Prenez rendez-vous… Avec vous !

Une fois n’est pas coutume, commençons par  parler de l’auteur, certes bien connu de la plupart d’entre nous, mais pas forcément sous toutes ses facettes.

Alain Ducardonnet est médecin ! C’est primordial, à n’en pas douter, car « seul un vrai médecin pouvait écrire ces pages » ; c’est en tout cas ce qu’affirme Jean-Christophe Rufin, de l’Académie française et médecin lui aussi, qui a joliment préfacé ce livre. Mais Alain Ducardonnet, c’est bien d’autres choses : d’abord il ressemble à Harrison Ford et ce doit être important, car le même Dr Rufin s’empresse de le souligner au début de sa préface, tout comme l’auteur, qui l’évoque dès son premier chapitre !

Plus sérieusement, Alain Ducardonnet a beaucoup de cordes à son arc : cardiologue, il s’est spécialisé dans la cardiologie du sport, il a d’ailleurs, avec d’autres, fondé le Club des cardiologues du sport, dont il fut le premier président et a été médecin du tour de France pendant onze années ; il fut également Président du Collège National des Cardiologues Français dont il reste administrateur. 

Mais c’est pour d’autres raisons qu’il est connu du grand public : Alain Ducardonnet s’est assez vite orienté vers le journalisme médical, à la radio d’abord, à Europe 1, puis à la télévision, LCI, TF1 et maintenant BFM-TV dont il est le consultant-santé. Joli palmarès à n’en pas douter, complété par la page santé du Parisien Week-end qu’il tient depuis cinq ans, et par le prix Escoffier-Lambiotte, reçu en 2019.

Après un riche préambule qui nous éclaire de façon sympathique sur son propre parcours, l’auteur nous entraine vers dix rendez-vous qui proposent au lecteur de faire le point sur lui-même et l’incite à « repenser son mode de vie pour devenir l’acteur principal de sa santé ».

Notons au passage qu’il n’aime pas le terme de « médecines alternatives », ambigu et contre-productif selon lui, car semblant s’opposer à la médecine conventionnelle, lui préférant de beaucoup la notion de médecine intégrative…

Celle-ci, apparue dans les années 1990 aux Etats-Unis, peut également s’appeler « médecine de santé », qui cherche, en gros, à rassembler médecine conventionnelle, médecine des modes de vie et médecines complémentaires validées.

Prendre rendez-vous avec soi, c’est se garder du temps dans son agenda ; pour en faire quoi ? C’est ce qu’Alain Ducardonnet nous propose de découvrir avec ces dix rendez-vous qu’il veut incontournables, qui nous invitent à faire le point sur nous-mêmes en repensant notre mode de vie.

De tous ces rendez-vous, le stress, le sommeil, le tabac, j’en passe évidemment, j’en retiens plus particulièrement deux, sans doute un peu plus « ludiques » que les autres tout aussi primordiaux : la nutrition et l’activité physique.

La nutrition est probablement « la » préoccupation principale de tout individu qui s’intéresse à sa santé ; l’auteur s’attache à développer ce thème avec beaucoup de précision et de sérieux, colligeant toutes les données validées, les types de comportements, démontant au passage ces régimes amaigrissants qui…font grossir, pour préciser les sept points de repère à garder en tête pour équilibrer son alimentation sans se prendre la tête ni perdre sa joie de vivre. 

L’activité physique et sportive est, on le sait, le domaine de prédilection de l’auteur, particulièrement enthousiaste sur ces pratiques dont les bienfaits n’en finissent pas d’être démontrés par d’innombrables études. Au passage, il prend le soin de bien expliquer la différence entre sport et activité physique, cette dernière ayant largement prouvé son bénéfice, alors que le sport est salutaire… si sa pratique est adaptée.

Tout au long de l’ouvrage, à l’aide de quiz-santé, de conseils et de pratiques simples, Alain Ducardonnet invite le lecteur à gommer ses mauvaises habitudes pour en adopter d’autres, bénéfiques pour sa santé.

Ce livre, clair, didactique et très complet, est à recommander largement à tous les sujets  qui s’intéressent à leur santé, patients ou (j’allais dire surtout) bien portants, comme aux professionnels de santé désireux d’apporter à leur patientèle des préceptes qui vont au-delà de la médecine dite conventionnelle.




Sangue d’Oro 2008 – Passito Pantelleria

Un des rares avantages du confinement fut qu’il a (re)donné aux français le temps et le goût de cuisiner, incités, il faut le dire, par les multiples émissions de télévision et articles de journaux consacrés à la gastronomie. C’était également un excellent prétexte, pour chercher le vin idéal à marier avec les plats réalisés.

C’est ainsi que mon épouse m’a régalé avec un délicieux tiramisu selon une recette du chef Massimo Mori (Mori Venice Bar) parue dans le Figaro. Mais pour accompagner ce dessert composé d’œuf, sucre, mascarpone, liqueur, génoise, biscuit, café froid, crème, cacao riche en matières grasses, opulent à force de sucre et de saveurs, le choix d’un vin, à l’évidence moelleux, à la fois sucré et un peu acide, s’avérait ardu. Heureusement, le chef indiquait 2 pistes, soit un marsala, vin sicilien doux, soit un passito de Pantelleria. J’ai déniché, au fond de ma cave, une petite merveille qui allait permettre un accord somptueux : ma dernière bouteille de vin de Pantelleria de Carole Bouquet.

Produire un grand vin

Et oui ! La vedette de cinéma, ex James Bond girl, héroïne de Bunuel, est devenue une vigneronne presque à temps complet après être tombée amoureuse de la petite île  italienne de Pantelleria, au large de la Sicile, à 70 km des côtes tunisiennes, aux sombres pentes escarpées, fouettées par les vents, sous un soleil de plomb qui semble immuable. Venue en villégiature, elle décide de s’y installer en 2002 dans un mas délabré, sans eau, ni électricité, et de ressusciter ses terres laissées à l’abandon : oliviers, câpriers, et surtout vignoble pour produire un nectar liquoreux appelé là-bas passito. D’un ha, elle passera à 10 en rachetant progressivement les parcelles de 70 paysans. Après avoir vinifié chez un voisin, elle fera construire un chai doté de toute la technologie moderne. Il lui en faudra de l’opiniâtreté et des efforts physiques, pour arriver à son but : produire un grand vin.

Le sol du vignoble à 500 m d’altitude est composé de 70 % de terres volcaniques pierreuses avec d’énormes rochers parmi les ceps, et de 30 % d’argiles et de limons. Les vignes, plantées du seul cépage de l’île le Zibibbo (en fait, du muscat d’Alexandrie), sont entourées de murets en pierres sèches disposées en terrasses, pour les protéger des vents tempétueux. Il est impossible d’y faire passer un animal de trait, et encore moins un engin mécanique, si bien que tout le travail doit être manuel. 

Les raisins, récoltés à maturité optimale, soigneusement triés, sont ensuite posés sur des claies à même le sol, pour être séchés naturellement par le soleil pendant 3 semaines selon la technique du passerillage et s’imprégner de tous les parfums environnants : figues, fenouil, câpres… 

Le but est de faire perdre au raisin son volume en eau, pour le concentrer en sucre, ce qui nécessite 3 fois plus de raisin pour produire un passito qu’un vin classique. Après fermentation alcoolique, le vin est élevé en fût pendant 24 mois, puis 1 an supplémentaire en bouteille. 

A l’évidence, ce vignoble n’est pas un caprice de star, et Carole Bouquet, bien aidée par le vigneron Nunzio et l’oenologue Lanati, s’investit pleinement veillant à y séjourner le plus souvent possible et assurant la commercialisation de son vin (12 à 15 000 bouteilles seulement) aux 4 coins du monde.

Une formidable complexité aromatique

Habillé d’une robe orangée foncée tirant sur le cognac et l’acajou, ce passito de Pantelleria 2008 déploie une formidable complexité aromatique : bergamote, cédrat confit, abricot sec, miel de fleur d’oranger, cire d’abeille, fruits secs : datte, figue, amande, safran ! Le palais est littéralement nappé par la douceur et la suavité de ce vin. Un savoureux équilibre entre sucre, acidité et alcool, si important dans l’harmonie des vins liquoreux, préserve beaucoup de fraîcheur et une bonne digestibilité, sans tomber dans la lourdeur. La parfaite gestion de la matière et de l’onctuosité, l’ampleur en bouche lui procurent une persistance incroyable. Le sangue d’oro de Carole Bouquet, comme son nom l’indique, est sanguinaire, puissant, voluptueux, il représente le fruit, le sang de la terre, sa lumière dorée, les couleurs rouge et jaune de la Sicile.

Ce passito 2008 est un dessert à lui tout seul et, en fait, un vin de méditation que l’on peut déguster, grâce à la concordance des arômes, avec quelques fruits : dattes, figues.

Outre le mariage magnifique réalisé avec le tiramisu, les accords avec de nombreux desserts s’avèrent onctueux, sensuels : logiquement, les savoureuses pâtisseries siciliennes : gâteau à la pâte d’amande, cannoli, cassata siciliana, pignolata au miel, frutta martorana, ou des préparations plus élaborées : financier aux amandes, panacotta au safran et biscuits à la cannelle. 

Si on veut terminer le repas sur une note plus légère, la fraîcheur du vin accompagnera une soupe de pêches au moscato d’Asti ou une tarte aux fraises. La rencontre d’un millésime plus jeune que le 2008 avec un pigeon ou un canard aux épices et foie gras pourrait s’avérer surprenante, voire sublime.

Carole Bouquet aime boire son vin avec des fromages à pâte persillée : roquefort, bleu de termignon, stilton, gorgonzola,voire un simple morceau de parmesan.

Laissons conclure l’actrice devenue vigneronne : « ce vin, c’est ma manière d’être italienne. A travers ce terroir, j’ai l’impression de transmettre la luxuriance et la beauté du sud, cette lumière retrouvée dans la robe ensoleillée du vin, l’expression liquide d’une culture, d’un pays, d’une terre ».

Carole Bouquet. Ile de Pantelleria – Italie




Chiroubles Chatenay 2018 – Beaujolais

Démarche iconoclaste, j’ai dérogé à la tradition familiale plus que cinquantenaire de se fournir en Beaujolais auprès de Rémi Benon (voir Le Cardiologue n°340) en rendant visite au domaine Daniel Bouland. Je dois d’emblée avouer avoir été conquis.

Ce vigneron est installé dans le hameau de Corcelette, siège de l’un des meilleurs terroirs du cru Morgon. Il possède 8 ha, exclusivement plantés en gamay, hérités des vieilles vignes de ses aïeux. D. Bouland représente le vigneron artisanal caricatural du Beaujolais. Il travaille seul (en dehors de quelques saisonniers) dans son vignoble, dont la majeure partie est constituée de vieilles vignes taillées en gobelet, pour certaines centenaires. Ses jeunes parcelles ont été plantées avec des sélections massales de ses ceps les plus anciens. Le vigneron accomplit un travail de titan dans ses vignes, dont beaucoup, très pentues, ne peuvent être traitées que manuellement. Sa science de la taille et de l’ébourgeonnage est remarquable. S’il reste en conventionnel, il n’en limite pas moins les apports chimiques autant que possible. Il utilise des herbicides, car il ne peut laisser pousser l’herbe sur les déclivités très importantes. Les rendements sont naturellement maîtrisés aux alentours de 50 hl/ha par l’âge des vignes. La vendange est évidemment manuelle (obligatoire dans l’AOC) avec des tris méticuleux.

Des cuvées remarquables

Le travail à la cave est, à la fois, simple et particulièrement soigneux. Les cuvées sont toutes vinifiées de la même manière en vendanges entières. Seul, le contenant d’élevage change. Les vins fermentent uniquement en levures indigènes en semi-carbonique selon la méthode beaujolaise traditionnelle. Les macérations durent 10 à 12 jours avec un remontage matin et soir, un pigeage en fin de fermentation. Les vins sont ensuite élevés en cuve inox et en foudre pendant 6 à 9 mois. Daniel favorise la présence de gaz, pour protéger ses vins pendant l’élevage et limiter la quantité de soufre ajouté. Les vins sont soutirés
15 jours avant la mise avec 2 objectifs : ôter le gaz et éliminer la réduction. Les vins sont soufrés à la vendange, puis après malo-lactique, ajustement si besoin à l’embouteillage, sans filtration. Daniel passe beaucoup de temps à la cave comme à la vigne à tous les stades de la vinification, goûte beaucoup et est très attentif à toute évolution n’hésitant pas à multiplier les analyses.

Lors de ma visite, j’ai rencontré un vigneron d’abord peu disert, très anxieux sur son travail et sur le jugement qu’on pourrait y apporter, mais qui se révèle progressivement très sympathique. J’ai goûté de nombreuses cuvées qui me sont toutes apparues remarquables : Côte de Brouilly corsé très aromatique, Morgon impressionnant de richesse, de puissance et pour tout dire envoûtant, mais qui, compte tenu du jeune millésime 2018, restent encore très austères et taniques, nécessitant une garde d’au moins 4 ans. C’est pourquoi je vous propose de déguster son Chiroubles, car cette appellation produit des vins fruités, élégants à boire dès leur prime jeunesse.

Un véritable mur impossible à labourer

Chiroubles, perché à plus de 400 m, est le plus haut des crus du Beaujolais sur un sol de gore (sable granitique peu épais). D. Bouland possède 70 ares en pentes très fortes, un véritable mur, dit-il, impossible à labourer, travaillé exclusivement à la main, traité à l’atomiseur pour contenir l’enherbement. A noter un élevage en cuves fibres, afin de tirer un maximum de fruité en évitant tout apport de bois.

Paré d’une robe pourpre claire aux brillants reflets violines, ce Chiroubles Chatenay du millésime solaire 2018 est une petite merveille d’équilibre et de friandise. Des arômes de fleurs : violette, pivoine, de fruits rouges acidulés : fraise des bois, framboise, cerise burlat, de légères notes de cassis et de prune rouge envahissent le nez et tapissent le palais. Avec cette « patte » de D. Bouland, le vin délivre immédiatement une impression tellement gourmande avec le juste équilibre qui en fait le modèle de Chiroubles. La bouche juteuse, pulpeuse révèle des saveurs très fruitées, d’aériens tanins veloutés. La finale, bien portée par une fine trame acide, reste énergique, croquante et salivante.

Des vins de copains

Les Beaujolais à boire frais et jeunes, tel ce Chiroubles, sont des vins d’ambiance, de copains. Ils escortent gaillardement les mets rustiques et en premier lieu, proximité régionale oblige, les lyonnaiseries de toutes sortes : les saucissons secs : jésus et rosette, les jambons crus, salés ou persillés, les pâtés divers, les terrines, notamment au lapereau ou au foie de volaille. Les classiques de la cuisine lyonnaise seront flattés par sa fraîcheur et son fruité qui équilibrent le gras des plats : tablier de sapeur, sabodet à la vigneronne, gras-double, pied de porc, choux farcis aux épices, andouillette grillée pommes pont-neuf. Un pigeon ou une pintade rôtie, un petit salé aux lentilles, un rôti ou un travers de porc à l’aigre-doux s’accommoderont parfaitement de l’exubérance des parfums de ce Chiroubles qui, de façon plus étonnante, se mariera parfaitement avec un saumon à l’oseille. En fin de repas, le gras d’un reblochon, d’un vacherin crémeux seront équilibrés par la fraîcheur du vin.

Laissons conclure le « gourou » Robert Parker : « Vins succulents… Daniel Bouland offre une interprétation particulièrement gourmande, une concentration fine et une longue finale qui font claquer les lèvres ». Et en terme d’offre, le rapport qualité-prix (10 euros) s’avère exceptionnel.

Daniel Bouland Corcelette
69910 Villie-Morgon




Les 50 ans d’internet – 4e partie

Notre dernière partie des 50 ans d’internet est consacrée à la tech-santé. Si la venue de l’informatique a développé le domaine de la Santé, l’introduction ces dernières années de l’IA, de la RA, (1) du machine learning et des datas données a considérablement changé la gestion de tous les secteurs de la santé. En ce début d’année 2020, un autre paramètre est venu bouleverser l’e-santé : la pandémie liée au coronavirus et les répercussions qu’elle générera.

L’ère de la santé

Amorcée dans les années 1970, l’ère de l’informatique et du numérique a permis le développement des recherches clinique et technologique (logiciels, matériels, numérisation des premiers projets de dossiers patients).

Comme tous les domaines, la santé est aujourd’hui largement influencée par le web : hôpital numérique (développement et modernisation des Systèmes d’Information Hospitaliers [SIH]), patients-acteurs de leur santé, télémédecine, suivis des traitements, dossiers médicaux, objets connectés, applications santé… les sujets sont nombreux. 

La conjugaison de la santé et du numérique offre des perspectives sans limites. 

Il est aussi sujet à des malversations comme le hacking, les fake-news, les stalkers ou le vol d’informations ou de données.

Les domaines de l’e-santé

  • La télémédecine. C’est le domaine de la téléconsultation, de la téléexpertise, de la télésurveillance, de la téléassistance et de la régulation médicale.
  • Les systèmes d’information en santé. Systèmes d’Information Hospitaliers, dossier patient informatisé, information partagée…
  • La télésanté. Services de suivi et de prévention avec objets connectés, applications mobiles, plateformes web.
  • La m-santé. Applications mobiles ou web, objets connectés, communautés de patients, portails d’information de santé.
  • Les dispositifs de soins. Systèmes d’Information Hospitaliers (SIH) internes, systèmes d’information partagés, systèmes d’information embarqués, dispositifs de télémédecine.
  • Les données. Dispositifs de collecte et de stockage des données, traitement algorithmique de données massives. Nous sommes ici à l’épicentre de l’e-santé. Et les acteurs y sont nombreux ! Les Gafam en tête s’y sont lancés il y a déjà plusieurs années afin d’imposer leur prise de pouvoir, car tout le futur de la médecine se trouve ici (voir Le Cardiologue 419). Il faut dire que ce marché mondial du numérique est estimé à plus de 230 milliards de dollars d’ici à trois ans, (2) ce qui a de quoi aiguiser les appétits !

En raison de leurs puissances financières, le développement du marché de la e-santé ne peut se faire sans les Gafam, même si leurs interventions diffèrent. Microsoft et Facebook, par exemple, se positionnent sur les données. Google travaille sur des projets d’Intelligence Artificielle (IA) et Apple continue le développement de l’Apple Watch permettant notamment de réaliser un électrocardiogramme directement depuis le poignet (voir Le Cardiologue 429).

Des entreprises françaises telles Withings, La Poste, Orange ou de nombreuses start-up y portent également leurs ambitions, tant dans le big data que le développement des technologies issues de données. 

Ces données sont également le domaine des technologies d’intelligence artificielle, de la réalité augmentée (chirurgie notamment et le recalage dynamique) ainsi que du machine learning qui donne la faculté à un ordinateur d’améliorer ses performances afin de résoudre des tâches sans avoir été programmé.

  • La Healthtech. L’avenir est dans l’IA, ou Intelligence Artificielle, qui est un ensemble technologique (neurobiologie computationnelle, logique mathématique et informatique) capable de simuler l’apprentissage et/ou le raisonnement. Elle devrait être complètement mature d’ici 2030. (3)

Elle s’est essentiellement développée dans les secteurs de l’imagerie, du diagnostic, du développement de médicaments et du traitement des données médicales, indispensable aux besoins de traitement algorithmique.

La stratégie politique

Mais rien ne pourrait fonctionner si les pouvoirs politiques ne mettaient pas en place des stratégies innovantes. C’est Marisol Touraine qui a présenté en 2016 la stratégie nationale e-santé 2020, s’articulant autour de quatre axes (4) :

  • développement de la médecine connectée à travers un plan « big data » en santé. Ce plan permettra par exemple la mise au point de nouvelles applications de suivi à distance ou d’interprétation des données médicales pour assister les médecins dans leurs diagnostics ;
  • encouragement de la co-innovation entre professionnels de santé, citoyens et acteurs économiques par le lancement d’appels à projets dédiés à l’e-santé ou le développement de living labs (5) afin d’imaginer, en lien direct avec les utilisateurs, la médecine de demain ;
  • simplification des démarches administratives des patients (admission, prise de rendez-vous en ligne, etc.) et outiller la démocratie sanitaire à l’aide d’une plateforme numérique facilitant la consultation et la participation des usagers ;
  • renforcement de la sécurité des systèmes d’information en santé grâce à un plan d’action dédié.

Cette orientation politique devrait permettre à la France de rester à la pointe en matière d’innovation et « d’entrer pleinement dans l’ère de la médecine digitale ». Agnès Buzyn a continué ce mouvement avec la création d’une délégation ministérielle du numérique en santé, de l’Agence du Numérique en Santé et du Conseil numérique en Santé.

Hacker, fake-news et désinformation

Mais ces évolutions de la healthtech vont de pair avec les questions essentielles de sécurité et un besoin conséquent de compétences et d’outils dans le domaine de la cybersécurité appliqués à l’e-santé.

C’est un secteur sensible par les données qu’elle génère et l’économie qu’elle suggère. 

