestie ?) leur part de responsabilité. En matière de terroir, quoi de plus fascinant que celui ou plutôt ceux de Meursault, car ce vignoble offre une diversité de « climats » produisant des vins de personnalité et de structure très variées, dominés par le puissant trio des Premiers Crus : Charmes, Genevrières et Perrières. Mais ces grands vins sont de plus en plus inaccessibles en raison de la demande mondiale et des tarifs exorbitants de certains viticulteurs : 300 à 700 euros au domaine d’Auvenay ou chez Arnaud Ente. Aussi, il est réjouissant de dénicher des Meursault génériques, tels ceux de Pierre Boisson, dont la qualité avoisine celles de nombre de Premiers Crus.

L’effervescence des amateurs

Les vignes du domaine Boisson-Vadot furent plantées vers 1940, enracinées sur des sols de calcaire dur, parfois très pierreux sur les hauts de Meursault, village, dont les moines de l’abbaye de Citeaux au Moyen-Age avaient déjà pris la mesure de la qualité des vins. Ceux du domaine de 9 ha sont maintenant vendus sous trois pavillons, car Bernard Boisson et son épouse, née Vadot, passent progressivement la main à leurs deux enfants, Anne et Pierre, qui élaborent leurs vins sous leur propre étiquette, mais tous vinifiés, au domaine, en famille, gardent le même style. Seules, les parcelles varient en fonction du propriétaire.

Ce domaine Boisson-Vadot crée l’effervescence parmi les amateurs depuis une dizaine d’années, car la nouvelle génération a fait entrer les vins du domaine déjà d’un bon niveau dans le cercle fermé des grands bourgognes blancs.

Du bio sans le dire
Le travail à la vigne n’est pas un vain mot. La conduite de la viticulture est, en théorie, conventionnelle, « à l’ancienne », dit le père : respect des sols par élimination des produits systémiques, des engrais chimiques, labourage attentif, un bon palissage, une attention de tous les instants, bref, du bio, sans le dire. A partir de là, les jus offrent une grande expression du fruit nourri par une terre saine.

Les vendanges manuelles sont relativement précoces, pour que les raisins ne produisent pas des vins trop mous. La vinification est assurée essentiellement par le fils Pierre, précis, sérieux, dont la grande amitié avec Raphaël Coche-Dury du célébrissime domaine leur permet d’échanger informations, réflexions, conseils. Ainsi, Pierre a posé son empreinte et sa rigueur, son intransigeance le poussent vers la perfection. Il limite au minimum les interventions au chai. Les élevages sur lies fines en fûts déjà utilisés, sans bois neuf pour les Meursault villages, sont longs sur 15 à 21 mois avec des batonnages délicats destinés à remettre en suspension les seules lies fines qui, par leur côté réducteur, apportent ce grillé caractéristique, sans excès de gras. Les vins ne sont pas filtrés.

Intensité et persistance gustative remarquables

Ce Meursault village 2013 de Pierre Boisson à la teinte jaune paille soutenue, lumineuse et brillante rehaussée par des touches de vert chartreuse fait jaillir du verre des parfums de fleur blanche, tilleul, acacia, de citron, de zestes d’agrumes, de sésame grillé, de silex et pierre chaude. En bouche dominent la tension, le minéral et apparaissent les arômes murisaltiens : beurre fondu, brioche, noisette grillée. Le vin s’étire tout en longueur en caressant le palais sur un bel équilibre gras, opulence versus tension, minéralité. L’intensité, la persistance gustative sur une finale saline et salivante sont remarquables. La fraîcheur, les jolies notes grillées, l’ossature opulente évoquent fortement le style de l’icône des bourgognes blancs : Coche-Dury.

Ce Meursault 2013 accompagnera parfaitement un foie gras en terrine pour ceux qui répugnent à servir en début de repas un vin sucré ou liquoreux. Le vin de
Pierre Boisson fera merveille avec les préparations à base de veau, tels bouchées à la reine, vol-au-vent, ris. Il s’accorde bien avec filet mignon, médaillon de veau aux champignons ou agrémenté d’épices et d’une garniture, type olive ou aubergines, dont la légère amertume est équilibrée par le gras du vin. Une volaille sauce crémeuse sera flattée par son équilibre et son moelleux.

Mais c’est avec les produits de la mer que ce vin exprimera toutes ses potentialités : poissons nobles à chair ferme avec un beurre manié ou une sauce mousseline : turbot, barbue, saint-pierre, croustillant de bar au foie gras en millefeuille de pomme de terre. Un peu vieilli, ce vin se marie bien avec des fromages d’alpage : comté, vieux fribourg, reblochon.

Ce « simple » Meursault générique est indéniablement magnifique. Mais voilà le hic : la ruée frénétique des amateurs (en particulier pour les cuvées parcellaires Grands Charrons, Chevalières, 1er Cru Genevrières), la politique tarifaire exemplaire des Boissons leur interdit d’accepter de nouveaux clients !

Vous pourrez peut-être trouver quelques flacons sur quelques sites de vente en ligne ou chez des cavistes avisés.

Meursault Village Pierre Boissson
21190 Meursault



Le parcours mystérieux et chaotique de l’Apollon du Belvédère [2]

[2] L’auteur, le lieu de destination, l’origine de sa découverte ne reposent que sur des hypothèses.

Deux courtes mentions interpellèrent les historiens pour en trouver l’auteur : Pline l’Ancien dans son Histoire naturelle indiquait qu’un aigle ravissant Ganymèdes et un Apollon ceint du diadème étaient du sculpteur Léocharès (XXXIV, XIX, 29). Pausanias dans sa Description de la Grèce avait vu deux statues d’Apollon placées devant le temple d’Apollon dit Patroôs dans l’Agora d’Athènes (I,III,4) : une de Léocharès et l’autre de Calamis (1). Selon Pline l’Ancien le sculpteur Leocharès était actif à Athènes « dans la 102e Olympiade » (entre 377 et 368 av. J.-C). Or il était décrit comme un jeune homme dans la XIIIe lettre platonicienne, vers 365 av. J.-C.

En se basant sur la composition centrifuge évocatrice des années 330 av. J.-C. et les caractéristiques de ses attributs, l’historien d’art Erica Simon attribue l’Apollon du Belvédère comme étant la copie en bronze de l’Apollon sculpté par Léocharès. Mais la méconnaissance de l’œuvre de cet artiste rend très hypothétique cette attribution. De plus les sandales portées par le dieu jettent le trouble. Elles ne peuvent remonter avant le IIIe, voire avant le IIe siècle av. J.-C. Il pourrait s’agir, en fait, d’une composition romaine originale.

Le texte de Pausanias nous invite à destiner cette sculpture au culte d’Apollon Patroôs. Les fouilles archéologiques de l’Agora mirent en évidence l’existence de plusieurs temples successifs. Le premier sanctuaire archaïque édifié par Pisistrate daterait du VIe siècle av. J.-C. et serait au mythe d’Apollon Patroôs (2). Les Perses détruisirent ce premier temple en 480/479 av. J.-C. Athènes, après sa défaite contre Sparte en 404 av. J.-C (construction du deuxième temple) et contre Philippe de Macédoine en 338 av. J.-C. (élévation du troisième temple), développa ce mythe de son glorieux passé. À côté du culte à caractère privé des Phratères, le dieu était honoré lors des grandes fêtes de la cité dans un temple public élevé aux frais de l’État. L’indigence des sources ne permet pas de connaître la teneur du culte public. Situé dans la zone ouest de l’agora, le dernier temple du IVe siècle, étudié en 1937, d’ordre ionique, tetra ou hexastyle, in antis, fut élevé sur l’instigation de Lysurgue entre 338 et 325 av. J.-C. Un kouros, sans doute la statue cultuelle du premier temple, une figure féminine assise provenant du fronton du dernier temple et une sculpture du IVe siècle av. J.-C. dite d’Apollon Patroôs attribuée à Euphranor (parfois donnée à Léocharès), furent découverts à proximité de ce sanctuaire. Cette dernière sculpture proviendrait de la cella de ce temple.

Pirro Ligorio, entre 1568 et 1583, suggéra que l’Apollon venait d’être mis au jour à Anzio (Antium), ville proche de Rome. Le transfert à Rome d’œuvres originales grecques était devenu habituel à la suite de l’expansion romaine dans le bassin oriental de la Méditerranée.

L’empereur Néron appréciait les œuvres du passé grec. Il les disposait dans ses palais, notamment dans la Domus Aurea à Rome. Dans ce contexte, si le transfert de l’Apollon à Antium dans l’immense villa que Néron avait fait construire en bord de mer est envisageable, aucun document ne l’atteste. Le lieu de sa découverte demeure toujours incertain. Après un silence de plus de 1 500 ans, il réapparait brutalement à la Renaissance pour faire d’emblée l’admiration des amateurs.

Un court voyage à Paris et son retour au Vatican

A la suite de la campagne d’Italie de 1796, le général Bonaparte imposa des conditions d’armistice. Le 23 juin, celui de Bologne exigeait du pape la remise de cent objets d’art et de cinq cents manuscrits. Le traité de paix qu’il signa à Tolentino en février 1797 renouvela l’indemnité en objets d’art.

Les commissaires et les artistes envoyés à Rome le 29 juillet 1796 sélectionnèrent les plus prestigieuses sculptures : l’Apollon du Belvédère, le Laocoon, et le Torse du Belvédère, Melpomène et le tireur d’épine. De Livourne les caisses embarquées dans la frégate le Sensible, puis entreposées en Arles, parvinrent à Paris le 15 juillet 1798.

Les 27 et 28 juillet, un cortège triomphal de chars défila du Musée d’histoire naturelle au champ de Mars. Une peinture d’Antoine Béranger (1785-1862) d’après un dessin à la plume d’Achille Valois (1785-1862) sur la panse d’un vase en céramique au musée de Sèvres en garde la mémoire (3). Une Notice des Statues, bustes et bas-reliefs décrivait chaque œuvre entreposée dans la galerie des Antiques du Musée central des Arts. La note 145 de l’Apollon Pythien, dit l’Apollon du Belvédère, après un texte insistant sur sa destruction du monstre Python, citait le lieu de sa découverte, son acquisition par le futur Jules II et l’origine possible du marbre. L’auteur, Enrio Quirino Visconti, « le pape de l’antiquité », considérait toujours qu’il s’agissait d’un original grec.

Sur la plaque en cuivre de fondation de l’Apollon du Belvédère au Musée central des Arts se trouvait l’inscription suivante : « La statue d’Apollon, qui s’élève sur ce piédestal, trouvée à Antium sur la fin du XVe siècle, placée au Vatican par Jules II, au commencement dit XVIe, conquise l’an V de la République par l’armée d’Italie, sous les ordres du général Bonaparte, a été fixée ici le 21 Germinal an VIII, première année de son Consulat ». Au revers est cette autre inscription : « Bonaparte, Ier Consul. Cambacérès, IIe Consul, Lebrun, IIIe Consul, Lucien Bonaparte, ministre de l’Intérieur ». En 1815, après les défaites de l’Empire, l’Apollon retourna à Rome au Musée du Vatican dans la salle de l’Octogone de la cour du Belvédère où il se trouve encore aujourd’hui sous une niche entre le Persée et le Laocoon.

De nombreuses inconnues subsistent : si nous sommes à peu près certain, à ce jour, qu’il s’agit d’une copie ou d’une adaptation romaine d’un bronze grec de la fin de l’époque classique (soit vers 330-320), des voix s’élèvent pour le considérer comme un original romain. L’auteur du bronze, peut-être Léocharès, son lieu de destination sur l’agora d’Athènes sans doute le temple de Patroôs et sa présence éventuelle dans la villa de Néron à Antium jusqu’à sa redécouverte à la fin du XVe siècle, ne sont que des hypothèses basées sur des écrits sommaires. Comment est-il arrivé dans le jardin du cardinal della Rovere à Saint-Pierre-aux-Liens à Rome ? le mystère persiste ! Il semble avoir été remarqué dès les décennies précédentes remettant en cause l’écrit de Pirro Ligorio. Ensuite jusqu’à aujourd’hui, nous suivons plus facilement sa trace.

Christian Zicarelli

Eva Mesko, étudiante en Master 2 Histoire de l’Art, Paris IV La Sorbonne.

(1) L’Apollon Alexicacos vu par Pausanias peut difficilement être la sculpture de Calamis (actif entre – 470 et – 440). Ce surnom, du dieu vient, disent les Athéniens, de ce qu’il leur indiqua, par un oracle rendu à Delphes, les moyens de faire cesser la peste dont ils étaient affligés en même temps que la guerre du Péloponnèse. (Pausanias 1.3.4).
(2) Ion, le fils d’un étranger Xouthos et de Creuse de famille athénienne eut quatre fils, les quatre fondateurs des tribus d’Athènes. Euripide dans sa pièce Ion, pour donner un ancêtre prestigieux à la ville remplaça Xouthos par Apollon Pythios (ancêtre des Ioniens) et Platon dans l’Euthydème, Pythios par Patroôs.
(3) En fait les sculptures entreposées dans des caisses n’étaient pas visibles. 

Bibliographie

1/ Ackerman JS, The Cortile del Belvedere, Cité du Vatican, 1954, p. 153.

2/ Clarac F (de), Maury A., Musée de la sculpture antique et moderne, 1841, Paris, p. 198.

3/ Cooper J. F., Excursions in Italy, Londres 1838, I, p. 188-189.

4/ Farington J., The diary of Joseph Farington, Londres, Kenneth Garlick et Augus Macintyre, II, 1978, p. 442.

5/ Flaxman J., « Report from the Select Committee on the Earl of Elgin’s Sculptured Marbles », in The Elgin Marbles from the Temple of Minerva, Londres, 1816, p. 29.

6/ Haskell F, Penny, N., Pour l’amour de l’antique. La statuaire gréco-romaine et le goût européen 1500-1900, traduit de l’anglais par François Lissarrague, Paris, Hachette, 1988, p. 176.

7/ Lanzac de Laborie L de), « Le Musée du Louvre au temps de Napoléon d’après des documents inédits », in Revue des Deux Mondes, tome X, 1912, p. 611-612.

8/ Matthews H, The Diary of an Invalid : Being the journal of a tour in pursuit of health in Portugal, Italy, Switzerland and France in the years 1817, 1818 and 1819, Londres, A & W Galignani 1825 (1ére éd. 1820), p. 215.

9/ Pietrangeli C, Montebello P (de), The Vatican Collections. The Panacy and Art. The Metropolitan Museum of Art, cat. expos. New-York, The Metropolitan Museum of art, 26 février-12 juin 1983, Chicago, The Art Institute, 21 juillet-16 octobre 1983, San Francisco, The Fine Arts Museums, 19 novembre 1983, 19 février 1984, New York, Harry N. Abrams, 1983.

10/ Schutter X (de), Le culte d’Apollon Patrôos à Athènes », L’antiquité classique, 56, 1987, p. 103-129.

11/ Winckelmann J. J., Histoire de l’art chez les anciens, volume 3, Paris, p. 357.




Clot-Bey : un médecin français à la cour du Pacha d’Egypte

Cette biographie passionnante se fonde sur une documentation exhaustive ainsi que sur les mémoires de Clot-Bey ; elle retrace la vie de l’homme et du médecin, et dresse un portrait nuancé de ce personnage plein de contrastes qui a contribué à écrire l’une des pages les plus importantes de l’Egypte moderne.

Né à Grenoble en 1793, Antoine-Barthélémy Clot arrive à Marseille en 1813 pour y étudier la médecine, malgré un manque total de ressources et de sérieuses lacunes dans son instruction. Admis comme externe à l’hôtel Dieu, reçu comme élève interne en chirurgie en 1816, il devient officier de santé en 1817 ; après avoir passé son baccalauréat à Aix-en-Provence en 1819, il devient docteur en médecine à Montpellier en 1820 et docteur en chirurgie en 1823.

Doté d’une forte personnalité et sans doute d’un caractère ombrageux, il a déjà été évincé de ses postes hospitaliers et ouvert avec succès un cabinet privé lorsqu’il est recruté par Tourneau un français au service du pacha d’Egypte, Méhémet Ali, en tant que médecin et chirurgien en chef de l’armée de ce dernier.

Antoine-Barthélémy Clot s’embarque le 21 janvier 1825 pour Alexandrie ; son contrat, prévu pour cinq ans, devait se prolonger jusqu’en 1849.

A peine arrivé, il soigne Méhémet Ali et le guérit d’une gastro-entérite, devenant son médecin attitré et son ami.

Mais, l’état sanitaire du pays est déplorable et la tâche immense. Clot a été le maitre d’œuvre de la modernisation des institutions médicales égyptiennes ; il crée un Conseil de santé et un service sanitaire militaire puis fonde un gigantesque complexe hospitalier à Abou-Zabel et une école de médecine ; il introduit et développe la vaccination antivariolique et crée une école de sages-femmes. Après la terrible épidémie de choléra de 1832, son dévouement exemplaire lui vaut d’obtenir le titre de Bey, qu’il ajoutera à son nom.

Après l’abdication de Méhémet Ali, Clot-Bey revient à Marseille en 1849, avant d’être rappelé en Egypte en 1854 où il retrouve ses fonctions d’inspecteur général de la santé jusqu’à son retour définitif en 1858.

Pendant les quelque trente années de son séjour, Clot-Bey a pu acquérir une importante collection d’antiquités égyptiennes qu’il a cédée à la ville de Marseille et  que l’on peut aujourd’hui admirer au musée de la Vieille Charité.

L’auteur, Bruno Argémi, est médecin lui aussi, spécialiste en endocrinologie ; membre de l’Académie de Marseille, il est depuis 2006 Président de l’association Provence Egyptologie.

Les spécifications du livre
Auteur : Bruno Argémi
Editeur : Gaussen
Pagination : 268 pages
Prix public : Livre : 20,00 €




Le parcours mystérieux et chaotique de l’Apollon du Belvédère [1]

L’Apollon du Belvédère, sculpture romaine en marbre de l’époque d’Hadrien, reproduction d’une effigie en bronze vers – 330 av. J.-C., se trouve  sous une niche dans l’octogone de la cour du Belvédère au Vatican. Cette statue de taille supérieure à l’être humain (2,24 m [h]), très souvent gravée et reproduite, fut l’objet de nombreux écrits, notamment aux XVIIIe et XIXe siècles. Admiré comme l’une des merveilles de la statuaire antique grecque, Johann Joachim Winckelmann le décrivit à plusieurs reprises avec emphase. Cependant son historiographie demeure encore aujourd’hui très méconnue.

Une découverte de la Renaissance 

Nous devons attendre le début du XVIe pour découvrir son existence dans le guide le plus célèbre de la Rome antique, L’Opusculum de mirabilibus novae & veteris urbis Romae de Francesco Albertini : « que puis-je dire de la très belle statue d’Apollon, qui je peux le dire semble vivante et que votre sainteté a transféré au Vatican ». L’auteur, chanoine de la basilique Saint-Laurent à Florence, aumônier du cardinal Fazio Santoro à Rome, fut élevé au titre de cardinal par le pape Jules II le 1er décembre 1505. Vers 1491 parut dans le codex Escurialensis, (1) publié vers 1508-1509, la première reproduction de l’œuvre. Ce recueil de dessins indiquait que la statue se trouvait dans le jardin du cardinal Giuliano della Rovere, le futur pape Jules II à San Pietro in Vincoli, dont il était le titulaire depuis 1471. En fait l’Apollon servit de modèle à Andrea del Castagno dans les années 1450 lorsque cet artiste peignit son David en citant l’attitude de la sculpture (David vainqueur de Goliath, tempera sur toile, Washington National Gallery of art). Pier Jacopo Alari Bonacolsi (v.1460-1528) dit l’Antico, qui avait reproduit plusieurs statues antiques pour le studiolo d’Isabelle d’Este, en fit une réduction en bronze, sans doute vers 1498, aujourd’hui à la Ca d’Oro à Venise.

Une installation symbolique dans la cour du Belvédère

Le pape Jules II, grand amateur d’antiquité, l’installa au Vatican dés 1509, puis dans la cour du Belvédère vers 1511. L’aménagement de celle-ci confié à Donato Bramante à partir de 1506 connectait le palais du Vatican à la villa du Belvédère par une série de terrasses. Dès 1503, Jules II amassa une immense collection de sculptures antiques dont le Laocoon et ses fils et le Torse du Belvédère. Il les plaça dans des niches donnant sur la cour. La gravure à l’eau forte de Marc-Antonio Raimondi (1474-1534) du Metropolitan Museum of Arts à New-York en 1530-1534 et celle sur cuivre d’Antonio Lafreri à la Bibliothèque nationale de France en 1550-1552 en apportent la preuve et donnent l’image de la figure de l’Apollon lors de sa découverte. Toute une symbolique liée à la présence de cette statuaire fut orchestrée par Jules II. Le palais du Belvédère est implanté sur la colline du Vatican, l’endroit, selon le Liber Pontificalis, (2) où aurait été crucifié saint Pierre. Au vers 33 du poème l’Antiquaria Varia Urbis, Andreas Fulvius indiquait qu’en ce lieu un sanctuaire était dédié au dieu Apollon :  « Vaticanus apex, Phoebo sacratus, ubi olim auguria hetrusci vates captare solebant ». L’empereur Constantin y érigea sous le pape Silvestre I (314-355) une basilique consacrée à saint Pierre. Elle gardait le sarcophage où reposait le corps du Saint. En replaçant cette statue d’Apollon dans la cour du Belvédère le souverain pontife donna une expression visuelle à cette tradition. Sa commande à Raphaël de la fresque d’Apollon au Parnasse dans les Stanze di Raffaelo au palais du Vatican participe de cette même symbolique. En concevant un jardin arboré entouré de statues antiques, il recréa l’antique viridarium. En 1532-1533, à la demande du pape Clément VII, l’Apollon subit une restauration. A l’époque il importait de rétablir les manques. Le sculpteur Giovanni Agnolo Montorsoli (1507-1563), compagnon de Michel-Ange, ajouta la main gauche, modifia l’avant-bras droit avec une main ouverte détournée du corps, et allongea le support pour que la main droite puisse s’y appuyer (cette main était attachée à l’origine à la cuisse supérieure, comme le prouvent les puntello survivants).

Ces modifications furent gravées et dessinées sans commentaire jusqu’au XIXe siècle. En 1924-1925 Guido Galli lui redonna son aspect primitif. Depuis 1981, l’Apollon est à nouveau autoportant et la pause ajustée avec précision : la statue penche maintenant au niveau de la tête de 50 mm environ. Quelques semaines après son élection en 1566, le pape Pie V annonça que la collection des sculptures de la cour du Belvédère allait être dispersée, « Il ne convenait pas au successeur de saint Pierre de conserver chez soi de telles idoles ». A sa mort en 1572, pas une statue jugée de premier ordre n’avait quitté la cité. Caché par des volets de bois en raison de sa nudité « indécente » l’Apollon resta en place jusqu’au traité de Tolentino en 1798.

Depuis sa « redécouverte » à la fin du XVe siècle jusqu’en 1850 : une des plus merveilleuses sculptures du monde, une « beauté idéale »

L’Apollon du Belvédère considéré comme une statue antique grecque originale fut admiré pendant trois siècles. La seconde description du savant allemand, Johann Joachim Winckelmann (1717-1768) montre l’engouement provoqué par cette œuvre : « de toutes les statues antiques qui ont échappé à la fureur des barbares et à la main destructrice du temps, la statue d’Apollon est sans contredit la plus sublime. On dirait que l’artiste a composé une figure purement idéale […] Son attitude annonce la grandeur divine qui le remplit […] Dans les traits de l’Apollon du Belvédère, on trouve les beautés individuelles de toutes les autres divinités réunies […]. Pour le poète, écrivain et théoricien de l’esthétique allemand Johann Christoph Friedrich Schiller « aucun mortel ne peut décrire ce mélange céleste d’accessibilité et de sévérité, de bienveillance et de gravité, de majesté et de douceur ». Le peintre Raphaël Mengs (1728-1779), le premier, émit des doutes. Avant sa mort, il affirma que l’Apollon était une copie romaine faite d’un marbre italien, en total désaccord avec le célèbre antiquaire romain Enrio Quirino Visconti. Après dix ans d’âpres échanges, le géologue et minéralogiste Déodat de Gratet de Dolomieu (1750-1801) trancha en faveur de l’Italie. Le sculpteur et dessinateur anglais, grande figure du néoclassicisme britannique, John Flaxman « était certain qu’il s’agissait d’une copie, au contraire du Thésée du Parthénon ». Pour Henry Mathews membre du King’s College de Cambridge dans son journal The diary of an Invalid « le style de finition n’a certainement pas l’air d’un original ». A la fin de la première moitié du XIXe siècle l’affaire était entendue : le « soupçon » que cette œuvre soit une copie se « chuchote si fort que tout le monde peut l’entendre ». Le 14 décembre 1795, le même John Flaxman affirmait qu’il s’agissait « d’une copie en marbre d’un original de bronze […] les plis du devant de la statue sont probablement une exacte imitation de l’original et ne correspondent pas à ceux de l’autre face ». Il restait à en découvrir l’auteur.

Christian Zicarelli

Eva Mesko, étudiante en Master 2 Histoire de l’Art, Paris IV La Sorbonne.

(1) Le codex Escurialensis arriva en Espagne vers 1509-1510. Daté habituellement de 1491 (fol. 50v.) il servit de source mythologique et d’ornement architectural lors de la construction du château de la Calahorra (Sierra Nevada) de 1508 à 1509 par le marquis Don Rodrigo Vivar y Mendosa (il se trouvait à Rome de 1506 à 1508).
(2) Chronologie des papes du IVe au XIe siècles.

 




Et moi, je vis toujours

Pouvait-on, dans cette rubrique médico-littéraire, laisser partir Jean d’Ormesson sans lui adresser l’hommage que méritent sa carrière et sa personnalité ?

Cet ouvrage ultime n’a certes pas grand-chose à voir avec la médecine ou la cardiologie.

Encore que …

Et moi, je vis toujours … Mais qui suis-je ?

Eh bien, je suis l’humanité ; plus que l’humanité, je suis l’histoire, je suis hier, aujourd’hui et demain.

Dans ce roman monde qui revisite l’histoire universelle, Jean d’Ormesson met tout son talent, extraordinairement intact jusqu’au bout, pour nous amener à réfléchir sur l’humanité et bien au-delà, du début – « L’histoire du monde avant l’histoire »  – à la possible fin de l’univers, « ce spectacle indicible d’un monde sans les hommes ».

Tantôt homme, tantôt femme, le narrateur vole d’époque en époque et ressuscite sous nos yeux l’aventure des hommes et de leurs grandes découvertes.
Vivant de cueillette et de chasse dans une nature encore vierge, il parvient, après des millénaires de marche, sur les bords du Nil où se développent l’agriculture et l’écriture.

Tour à tour africain, sumérien, grec ou troyen, ami d’Achille et d’Ulysse autant que d’Hector, citoyen romain, juif errant, il salue les grandes inventions et découvertes, le génie militaire, la Révolution de 1789, les progrès de la science. Marin avec Christophe Colomb, servante dans une taverne à Paris, valet d’un grand peintre ou d’un astronome, Il est partout chez lui, à Jérusalem, à Athènes, à Byzance, à Venise.

Il souligne à merveille les événements marquants des différentes époques, mais on sent bien qu’il garde une certaine préférence pour les grands artistes, écrivains, peintres, musiciens ou bâtisseurs.

Un brin pessimiste ou tout simplement lucide, il pronostique la fin de l’histoire : « je ne suis pas éternelle puisque je suis le temps et que le temps s’écoule ; j’ai passé, je passe, je passerai… »

Rédigé dans un style alerte et vif, avec ce sens de la formule qui fait mouche que l’on reconnaît à l’écrivain, le livre est, comme les précédents, très agréable à lire ; il nous invite, comme les autres, à réfléchir sur l’évolution et la vie; cette vaste entreprise d’exploration et d’admiration finit par dessiner avec ironie et gaîté une sorte d’autobiographie intellectuelle de l’auteur.

« Racine est une mode qui passera comme le café ! », aurait affirmé avec cet aplomb qui caractérise parfois les plus graves erreurs de jugement notre chère marquise de Sévigné.

Gageons que l’œuvre de ce cher Jean d’Ormesson durera autant que celle de Racine !

Les spécifications du livre
Auteur : Jean d’ Ormesson
Editeur : Gallimard
Pagination : 288 pages
Prix public : Livre : 19,00 € – Kindle : 13,99 €




Let’s talk ou comprendre sans connaître la langue

Cela fait pratiquement dix ans que le concept d’écoute augmentée existe. La technologie n’a cessé de s’améliorer depuis pour réapparaître sérieusement en 2016 afin d’arriver aujourd’hui  à des écouteurs-traducteurs en temps réel. Le marché devient mature et permet de comprendre et retranscrire des idiomes dans la langue de votre choix, si le logiciel le permet.