Les fake-news ou désinformation

Comme tout secteur d’activité, les désinformations ou fake-news sont nombreuses en Santé et les exemples ne manquent pas : « piquer les doigts et les oreilles d’une personne pendant une crise cardiaque peut lui sauver la vie », « l’eau salée peut guérir d’Ebola »… Lors de la déclaration de l’état d’urgence sanitaire de la pandémie du Covid-19, des retweets de comptes de différents pays sont soudainement apparus afin de contribuer à une désinformation organisée pour nuire à la politique et aux systèmes de santé des pays concernés.

Les hackers ou cyberattaques

Faux e-mails, fausses notes internes ou fausses alertes, l’inspiration des hackers est sans limites. Lors de l’épidémie du Covid-19, les spécialistes n’avaient jamais vu autant de campagnes de spams d’une telle ampleur (Google bloque chaque jour 18 millions de tentatives d’arnaque). Même l’OMS s’en était émue. Les cybercriminels ont surfé sur la peur. C’est d’ailleurs en partant de ce constat qu’un collectif international de 400 experts a été créé afin de lutter contre les piratages des institutions situées en première ligne face à la pandémie.   

Ces attaques, pour certaines, auraient pu avoir des conséquences redoutables. Les serveurs de l’AP-HP, par exemple, ont subi une attaque par déni de services (DDos) au cours de laquelle, brutalement surchargés de requêtes inutiles, ils ont été noyés et rendus inaccessibles. Le département américain de la santé et des services sociaux a également subi une cyber-attaque orchestrée pour ralentir les systèmes informatiques et déstabiliser l’institution. Le site de la Sécurité sociale italienne visé par des pirates a dû fermer alors même que les demandes d’aides liées au Covid-19 s’accumulaient. Plus récemment, les hôpitaux tchèques ont subi une tentative d’attaque, bloquée avec succès.

Covid-19 : Le retournement de situation

La crise sanitaire actuelle pourrait changer le cours de l’histoire de la healthtech. Des appels à projets sont lancés pour désengorger le système de soins avec des solutions concrètes (information, soins à domicile, suivi des patients, prise en charge médicale, etc.). [6]

Dans un autre registre, un groupe de médecins plaide pour le recours à l’IA via la méthode CovidIA (7) qui mettrait « en œuvre des modèles d’intelligence artificielle à partir d’hypothèses de départ sur la maladie et de résultats de tests combinés à des données issues de la géolocalisation, de manière contrôlée, anonyme et agrégée ».

Dans le Grand Est, le nombre de téléconsultations multiplié par cinq interroge pour la suite à donner à cet élan informatique, notamment pour des patients suivis régulièrement, certains médecins se demandant si une partie de leur activité n’allait pas devenir de la téléconsultation.

Cette mobilisation a fait ressortir l’illettrisme et les difficultés qu’ont un certain nombre de Français à accéder aux réseaux ou simplement à un ordinateur.

La « facilitation » numérique

Ces difficultés d’accès au numérique ne doivent pas faire oublier qu’envoyer un e-mail ou télécharger une attestation n’est pas donné à tout le monde. Une tranche importante de la population française (21 % selon une enquête de l’Insee en 2019) manque d’équipement informatique, a des difficultés d’usage ou se trouve en zone blanche. Cette situation actuelle a [enfin] poussé le gouvernement à raccorder tout le pays en très haut débit d’ici deux ans.

Conclusion

L’e-santé, qui s’est bâti avec une agrégation de technologies, connaît un développement exponentiel dû à la transition digitale et aux innovations. Reste une nécessaire mobilisation de tous les acteurs pour qu’une coordination des actions et de la recherche de synergies soit la plus efficace possible dans l’intérêt des patients, des médecins et de tous les acteurs liés à l’exercice de la Santé.

Pascal Wolff

(1) IA : Intelligence Artificielle – RA :  Réalité Augmentée
(2) bpifrance.fr
(3) bpifrance.fr
(4) Document du ministère de la santé à télécharger sur notre site au format pdf.
(5) Le living lab est une méthodologie où citoyens, habitants, usagers sont considérés comme des acteurs clés des processus de recherche et d’innovation.
(6) coalitioncovid.org
(7) reseau-healthtech.fr




La Présentation de Jésus au Temple – Une histoire de famille. 2e partie

La carrière du peintre vénitien Giovanni Bellini (v.1433-1516) fut longue et admirable, faisant de lui l’un des plus grands maîtres de la peinture occidentale auprès duquel se formeront des artistes prestigieux tels que Giorgione (1478-1510), Sebastiano del Piombo (v.1485-1547) et Titien (v.1485-1576).

Au début de sa carrière, Giovanni Bellini a pu s’inspirer de la peinture de son beau-frère Andrea Mantegna né près de Padoue mais « il en atténua le réalisme cru par une plus grande douceur et un chromatisme d’une transparence lumineuse ». Avec lui commence « la peinture vénitienne des temps nouveaux ». La carrière d’Andrea Mantegna (v.1431-1506) fut également remarquable bien que moins prestigieuse. Le thème de La Présentation de Jésus au Temple nous donne l’opportunité de faire connaissance des liens familiaux et artistiques qui unissaient ces deux peintres exerçant alors leur art bien souvent en famille, à l’instar d’autres familles vénitiennes telles que les Vivarini puis les Tiepolo, contrairement aux peintres florentins plus individualistes. Il nous est permis ainsi d’étudier les influences réciproques à une période qui voit s’exprimer à Venise des artistes hors du commun qui vont grandement contribuer à l’Histoire de l’Art européen.

Giovanni Bellini. La Présentation de Jésus au Temple. Vers 1470. Huile sur bois. 80×105 cm. Galerie Querini-Stampalia, Venise

A quelques années d’intervalle, Andrea Mantegna puis Giovanni Bellini firent deux peintures sur le même thème, La Présentation de Jésus au Temple mais ce n’est pas pour autant que les deux versions sont similaires, à commencer par l’aspect technique puisque Mantegna utilise une peinture a tempera dite aussi  à la détrempe  où les pigments sont délayés dans de l’eau avec un liant, en l’occurrence de l’œuf et sur une toile (canevas) alors que Bellini utilise une peinture à l’huile sur panneau [3]. C’est à Padoue que Mantegna a pu admirer les fresques de Giotto (v.1267-1337) dans la Chapelle des Scrovegni [5,8] avec, entres autres, deux « Présentation au Temple », d’abord celle de la jeune Marie accueillie par le grand prêtre Siméon qui est (déjà) âgé comme en témoigne « sa barbe grise flottante » et que nous retrouvons, tel qu’en lui-même, avec le petit Jésus c’est-à-dire une génération plus tard mais il est vrai que l’Esprit Saint l’avait informé qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Messie du Seigneur. Ainsi, lorsqu’il vit le petit Jésus il s’empressa de dire : « nunc dimittis » (maintenant je peux partir), «Maintenant, ô Maître, tu peux, selon ta parole, laisser ton serviteur s’en aller en paix ». A l’étonnement des parents il rétorque : « Vois, ton fils qui est là provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de division, et ton cœur sera transpercé par une épée ». Giotto nous montre, d’une composition à l’autre, deux points de vue différents du Temple avec ou non les colonnes torses dites salomoniques ; les personnages sacrés ont une auréole dorée de façon pleine et entière alors qu’elle se résume à un liseré doré chez Mantegna pour disparaître complètement chez Bellini, les protagonistes devenant alors plus humains avec « des expressions moins violentes, des couleurs plus intenses, des ombres plus subtiles » alors même que le cadre de marbre de Mantegna se résume chez Bellini à un simple parapet pendant que les personnages latéraux passent de deux à quatre. Giotto nous montre un Enfant Jésus richement vêtu, libre de ses mouvements puisqu’il tend son bras droit vers sa mère qui vient de le confier à Siméon, alors que nos deux peintres du XVe siècle nous le montrent strictement emmailloté dans des langes qui entravent ses mouvements et préfigurent son futur linceul. L’Enfant se tient debout sur un coussin, étroitement tenu par sa mère, dans un geste prémonitoire et qui appréhende de le confier au vieux prêtre ; la Vierge appuie son coude droit sur le rebord de marbre, symbole de la tombe ; chez Mantegna l’Enfant Jésus pleure. On est bien loin de la composition de Giotto avec le couple de tourterelles que tient Joseph, la prophétesse Anne avec son rouleau de prophéties et au-dessus de laquelle virevolte un ange. 

Autoportrait présumé de Giovanni Bellini. La Présentation de Jésus au Temple (détail).

Le tableau de Mantegna a pu être peint en 1453, l’année de son mariage avec Nicolosia, ou l’année suivante pour commémorer la naissance de leur fils ; le rendu des détails y est remarquable avec les broderies des vêtements et la « barbe fleurie » du patriarche biblique. La scène est « théâtrale » au sein d’un cadre fermé alors que la version de Bellini faite probablement vers 1470 à partir d’un même dessin (comme en témoigne en particulier la superposition quasi parfaite des représentations de la Vierge et de l’Enfant), est plus familiale, moins formelle puisque les personnages vêtus plus simplement ont en grande partie perdu leur caractère sacré avec la suppression des auréoles. Chez Bellini, les protagonistes que sont Siméon de profil et Joseph vu de face (peut-être Jacopo) sont moins sévères, la Vierge restant immuable d’une version à l’autre, toute à son inquiétude maternelle de devoir confier ce jeune enfant à ce vieux prêtre à la « sainteté rébarbative » surtout chez Mantegna qui nous montre deux personnages latéraux ; le garçon bouclé à droite est considéré comme un autoportrait du peintre qui a alors 23 ans et on admet que la jeune femme à gauche, bien trop jeune pour être la prophétesse Anne décrite par Saint Luc comme ayant 84 ans, est Nicolosia qui, avec son regard hors champ, semble se désintéresser totalement de ce qui est en train de se passer. La version de Bellini, plus longue avec son parapet qui n’en finit pas, a incité le peintre à rajouter deux autres personnages latéraux qu’il semble hasardeux de vouloir identifier ; à droite on voit deux jeunes hommes dont l’un nous regarde avec acuité ; il pourrait s’agir de Giovanni Bellini (*) alors que l’autre pourrait être Gentile (?) car il ne s’agit manifestement plus d’Andréa tel que l’autoportrait nous l’avait montré dès lors que les traits du visage sont très différents. A gauche se situent deux femmes qui pourraient être l’épouse de Giovanni, Ginevra, et Anna, non pas la prophétesse mais l’épouse de Jacopo Bellini (?) avec toute l’ambiguïté qui peut s’y rapporter si l’on se souvient de la filiation de Giovanni. Quoi qu’il en soit et à l’instar de la présumée Nicolosia peinte par Mantegna, la jeune femme de gauche semble bien peu concernée par la scène en cours au même titre que le jeune homme en arrière-plan à droite semble clairement préoccupé par autre chose. Reste à savoir ce qui incita Giovanni Bellini à faire ce tableau après un tel laps de temps ? En tous les cas, la peinture de Bellini propose un autre rythme avec des différences substantielles telles que l’adjonction de deux personnages et des modifications chromatiques en privilégiant une alternance de blancs et de rouges plutôt que le clair-obscur et les remarquables détails de la version de Mantegna.

Giotto (Giotto di Bondone v.1267-1337) La Présentation de Jésus au Temple. Chapelle des Scrovegni entre 1303 et 1306 – Padoue.

Bibliographie (parties 1 et 2)

  1. Gentili A. Le Cadre historique de la peinture vénitienne de 1450 à 1515. Profils (diversement) perdus : Andrea Mantegna et Jacopo Bellini. pp 224-279 in L’Art de Venise. Ed. Place des Victoires 2007
  2. Vasari G. Les vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes. Commentaires d’André Chastel. Thesaurus Actes Sud 2005
  3. Mantegna et Bellini. National Gallery Exhibition Catalogue 2018
  4. Steer J. La peinture vénitienne. Thames & Hudson 1990
  5. Rauch A. La peinture de la Renaissance à Venise et en Italie du nord in Renaissance italienne ; Architecture, sculpture, peinture, dessin. Ed de La Martinière 1995
  6. Tempestini A. Giovanni Bellini. Gallimard 2000
  7. Galansino A et al. Mantegna l’album de l’exposition au Louvre. Hazan 2008
  8. Zuffi S. Giotto. La Chapelle des Scrovegni. Skira 2012

 

(*) alors âgé d’environ 37 ans avec un nez busqué comme sur une médaille de Vittore Gambello (1460-1537) vers 1500 et dans un autoportrait (Musées du Capitole, Rome) avec une robe et une coiffe noires recouvrant des cheveux châtains à rapprocher, en particulier, d’un portrait issu de la Procession sur la Place Saint-Marc peint par Gentile (Académie, Venise) en 1496 tout en considérant que, dans La Présentation au Temple, le personnage supposé être Giovanni bien plus jeune a des cheveux bouclés très noirs avec le pigment d’origine.




Nostradamus et ses prédictions pour 2020

Et si tout ce qui nous arrive était prévu ?

Mieux que Didier Raoult, qui dans un rapport au ministère de la Santé avait mis en garde dès juin 2003 contre la menace de virus émergents dont le phénomène le plus redoutable serait l’apparition de mutants de virus respiratoires, notamment de la grippe, par introduction de virus d’origine animale dans le monde humain.

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Les 50 ans d’internet – 3e partie

La troisième partie de notre tour de l’internet est consacrée au développement des réseaux sociaux ainsi qu’à l’espace que prend la cybercriminalité et les enjeux écologiques…

Les facettes de l’internet (suite)

Voir : les chiffres clés

L’ère du cybercrime, ou de la cyberguerre

Pour terminer cette apologie de la noirceur d’internet (voir notre précédent numéro ou sur le site lecardiologue.com), le cybercrime, ou la cyberguerre (elle peut être économique) ne se réalisent qu’à des niveaux nationaux ou internationaux. Dire que ce phénomène est important est un euphémisme. Les États-Unis, par exemple, ont dépensé 14 milliards de dollars pour leur sécurité informatique.

Internet est devenu un lieu de confrontation majeur, liant les escrocs aux organisations terroristes, les armées aux Etats. Les méthodes sont bien recensées :

  • Vandalisme, braquage (APT38, des hackers nord-coréens liés au régime, ont réussi à subtiliser plus d’un milliard de dollars à certaines banques selon l’intrusion classique dans ce milieu : collecte d’informations/déploiement de logiciels malveillants/déploiements des portes de sorties/transferts de fonds/destructions de preuves).
  • Propagande et désinformation (par exemple lors d’élections majeures [Cambridge Analytica ou l’affaire russe aux Etats-Unis]).
  • Espionnage politico-industriel (les possibilités en la matière se sont démultipliées avec internet).
  • Sabotage (essentiellement des activités militaires).
  • Attaques d’infrastructures sensibles (distributions d’eau et d’électricité, communications, transports,…).

Les réseaux sociaux

En quelques années à peine, les réseaux dits « sociaux » ont conquis une place centrale au sein des différents usages d’internet. Le tournant est saisissant. Selon les derniers chiffres recensés, (10) sur les 7,6 milliards d’habitants que nous sommes, 4,388 milliards utilisent régulièrement internet (57 %), 3,484 milliards sont des utilisateurs des réseaux sociaux (45 %) [dont 3,256 milliards d’utilisateurs sur mobile (42 %)]. (10)

Les réseaux sociaux sont l’un des meilleurs moyens pour développer une marque, une entreprise ou tout simplement communiquer. Ils sont pour certains le fondement même de notre société et s’adaptent aux tendances, exigences et changements des individus.

En 2005, on comptait encore des services de ventes en ligne et de grands portails commerciaux parmi les dix sites à plus forte audience, comme eBay, Amazon, Microsoft ou AOL. Il n’aura fallu qu’une poignée d’années (2008) pour qu’apparaissent en haut du classement YouTube, MySpace, Facebook, Twitter, Hi5, Wikipédia et Orkut. (11)

En 2009, on dénombrait 250 millions d’utilisateurs de Facebook dans le monde, et 16 millions de Skyblogs en France. On compte 19 milliards de commentaires sur Skyblog (12) et plus de 10 milliards de photos sur Facebook. 

Facebook est de loin le numéro un, malgré la perte de confiance suite aux différents scandales et protection des données personnelles ainsi que la prolifération des fakenews.

Le phénomène des réseaux sociaux montre à quel point le principal usage d’internet est la pratique de l’échange et du partage. Ce phénomène  interroge sur les dynamiques sociales, culturelles et religieuses de tous les pays, tant il peut être disrupté par le nombre incalculable de fakenews, de canulars ou autres vidéos parodiques afin de faire passer des messages dans le but de manipuler ou de désinformer pour obtenir un avantage financier, idéologique ou politique. 

Egalement, le fait que les rédacteurs ne soient pas identifiables accentuent ce phénomène, notamment sur l’utilisation  qu’en font les mouvements terroristes et extrémistes violents (rapport d’Europol). 

Le succès et la vitalité des réseaux sociaux permet de diffuser des messages à des publics ciblés, mais également de recruter de nouveaux militants par la publication massive d’éléments de désinformation et de propagande.

Les Etats et les gouvernements se servent d’ailleurs de plus en plus de cette manne pour faire passer des messages « en direct », notamment sur Twitter, Donald Trump en étant – de par sa position – le premier utilisateur.

L’impact écologique du web

Depuis quarante ans, la conscience écologique s’est modelée avec les aléas climatiques. Or, ce temps est également celui du développement informatique et numérique.

Jusqu’à il y a peu, on présentait l’économie numérique comme vertueuse pour l’environnement. Ce n’est pas le cas. En effet,  le secteur représente 13,5 % de la consommation d’électricité en France et 4 % des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial (contre 2 % pour le transport aérien et 8 % pour les véhicules individuels) et, surtout, cette part de CO2 est en croissance annuelle de 10 % (13). Si on prolonge les courbes, on voit vite que ce n’est pas soutenable surtout que l’économie numérique ne remplace pas l’économie traditionnelle, elle s’y ajoute.

La chaîne numérique est divisée en trois émetteurs :

  • les infrastructures réseau (28 %), 
  • les data centers (25 %)
  • les équipements (47 %) que sont les ordinateurs, smartphones, tablettes, objets connectés, GPS…

Mais c’est le streaming qui est aujourd’hui le plus controversé. L’heure est à la dématérialisation des données et devrait capter cette année 80 % du trafic web mondial, d’autant qu’un smartphone équipé d’un forfait adapté permet la lecture d’un flux audio ou vidéo depuis des plateformes dédiées (Netflix, Spotify, Napster,…) n’importe quand et (presque) n’importe où. (14)

Les datacenters dont se servent les datastreams nécessitent des infrastructures extrêmement importantes avec une fourniture électrique conséquente, certains composants montant à 60 degrés : climatisation, immersion dans l’eau ou dans l’huile… tout est bon pour réguler la température.

Sur le fait, les pays nordiques sont devenus populaires pour les exploitants de centres de données, car il existe des conditions de refroidissement naturel ou direct, ainsi qu’une abondance d’hydroélectricité à faible teneur en carbone.

Google, pour sa part, laisse à l’intelligence artificielle le contrôle de ses systèmes de refroidissement, ce qui lui a permis d’augmenter son efficience de 30 % en neuf mois.

C’est également le comportement des utilisateurs qui doit s’adapter pour une réduction de l’impact écologique. Par exemple, une recherche d’une minute sur internet consomme 100 watts sur un ordinateur fixe (soit 1,66 Wh), 20 watts sur un ordinateur portable (soit 0,33 Wh), quelques watts sur une tablette, et encore moins sur un téléphone.

Les connexions par fil (câble ethernet) consomme moins qu’une liaison Wi-fi et doivent donc être priviligées.

 

Internet : les chiffres-clés

En 2019, sur 7,676 milliards d’humains, on dénombre :

5,112 milliards d’utilisateurs de téléphones 67 %

4,388 milliards d’internautes 57 %

3,484 milliards d’utilisateurs des réseaux sociaux 45 %

3,256 milliards d’utilisateurs des réseaux sociaux
sur mobile 42 %

Source : Blog du modérateur




La Présentation de Jésus au Temple – Une histoire de famille. 1ère partie

Il est permis de se demander pourquoi deux jeunes peintres de grand talent éprouvèrent le besoin de faire, à quelques années d’intervalle, deux peintures très ressemblantes sur le même thème : La Présentation de Jésus au Temple en considérant que ces deux peintres étaient très proches l’un de l’autre, non seulement par l’âge mais aussi par alliance puisqu’il s’agit de Giovanni Bellini (v.1433-1516) et de son beau-frère Andrea Mantegna (v.1431-1506) témoignant ainsi d’une relation étroite tant d’un point de vue familial qu’artistique.

 

Giovanni Bellini (v.1433 -1516) et Andrea Mantegna (v.1431-1506)

Giovanni Bellini est le fils cadet du peintre vénitien Jacopo Bellini (1400-1470) et est présumé adultérin dès lors qu’il ne figure pas sur le testament de la veuve de Jacopo, Anna Rinversi († 1471), en faveur de son fils aîné Gentile Bellini (1429-1507) dont le prénom rend hommage au maître de Jacopo, le peintre toscan Gentile de Fabriano (v.1370-1427) [1]. 

Elle lègue à son fils aîné deux remarquables recueils de dessins de son défunt mari, qui seront gardés comme modèles par ses fils, et permettent de comprendre que Jacopo Bellini puisse être considéré comme le père de la peinture vénitienne même si le peintre et historien d’art Giorgio Vasari (1511-1574) considère que « ses œuvres, en comparaison de celles de ses fils, ne sont pas extraordinaires » [2] et malgré le peu d’œuvres qui nous sont parvenues. 

Andrea Mantegna. La Présentation de Jésus au Temple. Vers 1453-54. Huile sur toile. 69×86.3 cm. Staatliche Museum, Berlin.

Jacopo exerçait au sein d’un atelier très actif et apprécié où se formeront des peintres de grand talent dont ses deux fils. De ces deux recueils, l’un (au Louvre) sera offert (v.1479) au sultan Mehmed II de Constantinople par Gentile, fin portraitiste très honoré en son temps et qui fut un spécialiste des peintures d’histoire de vastes proportions (teleri) destinées aux institutions laïques charitables de Venise que sont les Scuole. L’autre recueil (au British Museum) entrera tardivement en possession de Giovanni alors âgé de 75 ans…, par legs testamentaire de son frère « payant ainsi très cher sa condition de fils naturel » [3]. 

Autoportrait présumé d’Andrea Mantegna. La Présentation de Jésus au Temple (détail).

Andrea Mantegna est né dans une famille paysanne des plus simples [2] à Isola di Carturo devenue depuis 1963, en son honneur, Isola Mantegna dans la province de Padoue. Il est encore un enfant lorsqu’il entre dans l’atelier débordant d’activités du peintre Francesco Squarcione (v.1397-1468) qui finira par l’adopter et qui, ayant voyagé en Grèce, lui donnera le goût de l’antique, ce qui a fait dire à Vasari que le style de Mantegna est « un peu cassant, évoquant parfois la pierre plus que la chair vivante » [2] et cette « rigidité du trait padouan » sera retrouvée chez le peintre vénitien Bartolomeo Vivarini (1440-1499) au sein de cette famille concurrente des Bellini [4,5]. 

C’est après avoir quitté son maître, à l’âge de dix huit ans, qu’Andrea est associé, à Padoue, à la prestigieuse commande de la chapelle Ovetari de l’église des Erémitiques (Eremitani) qu’il finira de décorer quasiment seul. 

C’est lors d’un séjour à Venise avec son maître Squarcione qu’il fréquente Jacopo Bellini dont il épouse, en 1453, la fille Nicolosia née en 1429. Cet évènement atteste des liens étroits entre la famille Bellini et Mantegna alors qu’il n’avait qu’une vingtaine d’années et qui, par ailleurs, a pu être influencé par la perspective linéaire du grand sculpteur Florentin Donatello (1386-1466) lorsque ce dernier séjourna à Padoue de 1444 à 1453.

C’est ainsi que Mantegna développera l’art du trompe l’œil, avec des raccourcis en vue du dessous vers le haut (di sott’in sù) comme la remarquable Lamentation du Christ mort (Pinacothèque de Brera, Milan) peinte vers 1480. Giovanni sera influencé par le trait puissant et le sens du relief d’Andrea qui entre au service du marquis de Mantoue en 1458 pour rester définitivement à la cour des Gonzague à l’exception de quelques intermèdes en Toscane et à Rome. 

Cependant, au début des années 1460, l’attraction mutuelle et l’influence réciproque initialement très fortes entre Giovanni et Andrea commencent à s’atténuer et la rencontre de Giovanni avec Antonello de Messine (v.1430-1479) qui séjourne à Venise de 1474 à 1476, a pu finir de convertir Giovanni à la peinture à l’huile d’inspiration flamande même si Giovanni était alors un peintre accompli de plus de quarante ans [1]. 

Giovanni Bellini restera à Venise où il développera des variations sur le thème de la Vierge à l’Enfant, en particulier dans le cadre de la dévotion privée, témoignant ainsi de sa profonde religiosité à l’inverse de son peu d’intérêt pour les aspects terrestres de la vie du Christ qu’il laissera à ses élèves [1]. 

C’est vers 1470 qu’il peint La Présentation de Jésus au Temple. Entre 1470 et 1475 Giovanni Bellini se rend à Rimini pour peindre le retable de San Francesco qui marque un tournant dans sa carrière. Vers 1480 et pour une période de 10 ans, il peint pour des églises vénitiennes deux de ses grands retables [6]. 

C’est à partir de cette période qu’il supplantera définitivement son beau-frère qui était jusqu’alors la manifestation la plus originale de la peinture en Italie du Nord. En 1501, Giovanni peindra le célèbre portrait du Doge Leonardo Loredan (National Gallery Londres) où il excelle dans l’expressivité du visage et la représentation du brocart et des broderies en or puis fin 1505 « le meilleur, le grand, le vieux Giovanni Bellini », alors âgé de 72 ans, accueillera avec bienveillance Albrecht Dürer (1471-1528), alors âgé de 34 ans et qui se déclara son ami. 

C’est avec beaucoup d’humilité que Giovanni Bellini, pourtant bien plus âgé et considéré par Dürer comme « le meilleur des peintres », demanda à ce dernier un de ses pinceaux servant à peindre l’extraordinaire finesse de la chevelure des personnages, reconnaissant ainsi, implicitement, l’immense talent de l’artiste allemand à la fois peintre, sculpteur et graveur.

Giovanni Bellini (à gauche et Andrea Mantegna (à droite) [détail].

La Présentation de Jésus au Temple

L’évangile de Luc relate que Marie va devoir se purifier rituellement au Temple quarante jours après la naissance de Jésus puisque, dans le judaïsme, l’accouchement était considéré comme une souillure et la Présentation de Jésus au Temple par ses parents, Joseph et Marie, est en outre conforme à la loi juive disant que : « Tout mâle premier-né sera consacré au Seigneur ». Il est habituel que les parents apportent un couple de tourterelles ou de jeunes pigeons destinés au sacrifice et ils sont alors accueillis en l’occurrence par Siméon, un vieil homme juste et pieux qui est revêtu des ornements sacerdotaux avec une tiare ou une mitre et une riche tunique ou éphod pouvant comporter un pectoral orné de pierres précieuses. 

Il nous faut commencer par l’œuvre de Mantegna [3,7] dès lors qu’il ne semble plus faire de doute que celle-ci a précédé celle de Bellini, compte tenu des dates probables des compositions et du fait de la constatation, aux rayons X, de repentirs (pentimenti) absents chez Bellini. Là encore, le jeune
Mantegna a pu être influencé par les effets de profondeur dans le relief (stiacciato) de Donatello [5] qui est l’auteur de la statue équestre du Gattamelata sur la Piazza del Santo de Padoue mais aussi, dans la basilique de Saint Antoine, d’un bas relief en bronze montrant la Vierge tenant étroitement enlacé l’Enfant Jésus (1446-1450), thématique reprise clairement par nos deux peintres. C’est même pour rapprocher l’Enfant de sa mère que Mantegna corrigera sa version initiale.

Bibliographie

  1. Gentili A. Le Cadre historique de la peinture vénitienne de 1450 à 1515. Profils (diversement) perdus : Andrea Mantegna et Jacopo Bellini. pp 224-279 in L’Art de Venise. Ed. Place des Victoires 2007
  2. Vasari G. Les vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes. Commentaires d’André Chastel. Thesaurus Actes Sud 2005
  3. Mantegna et Bellini. National Gallery Exhibition Catalogue 2018
  4. Steer J. La peinture vénitienne. Thames & Hudson 1990
  5. Rauch A. La peinture de la Renaissance à Venise et en Italie du nord in Renaissance italienne ; Architecture, sculpture, peinture, dessin. Ed de La Martinière 1995
  6. Tempestini A. Giovanni Bellini. Gallimard 2000
  7. Galansino A et al. Mantegna l’album de l’exposition au Louvre. Hazan 2008



Le naufrage des civilisations

Je suis né en bonne santé dans une civilisation mourante et tout au long de mon existence, j’ai eu le sentiment de survivre sans mérite ni culpabilité…

C’est par ce bel incipit, qui d’ailleurs nous en rappelle un autre tout aussi savoureux (« je suis né dans la ville d’Aubagne, sous le Garlaban couronné de chèvres, au temps des derniers chevriers »), que nous entamons notre périple dans le dernier ouvrage d’Amin Maalouf.

Qui a lu, entre autres, « Léon l’Africain », « Les Echelles du Levant », ou surtout l’excellent « Rocher de Tanios », prix Goncourt 1993, sait tout ce qu’Amin Maalouf apporte à la littérature. 

Sa carrière d’écrivain en tous points remarquable lui a valu d’être reçu à l’Académie française en 2011 au fauteuil de Claude Levi-Strauss ; il a publié, outre les romans sus-cités et bien d’autres, des ouvrages historiques comme « Origines » ou « Les Croisades vues par les Arabes » ainsi que des essais comme « Les identités meurtrières » ou « Le Dérèglement du monde ».

Ses livres sont traduits dans une cinquantaine de langues.

Avec le naufrage des civilisations, l’auteur veut nous amener à partager ses analyses d’un monde qu’il estime, et on le comprend, en grand péril ; Amin Maalouf est digne de confiance tant il semble avoir la prescience des grands bouleversements de l’Histoire ; il s’inquiétait il y a vingt ans de la montée des « identités meurtrières », il nous alertait il y a dix ans sur « Le dérèglement du monde ».

Aujourd’hui il nous explique pourquoi toutes les aires de civilisation sont menacées de naufrage.

Depuis plus d’un demi-siècle, l’auteur observe le monde et le parcourt ; Il était à Saïgon à la fin de la guerre du Vietnam, à Téhéran lors de l’avènement de la République islamique.

Dans ce livre puissant et ample, il fait œuvre de penseur et de spectateur engagé, racontant parfois des événements majeurs dont il s’est trouvé l’un des rares témoins oculaires.

« C’est à partir de ma terre natale que les ténèbres ont commencé à se répandre sur le monde » écrit-il tristement avant d’évoquer l’extinction du Levant tolérant et les secousses sismiques du monde arabo-musulman, dont les répliques ont affecté, de proche en proche, la planète entière.

Il émet l’hypothèse d’un grand retournement qui aurait métamorphosé les sociétés humaines et dont nous serions aujourd’hui les héritiers hagards.

Pour autant, l’auteur se défend de prêcher le découragement, et reste persuadé qu’un sursaut demeure possible, pour éviter au paquebot des hommes de continuer, tel le Titanic, à naviguer vers sa perte.

A moins que, finalement, comme l’écrivait Constantin Cavafy dans l’un de ses Poèmes, cités ici par Amin Maalouf « Ce que réserve l’avenir, seuls les dieux le connaissent, les hommes sages ne perçoivent de l’avenir que ce qui est imminent » !

Cet ouvrage qui a reçu le prix Aujourd’hui 2019 est vraiment magnifique.

 




Bourgogne : Château de Monthelie – Domaine Eric de Suremain

Le Château de Monthelie, c’est d’abord une histoire de famille, où, tour à tour, les générations se sont succédé depuis 1903. Aujourd’hui, Eric de Suremain et sa femme Dominique exploitent le domaine avec énergie et passion.

Monthelie est un joli village niché au cœur de la Bourgogne qui partage ses coteaux avec Meursault, Volnay et d’Auxey Duresses. Le Château de Monthelie (XVIIIe siècle) avec sa toiture en tuile vernissée de Bourgogne, est inscrit à l’inventaire des monuments historiques.

C’est en 1903 qu’Albert de Suremain hérite du Château de Monthelie. Son fils, Robert, s’y installe en 1930 avec son épouse Germaine et exploite les vignobles de Monthelie et de Rully (propriété de sa femme). 

En 1956, c’est au tour de Bernard, l’un des quatre enfants de Robert, de s’y installer  et d’exploiter le domaine. Il est rejoint par son fils Eric en 1978 qui commence, après des études au lycée viticole de Beaune et six mois passés aux Etats-Unis, comme métayer, avant d’en prendre la gestion en 1983 avec sa femme Dominique. Et depuis 2019, C’est au tour de Gwendoline, leur fille, de les rejoindre dans cette belle aventure.

L’exploitation

De nos jours, le domaine Eric de Suremain exploite 5,7 ha sur Monthelie et 5 ha sur Rully. Les cépages sont ceux de la tradition bourguignonne avec le pinot noir qui est particulièrement adapté au climat et aux terroirs qui exprime ici toute sa dimension dans les vins rouges. Il apprécie les sols profonds, mais reste fragile et sensible au mildiou et à l’oïdium.

Quant au Chardonnay, ce cépage originaire de Bourgogne, prend ici toute sa dimension dans les vins blancs. Robuste malgré sa vulnérabilité au gel, il préfère les sols calcaires peu fertiles. 

La philosophie de la culture

Depuis 1996, Eric de Suremain cultive sa vigne selon la charte de l’agriculture biologique et certifiée en 2003, une volonté farouche de ne pas utiliser de produits chimiques de synthèse et de favoriser ainsi la biodiversité et la revitalisation des sols. 

Puis la « biodynamique attitude » est apparue. Le maître des lieux la compare à un chef d’orchestre. C’est elle qui donne le ton, l’impulsion, l’harmonie entre le sol, la plante et l’homme. Elle agit en parfaite concertation dans le sens même de la nature. Pour Eric, la biodynamie est l’essence même de la terre. De par ses principes, précise-t-il, « nous avons appris à nous adapter à la plante, au terroir, au climat. Nous observons le sol et la plante pour mieux agir. »

« Chacune de nos interventions biodynamiques favorise la racine, la feuille, la fleur ou le fruit » en y apportant des préparats d’origines animales (compost de bouse et bouse de corne), végétales (ortie, valériane, camomille, pissenlit, écorce de chêne, achillée mille feuilles) et minérales (silice).

Par dose homéopathique et mélangée avec de l’eau et dynamisée, ces préparats seront ensuite vaporisés dans la vigne. 

Le calendrier lunaire donne ensuite les éléments nécessaires quant aux moments propices pour intervenir quant à la taille, les mises en bouteilles ou toutes interventions sur le vin ou les vendanges.

Les vins

Nous avons goûté le millésime 2017 dans les appellations 1er Crus Rully et Monthelie.

Tout d’abord les blancs avec le Rully 1er cru « Agneux » qui dévoile un premier nez discret sous une teinte or pâle. Apparaissent ensuite des notes lactées, beurrées, florales et vanillées d’une belle intensité. L’attaque en bouche, grasse, tendue, est bien équilibrée, ronde et agréable sur un support acide parfait avec des notes de fleurs blanches, de poire et de noisette.

La persistance aromatique est magnifique et laisse présager d’un beau potentiel de garde.

Puis c’est au tour du Rully 1er cru Pillot « L’Intemporelle » avec une belle teinte jaune dorée. Après un premier nez discret qui évolue sur des notes florales, de cassis, d’épices et de bergamote, nous avons une belle attaque en bouche avec une puissance gustative qui se développe rapidement vers de la complexité et de la richesse. La présence de gaz carbonique apporte de la légèreté et de la fraîcheur. On y retrouve les chardonnays bourguignons d’autrefois !

Ce vin est un Grand vin, très prometteur et qu’il ne faut pas hésiter à garder.

Puis viennent les Rouges avec le Monthelie 1er Cru « l’Instant ». Une belle robe rouge rubis et brillante. Le nez encore timide sur des notes épicées, fumées, de noyau, mais l’entrée en bouche est belle, réglissée et croquante sur de la griotte. Les tanins intégrés et bien extraits sont de belle qualité et de belle maturité. Ce vin est destiné aux connaisseurs affirmés.

Et nous terminons avec le Rully 1er cru « Préaux », un flacon à partager sans modération entre amis pour un repas plaisir. Robe rouge rubis éclatant et d’une belle intensité, un nez flatteur sur des notes légèrement café/grillé, cerises noires, croquantes, une belle acidité d’entrée de bouche, agréable et fluide, où l’on retrouve le croquant et la gourmandise d’un pinot. Les tanins présents sont bien intégrés, délicats et fins.

Dans chaque bouteille il y a ostensiblement une véritable culture de l’art du vin.

Des restaurants prestigieux comme Troisgros ou la Côte Saint-Jacques, L’Oiseau des Ducs de Bernard Loiseau, ou plus simplement la Closerie des Lilas à Paris ne s’y sont pas trompés.

Si vous passez à Monthelie, vous y croiserez peut-être Eric de Suremain emmener son cheptel de poules afin d’y réintroduire (à petite échelle) des animaux « gratteurs » dans la nature…

Pascal Wolff

Domaine Eric de Suremain
Château de Monthelie – 21190 Monthelie




Bravo la pomme !

Dans un numéro précédent du Cardiologue  (Le Cardiologue n°424) nous vous présentions la nouvelle application ECG de l’Apple Watch 4 capable d’enregistrer un ECG selon une dérivation (D1) de grande qualité durant 30 secondes, de le stocker, de le transférer directement sur l’iPhone en format pdf pour être ensuite, si nécessaire, adressé par mail ou sms au cardiologue traitant.

L’algorithme de l’application permet de déterminer la fréquence cardiaque moyenne sur les 30 secondes et de dépister une arythmie complète par fibrillation auriculaire avec une très bonne sensibilité, comme l’attestait les études ayant justifié la FDA approved (équivalent américain d’un enregistrement à notre ANSM)

Il s’agissait alors à notre sens d’une évolution majeure par rapport aux algorithmes habituellement fournis sur ce type de montres connectées qui utilisent le plus souvent une cellule photoélectrique capable d’analyser le signal photopléthysmographique  des variations de l’onde de pouls. II s’agit dans ce cas d’un algorithme purement numérique, n’apportant aucune preuve électrique de la réalité du trouble du rythme, en dehors d’une confrontation ECG simultanée.

Pourtant plusieurs études de grandes dimensions apportaient un certain degré de crédibilité à ce type d’analyse, avec néanmoins de nombreuses limites méthodologiques.

Avec l’Apple Watch 4 (et versions suivantes), la preuve électrocardiographique est apportée de visu, puis que c’est un vrai tracé  selon la dérivation ECG D1 qui est enregistré, même si il est très bien filtré.

Pour autant, l’analyse des interprétations fournis par l’algorithme était assez décevante en dehors de l’AC/FA.  Il s’agissait ainsi d’une fréquence cardiaque moyenne qui ne tient pas compte  des variations de rythme durant les 30 secondes d’enregistrement. 

Premier tracé

Tracé numéro 1. 22  avril 2019  apple watch 4.

Dans l’exemple sur le tracé n° 1, du 22 avril 2019, l’enregistrement montrait d’abord une crise de tachycardie paroxystique jonctionnelle de type Bouveret, antérieurement documentée (par et chez votre serviteur) puis après une manœuvre de Valsalva  un pause sinusale suivie d’une bradycardie sinusale post-critique. 

L’analyse retranscrite sur l’enregistrement précisait trois éléments : 

  • Rythme sinusal – ce qui était faux durant la première partie de l’enregistrement
  • Fréquence cardiaque 90/mn – ce qui était faux, puisque c’était la moyenne des 30 secondes
  • Cet ECG ne présente aucun signe de fibrillation auriculaire – ce qui était vrai.

Une telle description pouvait être source de confusion faussement rassurante pour les utilisateurs. Nous avions alors transmis directement nos inquiétudes à l’équipe d’Apple France et Corporate US ainsi  qu’à leurs experts référents rythmologues de l’université de Stanford.

Nous n’aurons pas la vanité  de croire que nous avons été les seuls à faire de telles remontées d’inquiétudes aux équipes d’Apple, quoi qu’il en soit, avec la nouvelle version IOS 6.1.1 (17S449) mise à jour assez récemment automatiquement, j’ai eu l’heureuse surprise de constater, lors d’une récidive à la mi-janvier, que les messages d’interprétation avaient considérablement changé et étaient même devenus de véritables messages d’alerte, y compris en l’absence d’AC*FA , comme en attestent les interprétations  accompagnant les tracés 2 et 3 ci-joints du 15 janvier 2020.

Sur le deuxième enregistrement, il est maintenant précisé :

  • Fréquence cardiaque supérieure à 120 : fréquence moyenne 151/mn
  • Cet ECG n’a pas été utilisé pour rechercher une FA car votre fréquence cardiaque était supérieure à 120 /mn (décision éventuellement discutable mais témoignant sans doute des limites de sensibilité/spécificité de l’algorithme).

Tracé numéro 2. 15 janvier 2020 apple watch 4.

 

Si vous obtenez ce résultat à plusieurs reprises ou que vous ne vous sentez pas bien, consultez votre médecin.

Sur le troisième enregistrement qui correspond à la cédation de la crise toujours par un Valsalva de votre serviteur :

  • Fréquence moyenne 103/mn –  toujours la même erreur
  • Cet ECG est peu concluant – ce qui est plus sage que d’être affirmatif.

Tracé numéro 3. 15 janvier 2020 apple watch 4.

Mais cette fois ci, cette imprécision est complétée par le message de prudence :

Si vous obtenez ce résultat à plusieurs reprises ou que vous ne vous sentez pas bien, consultez votre médecin

En conclusion

Cette simple petite phrase  « Si vous obtenez ce résultat à plusieurs reprises ou que vous ne vous sentez pas bien, consultez votre médecin » change tout  et aurait peut être même méritée d’être complétée à l’heure de la télémédecine par la recommandation de transmettre « cet enregistrement à votre cardiologue sans retard ! » . Mais il est sans doute vrai qu’aucun d’entre nous ne souhaite être taillable et corvéable à merci, à n’importe quelle heure du jour et de la nuit surtout au tarif de la télé-expertise en France… Et pourtant cela pourrait rendre de grands services aux patients ; d’ailleurs par le passé certains ont tenté d’organiser de tels services de télédiagnostics ECG, mais c’était surement trop tôt.