 Les demandes sont fortes dans ce domaine où les demandes sont importantes : congrès, réunions interlangues, visualisation vidéo en lange étrangère, formation, voyages… Certains pays pour qui la langue peut-être une barrière – comme la Chine ou le Japon – ont bien compris l’avenir de cette technologie qui pourraient leur ouvrir plus facilement les portes des investisseurs ou visiteurs étrangers. Gare cependant aux technologies employées, aux smartphones qui doivent être connectés pour fonctionner au travers de l’application et au temps de latence entre la prise de parole et l’écoute qui peut avoir des conséquences non négligeables et le nombre de langues proposé (gratuites ou non). Petit tour d’horizon des principales technologies.

Ili Logbar

Présenté en 2016 – fonctionne sans 4G. 1 langue. Anglais vers espagnol, japonais ou chinois

C’est au CES 2016 que Logbar, société nippone, avait présenté un outil simple, capable de comprendre une langue complexe comme le japonais. Le produit se présente comme un boîtier de télécommande, simple et doté d’un microphone et d’écouteurs. L’avantage est qu’il fonctionne sans connexion. La bibliothèque préinstallée est plutôt chiche avec une traduction de l’anglais vers l’espagnol, le japonais et le chinois. L’inverse n’étant pas possible. Le temps de traduction est des plus courts avec un temps de  0,2 seconde en moyenne.

Pixel Buds

Sortie en octobre 2017 – 159 $. 40 langues

L’utilisation des écouteurs Pixel Buds de Google s’est avérée compliquée. En effet, une conversation avec une personne de langue étrangère oblige d’avoir deux smartphones Google Pixel 2 et deux paires d’écouteurs. Il faut donc trouver une personne qui a le même smartphone et les mêmes écouteurs… Quant à la traduction, elle est décevante, puisqu’elle transite via l’application Google Assistant et ne fournit que des mots-valises et non le résultat d’une véritable discussion…

WT2

Disponibilité avril 2018 – 179 $. 6 langues. Anglais, chinois, français, allemand, japonais, espagnol

La start-up Timekettle propose un traducteur en temps réel qui fonctionne via une application sur le smartphone. Celle-ci réalise la traduction puis envoie l’information vers les écouteurs. Il y a donc un temps de latence de 1 à 3 secondes entre le temps de parole de l’interlocuteur et la traduction. Malgré cela, l’outil est plutôt performant, à condition d’avoir un bon réseau mobile à proximité.

Mars

Sortie prévue été 2018 – aucun prix annoncé. 4 langues, 40 à terme. Anglais, chinois, coréen, espagnol

C’est au CES 2018 que de nouveaux écouteurs, baptisés Mars ont été présentés. Disponibles sur Android et iOS, ils autorisent la traduction en tête-à-tête en temps réel. Là encore, l’intelligence est déportée sur le smartphone par le biais d’une application. Lors des démos, Mars était en mesure de comprendre l’anglais, le chinois, le coréen et l’espagnol. A terme, une quarantaine de langues étaient promises.

The Pilot

Sortie à l’automne 2017 – 249 $. 15 langues

Là encore, la promesse est simple : pouvoir traduire à la volée et en temps réel les discussions depuis plusieurs langues. Les écouteurs s’appuient sur du « machine learning » (1) pour puiser les informations nécessaires à son fonctionnement.
Les oreillettes sont connectées en bluetooth à votre smartphone. Quinze langues sont supportées gratuitement, dont l’anglais, le français, l’italien, le portugais et l’espagnol

Baidu

Sortie prévue février-mars 2018. 3 langues

Après les Baidu Eye, le plus gros moteur de recherche de Chine a dévoilé un traducteur pas plus gros qu’un smartphone. L’appareil, qui fait appel à des intelligences artificielles, a besoin d’une connexion qui induit une latence significative. A ce jour, le chinois, le japonais et l’anglais sont les seules langues supportées. Le mandarin s’ouvre à vous !
Pascal Wolff

(1) Le « machine learning » ou apprentissage automatique, concerne la conception, l’analyse, le développement et l’implémentation de méthodes permettant à une machine (au sens large) d’évoluer par un processus systématique, et ainsi de remplir des tâches difficiles ou problématiques par des moyens algorithmiques plus classiques.




Les données du monde des réels

Ce site est toujours une curiosité, et nous vous en avions fait part il y a quelques temps. Worldometers propose en temps réel un nombre impressionnant de données (dont certaines font froid dans le dos), certaines concernant le monde de la santé :

– nombre de naissances

– nombre de décès

– décès dûs à des maladies contagieuses

– décès causés par la malaria

– décès causés par le VIH

– décès causés par l’alcool

– décès suite à des accidents de la route…

Il est bien sûr impossible de savoir à l’unité ou à la seconde prêt le nombre de décès causé par le VIH ou le nombre de cigarettes fumées, essentiellement parce que c’est déjà compliqué d’avoir des chiffres fiables dans les pays industrialisés, alors imaginez dans certains pays en voie de développement ou en état de guerre.

Au 20 février 2018, nous étions à 7 603 309 400 être humains sur terre…

Mais c’est surtout une curiosité. A noter que si, en France, le nombre de naissances régresse depuis trois ans, il progresse dans le monde plus vite que celui des décès…
Pascal Wolff




La tempête de Giorgione (1478-1510) ou la singularité de l’éclair

A Venise, à l’automne 1510, quand meurt prématurément de la peste,  Zorzi (en dialecte vénitien) de Castelfranco dit « le grand Giorgio » ou Giorgione (1477 ou 1478-1510), avec lui disparaît l’une des figures les  plus énigmatiques de l’art italien « entre existence et inexistence ».  

 

Comme la peinture toscane, la peinture vénitienne est issue de la tradition byzantine mais elle est imprégnée de la luminosité particulière de Venise nimbée d’une atmosphère adoucie par l’évaporation de la lagune qui, en revanche, s’est avérée peu favorable aux fresques, incitant à y substituer des toiles monumentales (teleri) puis des tableaux de chevalet destinés aux plaisirs intellectuels au début du Cinquecento. C’est ainsi que La Tempête de ce peintre éphémère que fût Giorgione nous présente « une atmosphère de musique et de poésie qui laisse au spectateur une entière liberté d’interprétation quant à la scène représentée ». A cette époque, il semble que nul autre que Giorgione, à la fois peintre et musicien, n’aurait pu saisir avec un tel raffinement ces sensations fugitives et subtiles laissant libre cours à de multiples interprétations mythologiques ou allégoriques qui donnent finalement « l’impression de s’annuler l’une à l’autre à l’infini ». Il en résulte qu’il s’agit  d’une toile ne nécessitant, peut-être, « aucun décodage »  en nous laissant dans un exceptionnel « état de réceptivité émotive ». L.-F. Garnier

Nous ne connaissons rien de la vie de Zorzi de Castelfranco, ni de son activité jusqu’à la première référence le concernant en date du 1er juin 1506 sous forme d’une inscription au dos de Laura (Kunsthistorisches Museum Vienne). Il nous faut faire confiance au peintre et biographe Giorgio Vasari (1511-1574)  pour savoir qu’il naquit d’une famille modeste à une cinquantaine de kilomètres de Venise, à Castelfranco di Veneto ; là  se trouvent  les fresques de la « Casa Giorgione » et surtout, dans l’église San Liberale, la Pala (1)  di Castelfranco représentant une Vierge à l’Enfant avec Saint François et Saint Nicaise, l’une des rares œuvres qui lui soit clairement attribuée. La date de naissance de Giorgione est  d’autant plus imprécise qu’à Venise l’année commençait alors ab incarnatione Christi, le 25 mars. il put être apprenti (v.1490) et  former son esprit, forma mentis, chez Giovanni Bellini (1430-1516).

Ce dernier demanda, en novembre 1508, qu’une commission de peintres incluant Vittore Carpaccio (v.1460-v.1526) fasse que Giorgione soit  correctement rétribué  pour sa fresque de la façade donnant sur le Grand Canal du Fondaco dei Tedeschi (2), l’autre façade ayant été peinte par Titien (v.1485-1576).  Il ne reste malheureusement presque rien de cette fresque détruite par l’air marin de la lagune et encore moins d’une peinture sur toile de grande dimension (teler) commandée en 1507 pour la salle du Conseil des Dix dans le  palais des Doges, détruite par un incendie en 1577. C’est dire la renommée du maistro  Giorgione de son vivant mais aussi la rareté de ses œuvres au hasard des attributions dans le cadre d’une fortune critique pleine d’incertitudes.

Une première description de ses œuvres fut faite dans un document  manuscrit rédigé dans les années 1520-1540 par un patricien vénitien collectionneur, Marcantonio Michiel (1484-1452) précurseur en tant que « connaisseur »  en la matière. Dès le milieu du XVIe siècle, les attributions s’avéraient délicates car Sebastiano del Piombo (v.1485-1547) et Titien  durent terminer des œuvres laissées inachevées par la mort prématurée du maître. Vasari nous dit en effet que sa mort « fut une grande perte rendue supportable grâce à deux excellents élèves : Sebastiano qui allait devenir frère del Piombo à Rome et Titien qui non seulement l’égala mais le surpassa. »

Giorgione et  l’élite cultivée de Venise 

C’est de façon posthume, à partir de 1548, qu’apparaît le nom de Giorgione dans le Dialogo della Pintura de Paolo Pino en hommage à « sa belle allure jointe à la noblesse de son âme ». Ce personnage mythique, qu’on dit mort de la peste par amour en embrassant sa fiancée malade, était  à la fois « beau, courtois, excellent musicien » et  peintre exceptionnel  de telle sorte que « ses chants et son luth le faisaient rechercher pour les concerts et les parties de plaisir de la noblesse vénitienne ».

Taddeo Contarini vit chez Michiel en 1525, les Trois philosophes (Kunsthistorisches Museum Vienne) et chez Gabriele Vendramin (mort en 1552), probable commanditaire de La Tempête, une toile dénommée Portrait de la famille Vendramin. Ces tableaux, en sus d’une remarquable collection de dessins, de peintures flamandes et de statues antiques, se trouvaient dans une des résidences de la famille, la Ca’Vendramin di Santa Fosca. Le caractère ésotérique de ces peintures ou « allégories absconses », le plus souvent réservées à un cercle d’érudits vénitiens fortunés faisant office « d’inspirateurs iconographiques sinon de commanditaires » fit que même Isabelle d’Este (1474-1539), la raffinée marquise de Mantoue, ne put acquérir une « Nuit  très belle et singulière » lorsqu’elle apprit la mort de l’artiste car les possesseurs ne voulaient pas s’en séparer. Il est possible que Giorgione ait rencontré Leonard de Vinci (1452-1519) qui l’aurait initié au sfumato (3) lors d’un bref passage à Venise (1500) et Albrech Dürer (1471-1528) au cours de son second séjour à Venise (1505-1507), de telle sorte que l’un et l’autre purent l’influencer.

La représentation de la Nature associée aux plaisirs bucoliques témoigne alors d’un engouement des riches vénitiens pour l’arrière-pays, la terraferma, où ils aimaient séjourner dans des domaines agricoles sur le modèle des futures villas palladiennes permettant de joindre l’utile à l’agréable. Le paysage joue alors un rôle important en tant que « miroir des émotions humaines ». Cet engouement pour la vie rustique était renforcé par la littérature de l’époque.

La Tempête

La Tempête (huile sur toile de lin 80 x 73 cm peinte vers 1505-1506) nous montre « l’étrange détachement » de deux personnages qui semblent s’ignorer l’un l’autre, dans un paysage champêtre doté de ruines improbables à l’orée d’une ville. Il s’agit de l’un des tableaux les plus mystérieux de l’Histoire de l’Art, « à présent comme hier », non seulement pour le spectateur et « l’érudit qui a tout intérêt à rester silencieux » mais aussi, semble-t-il, pour le commanditaire qui n’en donnait pas une explication convaincante, voire même pour le peintre lui-même puisque la radiographie a montré un repentir sous le personnage masculin ; on y voit une femme nue trempant apparemment  ses pieds dans le miroir d’eau à gauche,  et les réflectographies (2001) ont montré bien d’autres petites corrections. Ceci pourrait témoigner du fait que Giorgione changea radicalement d’avis en cours d’exécution, excluant ainsi l’hypothèse d’un thème précis préalable.

Il serait présomptueux de vouloir en donner une explication rationnelle et nous pouvons encore moins expliquer d’où vient sa « puissance magique ». La symbolique des personnages demeure incertaine, qu’ils soient issus de l’Ancien Testament (Adam et Eve chassés du paradis ou Moïse trouvé au bord du Nil) ou de la mythologie gréco-romaine tel que Pâris abandonnant la nymphe. Il semble plus simple d’en rester, comme beaucoup d’auteurs, à l’illustration d’un poème pastoral ou poesia qui était alors un nouveau genre de peinture en référence à l’Arcadie (4) cette région idyllique de la Grèce antique. L’expression du paysage est facilitée par « l’espacement latéral des personnages »  avec,  au sein d’un ciel  d’orage à l’atmosphère vaporeuse et menaçante, la survenue d’un éclair, peut-être « le vrai protagoniste de la scène » car considéré comme  très difficile à peindre, « irreprésentable », à l’instar de l’antique peintre grec Apelle (IVe siècle avant J.-C.) renommé pour le réalisme de ses compositions ; l’éclair  symboliserait , outre la colère divine ou la chute de Troie selon la version retenue, la brièveté de l’instant  dans la continuité d’une représentation de plus en plus fragmentaire du temps après que Giovanni Bellini ait illustré les changements des saisons puis les différents moments de la journée.

La scène se situe dans les quelques secondes qui précèdent le tonnerre qui fera peut-être s’envoler le héron (?) sur le toit dont une partie s’est effondrée et qui devrait inciter les personnages à se mettre à l’abri de l’orage qui arrive. Une femme nue est assise sur un talus et nous regarde avec insistance tout en donnant le sein à un jeune enfant ; seules ses épaules sont couvertes par un pan du linge blanc sur lequel elle est assise, avec un voile transparent sur ses cheveux blond sombre. Il est bien difficile de considérer que cette blonde « vénitienne » à la peau claire mérite le qualificatif correspondant à la première description du tableau en 1530 par Marcantonio Michiel sous la dénomination  « Le petit paysage avec l’orage, la bohémienne et le soldat » ce dernier devenant  un berger lors d’un inventaire en 1569 dès lors que,  si le menton volontaire, le court pourpoint rouge ou zipon et le  haut-de-chausse à crevés évoquent une attitude militaire, son bâton sans pointe semble être plutôt celui d’un berger.

Louis-François Granier

(1) Terme italien désignant un tableau d’autel et plus particulièrement au XVIe siècle lorsque  les retables à volets disparaissent.