En tout cas saluons la réactivité d’Apple Corporate et de son équipe d’experts référents cardiologues, surtout quand on connait l’inertie des décisions commerciales d’une telle entreprise mondialisée.

Question subsidiaire de l’auteur : pensez-vous qu’il serait raisonnable de penser à me faire  ablater ?

Jean-François Thébaut – Paris




Les 50 ans d’internet (2)

Nous avons vu dans notre première partie la naissance du www, de sa première utilisation devenue une révolution mondiale. La deuxième partie est consacrée au développement commercial, aux enjeux économiques ainsi qu’aux réseaux sociaux et autres bas-fonds de l’internet.

L’ère commerciale

Cette révolution de la communication ne pouvait se faire sans une ouverture grand public. 

Tout d’abord par la navigation. En 1994, Netscape Navigator est le premier navigateur commercial sur la toile, avant d’être dépassé et torpillé par Microsoft. La grande bataille des Gafam commence.

Puis par le commerce. Amazon crée le premier portail de commerce électronique en 1995 avec la vente de livres en ligne. L’entreprise a su profiter de l’internet pour se développer et populariser le commerce électronique.

Ensuite par les premiers services en ligne avec la naissance de Napster 1999, le premier service d’échange de fichiers musicaux (mais retiré en 2001, après deux ans de procédure judiciaire aux États-Unis pour infraction à la législation sur le droit d’auteur), devenu par la suite un service musical payant.

Mais ce sont surtout les moteurs de recherche qui vont réellement changer l’avenir du net. Tout d’abord avec Altavista en 1998 qui devient très vite populaire avec 13 millions de requêtes par jour, puis Google, fondée la même année, qui s’était donnée comme  humble mission « d’organiser l’information à l’échelle mondiale afin de la rendre universellement accessible et utile ». L’entreprise rafle tout sur son passage grâce à ses performances (Altavista en est la première victime). En 2000, le site est disponible en plus de dix langues, puis décliné en plus de cent langues en 2004 et cent cinquante en 2010, ce qui lui permettra de gagner de nouveaux marchés.

En 2010, Google est le premier moteur de recherche sur internet (80 % d’internautes américains l’utilisent, 93 % des Européens et seulement 35 % de Chinois).

Mais dans le monde, les Etats-Unis ne sont pas seuls. La Chine, par exemple, a son propre moteur de recherche avec Baidu, une entreprise créée en 2000 devenue rapidement le numéro 1 au pays du soleil levant grâce, notamment, à sa technologie de recherche en mandarin. Face à Google, son slogan est « Baidu connaît mieux le chinois ». Mais en 2009, Baidu s’est retrouvé au centre d’un véritable cyclone médiatique à cause d’une politique publicitaire qui plaçait les distributeurs illégaux de médicaments en tête de classement des recherches.

Les facettes de l’internet 

1. La fracture numérique

La fracture numérique comprend quatre niveaux d’inégalités :

  • l’accès au réseau internet ;
  • l’accès à un ordinateur ;
  • l’accès à l’usage des outils ;
  • l’accès à l’usage des informations.

L’usage s’entend par la compréhension des nouvelles technologies.

L’accès à internet est fortement marqué par la disparité entre les pays riches et les pays pauvres, entre les zones urbaines et les zones rurales (appelées zones blanches dont la France n’est pas exempte).

La fracture numérique se pose également sur la langue des utilisateurs, l’éducation et le niveau d’instruction, la population non équipée, le facteur économique.

Elle peut également venir de gouvernements qui restreignent l’accès pour contrôler les libertés d’expression et d’information. [En savoir plus]

2. L’ère de la censure

La censure fait partie de l’internet. Egalement appelée cybercensure, elle limite l’information disponible. Elle est pratiquée en général au niveau des Etats, des entreprises, des médias. Le filtrage internet est classé en trois catégories : politique, sociale, sécuritaire.

Les techniques employées sont diverses : du blocage IP, (1) au DNS (2) en passant par les contenus web ou simplement du lobbying. Dans la plupart des pays démocratiques, par exemple, les contenus liés au nazisme, au négationnisme, à la pédopornographie ou aux discours de haine sont bloqués.

L’internet est le miroir de la liberté d’expression dans le monde et la collusion entre pays libres et dictatoriaux.

Récemment, l’Iran a vécu une coupure internet inédite de dix jours au lendemain de la répression des manifestations du 15 novembre 2019. La reconfiguration du réseau internet a permis le contrôle avec une très grande précision de ce qui pouvait passer et ce qui ne le pouvait pas. Seulement, le commerce iranien a perdu près de trois milliards d’euros. La Chine est parvenue à développer un réseau qui permet de poursuivre les échanges commerciaux tout en étouffant les communications des mouvements de contestation. Elle a également créé une cybersurveillance sociale qui calcule le droit à voyager et à dépenser selon un score baptisé SCS (Social Credit System) qui cartographie les infractions.

3. L’ère du hacking

Le hacking possède plusieurs définitions. Ce n’est pas seulement le cybercriminel (voir piratage informatique plus loin) qui veut voler toutes vos données, c’est en premier lieu un activiste qui lie son activité et son destin à l’exploitation des failles et des vulnérabilités des systèmes. C’est en 1990 que l’on parle des premiers adeptes qui se divisent en deux parties : d’un côté les Black hat qui mènent des activités criminelles et d’un autre côté les White hat qui cherchent simplement les vulnérabilités informatiques pour les rendre publiques et ainsi les réparer. Les grandes entreprises y font aussi leur hacking et s’aident mutuellement lorsqu’une faille est découverte chez l’une d’entre elles.

Le collectif le plus célèbre est sans doute les Anonymous qui est « une conscience collective de lutte contre les manipulations de l’esprit. » En d’autres termes, il dénonce les atteintes à la liberté d’expression, notamment dans des pays où la censure est forte.

L’organisation la plus connue est Wikileaks qui « s’appuie sur la protection de la liberté d’expression et de sa diffusion par les médias, l’amélioration de notre histoire commune et le droit de chaque personne de créer l’histoire. Ces principes dérivent de la Déclaration universelle des droits de l’homme. » Le site divulgue des documents de manière anonyme et sécurisée « témoignant d’une réalité sociale et politique, voire militaire, qui serait cachée, afin d’assurer une transparence planétaire ». En 2017, 8 761 documents incriminant la CIA de cyber-espionnage global sont révélés par WikiLeaks.

Le scandale le plus important est celui de Cambridge Analytica qui a montré que les données pouvaient servir à manipuler les gens afin qu’ils votent d’une certaine manière.

4. La nébuleuse des faussaires : le darkweb

Le net est une nébuleuse où se côtoie un nombre incalculable de faussaires et autres escrocs. Fausses cartes d’identité, faux diplômes, fausses factures, faux documents administratifs… mais également fausses pharmacies, fausses banques, tout est bon pour s’accaparer ces juteux marchés. Même les particuliers peuvent devenir des faussaires professionnels grâce au darkweb, l’internet clandestin qui interdit toute traçabilité permettant de remonter jusqu’à l’adresse IP de son ordinateur.

La cyberdélinquance s’est également développée dans le trafic de drogues : cannabis, ectasy, cocaïne,… et autres médicaments (50 % des médicaments vendus sur internet sont des faux). [En savoir plus] Les trafiquants ont trouvé dans le web la possibilité d’écouler à grande échelle.

Mais il n’y a pas que des professionnels qui parcourent le net pour vendre des produits illicites. Le particulier peut facilement y trouver ce qu’il recherche, quitte à se faire prendre avec des fausses ordonnances. [En savoir plus] En parcourant le site psychoactif.org, on se rend compte à quel point le web est devenu une seconde planète.

Pour accéder au darknet, il vous faut un logiciel, le plus connu étant Tor, puis d’accéder à thehiddenwiki.org, le site qui essaie de recenser les sites du darknet. 

Mais qui dit cybertrafic dit cyberflic. Les coups de filet existent, comme ce forum qui mettait en relation environ 6 000 utilisateurs et 750 vendeurs de drogues, d’armes, de faux papiers, de coordonnées bancaires et d’outils de piratage informatique…

Les services non plus ne manquent pas, comme par exemple commanditer un meurtre, un passage à tabac, ou simplement louer les services d’un hacker pour paralyser le site de votre concurrent ou pirater un compte Facebook.

Internet est une vision du monde où les langues se délient, le darknet est une vision humaine où tout ce qu’il y a de pire existe.

5. L’ère du piratage informatique

Le piratage informatique peut prendre trois formes : 

  • la copie frauduleuse de logiciels ;
  • la pénétration des réseaux ou de bases de données ;
  • l’introduction de virus dans un système. 

Une vingtaine de villes américaines ont été victimes d’une attaque informatique en 2019, dont la ville de Baltimore (voir notre article), qui ont vu leurs sites devenus illisibles par un virus qui cryptait les données afin de les rendre inaccessibles.

En tant que particulier, vous pouvez être touché par le piratage pour, par exemple, une usurpation d’identité suite au vol de vos données (voir notre article).

(1) IP : l’Internet Protocol est le numéro d’identification de chaque ordinateur connecté.
(2) DNS : Domain Name System.




Les mastodontes du net

Ces sociétés précurseurs ont évolué grâce à internet sans lequel elles n’existeraient pas aujourd’hui.

Les américains…

1975 – Microsoft Corporation a été fondée par Bill Gates et Paul Allen. Son activité principale consistait à développer et vendre des systèmes d’exploitation, des logiciels et des produits dérivés (408,68 milliards de dollars de capitalisation boursière. 131 000 employés en 2018)

1976 – Apple est créée dans le garage de la maison d’enfance de Steve Jobs avec Steve Wozniak et Ronald Wayne. La société sous le nom d’Apple Computer a été déposée le 3 janvier 1997 (678 milliards de dollars de capitalisation boursière. 92 600 employés en 2018)

1994 – Amazon est une entreprise de commerce électronique américaine basée à Seattle (840 milliards de dollars de capitalisation boursière. Plus de 500 000 employés.

1998 – Google et son célèbre moteur de recherche ont été créés dans la Silicon Valley, en Californie, par Larry Page et Sergey Brin.

2004 – Facebook est fondée par Mark Zuckerberg et ses camarades de l’université Harvard avant une ouverture complète en 2006.

… et les chinois

1998 – Tencent est spécialisée dans les services internet et mobiles ainsi que la publicité en ligne. Effectif : 48 000 personnes. Plus de 35 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2018. [En savoir plus]

1999 – Alibaba tire ses revenus de ses activités d’échanges entre les entreprises, des plateformes de paiements et de ventes au détail, d’un moteur de recherche pour le magasinage et des services de cloud computing. En 2016, l’administration américaine met le site Taobao (une filiale de commerce en ligne) sur sa liste noire des sites notoires pour la contrefaçon. Résultat en 2019 : 43 milliards d’euros, pour 22 000 employés. [En savoir plus]

2000 – Baidu est devenue très rapidement Numéro 1 grâce à sa technologie de recherche en mandarin. [En savoir plus] Très obéissante aux ordres de la censure (le moteur de recherche suit les consignes du ministère de la sécurité publique et filtre les questions comme les réponses), l’entreprise est aussi plus prompte à proposer des liens de téléchargements quasi illégaux. Chiffre d’affaires 2017 : 13,03 milliards de dollars. [En savoir plus]




Anglais médical

Nous pensons tous avoir assez de connaissances pour parler et comprendre l’Anglais médical sans l’aide d’un quelconque guide ou dictionnaire qui serait plus encombrant que nécessaire. A force de fréquenter les congrès internationaux et les revues anglophones, nous n’avons aucun mal à nous débrouiller ! Du moins le croyons-nous…

Ce remarquable ouvrage, avec sa cinquième édition toute récente, nous montre, presque à chaque chapitre, le contraire.

Comme l’indique l’auteur dans son avant-propos, ce livre avait été initialement conçu en 1990 comme une aide à la communication pour un médecin francophone travaillant dans un pays anglophone.

Puis, de fil en aiguille, et le succès aidant, les rééditions se sont succédé jusqu’à cette cinquième, parue en septembre dernier, pour modifier le concept et en faire, plus qu’un dictionnaire, un guide pratique et peu contournable pour qui a peu ou prou l’intention de comprendre l’essentiel et les détails du langage médical anglais…

La structure même de l’ouvrage a été modifiée en 2013 pour refléter l’approche par spécialité de la médecine actuelle en y incluant des illustrations et de nouvelles thématiques.

Et cette dernière édition, que je vous propose de lire, inclut de nouveaux chapitres sur les formalités administratives, les prescriptions pharmaceutiques et le personnel paramédical.

Ce guide de la conversation (mais aussi de l’écrit) permet en effet aux médecins francophones et anglophones d’établir une relation de qualité avec le patient : le plan qui traite de chaque spécialité est identique, avec interrogatoire, liste des pathologies courantes, pharmacologie, examens clinique et paraclinique ; à tout seigneur tout honneur, c’est la rubrique cardio-vasculaire qui ouvre le bal, avec en exergue l’électrocardiogramme et la thérapeutique.

On y trouve également un tableau particulièrement soigné d’équivalence actualisée entre les principaux médicaments prescrits en France et Outre-Manche, de même que des notions utiles de conversation chez le pharmacien ou des expressions indispensables au suivi du patient.

Même les traditionnels faux amis ne sont pas oubliés ; et, mine de rien, ce rappel s’avère utile : est-on sûr de connaitre la signification médicale des mots anglais « Theatre » ? « Surgery » ? ou encore « Scan » (non cela ne veut pas forcément dire « scanner ») ?

L’auteure de cette cinquième édition, Eileen Sweeney, est la fille de Mireille Mandelbrojt Sweeney qui a rédigé les quatre éditions précédentes. Après des études bilingues en Irlande et un échange Erasmus à Montpellier, Eileen effectua un stage d’externe au Sénégal avant de superviser l’activité médicale à Médecins sans Frontières au Congo. Elle est actuellement chef de clinique des maladies infectieuses à Dublin.

Ce guide se veut une aide à la fois pour le malade et son médecin au cours d’une consultation médicale, il a également toute sa place auprès des confrères qui fréquentent peu ou prou les congrès internationaux et lisent les revues anglophones si répandues dans le monde médical.




Crémant d’Alsace – Blanc de blancs – Domaine Pfister

Amélie Nothomb a récemment déclaré « loin de moi l’idée de dire du mal des crémants d’Alsace ou de Bourgogne, mais ce sont des pétillants. Tandis que le champagne est effervescence. Et l’effervescence c’est de l’émotion, de la spiritualité en plus ». Eh bien au risque de contredire l’immense écrivaine, d’autant qu’elle confesse, sans retenue aucune, sa passion immodérée pour le champagne, je propose, à l’occasion de fêtes ou cérémonies, de déguster un crémant alsacien qui, en termes de finesse et d’effervescence, concurrence, sans difficulté, un bon champagne, et qui est élaboré par une autre femme de caractère : Mélanie Pfister.

La petite cité de Dahlenheim était déjà connue au Moyen-âge pour la qualité de ses vins ; le domaine Pfister y est implanté depuis 1780. André, le père de Mélanie, avait développé dans les années 1980-90 la viticulture en s’attachant à préserver l’intégrité des sols avant de confier en 2008 les rênes à sa fille qui représente donc la 8e génération. Au nord du Bas-Rhin, les vignobles de
Dahlenheim ne sont plus protégés par les Vosges du froid et des influences pluvieuses, le climat donc plus frais, le terroir essentiellement argilocalcaire expliquent la minéralité et la finesse prédominantes des vins.

Le domaine Pfister couvrant 10 ha comporte de nombreuses et belles parcelles comme le Silberberg ou le grand cru Engelberg (colline des anges) permettant de nombreuses cuvées parcellaires et imposant un équipement de plus de 40 cuves thermorégulées. Mélanie Pfister, après une solide formation d’ingénieur agronome à Bordeaux, et d’œnologue à Dijon, effectua de nombreux stages dans des domaines réputés comme Méo-Camuzet en Bourgogne, Cheval-Blanc en Bordelais, Zind-Humbrecht en Alsace.

Le respect de la terre et de l’environnement

D’emblée, elle marque sa préférence pour les vins secs, fuit le sucre inutile, le degré alcoolique trop important au profit du fruit et oriente l’expression du terroir vers la minéralité. La culture respecte la terre et l’environnement, élimine les produits chimiques, la conversion bio est en cours. Cette démarche a déjà permis l’obtention en 2013 du label « Haute valeur environnementale » et, en 2015, la certification « Fair’n Green » qui prend en compte le bilan carbone et l’investissement dans l’outil de production.

Le crémant assemble du chardonnay issu du terroir argilocalcaire de la Lehe qui procure beaucoup de finesse, et des pinots blancs et auxerrois des coteaux marneux d’Osthoffen qui apportent fruité et chair, donc des cépages blancs constituant un vrai blanc de blancs.

Après des vendanges manuelles, les fermentations alcooliques, puis malo-lactiques grâce à un levurage indigène, s’effectuent en cuves inox thermorégulées suivies d’un élevage sur lies fines avant l’embouteillage pour une 2e fermentation en bouteille par ajout d’une liqueur de tirage selon la méthode traditionnelle champenoise. Ce crémant de Mélanie Pfister se singularise par un élevage sur lattes particulièrement long de 38 mois jusqu’au dégorgement du dépôt de lies et l’apport d’une liqueur de dosage faiblement sucrée à 4 g/l, ce qui le fait entrer dans la catégorie des extrabruts.

Habillé d’une robe jaune d’or pâle, ce crémant, composé de 60 % de chardonnay et de 40 % de pinots blancs et auxerrois, a été récolté en 2014 et dégorgé en novembre 2017. Il fait exploser dans le verre un pétillement brillant et scintillant de très fines bulles se dégageant en cheminées continues et traçant une écume de mousse légère. La finesse de la bulle et la tenue de la mousse témoignent ainsi de la fermentation douce et de l’élevage long sur lies. Des senteurs de pain grillé et de brioche typiques de l’autolyse des levures par le long élevage avant le dégorgement envahissent le nez tout en préservant pureté, finesse, fraîcheur. A mesure que le vin s’aère dans le verre, émergent des arômes de jasmin, de pomme mûre, d’agrumes dominés par le zeste de citron structurant la belle acidité et la minéralité. La savoureuse finale dévoile des notes d’amande et une petite touche oxydative ajoutant à sa complexité.

Un merveilleux vin d’apéritif

Ce crémant vif, minéral, salivant est un merveilleux vin d’apéritif, dont l’effervescence met en valeur les petits feuilletés au fromage, les gougères, le kougelhopf salé alsacien. Mais son acidité, ses notes d’agrumes doivent aussi orienter les accords vers les produits marins : crevettes grises, rillettes de poisson, saumon fumé ou mariné, carpaccio de langoustines. Dans la suite du repas, il se mariera fort bien avec des poissons cuits à la vapeur, des Saint-Jacques au naturel, et surtout des assortiments de sushis. De façon plus inattendue, il peut clôturer votre repas sur des fromages de chèvre frais ou demi-secs, car, comme tous les blancs de blancs, il ne s’accordera pas avec les desserts sucrés.

Si vous aimez les vins marqués par la pureté du fruit, la finesse, la minéralité qui, de plus, sont à tarifs raisonnables, vous serez comblés par ceux proposés par Mélanie Pfister. Contrairement aux idées reçues qui ont classé le crémant comme « le champagne du pauvre », celui de cette vigneronne alsacienne tiendra la dragée haute à maintes bouteilles champenoises, et en tout cas ouvrira avec grâce vos agapes de fêtes.

Crémant d’Alsace Blanc de Blancs
Domaine Pfister, 53 Rue Principale – 67310 Dahlenheim

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Le marquis de la Rouërie (1751-1793) et la Conjuration bretonne ou l’histoire d’un double-jeu mortel – 2e partie


La défense de Rochefort-en-Terre.
Par Alexandre Bloch (1857-1919), musée des beaux-arts de Quimper.

Avec la mort de Robespierre (1758-1794) guillotiné le 10 thermidor de l’an II (28 juillet 1794) s’interrompt la Terreur et ses exécutions massives depuis les massacres de septembre 1792 et l’instauration du Tribunal révolutionnaire en mars 1793. C’est à la fin de janvier de cette même année 1793 qu’est mort de pneumonie le marquis de la Rouërie, héros valeureux mais méconnu de la guerre d’Indépendance américaine et qui, parti avant La Fayette (1757-1834) en est revenu après lui, trop tard pour en tirer des avantages. 

Voir la première partie.

Par Louis-François Garnier

Dans sa Bretagne natale, le marquis de la Rouërie deviendra le chef d’une Conjuration antirévolutionnaire qui, plus aristocratique que populaire, ne fera pas long feu. Cependant, le réseau de conjurés ou de sympathisants qu’il avait mis en place préludera à la Chouannerie ayant pu conduire à l’arrestation de chouans par la garde nationale comme l’illustrera le peintre Jules Girardet (1856-1938) spécialisé dans les scènes historiques telles que les guerres révolutionnaires en Bretagne. 

Le jeune marquis de la Rouërie  a vu son amitié et sa confiance trahies par un compatriote originaire d’un village tout proche de chez lui et, qui plus est, était un médecin apprécié qui devint ensuite un notable estimé sous l’Empire, la Restauration et la Monarchie de Juillet sans être inquiété alors que tant d’autres, dans la fleur de l’âge, ont fini sur l’échafaud pour moins que çà. Il y a manifestement « ceux qui font la révolution et ceux qui en profitent » (Bonaparte). 