(2) Fondaco dei Tedeschi ou Comptoir des Allemands près du pont du Rialto alors en bois comme représenté par Carpaccio : entrepôt de marchandises réservé aux marchands du nord de l’Europe mais propriété de la Seigneurie ;  détruit par un incendie dans la nuit du 27 au 28 janvier 1505 avec une perte estimée comme supérieure à celle de  la ville d’Anvers, sa reconstruction était terminée  dès 1508.

(3) sfumato : technique consistant à superposer plusieurs fines couches de peinture afin de produire un effet vaporeux et estompé  donnant au sujet des contours volontairement imprécis

(4) L’Arcadie de Jacopo Sannazzaro (v.1455-1530), roman en prose et en vers (1504), eut une grande influence sur le genre pastoral et la conception du paysage dans la peinture vénitienne du début du Cinquecento.

Bibliographie

1/ Brion M. Les peintres en leur temps. Philippe Lebaud 1994

2/ Chevreuil C. Les Mémoires de Giorgione. Le Livre de Poche 2000

3/ Clark K. L’Art du Paysage. Arléa 2010

4/ Dal Pozzolo E.M. Giorgione Actes Sud 2009

5/ Gentili A. Le cadre historique de la peinture vénitienne de 1450 à 1515. Profils (diversement) perdus : Andrea Mantegna et Jacopo Bellini in L’Art de Venise. Ed. Place des Victoires 2007

6/ Hagen R-M, Hagen R. Les dessous des chefs-d’œuvre. pp 107-111 Taschen 2003

7/ Lucco M. Giorgione. Gallimard/Electa 1997

8/ Nepi Scirè G. et al. Les Galeries de l’Accademia de Venise. Electa 2013

9/ Rosand D. La peinture vénitienne du Cinquecento in L’Art de Venise. Ed. Place des Victoires 2007

10/ Steer J. La peinture vénitienne. Thames & Hudson 199

11/ Vasari G. Les vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes. Commentaires d’André Chastel. Thesaurus Actes Sud 2005




Champagne Arpège 1er Cru Blanc de Blancs

Synonyme de fête, le champagne, plus que jamais dans le cœur des Français, est apprécié toute l’année, pour célébrer les joyeux événements de l’existence avec, à l’évidence, une apogée lors des festivités de fin d’année. Aussi, permettez-moi de vous adresser mes meilleurs vœux avec le champagne que j’ai eu grand plaisir à déguster à Noël.

Vigneron depuis 1982, Pascal Doquet a travaillé dans le domaine familial pendant 18 ans avant d’entrer en conflit avec son père qui ne voulait rien changer dans ses techniques culturales anciennes. Pascal, lui, désirait se tourner vers des pratiques respectueuses de la nature, et donc convertir les vignes en agriculture biologique, mettre en avant l’expression des terroirs et des parcelles.

La rupture survint en 2004, Pascal rachetant les parts de la société familiale, pour appliquer sa philosophie de « viticulture durable » passant en bio dès 2007. Il garde le statut de « récoltant-manipulant » qui ne produit du champagne qu’issu de ses propres vignes, car il a la chance de bénéficier de 8,7 ha, essentiellement sur les magnifiques terroirs très crayeux de la Côte des Blancs, en grand et 1er cru.

Le champagne est le vin de la civilisation
Charles-Maurice de Talleyrand
Bio pur et dur (il est d’ailleurs président de l’Association des champagnes biologiques), il utilise des amendements et composts naturels, des engrais organiques, la protection sanitaire est assurée par des préparations à base d’extraits de plantes et de microorganismes, la chimie naturelle (cuivre et soufre) est réduite au minimum. Les vignes sont labourées et enherbées, des céréales sont plantées entre les rangs, afin de « mobiliser les éléments minéraux ». Les rendements sont contrôlés par la taille et la maîtrise de la vigne. Les vendanges récoltent des raisins à pleine maturité, afin d’éviter la chaptalisation.

La vinification soignée, 2/3 en cuves d’acier émaillé, 1/3 en fûts de chêne, débute par un pressurage pneumatique horizontal. Les fermentations sont effectuées par les levures indigènes de chaque terroir pour respecter leur identité. L’élevage sur lies s’étend sur 5 mois en cuves, sur 11 en fûts avec un batonnage modéré. La fermentation malo-lactique est systématique, pour diminuer l’acidité. Les vins de réserve, constituant la base qualitative pour les assemblages, comportent 3 récoltes différentes. La mise en bouteille, sans collage, a lieu entre 6 et 12 mois selon les cuvées. Le dosage de sucre après dégorgement à la volée se fait par un apport de moût concentré de raisin en privilégiant les cuvées extra-brut à moins de 4,5 g/l de sucre. La commercialisation des cuvées ne se fait donc qu’au-delà de 4 ans de vieillissement.

Trois terroirs  pour un 1er cru

La cuvée Arpège Blanc de Blancs 100 % chardonnay est composée à partir de trois terroirs 1er cru : la vinosité est prodiguée par les argiles riches de Vertus, la finesse par les sols sableux de Villeneuve, la minéralité cristalline par les silex et craies du Mont-Aimé. La contre-étiquette procure des renseignements très précis : raisins cueillis lors des vendanges 2010 (53 %) et 2011 (47 %), mis, non filtrés, en bouteille en mai 2013, dégorgés le 11 octobre 2017, dosé à 3,5 g/l.

Une texture savoureuse et tonique

Dans le verre, cette Arpège extra-brut offre un pétillement jaune pâle très clair à reflets verts prasiolite d’une belle brillance, où les bulles se dégagent en fines cheminées, sans discontinuité, et où la mousse trace une écume légère. Des senteurs de fleurs blanches : verveine, tilleul, de fruits jaunes murs : mirabelle, coing émanent du verre complétées par un bouquet mentholé de poivre blanc et de miel. En bouche, la texture savoureuse, tonique, salivante s’affirme et, à mesure que ce vin complexe et racé s’ouvre, émergent des notes minérales de fumé, de craie. La crémosité généreuse, inhabituelle pour un extra-brut, se confirme dans une finale douce, longue, persistante.

Un vin de gastronomie

Ce champagne est un merveilleux vin d’apéritif, désaltérant, vivace, frais qui ne surcharge pas l’estomac. Son pétillement mettra en valeur les petits feuilletés au fromage, les gougères, et surtout les rillettes de colin, saumon fumé à la crème fraîche. Mais ce blanc de blancs aux expressions riches et complexes est un vin de gastronomie. Les plats de grande cuisine en sauce feront fête à sa crémosité : huîtres plates chaudes (belons) à la fondue de poireau, filets de turbot sauce champagne, sole à la crème safranée, croustillant de bar au foie gras, oursins en gelée de pomme. Ce champagne réussit un bel équilibre avec de nombreux champignons, plus particulièrement les morilles. Il ne faut pas hésiter à s’aventurer vers des combinaisons plus déconcertantes avec des plats rustiques, tels potée, pot-au-feu, andouillette…

N’oublions pas que les champagnes extra-bruts ne s’accordent absolument pas avec les desserts sucrés, mais, au contraire de la plupart des vins, accueillent volontiers camemberts au lait cru et coulommiers !

On n’a jamais autant consommé, ni parlé du champagne. Pierre-Emmanuel Taittinger, président de la maison éponyme, tente d’expliquer ce phénomène : « De plus en plus de consommateurs dans le monde boivent du champagne pour célébrer, parce qu’on n’a plus besoin de célébrer quand c’est dur ».

 

Champagne Arpège Pascal Doquet
1er Cru Blanc de Blancs
51130 Vertus



Gaillac « Du rat… des pâquerettes » 6102

Quel couple atypique forment Virginie Maignien, diplômée de l’ESSEC, et Patrice Lescarret ancien comédien et clown qui donnent une interprétation très personnelle du terroir gaillacois grâce à un travail remarquable dans leur vignoble !

Au nord-est de Toulouse entre les rivières Aveyron et Tarn, Gaillac est une vaste appellation peu connue. On y cultive une multitude de cépages indigènes, des variétés obscures qui permettent de produire une vaste gamme de vins, dont les blancs moelleux sont les plus réputés. Mais les rouges obtenus à partir des cépages ancestraux : braucol, prunelard et surtout duras souvent associés à la syrah, méritent d’être découverts.

Facétieux, provocateur à la plume acerbe, Patrice Lescarret se décrit ainsi : « Je n’ai bu que du bordeaux jusqu’à l’âge de 16 ans, ça n’aide pas et quand on sait que peu après je passai par l’institut d’œnologie de Bordeaux, on comprendra mes préjugés et mon manque d’objectivité. Heureusement un accident salvateur me frappa d’amnésie ».

Il travailla ensuite dans des domaines réputés à Sancerre et en Provence avant de s’installer en 1993 à Gaillac au départ sur 8 et maintenant 12 ha, où il s’efforce de mettre à l’honneur les cépages autochtones ancestralement cultivés dans la région.

Il se plait à stigmatiser « les décrets d’application miteux et poussiéreux tentant d’éviter le pire, mais assurément empêchant le meilleur » qui ont eu raison de sa pugnacité, et impose que la plupart de ses crus soient élevés au rang de vins de table, ce qui interdit la mention de cépages et de millésimes. Si bien qu’il contourne la réglementation en intitulant ses cuvées de duras de noms folkloriques : Du rat… des pâquerettes, Rasdu (il avait même envisagé : Hiroshima mon amour) et en les numérotant : par exemple, 6102 pour 2016 !

Biologique et  biodynamique

Le domaine de Causse Marines doit son nom au ruisseau Marines qui délimite le bas de la propriété, l’ensemble du vignoble s’étendant sur un causse (plateau calcaire) sis sur la rive droite du Tarn. Le climat entre influences atlantiques et méditerranéennes est idéal pour la vigne balayée et assainie par le vent d’autan. Les sols caillouteux et calcaires pauvres bénéficient d’une bonne hydrométrie. Toutes les vignes anciennes sont greffées sur place. Les nouvelles plantations issues de sélection massale sont méticuleusement sélectionnées.

Certifiée en agriculture biologique et maintenant biodynamique (Demeter), la viticulture, interdisant désherbants, insecticides, toute molécule de synthèse, est protégée par la phytothérapie : ortie, prèle, fougère. La totalité du vignoble est vendangée et triée manuellement.

Rendements très bas de 13 à 30 hl/ha, à « rendre dépressif un banquier et à ulcérer un chilien » selon Lescarret qui poursuit : « Nous mettons un point d’honneur à vinifier et élever nos bébés, sans artifice, ni chimie dégradante ».

Pour la cuvée « Du rat… des pâquerettes », la température de fermentation, évidemment naturelle, est écrêtée à 28°. Quelques pigeages au pied et une macération de 3 semaines sont effectués. L’élevage sur 6 mois se fait partiellement en vieilles barriques. Collage et filtration sont limités à leur plus simple expression.

Une bouche séduisante et complexe

Ce vin de France 100 % duras 2016 paré d’une robe sombre rouge grenat aux nuances violines exhale un bouquet intense de petits fruits noirs : mûre, myrtille, de cerise à l’eau-de-vie, d’épices abondantes dominées par le poivre noir (si bien qu’on peut confondre ce cépage avec la syrah), de réglisse. La bouche séduisante, vive, complexe, charnue et charpentée est garnie de tanins encore un peu fermes compte-tenu de sa jeunesse, mais qui évolueront à l’évidence vers souplesse et finesse. En fin de bouche, apparaissent des arômes de mine de crayon, de cailloux mouillés attestant d’une belle minéralité. Un peu de réduction peut apparaître à l’ouverture nécessitant un carafage.

Une âme de terroir

Ce Gaillac (quoique classé en vin de France) charpenté et épicé ouvrira agréablement le repas en compagnie d’un plateau de charcuterie, d’une salade landaise ou de foies de volaille. Mais il s’épanouira à l’évidence grâce à sa prégnance de poivre noir avec des belles viandes rouges poêlées ou grillées, et mieux encore en sauce : agneau de l’Aveyron au romarin, filet de bœuf en croûte aux champignons. Les viandes blanches finement cuisinées l’accueilleront également avec plaisir : millefeuille de veau aux pommes de terre et pommes fruit, mignon de porc et sa compotée de fruits d’automne. Sa complexité, se dévoilant au fil du repas, lui permettra d’encadrer fromages : morbier, cantal, bleu d’auvergne, puis desserts : poires à l’hypocras, figues au vin rouge.

Pascal Lescarret nous propose, à prix doux, des flacons de plaisir conviviaux reflétant le vigneron, dont la seule conviction est de produire des vins possédant une âme sur un terroir et un chai qui n’ont que faire de la technologie moderne et des poudres de perlimpinpin. Il conclut sur une note humoristique propre au personnage : « On peut faire du bio, sans avoir les cheveux longs, ni fumer la moquette ».

 

Gaillac « Du Rat…des Paquerettes » 6102 – Domaine Causse Marines – 81140 vieux




La santé, thème phare du CES de Las-Vegas

Pour clore le chapitre du CES de Las Vegas (voir Le Cardiologue 408), la tendance était au développement de plates-formes technologiques, d’applications mobiles avec capacités d’alerte en temps réel et infrastructure cloud pour les analyses de données, enjeu majeur des années à venir (deux cents start-ups sur ce thème y étaient présents). 

L’une des tendances marquantes concerne les soins aux personnes âgées et handicapées avec une volonté notable du maintien à domicile tout en gardant une certaine autonomie. Plusieurs start-ups se sont lancées dans des applications connectées avec analyse comportementale, hébergement cloud des données et traitement analytique.

La Poste

La Poste a lancé son application e-santé pour le CES. Elle rassemble tous les suivis médicaux et les données issues d’appareils de santé connectés et devient ainsi un carnet de santé numérique (voir article complet).

Aladin

La « lampe » connectée Aladin de Domalys en est le tout premier exemple. Ce système qui se veut B2C (1) ressemble à une lampe murale (il en faut plusieurs dans le lieu d’habitation) détecte les levers nocturnes, les chutes, gère les alertes et la prédiction de la perte d’autonomie ou de certaines pathologies.

Ce matériel est relié à une application (2) qui collecte les données  et les envoie sur la plate-forme de Prédical qui réalise ensuite des traitements analytiques disponibles pour les utilisateurs.

Cette technologie (3) associe les principes de la « smart home » (l’une des thématiques essentielles de ce CES 2018) et de la Silver Economy. Elle décèle les changements de comportement (déplacements plus lents, augmentation du nombre de levers nocturnes…) et anticipe l’installation ou le développement de certaines pathologies. Une fois les données récoltées, le comportement est analysé. En cas de comportement inhabituel, les aidants  (proches ou professionnels) reçoivent une notification par l’intermédiaire de l’app mobile qui résume les données de l’incident.

C’est également en EHPAD où ce système pourrait trouver son marché : suivre chaque résident grâce à l’outil statistiques et analyser son évolution, optimiser la gestion des équipes et améliorer la transmission entre les équipes, détecter les personnes en perte d’autonomie, sécuriser les personnes fragilisées et rassurer les nouveaux résidents notamment lors de la phase d’adaptation au logement.

L’entreprise Domalys a été sélectionnée par la région Nouvelle-Aquitaine pour représenter les couleurs de la French Tech. Aladin est conçu et fabriqué en France.

Sensoria health

La tendance du moment avec les capteurs intégrables dans les vêtements ne se positionne plus uniquement dans le sport. Sensoria fournit une gamme de services de réadaptation à domicile.

Les mouvements et les cadences sont détectés et agissent sur les exercices, l’utilisation d’une canne ou d’une prothèse.

Des chaussures « intelligentes » pour diabétiques surveillent la conformité d’un patient au protocole de délestage mécanique prescrit par le clinicien.

Des alertes en temps réel peuvent être appliquées aux soins actifs, à la prévention primaire et à la prévention secondaire.

La combinaison de l’accéléromètre et des lectures de pression plantaires permettent de détecter les chutes.

La capacité fonctionnelle et les tests de mobilité peuvent être suivis et enregistrés à distance.

iMicroMed

La température se connecte pour offrir un suivi en temps réel. La jeune startup iMicroMed américaine, qui ambitionne de s’imposer sur le marché des Wearables (4), propose une nouvelle génération de thermomètres intelligents (ThermaPatch) sous forme de patchs qui permettent de monitorer en temps réel et en continu la température. Les données sont émises aux terminaux mobiles afin d’être exploitées par une application qui les met en forme (graphiques). Des conseils sont directement adressés aux aidants. Médecins et personnels hospitaliers peuvent aussi accéder à distance ou sur présentation de ces données afin d’être informés de manière instantanée de tout problème de santé critique.
Pascal Wolff

(1) L’expression B2C (business to consumer ou commerce B to C) désigne l’ensemble des architectures techniques et logiciels informatiques permettant de mettre en relation des entreprises directement avec les consommateurs.

(2) Domalys a noué un partenariat avec Prédical, startup ayant pour mission d’allier analyse scientifique de données et domotique au service du maintien à domicile des seniors isolés.

(3) PrediCare Technology®, société spécialisée dans les solutions de prévention de la perte d’autonomie des seniors.

(4) Cette technologie est composée d’un vêtement ou d’un accessoire comportant des éléments informatiques et électroniques avancés.




CES Las Vegas : une french tech en forme

Rendez-vous incontournable de la high-tech mondiale depuis 51 ans, le Consumer Electric Show (CES) s’est tenu à Las Vegas du 9 au 12 janvier derniers. Les français n’étaient pas en reste cette année en étant la troisième présence mondiale derrière les Etas-Unis et la Chine avec 365 entreprises et structures exposantes.

Quatre secteurs ont été représentés par la high-tech française : la maison connectée (près de 70 exposants), la santé (près de 50), les services aux entreprises (35) et les transports (31).

Pour la French Tech, c’est plus largement la « deep tech » (intelligence artificielle, robotique, internet des objets, biotechnologies, nanotechnologies), qui sort son épingle du jeu avec quelques belles réussites, telles que Criteo, Zenly et Talend pour le secteur des données, ou encore SigFox, Devialet et Wandercraft pour l’internet des objets.

CardioNexion

Cela fait plus de trois ans que @-Health, une entreprise aixoise, travaille sur son projet technosanté CardioNexion. Vingt-quatre mois de recherche et développement ont été nécessaires afin que ce dispositif soit opérationnel dans sa première version. En le présentant au CES, la société entend démontrer la pertinence de son outil de surveillance de l’activité cardiaque face aux investisseurs américains et trouver des partenaires potentiels outre-Atlantique, mais également en Inde et en Asie.

Ce dispositif médical connecté permet un dépistage et une analyse précoces, en temps réel et en continu, de l’ensemble des pathologies cardiovasculaires.

En présentant CardioNexion, @-Health veut devenir un acteur de premier plan dans la lutte contre les maladies cardiovasculaires, première cause de mortalité dans le monde.

Temps réel et efficacité

CardioNexion permet de détecter et prévenir avec certitude toute pathologie ayant comme premier signe une modification du rythme cardiaque, mais également la mort subite du nourrisson, la grippe, l’apnée du sommeil… Et ce, bien avant que les premiers symptômes n’apparaissent.

CardioNexion permet au médecin traitant de prescrire un traitement adapté et d’en contrôler son efficacité en temps réel. L’anticipation est donc une vraie révolution dans l’approche des thérapeutiques.

Ce dispositif ambulatoire et autonome se présente sous la forme d’un T-shirt ou d’un soutien-gorge doté de capteurs qui surveillent en temps réel de nombreuses données (fréquence cardiaque, le rythme respiratoire, le positionnement dans l’espace, la température,…).

Les données anonymisées sont recueillies 24h/24 et envoyées via le smartphone du patient vers des serveurs sécurisés où elles vont être analysées puis acheminées vers une plate-forme de surveillance, véritable centre  de veille avec plusieurs niveaux d’alerte et d’interprétation.

Si un problème potentiel est décelé, le médecin du patient est alors prévenu.

TEAM 8

A l’heure où l’on parle d’une problématique évidente des enfants hyperconnectés, on peut être dubitatif sur la montre connectée Team8 destinée à des enfants de 5 à 12 ans. Avec celle-ci, votre chérubin pourra créer et gérer son propre super-héros (nom, costume, capacités, etc.) et pourra l’utiliser dans de nombreux jeux. S’il en a la possibilité, il pourra relier sa montre à celle de sa sœur ou de son copain et,  ainsi, s’opposeront leur propre héros !

Mais pour  que toutes ces activités aient un sens,  les super-héros auront besoin de se nourrir, et ce à partir de la force de vie des enfants : plus l’enfant fera des exercices et plus leur héros deviendra fort. Il fallait y penser !

L’application devrait aider les parents à contrôler le poids de leurs enfants, un appareil photo sera utilisé pour enregistrer la nourriture des enfants, collecter des points et vérifier via le code barre et en cas d’allergies, si le produit peut être mangé. Elle enverra des rappels pour l’observance du traitement et aidera sur de nombreux autres problèmes de santé.

La Poste eSanté

La Poste a présenté au salon CES une application de e-Santé sur smartphones et tablettes permettant de centraliser les données de santé collectées par des objets connectés et de les traiter par des envois d’alertes ou des transferts aux professionnels de santé.

Cette application a pour vocation d’enregistrer les données de santé et le calendrier vaccinal, de centraliser l’ensemble des données récoltées par les objets connectés (tensiomètre, pèse-personne, pompe à insuline,…), d’envoyer des alertes en cas de dépassement de seuils adaptés au profil du patient et de partager les informations récoltées avec le médecin traitant.

Un « carnet de santé numérique »

L’ambition de La Poste est de faire de cette application gratuite une « nouvelle forme de carnet de santé numérique » (nommée plus précisemment ENS ou Espace Numérique de Santé) avec pour objectif « un lien numérique entre le domicile, le patient, l’hôpital, et la médecine de ville, en zone médicale dense aussi bien que dans des déserts médicaux ».

La particularité par rapport aux autres applications (qui sont nombreuses) est que tous les objets connectés peuvent y transférer leurs données, et peu importe la marque car La Poste eSanté a obtenu la certification mHealth Quality.

Des tests cliniques sont menés en ce moment par plusieurs établissements hospitaliers, dont l’Ircad, l’IHU de Strasbourg, l’Institut Hartmann, l’hôpital Bichat et l’Institut Giptis à Marseille, sur les maladies rares.

D’autres services

L’application La Poste eSanté permettra également d’accéder à une large gamme de services qui pourront aller « de la prévention santé, la détection à distance des chutes et le suivi postambulatoire à domicile, jusqu’à la commande en ligne de repas, de services du quotidien, de biens culturels ».

“Visible Patient”

A Las Vegas, des démonstrations seront présentées sur l’utilisation de l’espace numérique santé de La Poste par la start-up Visible Patient qui propose un service en ligne de modélisation 3D permettant à un expert médical de disposer d’un clone virtuel réalisé à partir d’une image scanner ou IRM.

Pascal Wolff




Traité de médecine vasculaire – tome 2

Réalisé sous l’égide de la Société française de médecine vasculaire, du Collège des enseignants de médecine vasculaire et du Collège français de pathologie vasculaire, ce traité a pour ambition de regrouper l’ensemble des connaissances actuelles sur la discipline au sein d’un ouvrage de référence.

Très richement illustré, construit en deux volumes, ce précis de médecine vasculaire propose une mise au point sur des pathologies auxquelles sont  confrontés quasi quotidiennement les cardiologues que nous sommes tout autant que de nombreux praticiens, internistes, chirurgiens vasculaires, radiologues ou dermatologues.

Le premier tome, dont nous avions précédemment rendu compte, aborde  les données de base sur l’athérosclérose (anatomopathologie, physiologie, biologie, séméiologie) et décrit les maladies artérielles.

Divisé en huit parties, ce deuxième volume étudie les diverses pathologies veineuses, lymphatiques et microcirculatoires et fait le point sur la prise en charge thérapeutique du patient vasculaire.

Plus de cent pages sont notamment consacrées à la maladie thromboembolique veineuse avec une description particulièrement poussée des techniques de diagnostic ultrasonique et des modalités diagnostiques et thérapeutiques de l’embolie pulmonaire.

Viennent ensuite l’insuffisance veineuse profonde et superficielle avec un développement spécifique du traitement endoveineux des différentes formes de varices.

Mais c’est dans la description des manifestations microcirculatoires des connectivites et des vascularites systémiques que l’ouvrage affirme son originalité tant pour leur étude clinique précise et didactique que pour l’énoncé exhaustif des possibilités thérapeutiques du moment sur ces pathologies moins courantes et moins souvent abordées.

La dernière partie, consacrée à la thérapeutique, est particulièrement dense : de la pharmacologie vasculaire des médicaments concernés aux traitements chirurgicaux et endovasculaires, en passant par l’éducation thérapeutique et terminant sur les recommandations en vigueur, tout concourt à faire de ce livre une somme exhaustive des connaissances sur la discipline concernée.

Ayant mobilisé 160 auteurs, sollicités pour leur expertise en tant qu’enseignants ou médecins vasculaires, ou praticiens issus d’autres spécialités, coordonnés par un comité de rédaction de dix-huit médecins vasculaires, ce traité est désormais incontournable pour tous les spécialistes amenés à prendre en charge des patients vasculaires.

Il est dédié à la mémoire de François Luizy, ce médecin vasculaire pionnier des ultrasons dans notre pays qui a donné à la discipline ses lettres de noblesse et s’est investi jusqu’au bout dans l’écriture et l’illustration de ce livre de référence ; François, qui a travaillé à plusieurs reprises pour Le Cardiologue, était notre ami, nous aussi saluons très respectivement sa mémoire.

Auteurs : Société française de médecine vasculaire, Collège des enseignants de médecine vasculaire, Collège français pathologie vasculaire

Editeur : Elsevier Masson

Pagination : 952 pages – Format : 210×297 mm

Prix public : broché : environ 200,00 €

format Kindle : 135,99 €




Le Spectre des hackers

Vous avez sans doute entendu parler de Spectre, la faille de sécurité des puces Intel découverte l’année dernière par l’équipe Project Zero (1), et causée, selon elle, par « l’exécution spéculative », technique utilisée par la plupart des processeurs pour optimiser les performances. En d’autres termes, des acteurs malveillants pourraient aujourd’hui lire votre mémoire système, a priori inaccessible, vos informations qui s’y trouvent (mots de passe, clés de chiffrement (2), et les données sensibles ouvertes dans les applications (code de carte bleue par exemple).

Si l’on a autant parlé de cette faille, c’est que le problème a une réelle importance. Google a réussi à atténuer le problème pour  nombre de ses produits (où la vulnérabilité n’était pas la principale importance), mais c’est physiquement que la puce est défaillante, ce qui veut tout simplement dire que les patchs correctifs (qui sont en cours de mise à jour) ne permettraient que de combler la faille à court terme. Seul le renouvellement des appareils et/ou le rajout aux puces d’une fonction se dénommant KPT1 (Kernel Page Table Isolation) permettrait aux entreprises concernées de se prémunir durablement.

D’autre part, les correctifs pourraient avoir un impact sur les performances de certains modèles Windows et Linux qui réduiraient les vitesses d’exécution des tâches de 5 % à 30 %.

Quant à Apple, la faille aurait déjà été corrigée dans la version High Sierra. Par contre, aucune indication sur les anciennes versions qui sont considérées comme obsolètes et donc… sans mise à jour. Peut-être sur Sierra et El Capitan. (3) La rumeur court depuis quelques mois que le géant de Cupertino pourrait quitter Intel en développant ses propres puces ARM pour animer ses Mac.

Pour l’instant, Brian Krzanich, le PDG d’Intel, se veut rassurant, en déclarant que les conséquences de  la détection de Spectre touchant ses processeurs était contenue, ce qui ne l’a pas empêché de vendre plus de 25 millions de dollars de ses stock-options fin novembre 2017, peu de temps avant la révélation de la faille de sécurité… peu avant la baisse du cours Intel…
Pascal Wolff

(1) Project Zero est une équipe d’analystes de sécurité employés par Google chargée de trouver les vulnérabilités et bogues avant de les signaler aux fabricants et de les divulguer publiquement une fois les correctifs publiés.
(2) Le chiffrement ou cryptage est un procédé de cryptographie grâce auquel on souhaite rendre la compréhension d’un document impossible.
(3) Apple aurait corrigé (d’après un spécialiste de la sécurité sur Twitter, donc non officiel) la faille de sécurité au moins dans la version High Sierra.




Comment va mon cœur, Docteur ?

Le docteur Nabil Naaman a bien des cordes à son arc : médecin cardiologue, il est aussi spécialiste en médecine aéronautique, médecine préventive et hygiène.

Après avoir cofondé et dirigé une revue de cardiologie, il s’essaie aux ouvrages médicaux en arabe et en français et se complait dans le roman et l’essai ; Le Cardiologue s’était d’ailleurs fait le plaisir de rendre compte dans cette rubrique de son premier roman intitulé « les clefs de la maison d’Albassa en Galilée ». Nabil Naaman est membre du groupement des écrivains médecins ainsi que du PEN Club français et international.