 

Portrait de Georges-Jacques Danton (1759-1794).
Par Constance-Marie Charpentier, musée Carnavalet (1792).

Le 2 septembre 1792 alors que la coalition étrangère est entrée en France depuis plus de deux semaines, Chevetel revenant de Bretagne se précipite à 3 heures du matin chez Danton, alors ministre de la Justice, pour l’informer de la menace d’insurrection. Danton, dont Chateaubriand dira qu’ « il n’avait pas la conviction des principes qu’il soutenait », choisit alors de négocier car « il faut sauver le trône constitutionnel et l’intégrité du territoire » et mandate Chevetel à traiter en son nom. 

De retour en Bretagne et face au marquis dont « le caractère impétueux et franc s’accommodait mal des réticences », Chevetel est sommé de s’expliquer et ne nie pas ses relations avec les Cordeliers ; il  parviendra, lettre manuscrite de Danton à l’appui, à convaincre  les conjurés de sa bonne foi. 

Portrait de Pierre-Bénigne Lalligand (ou Laligant), dit Morillon (1759-1794).

Après Valmy, le 5 octobre 1792, il n’est plus question de ménager les conjurés de telle sorte que Danton charge Chevetel d’arrêter, de façon explicite et nominale, La Rouërie et les autres chefs de la Conjuration avec l’aide d’un sbire peu recommandable dénommé Lalligand, ancien faux-monnayeur et maître chanteur, affublé du pseudonyme de Morillon au même titre que Chevetel prendra le pseudonyme de Latouche. 

Arrivé en Bretagne, Chevetel se retrouve au pied du mur mais va saisir l’occasion de temporiser en acceptant une mission, au service de la Conjuration, auprès du comte d’Artois ; cette mission va durer trois mois et contribuera à le tirer d’affaire puisqu’à son retour la nouvelle de la mort de La Rouërie ne peut-être pour lui qu’un « lâche soulagement ».

Lalligand arrête alors la famille La Guyomarais (ainsi que ses domestiques) qui avait hébergé le marquis en faisant déterrer le cadavre et couper la tête pour mieux les compromettre. Chevetel s’en tire à bon compte et son sens de la discrétion sera tel que son nom ne sera même pas prononcé au procès qui suivra et il sera redevable à Lalligand (plus tard guillotiné à son tour pour malversations) de lui avoir donné quitus en écrivant au ministre « il n’y a rien à reprocher à Chevetel, il a bien été » quand il sera accusé, par un policier pendu à leurs basques et dénommé Sicard, d’avoir délibérément laissé filer le trésorier de la Conjuration, de loin le plus compromis, le châtelain de la Fosse-Hingant Marc Désilles de Combernon qui avait réussi à gagner Jersey au début de mars 1793 (où Chateaubriand se trouvait en convalescence). 

Dans cette affaire, Chevetel qui en sous-main dirigeait l’enquête, avait été jusqu’à se faire faussement arrêté et n’empêcha nullement que la fille et le beau-père de Désilles soient guillotinés en compagnie de Thérèse de Moëlien « qui se fit remarquer par son intrépidité à l’échafaud »  (Chateaubriand), la populace ayant pu alors apprécier la blancheur de sa peau… Chevetel avait réussi à rester dans l’ombre et à échapper au pire alors qu’il en fallait moins que ça, en pleine Terreur, pour finir sur l’échafaud. 

Que devint Chevetel qui poursuivit le marquis et les conjurés d’une « haine attentive » (Juramie) en allant jusqu’à procurer des documents à charge durant le procès ? Il épousa l’actrice Mademoiselle Fleury (1766-1818) dont on a dit qu’elle aurait été l’amante de La Rouërie après le décès de son épouse mais peut-être l’a-t-on confondue avec la cantatrice dénommée La Beaumesnil (1748-v.1803 ?) dont la « vertu accessible » n’avait pas laissé insensible le jeune marquis avant son départ pour l’Amérique. Installé sous l’Empire comme médecin à Orly, Chevetel  en devint le maire en 1811 en étant estimé de tous. 

Accusé par une lettre anonyme en 1823, sous la Restauration, il bénéficiera d’un non-lieu après un avis favorable du préfet alors même qu’à cette époque l’administration n’était pas spécialement indulgente. Réélu en 1830, il démissionne en 1832 pour raison de santé et meurt en 1834. 

Il est enterré avec les honneurs de ses administrés reconnaissants alors que l’histoire retiendra que même une crapule comme Lalligand était moins inhumain que Chevetel : « Il y a des degrés dans l’abjection » (Juramie) et, manifestement, Chevetel en avait atteint l’un des sommets.

Bibliographie

  1. AUBREE Etienne. Thérèse de Moëlien. Amazone de la Chouannerie. Librairie Académique Perrin 1941
  2. Chateaubriand François-René. Mémoires d’outre-tombe. Edition critique par J-C Berchet. Le Livre de Poche, 2008
  3. G. Lenotre. Le Marquis de la Rouërie et la Conjuration bretonne 1790-1793 Perrin 1901
  4. G. Lenotre. La Mirlitantouille. Episodes de la chouannerie bretonne. Perrin 1925
  5. G. Lenotre. La Révolution par ceux qui l’ont vue. Grasset 1934
  6. Juramie Ghislaine. La Rouërie. La Bretagne en révolution. Ed Lanore-Sorlot 1991
  7. Rome Paul. La Conjuration bretonne de 1792. La Rouerie héros malheureux, Chevetel ami calomnié. Chez l’Auteur 1987

Remerciements à M. Claude Cherbonnel pour m’avoir transmis l’opuscule du Contre-l’amiral Paul Rome originaire de Bazouges et qui lui a été dédicacé par l’auteur.




Le marquis de la Rouërie (1751-1793) et la Conjuration bretonne ou l’histoire d’un double-jeu mortel – 1ère partie

C’est par une froide nuit du 30 janvier 1793 dans le château de La Guyomarais (Côtes d’Armor) que meurt d’une pneumonie, à l’âge de 42 ans, Armand-Charles Tuffin, marquis de la Rouërie (1751-1793), héros méconnu de la guerre d’Indépendance américaine (1775-1783) où il a été peint en 1783 par le peintre et naturaliste Charles Willson Peale (1741-1827).

Portrait du Marquis de La Rouërie en 1783, par Charles Willson Peale (1741-1827).

La Rouërie était aussi le chef de la Conjuration bretonne et Chateaubriand (1768-1848) qui l’a rencontré à Fougères, en 1791, dira de lui qu’ « il était élégant de taille et de manière, brave de mine, charmant de visage et ressemblait aux portraits des jeunes seigneurs de la Ligue ». 

C’est alors qu’il lutte contre l’infection que sa cousine intime, Thérèse de Moëlien, comtesse de Trojoliff (1759-1793) (1) sollicite un médecin, demeurant à Paris, du nom de Valentin Chevetel (1758-1834) afin qu’il vienne de toute urgence au chevet du malade ; il arrivera trop tard. 

Les deux hommes se connaissaient de longue date, sans doute avant le départ du marquis pour l’Amérique où ce dernier arrive fin avril 1777 afin de prendre part à la guerre d’Indépendance contre les Anglais (il va s’y distinguer sous le pseudonyme de colonel Armand) tout en cherchant à faire oublier une jeunesse tumultueuse alors qu’il était officier aux Gardes Françaises. En outre, il y a tout lieu de penser que Chevetel faisait partie des admirateurs fervents qui accueillirent le marquis en héros à son retour définitif d’Amérique en 1784. 

La Rouërie, décoré plus tard de l’ordre de Cincinnatus (fondé en 1783) par Georges Washington (1732-1799), fit alors forte impression avec son fidèle compagnon d’armes américain dénommé le major Chafner (ou Schaffner), en plantant les premiers tulipiers de Virginie introduits en France tout en étant « accompagné d’un singe assis sur la croupe de son cheval » comme le relate Chateaubriand ou sur son épaule comme le montre une statue à Saint-Ouen-la-Rouërie (Ille-et-Vilaine). 

Statue de la Rouërie avec son singe à Saint-Ouen-la Rouërie

La Rouërie avait toute confiance envers Chevetel qui s’était occupé de l’épouse du marquis, probablement poitrinaire, jusqu’à l’accompagner en cure thermale à Cauterets où elle est morte le 18 juillet 1786. Peinant à faire son deuil, le marquis demanda à Chevetel de rester auprès de lui durant une grande partie de l’année 1787. 

Les deux hommes sont presque originaires du même endroit puisque Chevetel, fils de médecin et médecin lui-même est né à Bazouges-la-Pérouse à seulement une quinzaine de kilomètres de Saint-Ouen-la Rouërie. Chevetel était à Paris depuis que le marquis lui avait procuré une place au sein de la maison du comte de Provence, frère du roi Louis XVI (1754-1793) et futur Louis XVIII (1755-1824) et c’est donc à Paris que Chevetel va acquérir des convictions révolutionnaires et le sens de l’enrichissement personnel au contact de personnages-clés de la Révolution « avides de pouvoir et faisant du sort de la France l’enjeu de leurs rivalités personnelles » (G. Lenotre) tels que Marat (1743-1793), Camille Desmoulins (1760-1794), Fabre d’Eglantine (1750-1794) et surtout Danton (1759-1794), ce « colosse à la figure couturée par la petite vérole », fondateur du club des Cordeliers en 1790, ministre de la justice après le 10 août 1792, qui laissa faire les massacres de septembre et qui fut pourtant accusé de « tiédeur » et de concussion par Robespierre (1758-1794), et finira guillotiné ainsi que ses amis le 5 avril 1794, en disant au bourreau « Tu montreras ma tête au peuple, elle en vaut la peine ». 

C’est aussi à Paris, le 25 juin 1791 (le jour même du retour du roi arrêté à Varennes), que Chevetel héberge La Rouërie et ses compagnons revenant de Coblence où a émigré le comte d’Artois, frère du roi et futur Charles X (1757-1836) et qui a approuvé un projet que La Rouërie va exposer en toute confiance à Chevetel ; il s’agit de créer une organisation contre-révolutionnaire, qui sera dénommée Association ou Conjuration bretonne et qui, fondée en juin 1791, consistera à mettre sur pied une armée de 10 000 hommes capable de monter sur Paris lorsque les troupes de la coalition et les émigrés entreraient en France. Ceci fut le cas le 19 août 1792 mais la victoire des Révolutionnaires à la bataille de Valmy (20 septembre 1792) conduira les troupes étrangères à battre en retraite et à repasser la frontière avant que la Bretagne n’ait pu se soulever. 

Quoi qu’il en soit, cette première rencontre à Paris laissa, de son propre aveu, Chevetel « songeur » et il se garda bien de faire état de ses propres convictions. Pendant les dix huit mois qui vont suivre, Chevetel qui avait mis les doigts dans un engrenage infernal dont il n’avait peut-être pas soupçonné l’ampleur, va se livrer à un double-jeu dangereux et finalement mortel pour un certain nombre de protagonistes. 

Chevetel n’a pas de responsabilité directe dans la mort du marquis passé à la clandestinité après la perquisition de son château le 31 mai 1792, et dont l’organisme affaibli par une errance incessante ne pourra vaincre une pneumonie hivernale aggravée par un délirium lorsqu’il apprendra, par inadvertance, la mort du roi. 

En revanche, les informations de Chevetel ont conduit à l’arrestation puis à la condamnation à mort par le Tribunal révolutionnaire, le 18 juin 1793, de douze conjurés incluant Thérèse de Moëlien dont on dit que la beauté contribua à l’essor de la conjuration et dont la présence d’esprit, en détruisant des documents compromettants, sauva la vie de nombreuses personnes. 

Jusqu’à la fin elle avait fait confiance à Chevetel et on peut s’étonner que les conjurés bretons, à commencer par le marquis et son entourage proche (à l’exception de Pontavice qui servait d’agent de renseignement à Paris), mais aussi les princes en exil (!) aient pu faire preuve d’une telle désinvolture qui était alors « une preuve d’élégance de pensée » (Juramie) et d’ingénuité qu’ils n’ont pas pu démasquer Chevetel qui, il est vrai, était un personnage secret et peu disert. 

Il semble d’ailleurs que Danton lui-même appréciait « le calme et l’attitude réfléchie » de Chevetel qui avait su se rendre très utile aux Bretons à plusieurs reprises dans le cadre de missions importantes telles que des opérations de change des assignats ou une livraison d’armes à Jersey (que de son propre aveu il fit échouer…). Chevetel avait même accepté de faire partie du Conseil de l’Association atteignant alors le comble de la duplicité confirmant, en véritable Janus, l’aphorisme populaire « bonne mine, mauvais jeu ». 

Parmi les allers-retours de Chevetel entre Paris et la Bretagne, deux épisodes, à moins d’un mois d’intervalle, illustrent à quel point la situation pouvait alors évoluer rapidement en fonction des évènements et, en l’occurrence, de part et d’autre de la bataille de Valmy qui est un « véritable désastre » pour la Conjuration bretonne qui, d’une certaine façon, n’a plus lieu d’être compte tenu de ses objectifs programmés ; avant Valmy le principe d’une monarchie constitutionnelle reste d’actualité alors qu’ensuite la monarchie est renversée et la République proclamée.

Les révoltés du Fouesnant ramenés par la garde nationale de Quimper en 1792, par Jules Girardet, (1886), huile sur toile, musée des beaux-arts de Quimper.

(1) Thérèse de Moëlien née à Rennes le 14 juillet 1759 paya de sa tête son dévouement absolu au marquis de La Rouërie (ils étaient cousins germains) et Chateaubriand dira d’elle lorsqu’il vit en 1782 la Comtesse de Tronjoli (sic) : « Je n’avais encore vu la beauté qu’au milieu de ma famille ; je restai confondu en l’apercevant sur le visage d’une femme étrangère » 




Château Talbot 1996 – Grand vin de Saint-Julien

Je voudrais vous faire partager le plaisir que j’ai récemment eu à déguster ce vin, surtout si vous appréciez comme moi ces Talbot « à l’ancienne » avec leur richesse en matière et en tanin, et leur côté « sauvage ».

Moitié anglais, moitié lorrain, tel se présente Château Talbot 4e grand cru classé de Saint-Julien. En effet, il est certain que ce château a emprunté son nom à
John Talbot, gouverneur de Guyenne, grand connétable des armées anglaises qui n’en a jamais été propriétaire, mais y avait installé son quartier général en juillet 1453 avant de marcher sur Castillon, où l’attendaient les forces du roi de France. Non seulement il devait perdre cette bataille décisive qui mît fin à la guerre de cent ans et à la domination britannique en Aquitaine, mais il y laissa également la vie. Car Talbot, homme d’honneur ayant prêté serment de ne plus combattre le roi de France, marcha, désarmé et sans armure, à la tête de ses troupes, pour tomber sous le feu des couleuvrines françaises.

Pendant plus de deux siècles, le domaine fut la propriété du marquis d’Aux et de ses descendants (dénommé alors Talbot d’Aux).

Désiré Cordier, d’origine lorraine, était négociant en vins à Toul, lorsqu’il dut quitter sa région natale, pour fuir la guerre de 1914. Installé dans le bordelais, il acheta Talbot en 1917. Depuis, ce grand cru est resté dans le giron de la famille Cordier, ce qui prouve leur réel attachement à ce domaine. Le petit-fils Jean réalisa de nombreux investissements, pour produire un vin de qualité. 

A la mort de Jean en 1993, ce sont ses filles Lorraine disparue en 2011 et Nancy (racines familiales !) qui héritent de la vaste propriété. Aujourd’hui, Nancy Bignon-Cordier dirige le domaine. Elle a financé un profond renouvellement avec la création, en 2011, d’un chai performant et spectaculaire.

Le Talbot, dont on appréciait le caractère classique, a gagné en finesse, tenue de bouche, précision grâce aux conseils de Stéphane Derenoncourt, Jean-Michel Laporte et la présence d’Eric Boissenot comme œnologue, mais il reste noir d’encre, délicieusement gras et suave, toujours régulier, toujours Saint-Julien, dont les tarifs demeurent relativement raisonnables (un peu plus de 50 euros pour le 2015).

Viticulture raisonnée, sans herbicide ni insecticide

Le vignoble de 110 ha d’un seul tenant entoure le château situé à la frontière de Pauillac, favorablement orienté vers le sud-ouest sur 2 croupes graveleuses, séparées des sols argilo-limoneux dotés d’une bonne réserve hydrique. 

Le travail du sol est l’objet de soins vigilants : viticulture raisonnée sans herbicide ni insecticide, labour traditionnel, chaussage et déchaussage des ceps, ébourgeonnage, rognage assez haut pour favoriser la surface foliaire, effeuillage sur une face. Les vendanges sont manuelles, un double tri à la vigne, puis par trieuse optique est réalisé. 

Les raisins, en cuves bois thermorégulées, subissent une macération à température ambiante, puis sont levurés avec une souche neutre et mis en fermentation. Les cuvaisons avec délestages précoces, puis remontages durent 1 mois. L’élevage pendant 14 mois bénéficie de 50 % de bois neuf et de quelques soutirages.

Un vin majestueux, élégant et complexe

Le château Talbot 1996 assemblant 70 % de cabernet sauvignon, 25 % de merlot, 3 % de cabernet franc, 2 % de petit verdot arbore une robe rubis foncé soutenu bordée d’une légère frange orangée témoignant de l’âge respectable. 

Le nez est envahi par toute une gamme de senteurs les plus variées : fruits noirs : cassis, mûre, nuancés de réglisse, épices douces : clou de girofle, poivre blanc, herbes fraîches : eucalyptus, menthe, tabac de Havane, cuir, rejoints par quelques notes empyreumatiques : café, pain grillé. La bouche est bien étoffée et impressionnante de richesse en matière. 

La texture est charnue, les tanins bien présents, mais fondus. Commencent à poindre des flaveurs d’évolution gibier et truffe. La finale est tout à la fois persistante, profonde et bien marquée par la mâche. En résumé, il s’agit d’un vin majestueux, élégant et complexe grâce à sa richesse aromatique, d’une grande capacité aux longues gardes.

J’avais dégusté ce Talbot 1996 avec un classique gigot, mariage au demeurant parfaitement réussi comme avec toutes les préparations à base d’agneau : selle, épaule, navarin, mais je pense que la patine de l’âge permet à ce vin des rencontres plus prestigieuses : en premier lieu, des gibiers délicats plutôt à plumes qu’à poils, les oiseaux mythiques du sud-ouest : bécasses, palombes réaliseraient un magnifique accord, de même des cailles aux raisins, une chartreuse de perdrix, une grouse rôtie au vin rouge, un faisan à la mode de Gascogne formeraient avec ce château Talbot une osmose mémorable. Ses arômes de mélanosporum mériteraient une confrontation avec les grands plats truffiers ; chausson ou chapon de Bresse rôti aux truffes, truffe sous la cendre, soupe VGE.

Ce grand vin que l’âge vient sublimer, nous incite, au-delà du plaisir des arômes, à réfléchir, hors du temps, sur l’histoire et l’héritage de ses origines qu’il transmet.

Famille Cordier
33250 Saint-Julien de Beychevelle

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération




Les virus

Le virus est à la mode ! Particuliers, industriels, partis politiques, commerces,… tout le monde est touché par ce fléau. Pour être – un peu moins ignorant – il est important de connaître les principaux mode de virus existants pour savoir s’en préserver et… s’en débarasser au cas où.

Mise à jour – 26/11/19. La bombe logique est un programme installé dans le système en attendant un événement (date, action, données particulières…) pour s’exécuter. Elle est généralement utilisée dans le but de paralyser temporairement des serveurs afin de nuire à leur fonctionnement.

Le spyware est un mouchard qui peut enregistrer différents types de données : sites visités, requêtes tapées dans les moteurs de recherche, données personnelles, type de produits achetés, informations bancaires. Ces informations sont exploitées à des fins de profilage pour l’envoi de publicités ciblées sur les centres d’intérêt de la personne qui a été espionnée.

Le keylogger espionne les frappes de clavier de l’ordinateur qui l’héberge afin de les transmettre à un pirate. Ce système permet ainsi de recueillir les mots de passe, codes de carte bancaire, intitulés sous lequel vous ouvrez une session…

Le backdoor est un cheval de Troie caché dans un logiciel, un service en ligne ou un système informatique afin de surveiller, copier ou détruire des données, de prendre le contrôle d’un ordinateur et de pouvoir l’utiliser pour mener des actions malfaisantes…

Le trojan (cheval de Troie) est un programme informatique utilisé pour voler des informations personnelles, propager des virus ou perturber les performances de votre ordinateur. Il permet également un accès à distance.

Le ver informatique est un virus réseau qui s’auto-reproduit et se déplace sans avoir besoin de support physique. Il recherche les fichiers contenant des adresses de messagerie et les utilise pour envoyer des messages électroniques infectés en usurpant les adresses des expéditeurs dans les derniers messages afin que les messages infectés semblent provenir de quelqu’un que vous connaissez.

Le ransomware empêche l’utilisateur d’accéder à son système ou ses fichiers et exige le paiement d’une rançon en échange du rétablissement de l’accès. Il utilise couramment les e-mails indésirables (malspams) pour livrer des malwares. Ces e-mails peuvent inclure des pièces jointes piégées ou des liens vers des sites Web malveillants.

Le phishing est un envoi d’e-mail qui prend l’apparence de banques, de services de paiements… Vous êtes invités à remplir un formulaire en ligne ou à cliquer sur un lien qui mène vers un faux portail de connexion. L’objectif de ce procédé est l’accès, entre autres, à vos mots de passe et noms d’utilisateur.

Ce qu’il faut faire… et ne pas faire

Certaines recommandations peuvent faire sourire, et pourtant…

  • Les noms de messagerie se volent. Il se peut, si ce n’est déjà fait, que vous receviez un jour un e-mail de… votre part ! C’est ce que l’on appelle de l’usurptation d’identité. Il arrive régulièrement que des comptes entiers d’entreprises soient subtilisés.
  • Mots de passe. On ne le dira jamais assez : changez régulièrement vos mots de passe et créez des codes ultrasécurisés uniques par site ou service (on estime à 20 % le nombre d’internautes qui se servent de leur date de naissance comme mot de passe). Notez les dans un carnet ou mieux, mettez une application dans votre ordinateur qui se connecte sur vos autres supports pour faire les changements automatiquement.
  • Lors d’une inscription sur un site, les identifiant et mot de passe doivent être différents.
  • N’ouvrez jamais un fichier venu d’un mail inconnu et ne cliquez pas non plus sur le lien ou l’image.
  • Vous avez un doute, vérifiez l’adresse mail. Si elle est de ce type : marlenwdfnedidier@indirsino.icu, passez votre chemin.
  • Votre banque vous écrit que vous êtes débiteur (vous trouvez le message « bizarre ») et qu’il suffit de cliquer sur le lien pour savoir ce qui se passe (pishing)… Allez donc directement sur le site de votre banque sans passer par l’e-mail. La BNP par exemple a eu son site copié : un e-mail semblable à celui de la banque vous envoyait sur un faux site.
  • Ne cliquez pas sur « unsubscribe » lorsque l’email est un spam.
  • Sites sensibles. Dès que vous le pouvez, passez à la double identification (mot de passe + code sur votre smartphone).
  • Mettre à jour son pare-feu et son logiciel d’exploitation.
  • En aucun cas, ne donnez des informations par retour d’e-mail. Privilégiez toujours d’aller directement sur le site en question.

Ce que vous devez avoir

  • Un antivirus, le bon sens. Tout d’abord investir dans une application antivirus et la mettre systématiquement à jour, sinon elle ne sert à rien. 
  • Une application pour les mots de passe, la logique. Possédez donc une application où vous mettez vos mots de passe à l’abri. Vous n’aurez pas besoin de vous en souvenir, elle le fera à votre place tout en vous proposant des mots de passe solides. Il en existe une multitude. Sans faire de publicité, Avast Passwords est gratuite pour son app de mots de masse et l’une des meilleures à utiliser, tant pour les sites que pour garder au chaud vos numéros de cartes bancaires.

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Les 50 ans d’internet – 1ère partie

Cinquante petites années déjà passées à vivre avec internet, ou du moins ses premiers messages car le « vrai » internet tel que nous le connaissons, est apparu avec le World Wide Web, autrement dit le fameux www qui commence la plupart des adresses des sites web.

Par Pascal Wolff

Deux dates et deux lieux ont tissé les fondations de l’internet tel qu’il existe aujourd’hui. C’est tout d’abord aux Etats-Unis que l’histoire commence avec la création de l’ARPA (Advanced Research Projects Agency) à l’agence DARPA du département américain de la Défense, lors de la guerre froide.

Années 1950-1960. Nous sommes en 1958. Les chercheurs de l’agence américaine imaginent très rapidement que l’ordinateur pourrait être un outil de communication. 

Années 1960-1970. En 1967, l’agence élabore un procédé de messagerie appelé IMP (Interface Message Processor), à partir d’un ordinateur de la taille d’un réfrigérateur et… 12 ko de mémoire.

Mais c’est à partir de ce fameux 29 octobre 1969 à 10h30 que provient la naissance d’internet : deux ordinateurs reliés entre l’université de Californie à Los Angeles et le Stanford Research Institute réussissent à  communiquer. Pour la petite histoire, les trois dernières lettres, à la suite d’un bug, mettront une heure pour arriver…

Ce réseau comptera deux nœuds supplémentaires (un nœud désigne un ordinateur) en décembre 1969 avec une nouvelle connexion entre deux autres universités. Les communications passeront entre 1971 et 1992 de vingt-trois à plus d’un million de nœuds.

La première utilisation

Le terme InterNet est un dérivé des mots International et Network qui signifie en français internet des réseaux.

Années 1970-1980. La première utilisation du mot, qui date de 1972, vient de Robert Kahn au cours d’une conférence internationale des ordinateurs et de la communication, mais son officialisation a été faite le 1er janvier 1983.

Années 1980-1990. Pendant les années 1980, les universités  se sont de plus en plus informatisées afin d’accéder à internet et communiquer des informations entre elles.  Cette augmentation de l’utilisation des réseaux provoqua en 1987 une multiplication du débit par vingt.

En 1989, la première page Web (photo ci-dessous) a été mise en ligne par le CERN (Centre Européen de Recherche Nucléaire). On la doit à Tim Berners-Lee, chercheur britannique. A l’origine du projet, baptisé « World Wide Web », l’échange d’informations en instantané entre scientifiques du monde entier. C’est ce développement d’une sorte de réseau postal pour lier des documents en ligne – baptisés plus tard « pages web » ou « sites internet » selon les cas, à mesure qu’ils s’étoffent et s’enrichissent – qui a donné les bases de l’internet tel que nous le connaissons aujourd’hui.

Première page web (© Cern)

C’est à partir de ce moment-là que le web s’impose comme la porte d’entrée principale.

Une révolution mondiale

A partir des années 1990, internet va révolutionner le monde et s’imposer comme le moyen de communication par défaut des êtres humains avec une intégration sans précédent de ses capacités. Les réseaux se déploient dans le monde entier. Le réseau internet grand public en France débute en 1994, mais ne se démocratise réellement qu’au début du XXIe siècle avec l’apparition de l’ADSL (Asymmetric Digital Subscriber Line) qui permettra l’utilisation d’une ligne téléphonique ou d’une ligne spécialisée pour la transmission ou la réception des données numériques de manière indépendante. 

En Asie, le Japon se raccorda au NSFNet en 1989, Singapour développa son réseau TECHNET en 1990, la Thaïlande reçut en 1992 une connexion Internet mondiale, et la Chine développa sa première connexion en 1994.

En Amérique du Sud, le Brésil, le Mexique ont été raccordés en 1991, l’Argentine en 1992, la Colombie en 1994.

Alors que tous les pays développés accédaient à internet avec leurs propres infrastructures technologiques, les pays en développement en étaient privés, subissant de plein fouet ce que l’on nomme aujourd’hui la fracture numérique liée, entre autres, aux facteurs économique et éducatif. Cependant, en 1996, un projet est lancé par l’USAID (Agence américaine indépendante chargée du développement économique et de l’assistance humanitaire dans le monde) pour le développement d’une connexion complète pour tout le continent africain. La Guinée, le Mozambique, Madagascar et le Rwanda reçurent leurs stations satellites en 1997, suivis par la Côte d’Ivoire et le Bénin en 1998. 

L’Érythrée a été le dernier pays africain à être connecté, en novembre 2000. Cependant, une très faible minorité de la population africaine a accès au réseau.

Il est à souligner que la Tunisie s’est imposée en 1996 comme un pionnier dans le monde arabe et africain en permettant l’utilisation commerciale et publique de l’internet.

Internet et web, l’indicible différence :Pour n’importe quel internaute aujourd’hui, les mots « internet » et « web » ont la même signification. Et pourtant, « internet » fête ses cinquante ans alors que le « web » n’en a que trente. Le web n’est qu’une application comme peuvent l’être toutes les applications existantes aujourd’hui, qui transite donc sur le réseau informatique mondial qu’est internet, ou pour être plus précis, communique sur un nœud gigantesque et sans centre névralgique de millions de réseaux sur lesquels des informations numériques, ou données, circulent par paquets.

Années Evénements
 1952  Semi-Automatic Ground Environment : système d’armes mettant en réseau 40 ordinateurs à autant de radars
1958 Les Laboratoires Bell créent le premier Modem permettant de transmettre des données binaires sur une simple ligne téléphonique
1961 Leonard Kleinrock du Massachusetts Institute of Technology publie une première théorie sur l’utilisation de la commutation de paquets pour le transfert des données
1962 Début de la recherche par DARPA, une agence du département de la Défense américain, où J.C.R. Licklider défend avec succès ses idées relatives à un réseau global d’ordinateurs
1964 Leonard Kleinrock du MIT publie un livre sur la communication par commutation de paquets pour réaliser un réseau
1967 Première conférence sur Arpanet
1969 Création du Network Working Group et connexion des premiers ordinateurs entre quatre universités américaines qui marque le point de départ du développement de la toile mondiale telle qu’on la connaît aujourd’hui
1971 23 ordinateurs sont reliés sur Arpanet. Envoi du premier courriel de 200 lignes par Ray Tomlinson. Le courrier électronique fait son apparition sous le nom de Netmail (Network Mail)
1972 Naissance de l’International Network Working Group, organisme chargé de la gestion d’internet. Création des premières adresses email qui permettent alors de localiser les systèmes sur le réseau
1973 Définition du protocole TCP/IP : TCP (Transmission Control Protocol) et IP (Internet Protocol)
1974 TCP/IP est créé pour uniformiser le réseau, un système toujours d’actualité
1979 Création des NewsGroups (forums de discussion Usenet) par des étudiants américains
1983 Arpanet adopte le TCP/IP qui sera la base d’internet. Arrive le premier serveur de noms de sites (serveur DNS)
1989 Invention du web. Le Centre Européen de Recherche Nucléaire (CERN) met en ligne la première page Web
1990 Disparition d’Arpanet (démilitarisé) et remplacé par internet (civil) et annonce publique du fameux www (World Wide Web) [Tim Berners-Lee] (1)
1993 Apparition du Navigateur web NCSA Mosaic
1994 Création de Netscape Navigator, premier navigateur commercial
1995 Le premier portail de commerce en ligne qui voit le jour est Amazon.com. C’est la naissance d’une nouvelle dimension commerciale
(1) Timothy John Berners-Lee est un informaticien britannique, principal inventeur du www, est également considéré comme l’inventeur du HTML. Il fut aidé à ses débuts par l’ingénieur et informaticien belge Robert Cailliau qui cosigna notamment avec lui, en novembre 1990, un document désormais entré dans l’Histoire et intitulé « WorldWideWeb : Proposition pour un projet hypertexte ».



Cœur et Travail – sous la direction de Bernard Pierre

Le temps passe vite et nous en sommes déjà à la troisième édition, à nouveau coordonnée et dirigée par notre ami le professeur Bernard Pierre, cardiologue et président de l’association Cœur et Travail.

L’ouvrage, préfacé par rien moins que les présidents des trois structures phare que sont la Société Française de Cardiologie, la Fédération Française de Cardiologie et le Collège National des Cardiologues Français, regroupe une soixantaine de chapitres rédigés par 70 auteurs reconnus, cardiologues ou médecins du travail pour la plupart.

Les deux précédentes éditions, dont Le Cardiologue s’était fait également l’écho, avaient connu un franc succès ; mais il est apparu d’évidence qu’un troisième traité s’imposait pour s’adapter aux attentes du lectorat actuel et permettre aux différents spécialistes concernés de « glaner » rapidement les informations nécessaires : données fondamentales (épidémiologiques, cliniques, paracliniques), critères d’évaluation cardiologique, critères d’évaluation du poste de travail, critères juridiques, et, couronnant chaque fin de chapitre, description des arbres décisionnels (ce qu’il faut toujours faire, ce qu’il ne faut jamais faire, ce qu’il faut discuter au cas par cas).

Le cœur a fait l’objet de nombreux textes réglementaires, et  de nouveaux arrêtés se font jour régulièrement, comme les nouvelles recommandations de maintien à l’emploi, parues sous l’égide de la Haute Autorité de Santé. Mais, comme le souligne dans son introduction le professeur Jean Dominique Dewitte, président de la société française de médecine du travail, la médecine du travail est aussi une discipline de la prévention qui s’inscrit clairement dans le cadre plus large de la santé publique. Et c’est bien l’une des préoccupations premières de l’ouvrage comme pourrait en témoigner son sous-titre « prévention, prise en charge, maintien dans l’emploi ».

C’est ainsi que reste plus que jamais impératif la collaboration entre le cardiologue et le médecin du travail, à charge pour le  premier d’évaluer les performances et les risques de nos patients, pour le second d’établir leur adéquation aux postes de travail.

« On ne va pas au travail pour risquer sa santé, voire sa vie, et cet ouvrage a l’ambition de contribuer à diminuer le risque encore trop élevé de se tuer au travail » ; c’est cette phrase qui termine la quatrième de couverture ! Acceptons-en l’augure et  proposons ce livre à tous les cardiologues légitiment désireux d’optimiser la prise en charge de leurs patients.

  • Auteur : Bernard Pierre
  • Editeur : Frison-Roche
  • Format : 16×24 cm
  • Prix public : Livre : 68,00 €



Tachycardie paroxystique et Applewatch 4.4

Dans certains cas, les objets connectés équipés d’un capteur électrique de l’électrocradiogramme peuvent être d’une aide importante de par leur facilité d’utilisation. Nous faisons cas ici d’un patient avec antécédents équipé d’une Applewatch.

Cas clinique

Homme de 71 ans, pléthorique, hypertendu, diabétique traité entre autres par hypoglycémiants oraux, sartan, diurétiques dont spironolactone et statine.

Antécédents de crises de tachycardies paroxystiques de type Bouveret documentées de longue date (figure 1). Ces troubles du rythme sont assez peu fréquents (moins d’une crise par trimestre) et les crises sont pratiquement toujours réduites par une manœuvre de Valsalva autogérée. Leurs durées sont de fait assez brèves entre quelques dizaines de secondes et quelques minutes. Une seule crise a été plus prolongée (90 mn) mais elle a cédé spontanément. De fait, la décision partagée entre le patient et son expert rythmologue a été ni de l’explorer ni de la traiter au long cours.

Alors que le patient était depuis peu en possession d’une Applewatch 4.4 version iOS 12.2 équipée de l’application de détection des accès de fibrillation auriculaire, il ressent le 22 avril 2019 plusieurs accès brefs. 

La facilité d’utilisation de la montre et de l’application lui permet de faire immédiatement un enregistrement électrique ECG, durant 30 s consécutives, correspondant à une dérivation D1 entre la face postérieure du boitier (dos du poignet gauche) et l’index droit au contact de la molette métallique de la montre. 

Dans le cas présent, le début des enregistrements ECG (figures 2 et 3) de très bonne qualité montre une tachycardie régulière à QRS fins proche de 150/mn, sans onde P clairement individualisable.

Après une manœuvre de Valsalva, on note, sur les deux enregistrements, une réduction brutale de la tachycardie avec sans doute un échappement jonctionnel, avec pauses respectivement à 1800 ms et 2400 ms, puis une restitution progressive d’une bradycardie sinusale autour de 50/mn.

Ces enregistrements sont immédiatement disponibles sur l’iPhone sous forme de pdf transférables si nécessaire sans retard à l’équipe médicale.

L’analyse automatique précise « fréquences cardiaques moyennes respectivement à 89/mn et à 95/mn. Aucun signe de fibrillation auriculaire »

COMMENTAIRES
Les plus

  • Grande simplicité et réactivité d’utilisation permettant des enregistrements ubiquitaires et instantanés.
  • Très grande qualité des enregistrements.
  • La capacité instantanée de transfert des fichiers ECG au cardiologue ou à son équipe.
  • Diagnostic positif : exact, c’est-à-dire effectivement pas d’AC*FA.

Les moins

  • Fréquences cardiaques moyennées sur les 30 secondes, ne prenant donc pas en compte les deux séquences très différentes de tachycardie et de bradycardie.
  • Limites : aucun élément diagnostic autre que la FA.

Discussion

L’algorithme de détection de la fibrillation a été validée scientifiquement [1] sur de grandes séries par des équipes de cardiologues prestigieuses…

Jusqu’à présent, il s’agissait d’une analyse faite à partir d’un recueil photopléthysmographique à partir de capteurs situés sur la partie arrière du boitier, avec une reconstitution virtuelle de la trace ECG.

Maintenant, il s’agit de l’enregistrement d’une dérivation électromyographique type D1 qui permet d’analyser réellement le tracé, avec la réserve d’une dérivation unique.

Dans le cas présent, il ne s’agit pas à l’évidence d’une TAC*FA, mais la qualité de l’enregistrement permet au cardiologue de faire aisément un diagnostic rythmique.

D’autres applications proposent avec des différents dispositifs connectés à une dérivation, comme Kardiamobile par exemple, une analyse algorithmique analogue, ayant également fait des études de validation multicentrique.[2] Dans l’étude en référence, l’analyse de l’enregistrement par un cardiologue permet une spécificité et la sensibilité diagnostique de 100 % par rapport à un ECG 12 dérivations. 

L’algorithme seul apportait un diagnostic positif dans 87 % des cas de FA et de 97,9 % de valeur prédictive négative. En revanche les performances sont nettement moins solides pour les autres troubles du rythme et surtout les troubles de conduction.

Mais ce qui est important, comme le soulignait l’expert rythmologue du patient en question, c’est moins le diagnostic de l’algorithme que la qualité du tracé… ce qui laisse encore une place prépondérante au cardiologue. n

Jean-François Thébaut – Paris

(1) M.P. Turakhia. Rationale and design of a large-scale, app-based study to identify cardiac arrhythmias using a smartwatch: The Apple Heart Study-AHJ ;207, January 2019,66-75
(2) J. C. L. Himmelreich Diagnostic Accuracy of a Smartphone-Operated, Single-Lead Electrocardiography Device for Detection of Rhythm and Conduction Abnormalities in Primary Care he Annals of Family Medicine 17(5):403-411 · September 2019

Figure 1. Tracé ECG de 2009.

Figures 2 et 3. Enregistrements de l’ECG sur l’AppleWatch.




De l’impression 3D à la bio-impression

A LIRE EGALEMENT.
La bio-impression

L’impression 3D existe depuis le début des années 2000 et s’est accaparée de matériaux tels le plastique, la cire, le métal (aluminium, acier, titane, platine), le plâtre, les céramiques et même le verre.
Si elle est utilisée dans de nombreux secteurs, le domaine de la Santé l’exploite dans la création de prothèses et d’implants (hanches artificielles, bras, appareils dentaires et auditifs…) ainsi que dans la réalisation d’exosquelettes.
L’impression 3D concerne également les médicaments dont la première commercialisation a eu lieu en 2016. La substance active, le lévétiracétam,  qui a été fabriquée sous forme de pilule, se dissout plus rapidement et facilite son ingestion par les personnes atteintes de dysphagie ou de troubles de la déglutition.

Le premier développement de la bio-impression date de 1988. C’est en 2002 que le premier organe, un rein, a été imprimé à échelle réduite et un système modifié pour le dépôt de cellules dans des matrices tridimensionnelles placées sur un substrat a vu le jour en 2003. (1)
La bio-impression est une innovation qui positionne simultanément des cellules vivantes et des biomatériaux couche par couche afin de réaliser des tissus vivants dont l’utilisation principale des organes imprimés est la transplantation.
C’est une startup française, Poietis, qui commercialise la première le tissu de peau humaine bio-impression par laser. Elle a d’ailleurs récemment signé un partenariat avec Prometheus (2) dans l’ingénierie tissulaire telle que la production de tissus vivants implantables fabriqués in vitro (les cellules souches ainsi réalisées sont capables de se transformer en n’importe quel organe).

(1) L’impression 3D d’organes a été pour la première fois employée en 2003 par Thomas Boland de l’Université de Clemson qui a breveté l’utilisation de l’impression de jet d’encre pour les cellules.
(2) Prometheus, département d’ingénierie tissulaire de l’Université catholique de Louvain (Katholieke Universiteit Leuven).

© poetis




Le Sanjusangen-do à Kyoto de l’époque Heian (Partie 1)

Considéré comme la plus grande construction en bois du monde, le Rengo-in, appelé familièrement le Sanjusangen-do, fut fondé en 1164 à la demande de Go-Shirakawa (1127-1192). Sanjusangen-do signifie « temple aux trente trois travées », le nombre d’intervalles entre les piliers soutenant son architecture de bois. Le chiffre 33 renvoie au nombre de formes possibles de la déesse Kannon.

Le Rengo-in, temple Shingon

Initialement, 1001 statues de la déesse Kannon du sculpteur Kojyo (un disciple de la quatrième génération de Jocho) occupaient toute la surface du bâtiment. Il fut détruit par un incendie qui ravagea Kyotoen en 1249, l’empereur Gosaga le fit reconstruire à l’identique, dés 1251. Il compléta, en 1266, les 1001 statues de la déesse Kannon de trente sculptures supplémentaires. La grande porte d’accès date de 1590. Le temple hall, très long et très étroit, de 118,2 m. de long, possède trente cinq travées sur le côté est et cinq sur la face nord. Le toit de tuiles progressivement incurvé est propre aux temples japonais. Poutres, chevrons, constituent la charpente élaborée selon la construction traditionnelle Keshou-Yaneura, usitée depuis la période de Nara (710-714), nulle part plus exquisément représentée qu’au Sanjusangen-do.