Ici il est question de médecine et plus précisément, spécialité oblige, de cardiologie.

Comment va mon cœur, docteur ? Est le premier livre inaugurant « Médecines, Arts et Lettres », nouvelle collection en gestation.

Où il est question d’innovations, d’explications et autres recommandations d’un praticien après trente cinq années d’exercice de sa profession (c’est lui qui le précise), l’une des plus prestigieuses, qui aura connu les avancées les plus fulgurantes depuis un demi-siècle.

Le style est clairement didactique et les termes utilisés sont à la portée de la majorité des lecteurs.

Mais la Médecine ne saurait être déconnectée des autres sciences, sciences humaines surtout, encore moins des arts et des lettres ; aussi l’auteur fait-il appel non seulement aux cardiologues et chercheurs, mais aussi aux artistes, philosophes et écrivains pour l’aider à comprendre et décrire les facettes multiple et variées du genre humain.

Et c’est à juste titre qu’il écrit dans son prologue qu’il « estime avoir les clefs pour modérer, convaincre et conseiller, et avec probité, discernement et modestie, pouvoir informer ».

Dans sa préface, le professeur Gilgenkrantz insiste d’ailleurs sur l’humanisme de l’auteur autant que sur la quantité et la qualité des informations contenues dans l’ouvrage qu’il recommande à un large public : patients cardiaques ou non mais aussi étudiants qui pourront y trouver de multiples exemples sur la qualité de la relation médecin-patient.

Science sans conscience n’est que ruine de l’âme, prophétisait Rabelais dans cette admirable  formule ; ce livre en est, à sa mesure, l’illustration.

Auteurs : Nabil Naaman

Editeur : Connaissances Et Savoirs Editions

Pagination : 168 pages

Prix public : Livre : 15,50 € – format epub : 4,99 €




Lucas Cranach l’Ancien ou l’histoire d’une amitié fervente

Le 31 octobre 1517, le moine Augustin Martin Luther (1483-1546) placarde ses quatre-vingt-quinze thèses réformatrices, critiquant les indulgences (*), sur la porte de l’église du château de Frédéric III le Sage (1463-1525), duc de Saxe et prince-électeur (**), grand collectionneur de reliques. 

Le château se situe à Wittenberg, au bord de l’Elbe, ville de Saxe-Anhalt en Allemagne, enrichie par les mines d’argent et dotée d’une université depuis 1502. Luther fut transféré d’Erfurt à Wittenberg en 1508 pour y enseigner la théologie. S’il est plausible que Luther ait placardé lui-même ses thèses, il les a surtout envoyées à Albert de Brandebourg, archevêque de Mayence, qui administrait la distribution des indulgences dans son évêché en lien avec les banquiers Fugger. Les thèses de Luther furent transmises à Rome, mais c’est sans attendre la réponse du Saint-Siège qu’elles sont imprimées et diffusées en quelques semaines dans toute l’Allemagne.

La réponse du Pape Léon X (1475-1521) ne se fait pas attendre ; dans sa bulle Exsurge Domine (Lève-toi, Seigneur) le pape condamne 41 des propositions de Luther et lui ordonne de se soumettre à l’Eglise. Luther refuse et faisant fi de l’anathème, jette publiquement la bulle papale au feu ; il est excommunié le 3 janvier 1521 et comparaît devant l’assemblée du Saint-Empire Romain Germanique, la diète, réunie à Worms en avril 1521 ; il persiste dans ses convictions, lui qui changea son nom de Luter en Luther par analogie avec eleutheros (celui qui est libre et cesse d’être esclave).

Mis au ban de l’empire, Luther est protégé par le prince électeur dans son château de la Wartburg en Thuringe de mai 1521 à mars 1522. Convaincu que seule l’écriture sainte « sola scriptura » peut régler la vie du croyant, il va traduire, tout en l’interprétant, le Nouveau Testament du latin en allemand pour le rendre accessible à ses contemporains. La Réforme gagne peu à peu l’Allemagne et aura des répercussions sur l’art religieux avec un mouvement iconoclaste qui aboutit à la fin de la peinture religieuse dans les pays réformés où « les arts sont gelés » (Erasme). C’est dans ce contexte que le peintre Lucas Cranach (1472-1553) dit l’Ancien devient un partisan mais aussi l’ami de Luther dont il fait la connaissance à Wittenberg. Il va contribuer activement au développement d’une iconographie protestante.

On ne connaît presque rien de la formation artistique de Lucas Maler dit Cranach l’Ancien né le 4 octobre 1472 à Kronach, petite ville allemande de Haute-Franconie, d’où provient son nom. Son père Hans aurait été peintre comme le suggère le patronyme de Maler (peintre). C’est probablement après s’être formé dans l’atelier paternel qu’il séjourne à Vienne (1502-1504), où il rencontre des humanistes dont il peint les portraits. Il s’établit en 1505 à Wittenberg auprès de la cour de Frédéric le Sage.

Tout comme Albrecht Dürer (1471-1528) dont il s’inspire tout en développant son propre style, Cranach est déjà un peintre reconnu. Il bénéficie d’appointements fixes en tant que peintre officiel succédant au Vénitien Jacopo de’Barbari (1445-1516). Outre des peintures il grave et crée des décors éphémères, des costumes, des médailles et même il décore les bâtiments extérieurs réalisant ainsi un grand ensemble pictural qui ne nous est pas parvenu. Il fut aussi très admiré en tant que peintre animalier en décorant les rendez-vous de chasse du prince-électeur. Ce dernier, en 1508, l’envoie aux Pays-Bas et lui accorde un brevet d’armoiries avec comme emblème un serpent couronné portant des ailes déployées (repliées après la mort de son fils aîné) de chauve-souris et tenant dans sa gueule un rubis serti dans un anneau d’or.

Ces armoiries se substituent au monogramme L.C du début de sa carrière et seront dorénavant la signature de son atelier, d’une productivité inégalée à son époque, avec jusqu’à une quinzaine d’apprentis et de disciples parmi lesquels ses deux fils, Hans Cranach (1513-1537) mort prématurément à Bologne, et Lucas Cranach le Jeune qui reprendra l’atelier à la mort de son père. Lucas Cranach l’Ancien, qui fut bourgmestre à trois reprises, était un homme riche ; à la fois marchand de vin, propriétaire de maisons, et ayant un privilège d’apothicaire (1520), il avait aussi une imprimerie qui servit à divulguer les pamphlets de Luther. Il fut aussi un homme en qui Luther avait toute confiance et un homme de conviction puisqu’il suivit dans sa captivité à Augsbourg, où il rencontra Titien (v.1488-1576), le prince-électeur Jean-Frédéric après la défaite des protestants à la bataille de Mühlberg (1547) contre les troupes impériales. Lucas Cranach l’Ancien meurt à Weimar en 1553 où il est enterré avec comme épitaphe « pictor celerrimus » (peintre très rapide).

C’est à partir de 1507 qu’apparaissent les premiers nus de Cranach avec les Adam et Eve, probablement inspirés d’Albrecht Dürer (1471-1528) qu’il a pu rencontrer à Nuremberg dans sa jeunesse et dont il connaît les gravures.

Plus tard, son adhésion à la Réforme ne l’empêcha pas de peindre des nus bibliques et mythologiques sous forme de Vénus longilignes aux cheveux blonds ondulés avec leur petit menton pointu et leurs yeux obliques et dont l’érotisme n’était pas forcément du goût de Luther.

L’amitié de Lucas Cranach pour Luther ne l’a pas empêché de beaucoup travailler pour l’archevêque de Mayence, et ce bien après 1517, en privilégiant certains motifs selon que le commanditaire était catholique ou protestant. C’est grâce à Lucas Cranach et à son atelier que nous savons à quoi ressemblait Luther et comment sa physionomie a évolué avec le temps.

Lucas Maler dit Cranach l’Ancien et Augustin Martin Luther

En 1512, le jeune moine augustin porte le bonnet de docteur en théologie.

En 1520, une gravure sur cuivre nous le montre toujours maigre et imberbe au regard déterminé. Environ deux ans plus tard, il porte la barbe pour ne pas être reconnu sous le pseudonyme de Junker Jörg, le « chevalier Georges ».

En 1524 Luther quitte l’état monastique et épouse en 1525, avec comme témoin Lucas Cranach, Katharina von Bora (1499-1552), une ancienne moniale qui lui donne six enfants et gère très efficacement les affaires courantes.

Comme trois ans au préalable, Luther en 1528, de nouveau imberbe, n’est pas encore grisonnant, et commence à s’empâter avec un double menton.

En 1546, il est corpulent mais il reste doté d’une force de volonté héritée de ses parents, Margarete et Hans Luther, peints par Lucas Cranach l’Ancien en 1527. Les portraits de Luther reflètent la conviction dont il fait preuve quand il prêche en chaire comme le montre Cranach dans la prédelle du retable de l’église de Wittenberg. Luther meurt le 18 février 1546.

C’est dans l’église municipale de Weimar qu’on peut admirer un triptyque peint par Lucas Cranach l’Ancien en 1552 et terminé en 1555 par son fils Lucas Cranach le Jeune. La peinture met en scène une partie de l’épitaphe du prince Jean-Frédéric de Saxe dit le Magnanime qui fut l’un des grands protecteurs de Luther et de son épouse Sybille de Clèves, représentés sur la gauche et morts en 1554 ; du côté opposé figurent leurs trois enfants. L’inscription « VDMAE » inscrite sur la draperie au dessus du couple princier est la forme abrégée de la devise inscrite sur la pierre tombale « Verbum Domini Manet in AEternum » (La parole de Dieu reste pour l’éternité).

Triptyque Herderkirche, Weimar

Le tableau fait office de sermon illustré associant plusieurs histoires de l’Ancien et du Nouveau Testaments telles que l’Exode, le serpent d’airain et Moïse montrant les dix commandements alors qu’Adam, incapable de s’y conformer, court vers la mort. Une personne, les bras levés, lutte contre le feu alors que l’ange sur fond de ciel clair annonce la venue du Messie aux bergers. Au centre se situe le Christ crucifié vêtu d’un perizonium ou pagne de pureté à double pan flottant, aux prises avec un vent imaginaire. A gauche le Christ ressuscité terrasse la mort et le diable.

Les trois hommes qui se trouvent à droite sont Jean le Baptiste montrant le Christ et l’agneau de Dieu qui « enlève les pêchés du monde ». A côté du Baptiste se tient Lucas Cranach l’Ancien avec son imposante barbe blanche similaire au portrait (Musée des Offices, Florence) qu’en fit son fils à l’âge de 77 ans ; il porte des bottes en cuir couleur safran et un manteau en fourrure évoquant sa prospérité et sa dignité.

Un filet de sang jaillit de la plaie du Christ et retombe en giclant sur la tête du peintre qui nous regarde avec assurance, comme pour nous dire « Me voici, Lucas Cranach, le célèbre artiste-peintre, mais ce que je suis, je le suis à travers l’action du Christ, ce qu’il a fait pour moi ». A sa gauche se tient Martin Luther aux cheveux grisonnants, mort depuis 6 ans, et dont le regard « hors champ » nous échappe. Les deux amis sont réunis pour l’éternité.

(*) Indulgences du latin indulgentia = remise de peine: possibilité d’une rémission totale (indulgence plénière) ou partielle de la peine temporelle due aux pêchés en échange de dons ou d’actes de charité. Luther en dénonça l’esprit de lucre, les bulles pontificales, la portée dans l’au-delà (même les âmes du purgatoire pouvaient en bénéficier) et la fausse sécurité au détriment d’une pénitence authentique.

(**) Princes électeurs : ducs des anciennes nations franques ou prélats formant un collège destiné à élire l’empereur du Saint Empire Romain Germanique (Xe-XVIIIe siècle). Contrairement aux états à pouvoir centralisés (Angleterre, France, Espagne) ce sont des villes, des évêques et des princes qui régnaient en Allemagne et en Italie.

Remerciements au Dr Philippe Rouesnel pour son voyage guidé en Saxe et à Eleonore Garnier pour sa traduction 

Bibliographie




Ultima Laude 2015 IGP Alpilles

Un voyage dans le temps et dans les splendides paysages des Alpilles, voilà ce qu’inspirent les vins de l’abbaye de Pierredon.

Celle-ci fut bâtie au XIIIe siècle par les moines chalaisiens, ordre proche des cisterciens, au cœur d’un immense site protégé sur les flancs sud des Alpilles, où ils menaient une vie de silence et de prières, en pratiquant l’élevage. A la suite de différents conflits, l’institution monacale disparut et le prieuré fut sécularisé, la chapelle restant ouverte au culte. Vers 1800, l’ensemble des bâtiments fut unifié par une belle façade donnant sur une cour fermée par des grilles majestueuses. Une vaste bergerie fut entretenue. Au XXe siècle, la propriété, passée entre différentes mains, tomba en déshérence.

Le domaine fut acquis en 2001 par Lorenzo Pellicioli, grand patron de l’édition italienne qui eût le coup de foudre pour cette vaste étendue de 650 ha de garrigues et vallons boisés qu’il trouve dans une déréliction désolée. Il entreprit des travaux colossaux, pour réhabiliter l’ensemble des bâtiments et les terres alentour, et d’emblée se concentra sur la culture des oliviers, et surtout de la vigne qu’il créa ex nihilo, d’abord selon son inclinaison avec des cépages bordelais, puis méridionaux : rolle pour les blancs, grenache, syrah pour les rouges et rosés. Mr Pellicioli, totalement ignorant de la viticulture, sut s’appuyer sur 2 grands professionnels connaissant parfaitement les ressources et les exigences de la région :
Badigh Maaz à la culture et Antoine Dürrbach, fils du grand Eloi propriétaire du célèbre domaine de Trévallon, à la vinification. Le terroir argilo-calcaire se révèle idéal pour la viticulture, l’ensoleillement important et le vent puissant constituent une protection contre les maladies de la vigne, si bien que la culture biologique avec forte inclination biodynamique s’est imposée naturellement. Mr Maaz a surgreffé des sélections massales d’un pépiniériste réputé, enherbé un rang sur 2 avec de la luzerne, pratiqué sous-solages, labours et griffages. Les traitements biologiques à base de plantes, appliqués sur les pieds des ceps selon les cycles lunaires, sont réduits au minimum. Aucun produit de synthèse, ni désherbant ne sont utilisés. Le terrain calcaire et caillouteux assure un bon drainage, la vigne peut ainsi aller chercher en profondeur l’eau abondante grâce à des sources.

Les vendanges manuelles se font à pleine maturité, de nuit pour certains cépages. Les raisins sont triés à la vigne, seules les plus belles grappes conservées et amenées en douceur dans de petites caissettes de 20 kg au chai.