1. Le Sanjusangen-do.

Les divinités

Au centre, trône l’image principale de la déesse Kannon aux onze petits visages (sur sa tête couronnée) et mille bras symbolisés ici par vingt paires de bras qui représentent 50 vies à sauver dans l’univers bouddhiste. Assise sur une feuille de lotus, aux yeux de cristal, elle fut élaborée par Tankei (1173-1256), originaire de Nara, le fils et l’élève du maître sculpteur Unkei (4).

2. Kannon aux onze petits visages et mille bras. Bois laqué, doré, H. 3,33 m, vers 1256.

La formation de cette sculpture répond à la technique appelée Yosegi-zukuri. Plusieurs planches de bois assemblées composent le corps qui est ensuite sculpté.

Enfin la statue est peinte, laquée et recouverte d’une couche d’or. De chaque côté de la déesse, debout en position frontale sur une fleur de lotus, les 1 000 statues de Bodhisattva Kannon (cent vingt à cent cinquante d’entre elles furent sauvées de l’incendie) sont installées sur 10 rangées d’estrade, selon un ordre parfait.

3. Tankei, Bodhisattva Kannon aux mille bras. Bois laqué doré, entre 1251 et 1256.

Possédant 21 paires de bras, au premier regard, elles semblent identiques, en fait, elles sont toutes différentes les unes des autres. Ces effigies en bois de grandeur nature, en apparence plus simple que l’effigie centrale, sont conçues par les plus grands sculpteurs de l’époque sous la direction de Tankei, selon la même technique que la déesse Kannon.

La réalisation de cet ensemble prit une quinzaine d’années. Toutes portent les mêmes attributs que l’image principale et notamment un œil (5) dans la paume de la main d’un de leur bras. Certaines gardent la signature de leur concepteur.

Devant cet ensemble trente autres sculptures en bois impressionnent les visiteurs. Elles représentent Raijin, Fujin et les vingt huit déités, serviteurs (Nijūhachi Bushū) de Kannon. Ces dernières évoquent les vingt huit constellations du bouddhisme ésotérique (le Shingon), dont les deux gardiens traditionnels des temples repoussant les forces du mal : Missha-Kongo (Vajra-Pani) et Naraen-Kengo (Narayanja).

Ces derniers se trouvent normalement à la porte d’entrée des sanctuaires nommée Niomon (porte des Ni-oh). Missha Kongo, la bouche ouverte, symbolise la première syllabe du sanskrit qui se prononce « a ». Naraen Kongo, la bouche fermée, symbolise la syllabe « hum » (toutes deux se référant à la naissance et la mort de toutes choses ; la contraction des deux sons [Aum] évoque « l’absolu » en sanskrit). Ils représentent « toute la création ». Misshaku Kongo, également appelé Agyo (en référence à la syllabe « a »), est un symbole de la violence manifeste : arborant un air menaçant, il brandit un vajra (arme rituelle, symbolisant la foudre ou le soleil). Naraen Kongo, également appelé Ungyo (en référence à la syllabe « hum »), est représenté mains nues (ou parfois armé d’une épée), symbolisant la force latente, gardant la bouche fermée. Les autres représentations sont des dieux ou des esprits de beauté, de bienséance, de sagesse, de charité, de solidarité… Ils servent Kannon et protègent les croyants de tous les dangers.

4. Tankei (1173-1256), Bodhisattva Kannon aux mille bras. Bois laqué, doré, entre 1251 et 1256, n° 40.

Nous découvrons curieusement une image de Garuda, le gigantesque oiseau véhicule du dieu indou Vishnu, une illustration caractéristique du syncrétisme de la civilisation japonaise. Ailleurs, le dieu du vent, Fujin tenant sur ses épaules un sac rempli de vent et le dieu du tonnerre, Raijin sont debout sur un piédestal en forme de nuage. Toutes ces statues de bois coloré, marquées par l’héroïsme, aux muscles saillants, au drapé fluide et au visage farouche, d’un naturel exacerbé, expriment la puissance, le dynamisme.

Dans l’année 32 de l’ère Showa (1957) l’ensemble fut restauré et les attributions optimisées. Ainsi seules neuf statues de Bodhisattva Kannon reviennent à Tankei, les autres appartiennent à son école, comme celles dues à Koen (6) et les autres par des artistes des écoles In (Inkei mort en 1179, Insho, Inga) et En (Ryuen, Seien) de Kyoto.

Go-Shirakawa. Le prince Masahito, le quatrième fils de l’empereur Toba, devint le soixante-dix-septième empereur du Japon, sous le nom de Go-Shirakawa en 1155. Il abdiqua en 1158 à la faveur de son fils, l’empereur Nijo, tout en continuant à gouverner par l’intermédiaire de l’insei (gouvernement des empereurs retirés) jusqu’à sa mort. Son nom posthume lui fut donné en mémoire de l’empereur Shirakawa (le préfixe Go signifiant « postérieur », soit « Shirakawa II ».) Adepte du Bodhisattva Kannon, il diffusa la religion bouddhiste à travers tout le pays. Lors de la rébellion de Hogen (2) les guerriers samouraï installés dans les domaines provinciaux s’emparèrent du pouvoir impérial. Sa tombe se trouve à proximité du temple Rengo-in.

La déesse Kannon. Dans le bouddhisme du Mahayana, du Grand Véhicule, le Bodhisattva Kannon est surnommé la déesse de la compassion. Kan signifie : observer, on signifie le son, « celle qui entend les cris du monde. Elle possède tous les mérites et vertus, et regarde tous les êtres sensibles avec un regard compatissant ». Si au Japon elle se nommait Kannon, elle changeait de nom selon les pays où elle était vénérée. En Inde elle s’appelait Avalokitesvara (3), au Tibet, Chenrézi (dont le Dalaï Lama est une émanation), sans doute le bodhisattva le plus vénéré et le plus populaire par les bouddhistes du Grand Véhicule.

(1) L’ère Heian (794-1185) succède à l’époque de Nara (710-794) et d’Asuka (IVe siècle-710) et est suivie par l’époque de Kamakura (1185-1333) puis de Muromachi (1336-1573).
(2) La rébellion de Hōgen, est une courte guerre civile survenue en l’an 1156 qui impliqua les trois plus puissants clans de l’époque, les Minamoto, les Taira et les Fujiwara, dans une lutte pour la domination de la cour impériale de Kyōto.
(3) Avalokitesvara, habituellement de sexe masculin, est en Chine et au Japon considéré comme de sexe féminin, bien qu’aucun texte canonique ne puisse venir à l’appui d’une telle détermination.
(4) Unkei, né aux alentours de 1151 et mort en 1223, était un sculpteur d’images bouddhiques originaire de Nara à la fin du XIIe et au début du XIIIe siècle, appartenant à l’école Kei de l’époque de Kamakura. Il fut honoré du plus haut titre ecclésiastique pour les sculpteurs bouddhiques, obtenant le titre suprême de Hoin, en 1203.
(5) Idée peut-être d’origine tibétaine et symbolisant la vision omniscience d’Avalokitesvara.
(6) Koen : fils de Koun, deuxième fils d’Unkei, travaille avec Tankei et prend la direction de l’atelier à sa mort.




Mas Llossanes rosé 2017 Côtes Catalanes

Qui en doute encore ? Même pas moi ! … Le rosé est maintenant un vin de prestige et de gastronomie présent dans les restaurants les plus huppés et, cocorico, la France caracole en tête de la production mondiale et exporte massivement aux Etats-Unis, malgré Trump ! Parmi les nombreuses régions productrices, le Roussillon émerge, car son terroir permet de produire d’excellents rosés grâce, en particulier, au cépage cinsault, dont la finesse, le fruité, la douceur des tanins sont bien mis en valeur par le pressurage direct.

C’est sur les contreforts des Pyrénées au milieu de 12 ha de maquis à 700 m d’altitude que se niche un des plus hauts vignobles français : le mas Llossanes. J’avais déjà été séduit par son rouge Dolmen puissant et très aromatique des côtes Catalanes, j’ai été conquis, durant cet été caniculaire, par son rosé.

Le domaine se situe à cheval sur les villages de Tarerach et Arboussols en face du mont Canigou. Les 11 ha de vignes, nées dans les années 1940, prennent racine sur des sols de schistes et d’arènes granitiques à flanc de montagne regardant la mer. Un magnifique dolmen du néolithique sur ces terres l’identifie comme un lieu de culte : un lieu saint (Llossanes en catalan). 

Une vivacité rare pour un vin méditerranéen

Depuis 2016, Solenn et Dominique Génot ont acquis ce domaine, elle sommelière, lui ingénieur agronome et œnologue, après avoir passé 10 ans à gérer une propriété réputée en Toscane. Quarantenaires, ils décident de s’épanouir en choisissant l’exceptionnel terroir du mas Llossanes, les magnifiques paysages du Roussillon guidés par leur goût pour les vins du sud et aussi l’attractivité du foncier. L’altitude, le climat marquent leurs vins d’une fraîche vivacité rare pour un vin méditerranéen. Dès leur arrivée, le vignoble bénéficie d’une culture biologique (certifiée) et biodynamique. Tout en bannissant les produits chimiques, ils travaillent les sols au tracteur et à cheval. Les vignes sont stimulées par des apports de compost et de préparations biodynamiques. En toute logique, les vendanges sont exclusivement manuelles. 

La philosophie bio et biodynamie

En cave, la même philosophie bio conduit la vinification : limitation au minimum des interventions, et des intrants, utilisation de levures indigènes, doses faibles (> 40 mg/l) de sulfites, pas d’enzymage, ni de produits exogènes. Le rosé est un 100 % cinsault issu de vignes âgées de 40 à 80 ans. Les raisins non égrappés sont pneumatiquement pressés délicatement et très lentement, pour préserver vivacité, fraîcheur et rehausser la couleur lors de la macération dans le pressoir. La fermentation à basse température et la maturation pendant 3 mois sur lies fines s’opèrent dans des cuves en acier inox, la fermentation malolactique secondaire adoucit l’acidité. Ensuite il faut encore 3 mois de vieillissement avant la mise, sans collage, en bouteille fermée par un bouchon en verre.

Habillé d’une robe rose brillante tirant sur l’orange et l’ambre, ce rosé du mas Llossanes 2017 (2 ans de vieillissement minimum sont nécessaires, pour qu’il s’ouvre et gagne en maturité) exprime de délicats et gourmands arômes de petits fruits rouges : groseille, fraise des bois, des parfums floraux d’herbes résineuses et de garrigue. Une touche inattendue de cardamone renforce la personnalité de ce vin. 

La bouche frémit sous l’effet d’un grand courant de fraîcheur, de vivacité et de minéralité et répand les sucs délectables d’un fruité croquant et savoureux. Une texture rafraîchissante, vive et glissante, des tanins soyeux, une longue finale salivante vivifiée par des notes de fraise, de peau de pêche, de laurier et romarin confirment la haute qualité de ce vin.

Un vrai vin de gastronomie

Et quel meilleur moment, pour déguster ce rosé que celui de passer à table ? De l’entrée au dessert, la liste des accords est ici inépuisable. Ce rosé sera parfaitement adapté, pour accompagner les entrées provençales : pissaladière, petits farcis niçois, tomates sous toutes formes : gaspacho, tarte friande, farcies, crues avec burrata, mais aussi carpaccio de thon rouge, tartare de bar. 

Son origine catalane appellera les anchois : marinés, en anchoïade, dans une salade niçoise, voire une tartine de poutargue. 

Ses arômes de cardamone se marieront avec la cuisine indienne : samoussas, pakoras, bhajji aux oignons. Le mas Llossanes rosé donnera une note festive et rafraîchissante à votre barbecue de saucisses, merguez et brochettes, ou de poissons : sardines, rougets. Servi bien frais, il calmera le feu de la rouille d’une bouillabaisse ou de l’harissa d’un couscous. Il poursuivra le repas sur un chèvre frais à l’huile d’olive, un Saint-Nectaire fermier ou un brocciu corse.

Pour les desserts, ce sont certainement les fruits rouges, simplement : en sorbet, tartelette, salade ou plus sophistiqués : sabayon à la framboise, pannacotta à la fraise qui l’accompagneront le mieux.

Ce vrai vin de gastronomie que vous pourrez déboucher en toute saison, illustre parfaitement la philosophie du couple Génot : « L’objectif, poursuivi par nos choix, est d’exprimer au mieux la personnalité du terroir, sans jamais le maquiller, ni le masquer ».

Solenn et Dominique Genot – 66320 Tarerach

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération




Le Sanjusangen-do à Kyoto de l’époque Heian (Partie 2)

Le Bouddhisme… Shingon

Le bouddhisme venu de la Chine, transmis par l’intermédiaire de la Corée, apparut au Japon vers le milieu du VIe siècle. On cite les années 538 et 552, comme dates des premiers tributs incluant des figures de Bouddha et de textes de sutra. Il se heurtera à la religion traditionnelle, le shintoïsme (7). 

Raijin, Dieu du tonnerre, bois peint, grandeur nature, vers 1256.

Mais soutenu par la cour impériale il deviendra religion d’état par décret du prince Shotoku en 587 qui fit ériger, par des spécialistes coréens, des temples selon le modèle chinois. Sous les périodes Asuka et Nara, le Bouddhisme prit un essor considérable. Des clans influents l’adoptèrent. Les temples bouddhiques furent des lieux d’instruction et d’éducation, des écoles de lettrés. La religion devint syncrétique, associant des pratiques bouddhistes, taoïstes, avec des éléments chamaniques et shinto. À la fin de l’ère Nara, apparurent deux nouvelles écoles, associées au Bouddhisme ésotérique du Grand Véhicule (8) : Shingon et Tendai. Saicho (767-832), le premier moine à quitter Nara mit en pratique une nouvelle doctrine, le Tendai qualifiée de « parfaite et de soudaine », célébrant le Sutra du Lotus. Lors de son séjour en Chine (de 803 à 806), le moine Kukai (774-835) [9] avait été initié par un grand maître à la doctrine secrète de « la véritable parole ». Grand érudit, il étudia le sanscrit, la calligraphie, la poésie et les arts manuels. Il fonda le Bouddhisme Shingon (10), une école qui résume son idéal dans les mots « Nyojitsu Chisjishin » signifiant « La vérité, connaître son propre esprit tel qu’il est vraiment ». Parvenir à l’état de Bouddha ne requiert point plusieurs vies mais peut être réalisé dans cette existence même, par la pratique des 3 mystères : la juste pensée (contemplation des mandalas), la juste parole (récitation des mantras) et la juste action (exécution des mudrâ [11]).

Naraen Kongo (gauche), et Missha Kongo (droite), bois peint, H. 1,66 m, vers 1256.

Cette doctrine fascinait, par ses rites magiques, le public superstitieux du début de l’époque Heian. Il appartient à l’une des lignées les plus anciennes du bouddhisme tantrique, le Vajrayana. Il enseigne la répétition des mantras, la méditation et la gestuelle rituelle. Avec environ 12 millions de fidèles, c’est un des courants majeurs du bouddhisme japonais. Durant l’ère de Kamakura (1185-1333) plusieurs autres écoles bouddhiques se développèrent, toujours actives aujourd’hui. Le Jodo, l’école de la « Terre Pure », révère le Sutra de la Terre Pure et la dévotion auprès du Bouddha Amida (12). Le Jodo-Shinski, l’école de la véritable école de la Terre Pure, enseigne en plus de la précédente l’humilité et la loi dans l’amour du Bouddha Amida. Le Nichiren, du nom de son fondateur, révère le Sutra du Lotus et la seule répétition de ce sutra suffit pour atteindre le paradis. Le Zen comporte différentes écoles (13). Il prône l’enseignement direct du maître à élève, et recherche l’illumination intérieure de l’individu par la méditation (notamment sur des phrases paradoxales) et certaines postures corporelles.

Fujin, dieu du vent, bois peint, grandeur nature, vers 1256.

(7) Le Shintoïsme est une religion polythéiste avec des dizaines de milliers de divinités (Kami). Jusqu’à l’aire Meiji (1868-1912), Bouddhisme et Shintoïsme évoluèrent ensemble et se mélangèrent. Le plus grand sanctuaire Shinto se trouve à Ise.
(8) Les écoles de Nara prônaient le Hinayana (le Petit Véhicule).
(9) Kukai représente aux yeux des Japonais, le modèle du génie universel qui a marqué la culture et l’art du début de la période Heian.
(10) Traduction du mot sanskrit mantra (confection de diagramme représentant la Divinité et ses forces, ou bien des groupements de divinités, la meilleure manière de représenter l’univers invisible), le mot shingon signifie « vraie parole ».
(11) Mudrâ : exercer des gestes symboliques (positions des mains) qui symbolisent des forces et des manifestations divines utilisées par les moines dans leurs exercices spirituels.
(12) Amitabha, le Bouddha de l’au-delà appelé Amida au Japon, également le bouddha du pouvoir intellectuel. Grâce à la compassion d’Amida, les êtres naissent dans la Terre pure où ils peuvent réaliser plus facilement l’éveil.
(13) Les écoles rinzai (privilégie l’enseignement par le kôan – énigme illogique que le maître pose au disciple pour évaluer son état de spiritualité), Sōtō et Ōbaku.

Bibliographie

1/ COQUET, Michel, Shingon : Le bouddhisme tantrique japonais, Paris, Guy Tredaniel, 2004, 336 p.
2/ FREDERIC, Louis, Les Dieux du bouddhisme, Paris, Flammarion, 2006 (1992), 360 p.
3/ HEMPEL, Rose, L’âge d’or du Japon. L’époque Heian (794-1192), Fribourg, Office du Livre, 1983, 253 p.
4/ Le Japon, un portrait en couleur, Doré Ogrizek, dir., Paris, Odé, 160, 254 p.
5/ RAWSON, Philip, L’art du tantrisme, Paris, Thames and Hudson SARL, 1995, 216 p.
6/ SHIMIZU, Christine, L’art Japonais, Paris, Flammarion, 2014 (2001), 448-XXXII p.




La bio-impression

Il y a encore peu, la bio-impression version 2019 aurait relevé de la science-fiction. Mais depuis que chercheurs, ingénieurs et biologistes, s’en sont emparés il y a près de vingt ans, son développement a été considérable, tant dans les différents procédés que les matières symbolisant à elles seules le futur.


C’était en 2013, il y a tout juste six ans que Will Shu (1) avait mis au point avec son équipe une imprimante 3D capable de former des amas de cellules souches embryonnaires, sans les abîmer ni les dénaturer. Mais l’impression d’organes entiers relevait encore du simple fantasme.
C’est en 2015 que les premières structures biologiques tridimensionnelles complexes sont imprimées couche par couche dans une matière gélatineuse dans un bain de gel qui sert de support. Ce principe, qui a la particularité de fondre ce gel à la température du corps, ne détériore les cellules bio-imprimées.
En 2019, les scientifiques et ingénieurs ont considérablement progressé dans leur capacité à intégrer des organes fonctionnels en bio-impression après avoir mis au point une méthode de reconstruction des composants du cœur humain.
Jusqu’à maintenant, la bio-impression, bien qu’avancée dans la recherche de la Santé (notamment les greffes de peau), avait des difficultés à reproduire des biomatériaux complexes, mous et dynamiques.
C’est début août dernier que des chercheurs de l’Université Carnegie-Mellon (2) ont publié leurs résultats dans la revue Science, et ils sont impressionnants : ils ont réussi à bio-imprimer en 3D un organe complexe fonctionnel, à savoir un cœur humain en améliorant la technologie FRESH (3) brevetée par la startup Fluidform 3D. qui a consisté en la réalisation d’un gel temporaire pour éviter le phénomène d’affaissement des matériaux mous.
Le résultat de ces recherches a permis l’impression d’un cœur humain avec toute sa complexité de reproduction : cellules, vaisseaux sanguins, valves et même battement des ventricules. Selon le cofondateur de Fluidform, Adam Feinberg, « Nous avons maintenant la capacité de réaliser des impressions qui reproduisent les propriétés structurelles, mécaniques et biologiques essentielles des tissus natifs ».

Une reproduction fidèle…

Préalablement scanné par IRM, le cœur imprimé est la reproduction fidèle de la structure anatomique du patient et parfaitement fonctionnel, selon les chercheurs, jusqu’à la synchronisation des contractions.

… et une avancée médicale importante

Tous les organes complexes sont bien sûr concernés par le résultat de ces recherches. « L’impression par FRESH du collagène et d’autres biomatériaux mous est une plate-forme dont le potentiel est de construire des structures pour une large gamme de tissus et d’organes », précise le communiqué.
Mais les chercheurs préviennent : il faudra attendre encore quelques années avant une utilisation médicale à grande échelle. Pour accélérer les progrès, ils ont d’ailleurs développé des modèles open source qui pourront servir de socle à des laboratoires médicaux et à des étudiants.

Source Numérama, Science, 3dnatives, Fluidform3d, futura-sciences.
(1) Chercheur à l’université Heriot-Watt d’Édimbourg, avait publié ses résultat dans la revue Biofabrication.
(2) Pittsburgh (Pennsylvanie).
(3) Freeform Reversible Embedding of Suspended Hydrogels.