La cuvée blanche Ultima Laude 100 % rolle est obtenue par pressurage doux direct, fermentation lente à basse température en cuve thermorégulée, en levurage naturel pendant 15 jours. L’élevage en cuve inox, sans aucun passage par le bois, dure 4 à 6 mois. Léger collage à l’argile avant mise en bouteille avec une légère filtration, pour préserver tous les arômes.

C’est par un long chemin caillouteux et poussiéreux bordé d’oliviers, de champs de lavande, de cistes, de romarins, de genêts d’or, de pins d’Alep, surmonté d’énormes rochers calcaires éblouissants, paysage d’une beauté à couper le souffle que l’on accède, après avoir admiré en contrebas le clocher roman de l’abbaye, à un long mas parfaitement intégré dans le décor, équipé d’une cuverie gravitaire et d’un chai, où trônent grands foudres et barriques resplendissants. Les parfums odorants de garrigue, le craquètement des cigales participent à la magie des lieux.

Parée d’une robe jaune topaze pâle claire et cristalline, ce vin blanc de Pierredon « Ultima Laude » (dernière prière du soir), dont la belle étiquette évoque les vitraux du Moyen-Age, embaume dès l’ouverture les parfums de fleur blanche, aubépine, iris, jasmin, les agrumes, pamplemousse rosé, citron confit rehaussés par des touches miellées et anisées. L’attaque, en bouche, est vive, gourmande, fruitée et fraîche grâce à des effluves de cailloux mouillés. Progressivement apparaissent des fragrances typiquement provençales : fenouil, lavande, romarin, amande fraîche. Ce vin complexe et expressif au tranchant d’une épée parfumée déroule une longueur en bouche étonnante.

Ce vin délicieux va magnifier la cuisine méditerranéenne ensoleillée. En apéritif, sa vivacité s’accordera avec tapenade, anchoïade, caviar d’aubergine, puis sa richesse aromatique civilisera et flattera la puissance des traditionnelles bouillabaisse, bourride, aïoli. Les plats marins : tartare de saumon, brouillade d’oursins, saint-jacques dorées à l’épeautre et mousseline de pomme verte, daurade au safran, calmars ou encornets farcis à la marseillaise, l’accueilleront avec plaisir, de même que, dans un registre terrien, une viande blanche : côte de veau aux champignons, volaille sautée à la crème. Cette Ultima Laude enrobera agréablement les fromages de chèvre : le local banon, un bouton de culotte ou une bûchette affinée.

N’hésitez pas à visiter ce domaine et à profiter de ses vins promis à un grand avenir à des prix, pour le moment, fort doux.

L’esprit de Pierredon, si prégnant, lorsqu’on découvre ce site extraordinaire, est parfaitement résumé par Antoine Dürrbach : « respecter la nature, rendre hommage à la beauté des lieux et la retrouver dans nos vins ».

Ultima Laude 2015 IGP Alpilles

Abbaye Sainte-Marie-de-Pierredon – 13210 Saint-Rémy-de-Provence




La réalité augmentée en chirurgie

La réalité augmentée promet de révolutionner les métiers dits « manuels », en particulier dans les environnements complexes ou sensibles. Le secteur de la santé est directement concerné. Et les espoirs sont immenses tant les attentes sont grandes. La révolution n’en est qu’à ses débuts.

C’est début octobre dernier que Microsoft (1) a fait la présentation de la réalité augmentée qui va révolutionner le workflow (2) des chirurgiens au bloc opératoire.

Le principe est plutôt simple…

Le chirurgien, équipé d’une paire de lunettes à réalité augmentée, travaille en 3D sur des images techniquement « projetées » (les éléments étant figés) [voir encadré]. Ces images peuvent être facilement diffusées vers d’autres confrères basés à l’extérieur, que ce soit pour seconder le chirurgien ou partager des expériences ou autres conseils,…

 … et la réalité plus complexe. Jusqu’à maintenant, le chirurgien avait besoin de plusieurs écrans pour visualiser son intervention. Avec les lunettes HoloLens (3), la visualisation se fait uniquement dans le champ de vision du chirurgien contrôlé uniquement par le gestuel et le vocal, ce qui laisse au praticien toute liberté manuelle.

La réalité augmentée permet d’afficher une simulation d’hologrammes et d’orienter en 3D la version native du scanner, en clair de superposer de manière virtuelle un modèle 3D numérique du patient sur la zone d’opération. Cette visualisation étant impossible sur un écran traditionnel.

Toutes les informations sont calculées en temps réel dans le cloud et diffusées jusqu’à l’application HoloPortal, ce qui permet une visualisation extrêmement précise, notamment lors d’interventions micro-invasives. Ce ciblage de très grande précision diminuera notamment les tailles de cicatrices.

La latence entre les gestes du chirurgien et la répercussion à l’écran reste très faible. Un test entre la France et les Etas-Unis a montré un temps de latence de 30 millisecondes.

L’atout de l’information visuelle

Le chirurgien, durant l’opération, a toutes les informations en temps réel et en permanence sur le patient (imagerie, observations, notes, coupes 2D et 3D,…).

L’hologramme inséré en surimpression sur le corps du patient fournit un guide visuel. Poser par exemple un stent sera possible en naviguant en 3D avec une acquisition en fin d’intervention pour vérifier le succès technique de l’opération.

Restent le temps opératoire qui pourrait être amélioré, la 3D n’étant qu’un outil de navigation, une sorte de GPS corporel, qui permettra par la suite de gagner un temps précieux, et le problème du recalage (voir encadré ci-dessous). Il suffit que le patient bouge – même légèrement – pour que tout le système vasculaire se déforme. De fait, les algorythmes et les modèles d’acquisitions doivent donc être extrêmements performants pour recréer au plus vite le modèle 3D.
Pascal Wolff

(1) Usine Digitale

(2) WorkFlow » (traduisez littéralement « flux de travail ») la modélisation et la gestion informatique de l’ensemble des tâches à accomplir et des différents acteurs impliqué dans la réalisation d’un processus métier (aussi appelé processus opérationnel). Le terme de Workflow pourrait donc être traduit en français par Gestion électronique des processus métier. 

(3) Microsoft a présenté pour la première fois les paires de lunettes HoloLens en janvier 2015.

Une première Mondiale

La première intervention d’une implantation d’une prothèse de l’épaule assistée par un casque de réalité augmentée a eu lieu le 5 décembre dernier à l’hôpital Avicenne (Bobigny). Cette opération de « routine » a montré en quoi l’utilisation d’HoloLens est une révolution. Le chirurgien, le docteur Gregory, projette à travers son casque, des modélisations en 3D. IL a ainsi pu visualiser l’image du squelette de l’épaule pour accéder, selon ses termes, à « la partie immergée de l’iceberg ».  Cette opération a été diffusée en direct. Le Dr Gregory était en liaison par Skype avec trois chirurgiens situés aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Corée du Sud qui ont ainsi pu visualiser les actions du chirurgien et lui donner des conseils en temps réel.




Réalité augmentée : le recalage dynamique

Le point crucial de la réalité augmentée reste le recalage du modèle numérique en fonction de la position du patient ou d’éventuels mouvements lors de l’intervention (respiration, déformation des tissus au passage des outils chirurgicaux…).

L’image projetée est réalisée à partir de données collectées lors d’examens préliminaires (radiographie, scanner…). Le chirurgien travaille donc à partir d’éléments « figés ». Si le patient bouge, il faut donc un recalage dynamique, au plus près du temps réel, pour corriger la déformation des éléments. Celui-ci se fait actuellement en moins d’une minute.

Plusieurs pistes sont à l’étude, notamment des acquisitions régulières en 3D mais se pose le problème du taux de rayonnement important ou l’utilisation de l’imagerie par ultrasons.

L’anticipation des gestes est également en cours de recherche car on peut prédire dans une certaine mesure le déformation des éléments du corps suivant les gestes du chirurgien.
Pascal Wolff




La réalité qu’il vous faut 

La réalité virtuelle se définit comme un ensemble qui procure le sentiment de pénétrer dans des univers synthétiques.

La réalité augmentée désigne des interactions entre situation réelle et éléments virtuels. Elles sont rendues possible par un appareil qui va faire office d’unité de calcul et permettre de positionner et suivre les éléments numériques en temps réel.
Pascal Wolff




Production nette d’électricité en France et en Allemagne

En France

Thermique nucléaire : 72,3 %

Thermique fossile : 8,6 %

dont charbon (1,4 %), fioul (0,6 %), gaz (6,6 %)

Hydraulique : 12,0 % (dont renouvelable : 11,1 %)

Éolien : 3,9 %

Photovoltaïque : 1,6 %

Bioénergies : 1,6 % (dont renouvelable : 1,2 %)

Source : RTE

 

En Allemagne

Lignite : 41,0 %

Energie renouvelable : 35,5 %

Gaz : 9,6 %

Charbon : 5,6 %

Déchets non renouvelables : 5,4 %

Pétrole : 2,8 %

Source : Ageb

Pascal Wolff




Muscadet Sèvre-et-Maine Amphibolite 2015

Le muscadet : un petit blanc de comptoir à avaler sur le pouce après s’être protégé l’estomac contre son acidité avec du maalox ? Et bien non ! Un vrai bon vin, auquel, fer de lance d’une nouvelle génération de viticulteurs, Jo Landron, la moustache frémissante dès qu’on dénigre « son » muscadet, a su rendre ses lettres de noblesse.

Muscadet, appellation régionale du Pays Nantais peut être revendiquée par tous les vins locaux produits par un unique cépage, le melon de Bourgogne. Ici, la Loire façonne les paysages, creuse la roche primaire du massif armoricain et dégage des coteaux peu élevés propices à la viticulture, dont une bonne partie est occupée par le muscadet, cépage d’origine bourguignonne, dont le nom s’explique par la pratique des négociants hollandais très actifs en Pays Nantais, fin du Moyen-Age, qui avaient l’habitude d’ajouter au vin des épices, notamment la noix de muscade. Sa résistance au gel lui valut de conquérir les rives de la Loire et de ses affluents lors des terribles hivers de fin XVIIe siècle. Son adaptation aux différents sous-sols de granit, de gneiss, de schiste qui révèlent sa vivacité, sa souplesse ou son onctuosité, assura son succès.

Jo Landron est, depuis 1990, seul aux commandes du domaine familial après avoir travaillé pendant plus de 10 ans avec son père qui avait développé la petite exploitation dès 1945. En 1987, une parcelle de jeunes vignes allait disparaître suite à un empoisonnement par herbicides. Pour les sauver, malgré l’extrême réticence paternelle, il décida d’abandonner les herbicides et pesticides, de labourer, d’aérer le sol et de convertir progressivement l’ensemble du domaine à la culture bio, puis, depuis 2011, à la biodynamie respectant les rythmes cosmiques et les cycles lunaires, car certaines périodes lui semblaient plus favorables au développement de la racine, de la plante et du fruit. Il constata « que le vin s’améliorait en termes de buvabilité, acquérait davantage d’équilibre, de fraîcheur, de spontanéité ».

Actuellement, la propriété s’étend sur 48 ha, dont le principal domaine, la Louveterie, est sis sur les coteaux de la Sèvre. Diverses parcelles ont été isolées, pour mettre en avant la typicité des terroirs en particulier des sous-sols : outre l’Amphibolite, les Houx, sols argilo-sableux et graves sur grès et gneiss, le Fief du Breil ou la Haute Tradition sur orthogneiss et quartz. Cuvée phare de Jo Landron, l’Amphibolite, dont le nom est dû au sous-sol de roches métamorphiques constituées lors de l’effacement de l’océan, et de roches vertes en dégradation, exprime, de ce fait, une minéralité tendue, saline et des saveurs iodées. Les vignes sont âgées de 25 à 45 ans. Le travail extrêmement méticuleux du sol, le respect des règles biodynamiques préparent de beaux raisins sains. La récolte est manuelle. Les grappes entières sont pressurées pneumatiquement, puis débourbées à froid. La fermentation thermorégulée en levurage indigène s’effectue en cuves ciment verrées. L’élevage sur lie, c’est-à-dire sur levures mortes, permettant d’obtenir des vins plus onctueux et plus gras, est cependant réduit à 4 mois, afin de conserver fraîcheur et vivacité. La cuvée est légèrement sulfitée en fin de fermentation alcoolique, pour éviter la malo-lactique. Elle n’est jamais chaptalisée, ce qui explique sa légèreté en alcool. La mise en bouteille, après stabilisation au froid, s’effectue par gravité, sans filtration.

Parée d’une brillante robe jaune pâle, or blanc, cette Amphibolite 2015 dégage des parfums d’algue marine, d’eau de mer, de fruits : agrumes citronnés, pomme verte et de fleur blanche, type chèvrefeuille. L’attaque en bouche, iodée, saline est très précise et tendue témoignant d’un bel équilibre entre fraîcheur et acidité. La minéralité sur la pierre à fusil, la roche mouillée assure une vive persistance. Un léger perlant traduit la présence de gaz carbonique issu naturellement de la fermentation. Ce vin très désaltérant, expressif, énergique, remarquable de pureté et fraîcheur, incroyable de pénétration et tonicité ne peut que réconcilier les détracteurs du muscadet. Contrairement aux cuvées bénéficiant d’un long élevage (jusqu’à 24 mois), ce n’est pas un vin de garde et il est conseillé de le consommer dans l’année.

Le muscadet est un vin de grand large, d’embruns, de pêche et l’Amphibolite, exaltant ses notes salines, iodées, en est l’archétype. Il accompagnera merveilleusement les fruits de mer, en particulier les huitres, et surtout les meilleures, telles les Marennes-Oléron un peu vertes de Gillardeau ou les creuses de pleine mer de Prat-Ar-Coum d’Yvon Madec. Les coquillages : coques, bulots, bigorneaux, les crevettes, tourteaux, langoustines servis nature ou avec une mayonnaise magnifieront ses notes marines. C’est un bon partenaire de plats simples : sardines artisanales en boîte, accompagnées d’un filet d’huile d’olive, de fleur de sel et de pain grillé. Il fera honneur à des maquereaux marinés au vin blanc, une sole tout simplement grillée, une soupe de moule, un carpaccio de thon ou de Saint-Jacques. N’attendez pas le dessert, contre lequel il se heurterait, pour terminer le flacon avec un fromage de chèvre frais, tels chabichou, cabécou ou le local curé nantais au lait cru de vache.

Laissons conclure Jo Landron : « Pour moi, le muscadet doit être l’expression fidèle de son terroir traduit par sa signature minérale. Seuls, le travail au sol et le respect de la vigne permettent d’exprimer la pleine personnalité du cépage ».

Muscadet Sèvre-et-Maine Amphibolite 2015
Domaine Jo Landron – La Haye-Fouassiere

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération




Répartition des sources de lithium dans le monde

Bolivie : 9 Mt,  notamment dans le fameux Salar d’Uyuni sur les hauts plateaux boliviens.

Chili : 7,5 Mt

Argentine : 2,5 Mt

Chine : 2,5 Mt

Etats-Unis : 2,5 Mt

Autres pays : 1,5 Mt

Pascal Wolff

Source : US Geological survey




[3] Etude critique de la mort de la Vierge (suite)

Suite du précédent numéro sur l’analyse de La Mort de la Vierge, un des tableaux majeurs de Caravage. Cette étude repose en grande partie sur le livre de Berne Joffroy paru en 1959 qui reprenait tous les écrits publiés sur l’artiste.

Mia Cinotti, en 1991, dans son livre sur l’artiste, apporta un grand nombre de précisions sur son enfance et son adolescence. Elle récusa l’influence de la science de Galilée sur l’artiste évoqué par Ferdinand da Bologna. Bernard Berenson fin 1950, s’insurgea contre Giovanni Pietro Bellori qui accusait Caravage « d’incapacité picturale totale hors du secours visuel du modèle ». Prenant pour exemple La mort de la Vierge, « […] poursuivi par les Furies […], sa condition était si misérable qu’il devait renoncer non seulement aux modèles mais aussi aux aides d’atelier ». A la suite de l’exposition de 1951 Jean Paulhan fustigeait encore l’artiste : « Ce qui fait l’extraordinaire grossièreté et précisément la goujaterie de Caravage […], c’est qu’il utilise pour mettre en valeur ses souteneurs ou ses saints […] de tous les artifices de la perspective : distribution des noirs et des blancs, ronde-bosse ou le reste ». Pamela Askew, Stéphane Loire et Arnault Brejon De Lavergnée, en 1990 publièrent  une monographie sur La mort de la Vierge. Pamela Askew expliquait les raisons pour lesquelles cette image de la Vierge ne pouvait être acceptée par les Carmes, en la replaçant dans le contexte artistique, littéraire, théologique et spirituel de l’époque. Elle donnait de nouvelles informations sur Laerzio Cherubini. Stéphane Loire et Arnault Brejon De Lavergnée, après avoir retracé l’historique du tableau et l’iconographie du sujet, posaient la question du refus liée aux « inconvenances théologiques », plus qu’à un trop grand réalisme ou à l’impiété du peintre, tout en soulignant l’influence de cette peinture sur l’art français.

Le regard des artistes contemporains surprit l’ambassadeur du duc de Mantoue. Même si Giovani Pietro Bellori traita Caravage de « mauvais peintre », il reconnaissait dans sa biographie que « cette manière de faire [les « véhémentes oppositions de clair et d’obscur »] déchaîna l’enthousiasme des jeunes peintres [qui le] considéraient comme un génie extraordinaire, et le seul vrai imitateur de la nature ». D’un ton presque en désaveu il citait l’opposition des anciens : les « vieux peintres » au contraire « prétendaient qu’il ne savait rien faire, hors de la cave, qu’il ignorait complètement la dignité de l’art, la composition et la science des dégradés ». Il déplorait sa vie agitée qui nuisait à sa peinture, il lui reprochait de négliger les maîtres anciens, d’être incapable par manque d’imagination, de peindre sans modèle, de faire une peinture facile source du succès du caravagisme. Pourtant lorsque Pierre-Paul Rubens découvrit la mise en vente de la mort de la Vierge, il ne cessa d’insister pour que cette « belle œuvre » intégra la magnifique galerie de tableaux du duc de Mantoue. Pietro Faccheti (1535/1539-1619), peintre graveur maniériste né à Mantoue, consulté par Giovanni Magno, approuva ce jugement de valeur. Dans sa lettre du 17 février 1607, il poursuivait, « le peintre compte parmi les plus fameux entre ceux qui ont actuellement exécuté des œuvres à Rome et on tient ce tableau pour l’un des meilleurs qu’il ait faits ». Avant son envoi l’ambassadeur à la demande de la corporation des peintres dut l’exposer pendant une semaine. Le succès fut considérable, « en effet elle a été acclamée pour son mérite exceptionnel ».  Antony Blunt remarqua que la mort de la Vierge peinte par Nicolas Poussin, qui n’aimait pas particulièrement l’art de Caravage, était proche du tableau du Louvre : « […] dans la version de l’artiste italien, la figure principale est placée en diagonale et les apôtres sont groupés derrière le lit d’une manière très semblable à celle que l’on voit dans la composition de Poussin […] ». Il fut gravé pour le recueil Crozat, par Simon Vallée en 1729. A la fin des années 1770, les artistes français présents à Rome, s’intéressent de nouveau à Caravage et ses suiveurs. Jean Charles Nicaise Perrin peignit en 1788 pour la salle capitulaire de l’église des Chartreux de Paris une Mort de la Vierge. L’oblique du corps de Marie sur une simple couche, l’attitude de désolation des apôtres répartis sur plusieurs plans parfois à peine visibles, celui qui essuie ses larmes, cet autre qui lève la tête vers le ciel, la présence de Marie Madeleine, ne sont pas sans rappeler la composition de l’église de San Nicolas della Scala. Au XIXe siècle Antoine Etex, sculpteur et élève d’Ingres, écrivait en 1870 dans ses souvenirs d’un artiste « la mort de la Vierge […] peut donner une idée de la sauvagerie puissante de Caravage »

Avant d’aborder l’iconographie, il faut revenir sur la commande de Laerzo Cherubini. Le contrat signé avec l’artiste spécifiait parfaitement le sujet de la composition, « in quo quidem quadro dipingere similiter promisit mortem sive transitum Beatae Mariae Virginis ». Tout tient au sens donné au terme « transitus beatae Marie Virginis », en italien « transito de la Madona » que l’Eglise latine traduit par « Dormitio ». La Dormition de la Vierge est le sommeil de la mort moment où l’âme de la Vierge rejoint son fils au ciel, « un état singulier du corps en attente de l’Assomption », le Trépassement de Notre-Dame en vieux français. Aucun texte des Écritures ne cite la mort de la Vierge, seuls les écrits apocryphes en firent état. Une brève description se trouve chez le Pseudo-Dionysius, un mystique néoplatonicien qui déclarait avoir assisté à la mort de Marie. Cet écrit, considéré comme historiquement vrai fut repris et amandé par les théologiens. Marie désireuse de revoir son fils, un ange lui annonça qu’elle allait mourir dans les trois jours. Alors que Jean prêchait, « une nuée blanche le souleva et le déposa devant le seuil de la maison de Marie ». Les autres apôtres le rejoignirent. Jacques de Voragine, dans la « Légende Dorée », tenait cette première partie du récit d’un apocryphe du nom de Saint Jean l’Évangéliste. Puis il se référait au texte « Des noms de Dieu » écrit vers 500 ap. J.-C, transcription du Pseudo-Denis. « Or vers la troisième heure de la nuit Jésus arriva avec la légion des anges, la troupe des patriarches, l’armée des martyrs, la cohorte des confesseurs et les chœurs des Vierges […]. Et l’âme de Marie sortit de son corps et s’envola dans le sein de son fils ». Très populaire dans le monde byzantin, le schéma de la représentation de la « Koimésis » de la Vierge υ s’est propagé ensuite à tout l’Occident. Marie, représentée morte étendue sur un lit, est entourée des douze apôtres. Le Christ, au centre du groupe, recueille l’âme de sa mère dans ses bras. Cette image la plus traditionnelle peut faire l’objet de variante. L’art occidental, représenta la Vierge plutôt mourante, son lit n’est plus horizontal mais disposé en biais. Le Christ au-dessus « vole entouré d’une nuée d’anges ». Le plus souvent les apôtres tiennent un livre de prières exprimant peu leur douleur en référence au texte « Prenez garde mes frères à ne point pleurez quand elle sera morte ». Domenico Beccafumi (1484-1551) peignit à fresque ce thème pour l’oratoire San Bernardino à Sienne vers 1518-1520. Un ange écarte les bras pour recueillir le corps de la Vierge en train de passer de vie à trépas, et l’emporter au ciel. Parmi les personnages féminins, Marie Madeleine assise aux pieds du lit de la Vierge tenant la palme des martyrs lève les yeux au ciel. A la demande du pape Clément VIII, Giovanni Baglione (1566-1643) peignit à fresque en 1598-1599 dans l’église Santa Maria dell’Orto une Vie de Marie. Dans La dormition de la Vierge d’inspiration maniériste, les apôtres entourent Marie assise sur son lit. Elle sommeille avant son ascension au ciel. Ces fresques n’étaient pas méconnues de Caravage. Lors de son procès en 1603 le peintre répondit qu’il avait vu « toutes les œuvres de Giovanni Baglione […] ». Ces deux compositions très éloignées de celle de Caravage répondent, au schéma traditionnel de l’iconographie. Certainement il avait aperçu la fresque de Frederico Zuccaro à l’église Saint Trinité des Monts, une citation  scripturale. Marie, enveloppée dans un linceul blanc et étendue obliquement sur un lit sommaire la tête appuyée sur un coussin, semble dormir. Autour les apôtres prient, certains avec de grands livres. L’un d’eux, les yeux grands ouverts, lève la tête vers ciel où le Christ, entouré d’anges, est prêt à accueillir l’âme de sa mère. Certains éléments de cette composition se retrouvent chez Caravage, même si ces deux œuvres sont très différentes.

La mort de la Vierge de l’artiste est à l’encontre de l’iconographie traditionnelle, voire provocatrice. Les apôtres ne devaient pas exprimer leur douleur encore moins pleurer, une attitude inconcevable. Il osait montrer la Madone le visage bouffi, les pieds sales dépassant du lit et le ventre gonflé, étendue sur une couche rudimentaire, une Madone sans dignité, en fait une prostituée qui, selon la rumeur, se noya dans le Tibre. La Vierge morte, le temps se situait au-delà de l’Assomption que rien n’évoque. Absence du surnaturel et du divin, cette scène terrestre du quotidien représente la mort d’une proche qui réunit familles et amis. Tous ces éléments pouvaient expliquer le rejet de la toile par les prêtres de Santa Maria della Scala : « Caravage se laissait emporté par le naturel ». A contrario, Marie Madeleine « la pècheresse repentante » rarement associée à ce sujet répond à la Casa Pia et représente la pénitence. Les apôtres pieds nus rappellent l’ordre des Carmes déchaussés, la pauvreté du lieu se comprend par l’adhésion de l’église à la confrérie de Santa Maria dell’Orazione, chargée des funérailles des pauvres. Le non-respect des textes fut plutôt à l’origine du rejet, beaucoup plus que l’aspect de la Vierge sur lequel insistaient les biographes contemporains. Confortant cette hypothèse les Pères refusèrent également la première composition de Saraceni qui montrait la Vierge assise au milieu des apôtres et levant les yeux au ciel. Ils lui demandèrent d’ajouter « une gloire d’anges » accueillant la Vierge en lien avec l’Assomption. Ainsi il respectait les textes anciens. Raconter qu’il s’agissait d’une prostituée favorisa, aussi, son refus, en effet depuis 1597, l’église « était liée par contrat à la Casa Pia, maison fondée en 1563, pour remettre sur le droit chemin les prostituées et protéger les jeunes filles en danger ».

Cet excès de naturalisme n’est-il pas en accord avec les nouvelles recommandations du Concile de Trente ? Le 3 décembre 1563, jour de la dernière session, les Pères promulguent un Décret sur les saintes images. Johannes Molanus, fervent partisan de la Contre-Réforme, dans son deuxième livre du « Traité des saintes images », abordait les différentes représentations des images sacrées. Il jugeait inconvenant de représenter La mort de la Vierge car morte sans souffrance. Le cardinal Cesare Baronio (1538-1607), proche de Philippe de Néri, dans ses  Annales Ecclesiastici,  insistait également sur la mort naturelle de Marie sans douleur reprochant aux apocryphes leurs sources légendaires. Les théologiens de la Contre-Réforme engageaient les artistes à peindre des compositions compréhensibles par tous, voire de concevoir une représentation actualisée des scènes religieuses avec naturel. Lors de l’exposition de Milan en 1951, Roberto Longhi invitait les visiteurs de l’exposition « à lire naturellement, un peintre qui a cherché à être naturel et compréhensible plutôt qu’humaniste, et, en un mot, populaire ». Cela ne veut pas dire dénué de spiritualité. Les commanditaires privés propriétaires de chapelles et certains hauts prélats reconnaissaient le message spirituel de sa peinture. Un message au premier abord « ni tout à fait sacré ni tout à fait profane » difficile à décrypter. « Autrement dit des sujets qui traitent de l’irruption du sacré dans le monde profane et son caractère éventuellement non reconnaissable pour qui ne reçoit pas la foi ». Le tableau de Caravage dissimulant son contenu se voulait « un exercice spirituel » invitant le spectateur à s’interroger, à comprendre l’image, une demande de la Contre-Réforme. La mort pour le christianisme est un sommeil dans l’attente de la résurrection. Après le concile de Trente, l’image devait montrer le caractère réel des faits. La représentation de la mort de la Vierge signifie obligatoirement que son Assomption a eu lieu. « Nulle manière d’exprimer mieux le mystère […] qui se déroule sous nos yeux et à l’insu des apôtres abîmés dans leur douleur ». La lumière identifiée aujourd’hui à la grâce divine enveloppe le corps de Marie pour le porter au ciel. Lionello Venturi qualifia La mort de la Vierge de tableau « le plus profondément religieux de la peinture italienne du XVIIe siècle ».

Desservi par sa conduite loin d’être irréprochable, Caravage, adulé par les uns, banni par les autres, fut à son époque à l’origine d’une peinture déroutante. La comprendre nécessite de l’étudier en fonction des recommandations émises par les théologiens de la Contre-Réforme sur la manière de représenter les œuvres d’art. La mort de La Vierge, une de ses plus belles œuvres, en est l’un des meilleurs exemples. A l’origine de controverses parfois injurieuses, cette peinture du naturel, voire éminemment « réaliste », devait aider le peuple peu instruit à comprendre le mystère de l’Assomption et à s’interroger sur l’au-delà de la mort. Installés dans le quartier pauvre du Transtevere, les Carmes avaient souhaité une image explicite illustrant les anciens textes légendaires connus par tous. L’œuvre de Caravage, trop érudite, pouvait difficilement être comprise par cette population à qui elle était pourtant destinée.

 

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