Atlas d’anatomie humaine – 7e édition

On pourrait en préambule demander que ceux qui ne connaissent pas « le Netter » lèvent le doigt, tant il représente, depuis plus de 25 ans, l’Atlas de référence internationale.

Comme chacun sait, le succès de cet ouvrage réside dans la qualité et la beauté du travail du Dr Frank Netter, ainsi que ceux du Dr Machado, cardiologue, parmi les plus grands illustrateurs médicaux au monde. Ensemble, ces deux médecins-artistes au talent hors du commun mettent en évidence le corps humain du point de vue du clinicien.

Cette septième édition s’enrichit de nombreux contenus, la rendant encore plus précieuse et didactique :

  • Une nouvelle section « vue d’ensemble des systèmes » offre une vue complète des vaisseaux, des nerfs et des lymphatiques.
  • Plus de 25 nouvelles illustrations du Dr Machado présentent les structures anatomiques ayant une implication clinique (dont par exemple – pour le Cardiologue – les veines profondes des membres inférieurs), ainsi que des zones difficiles à visualiser.
  • De nouveaux tableaux cliniques à la fin de chaque section régionale se concentrent sur les structures qui ont une signification clinique particulière ; ces tableaux fournissent des résumés rapides, qui précisent dans quelles illustrations ces structures sont les mieux visibles.
  • Plus de 50 nouvelles images radiologiques utilisant les nouveaux outils d’imagerie médicale permettent de relier l’anatomie illustrée à l’anatomie vivante pour aider à la compréhension et à la pratique quotidienne.

La terminologie internationale – Terminologia Anatomica – a été mise à jour, l’ancienne ayant été intégrée entre parenthèses pour faciliter la compréhension.

Enfin, et peut-être surtout, cette septième édition donne accès aux compléments en ligne français – planches à légender, QCM avec réponses commentées ainsi que 100 cas cliniques – et à l’ensemble des compléments en ligne américains – nouveaux modèles tridimensionnels, vidéos de dissections, planches commentées.

Le cardiologue se « jettera  sur la section 4 (Thorax) » et, plus précisément, sur les célébrissimes planches sur les valves et les cavités cardiaques que les échographistes doivent (en principe) bien connaitre.

L’anatomie est la mère de toutes les disciplines médicales et chirurgicales, rappelle dans sa préface Jean-Pierre Richer, anatomiste et professeur des Universités à l’université de Poitiers ; ce remarquable ouvrage en est la parfaite illustration !

Cet Atlas reste bien LA référence indispensable à tous les étudiants en médecine, et bien au-delà à tous les chirurgiens  et médecins soucieux d’impliquer l’anatomie dans la résolution de problématiques cliniques. 

Un monument !

  • Auteur : Frank H. Netter
  • Editeur : Elsevier Masson
  • Pagination : 672 pages
  • Prix public : Livre : 85,00 €



Les drones en bonne santé…

Au Ghana, sang et médicaments tombent du ciel…

Malgré les critiques de l’Association médicale du pays, le Ghana a récemment lancé une flotte de drones transportant des fournitures médicales dans des zones isolées pour 12 millions de dollars. La présidente, Nana Akufo-Addo, a déclaré qu’elle deviendrait le « plus grand service de livraison de drones au monde ».

Chaque jour, ce sont près de 600 vols de drones qui devraient être effectués, apportant vaccins, fournitures de sang et autres médicaments pour douze millions de ghanéens.

Le service fonctionnera à partir de quatre hubs, chacun hébergeant 30 drones. 

Conçus par une entreprise américaine, Zipline, les drones, qui peuvent transporter une charge de 1,8 kilo, ont déjà été utilisés au Rwanda avec 13 000 livraisons dont un tiers était des fournitures d’extrême urgence.

… alors qu’un rein atterri au Maryland

Un drone spécifique pour pouvoir transporter et surveiller un organe humain a livré son premier rein au centre médical de l’Université du Maryland. Techniquement, il a volé grâce à huit rotors et plusieurs groupes motopropulseurs en respectant la réglementation de la FAA (Federal Aviation Administration), et capable de supporter le poids de l’organe, des caméras, des systèmes de suivi, de communication et de sécurité, au dessus d’une zone urbaine densément peuplée.

Ce premier vol réussi devrait inaugurer cette méthode de transport considéré comme plus rapide, plus sûr et plus largement disponible que les méthodes dites traditionnelles.

Selon le United Network for Organ Sharing, qui gère le système de transplantation d’organes aux États-Unis, en 2018, environ 1,5 % des envois d’organes de donneurs décédés n’arrivent pas à la destination prévue et près de 4 % des envois d’organes ont un retard imprévu de deux heures ou plus.




Le Health Data Hub – la plate-forme des données de santé en France

Le lancement de cette nouvelle plate-forme de données, avec un budget de 80 millions d’euros sur quatre ans, verra le jour dans quelques semaines.

Voulu par Emmanuel Macron, le Health Data Hub rassemblera l’ensemble des données de santé (NDR : Assurance-maladie pour la partie facturation, données clinique, scientifique et médicale pour la partie santé), qui sont pour le moins actuellement éparpillées, le but étant de les croiser afin de trouver des corrélations et contribuer à favoriser l’innovation médicale par le traitement de volumes massifs de données de santé.

Le premier appel à projets a retenu dix lauréats (1) qui a déjà donné quelques chiffres : environ 53 000 dossiers sur le sarcome (type de tumeurs) de NetSarc (réseau français de référence clinique pour les sarcomes des tissus mous et viscéraux), 250 000 images issues de l’e-SIS Gard/Lozère ou encore près de 20 000 dossiers de patients atteints de la maladie de Parkinson. Ce système permettra, selon la ministre de la Santé, de mettre au service du plus grand nombre « un patrimoine de données de santé dans le respect de l’éthique et des droits fondamentaux des citoyens. »

Le point de vue de Sanofi

Sanofi collabore avec l’équipe du Health Data Hub afin d’étudier les partenariats et de réfléchir à tous les usages possibles des données hébergées. Mais tout en saluant la démarche des pouvoirs publics pour la création de cette plateforme, Bernard Hamelin (Sanofi) [2] considère que la France (ainsi que l’Europe) souffre d’un déficit réel de plateformes d’intégration de données. Selon lui, la formidable richesse des données et de sa mise à disposition doit répondre aux problèmatiques de l’industrie dans un pays les plus avancés dans le domaine des applications.

Les principales missions du Health Data Hub

1. Mise à disposition d’une plateforme de partage des données.
2. Transparence et sécurité des données partagées.
3. Qualité des données.
4. Guichet unique avec un point d’entrée clairement identifié.
5. Mutualisation des technologies et expertises.
6. Promotion de l’innovation.

(1) Deepsarc (NetSarc), Parcours IDM (ARS Ile-de-France), Pimpon (Vidal), Hydro (Implicity), NS Park (ICM, l’Inserm et F-CRIN), ARAC (Malakoff Médéric Humanis), ORDEI (ANSM), OSCOUR (Appui), Deep Piste (Epiconcept), Retrexis (CHU de Limoges).

(2) directeur monde de Sanofi en charge de la production de preuves médicales.

Sources : Les Echos – ticpharma 




Virus : Baltimore, devenue ville fantôme

La ville de Baltimore est en proie depuis le 7 mai dernier à une cyberattaque de type ransomware. La principale conséquence est un blocage partiel des systèmes informatiques de l’agglomération.

Au total, 10 000 ordinateurs auraient été touchés dont le serveur central et la messagerie de la ville ainsi qu’un grand nombre de téléphones portables. La ville n’émet plus de facture d’eau ou autres amendes de stationnement par exemple.

Le comble, et le plus inquiétant également, est que ce ransomware a été conçu en partie par la NSA (National Security Agency) qui se l’était fait voler en 2017, sans retrouver la moindre trace des pirates.

La mairie ayant refusé de payer la rançon exigée par les hackers.

Baltimore est la troisième grande ville américaine, après Atlanta et San Antonio, à être affectée par une cyberattaque.




Guide pratique de la maladie veineuse thromboembolique

Comme l’écrit si justement dans sa préface le Pr Ismail Elalamy, actuel président de la société française d’angiologie, « la maladie thromboembolique veineuse est un ennemi majeur de santé publique avec son incidence croissante (ndr : quand elle n’est pas mortelle), et ses conséquences délétères sur la qualité de vie ».

Regroupant la maladie veineuse et l’embolie pulmonaire, elle correspond à la troisième cause de mortalité cardiovasculaire, derrière l’infarctus du myocarde et l’accident vasculaire cérébral.

Depuis plus de cinquante ans, les progrès techniques d’imagerie médicale et l’avènement des différentes formes d’anticoagulants ont permis de mieux connaître cette pathologie qui doit être appréhendée comme une affection chronique nécessitant un suivi médical au long cours. Or, ce suivi ne peut s’envisager qu’à travers une mise à jour régulière des connaissances, et c’est précisément l’objet de cet ouvrage.

L’arrivée sur le marché des anticoagulants oraux directs fait partie des évolutions qui ont modifié les schémas thérapeutiques de cette maladie ; les résultats des nombreuses études cliniques déjà réalisées ou en cours vont permettre de définir de nouvelles recommandations dont les plus récentes sont synthétisées dans ce guide pour offrir une stratégie diagnostique et thérapeutique adaptée à chaque situation.

Cet ouvrage aborde les trois dimensions de cette maladie aigüe puis souvent chronique : les bases physiopathologiques, les approches diagnostiques et les propositions thérapeutiques. 

L’approche est clairement didactique avec des chapitres bien différenciés, des schémas et tableaux très nombreux et clairs et de multiples questions pratiques destinées à faciliter la pratique clinique dans son exercice quotidien.

L’auteur, le docteur Ariel Tolenado, spécialisé en échographie-doppler et en laser vasculaire, a déjà rédigé plusieurs ouvrages sur les maladies vasculaires ; homme de terrain autant qu’expert, il veille à apporter un éclairage synthétique en faisant le tour des recommandations les plus récentes sur le sujet.

Paru aux éditions Med-Line dans la série des guides pratiques, l’ouvrage s’adresse aux étudiants comme aux médecins généralistes et vasculaires, et faut-il le préciser, à tous les cardiologues désireux de ne pas délaisser cette pathologie si fréquente et potentiellement si grave.

  • Auteur : Ariel Toledano
  • Editeur : Med-Line
  • Pagination : 210 pages
  • Prix public : Livre : 15,00 €



Les virus

Le virus est à la mode ! Particuliers, industriels, partis politiques, commerces,… tout le monde est touché par ce fléau, telle la ville de Baltimore qui en a récemment fait les frais (encadré). Pour être – un peu moins ignorant – il est important de connaître les principaux mode de virus existants pour savoir s’en préserver et… s’en débarasser au cas où.

La bombe logique est un programme installé dans le système en attendant un événement (date, action, données particulières…) pour s’exécuter. Elle est généralement utilisée dans le but de paralyser temporairement des serveurs afin de nuire à leur fonctionnement.

Le spyware est un mouchard qui peut enregistrer différents types de données : sites visités, requêtes tapées dans les moteurs de recherche, données personnelles, type de produits achetés, informations bancaires. Ces informations sont exploitées à des fins de profilage pour l’envoi de publicités ciblées sur les centres d’intérêt de la personne qui a été espionnée.

Le keylogger espionne les frappes de clavier de l’ordinateur qui l’héberge afin de les transmettre à un pirate. Ce système permet ainsi de recueillir les mots de passe, codes de carte bancaire, intitulés sous lequel vous ouvrez une session…

Le backdoor est un cheval de Troie caché dans un logiciel, un service en ligne ou un système informatique afin de surveiller, copier ou détruire des données, de prendre le contrôle d’un ordinateur et de pouvoir l’utiliser pour mener des actions malfaisantes…

Le trojan (cheval de Troie) est un programme informatique utilisé pour voler des informations personnelles, propager des virus ou perturber les performances de votre ordinateur. Il permet également un accès à distance.

Le ver informatique est un virus réseau qui s’auto-reproduit et se déplace sans avoir besoin de support physique. Il recherche les fichiers contenant des adresses de messagerie et les utilise pour envoyer des messages électroniques infectés en usurpant les adresses des expéditeurs dans les derniers messages afin que les messages infectés semblent provenir de quelqu’un que vous connaissez.

Le ransomware empêche l’utilisateur d’accéder à son système ou ses fichiers et exige le paiement d’une rançon en échange du rétablissement de l’accès. Il utilise couramment les e-mails indésirables (malspams) pour livrer des malwares. Ces e-mails peuvent inclure des pièces jointes piégées ou des liens vers des sites Web malveillants.

Le phishing est un envoi d’e-mail qui prend l’apparence de banques, de services de paiements… Vous êtes invités à remplir un formulaire en ligne ou à cliquer sur un lien qui mène vers un faux portail de connexion. L’objectif de ce procédé est l’accès, entre autres, à vos mots de passe et noms d’utilisateur.

Vérifiez si votre adresse mail est hackée sur :
have i been pwned?




Protection contre les hackers : ce qu’il faut faire… ou ne pas faire

Certaines recommandations peuvent faire sourire, et pourtant…

Les noms de messagerie se volent. Il se peut, si ce n’est déjà fait, que vous receviez un jour un e-mail de… votre part ! C’est ce que l’on appelle de l’usurptation d’identité. Il arrive régulièrement que des comptes entiers d’entreprises soient subtilisés. Changez donc régulièrement votre mot de passe de messagerie.

Mots de passe. Créer des codes ultrasécurisés (on estime à 20 % le nombre d’internautes qui se servent de leur date de naissance comme mot de passe) et bien sûr un mot de passe unique par service et non pas pour tout le monde. Et vous ? Les pirates possèdent leurs propres logiciels pour débusquer les mots de passe.

Lors d’une inscription sur un site, les identifiant et mot de passe doivent être différents.

N’ouvrez jamais un fichier venu d’un mail inconnu et ne cliquez pas non plus sur le lien ou l’image.

Vous avez un doute, vérifiez l’adresse mail. Si elle est de ce type : marlenwdfnedidier@indirsino.icu, passez votre chemin.

Votre banque vous écrit que vous êtes débiteur (vous trouvez le message « bizarre ») et qu’il suffit de cliquer sur le lien pour savoir ce qui se passe (pishing)… Allez donc directement sur le site de votre banque sans passer par l’e-mail.

Ne cliquez pas sur « unsubscribe » lorsque l’email est un spam.

Sites sensibles. Dès que vous le pouvez, passez à la double identification (mot de passe + code sur votre smartphone).

Mettre systématiquement à jour son pare-feu et son logiciel d’exploitation.

En aucun cas, ne donnez des informations par retour d’e-mail. Privilégiez toujours d’aller directement sur le site en question.

Ce que vous devez avoir

Un antivirus, le bon sens. Tout d’abord investir dans une application antivirus et la mettre systématiquement à jour, sinon elle ne sert à rien.

Une application pour les mots de passe. Possédez donc une application où vous mettez vos mots de passe à l’abri. Vous n’aurez pas besoin de vous en souvenir, elle le fera à votre place tout en vous proposant des mots de passe solides.




Vin de moselle « pappoli villa » 2017

Et si avait éclot en Moselle un « wonder kid » de la vinification ? L’obtention pour les vins mosellans d’une AOC en 2010 a indiscutablement entraîné une remarquable progression qualitative derrière des domaines phares (voir Le Cardiologue n° 333) privilégiant la culture bio, affinant des cépages adaptés au terroir : auxerrois, mûller-thurgau, pinot gris, bonifiant le caractère corsé des pinots noirs. A cela s’ajoute l’arrivée de jeunes viticulteurs, illustrée par François Maujard.

Ce dynamique vigneron tout juste trentenaire avait assouvi sa première passion : le rugby évoluant en cadet au club de Metz aux côtés d’un certain Morgan Parra, future star de l’équipe de France. Il avait ensuite voulu travailler dans la finance en débutant une licence d’économie à la faculté de droit de Nancy, mais avait été vite rebuté par l’âpreté et le manque d’éthique du milieu qu’il entrevoyait. Il décide alors de se rapprocher du monde paysan, pour être confronté au concret, œuvrer pour la protection de la nature et l’avenir de ses enfants. Il décide donc de devenir vigneron en passant un BTS viti-oeno à Beaune en alternance avec des stages chez des vignerons réputés : Thibault Liger-Belair, Thierry Mortet, Sylvain Pataille. Cette formation purement bourguignonne va beaucoup influer sur ses choix œnologiques : ses pinots noirs nous rappellent ceux de Nuits-Saint-Georges, ses chardonnays, une rareté dans la région, ont le nez flatteur typique de ce cépage.

Tout récemment installé en 2016, il a pu, grâce à des subventions, acheter ou prendre en fermage des vignobles, dont les propriétaires, pour certains déjà bio, partaient en retraite ou acceptaient de l’aider sur les communes de Plappeville, Lessy, Jussy, Vaux et Rozérieulles couvrant un peu plus de 4 ha complantés principalement en pinot noir, auxerrois, pinot gris. Les terroirs bien drainés, constitués de terrasses pierreuses et de sol argileux sur éboulis calcaires, sont situés sur des coteaux de la Moselle, le plus souvent exposés sud, sud-est générant un microclimat protégé des influences froides. La pluviométrie est régulière, les chaleurs estivales sont tempérées par le fleuve.

Dès le départ, le jeune homme, fidèle à ses convictions, ne conçoit pas de travailler autrement qu’en bio, malgré les contraintes et le surcroît de travail. Les vignes sont enherbées, légèrement griffées sans labour. Toute chimie est exclue. La prévention du mildiou, fréquent en Moselle, repose sur la bouillie bordelaise en limitant les doses de cuivre à moins de 6 kg/ha. Des préparations bio, type tisane d’ortie, sont en préparation. Les engrais sont naturels.

Les vendanges, très soigneusement triées, sont manuelles (obligatoire pour l’AOC) en petites caissettes. La vinification est la plus naturelle possible. Les raisins blancs non égrappés, ni levurés ou enzymés, sont transférés en cuve, pressurés pneumatiquement pendant 2 h, débourbés pendant 24 h. L’entonnage par gravité dans des tonneaux de chêne parfois chauffés permet la fermentation alcoolique grâce aux levures naturelles. La malolactique est systématique. L’élevage en fûts sur lies fines sans aucun batonnage pour respecter le produit, s’étend sur 8 à 12 mois. Après soutirage, la mise en bouteille s’effectue sans collage, ni filtration.

François Maujard a choisi de vinifier séparément chaque parcelle en mono-cépage, pour « distinguer les nuances des terroirs et offrir une palette diversifiée de vins ». Il avait l’intention, selon le modèle bourguignon, d’attribuer à chaque cuvée le nom du village, dont elle était issue, ce que les règles administratives lui ont interdit. Aussi, il contourne la difficulté en prenant leur nom historique datant de l’époque romaine : Pappoli Villa (Plappeville), Vallis (Vaux), Jussiaca (Jussy) !

Malgré son atavisme bourguignon, il a une tendresse toute particulière pour le cépage auxerrois apparu fin du XIXe siècle sur les coteaux de la Moselle, mais qui doit son nom au fait qu’il fut développé dans des pépinières proches d’Auxerre.

Le Pappoli Villa 2017, pur auxerrois, paré d’une brillante robe jaune topaze à reflets verts, fait jaillir du verre d’intenses senteurs de fruits jaunes : poire Williams, pêche, mirabelle (Lorraine oblige !), melon et abricots nuancées de subtiles notes d’agrumes : orange bien mûre, zeste de mandarine, d’épices noires (coriandre) et de vanille traduisant l’élégant boisé. La bouche allie une texture crémeuse à un séveux riche, tendu, ciselé avec une touche minérale pierreuse et crayeuse. La finale raffinée s’attarde sur une certaine douceur miellée liée à un peu de sucre résiduel qui contribue à atténuer l’alcool (13,5 °) et à soutenir la richesse en fruit.

Cet auxerrois mosellan s’accordera parfaitement et logiquement avec la cuisine de la même région : tourte à la viande, pâté lorrain, grenouilles à la mode de Boulay, cassolette d’escargots à l’anis et avant tout quiche bien crémeuse. Il sera également complice de poissons de rivière en sauce : pavé de sandre, brochet braisé à la crème, matelote de poissons d’eau douce. François Maujard estime que certaines notes sucrées et exotiques de son vin peuvent faire merveille avec les plats sucrés-salés : tajine d’agneau aux pruneaux et abricots, pastille de pigeon amande et miel, poulet aigre doux ananas, brochettes de porc satay à la banane.

Les vins de garage élaborés par des viticulteurs inspirés dans des locaux exigus avec les moyens du bord ont autrefois connu leur heure de gloire. François Maujard, dont le chai est installé de bric et de broc dans une vieille grange, va probablement connaître la célébrité en inventant les «vins de grange». En attendant, il se réjouit : « on a la chance, nous les vignerons, de vendre du rêve. Même si le métier est dur, on fournit du bonheur. C’est magique » et les prix à moins de 15 euros plus encore !

Domaine Maujard-Weinsberg 57535 Marange-Silvange

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération




Orange et la télémédecine

A l’heure où l’on ne parle que de déserts médicaux, Enovacom (filiale d’Orange Business Services) a annoncé en partenariat avec Microsoft, une offre dédiée visant à permettre la collaboration entre soignants à distance… l’objectif étant de favoriser l’adoption des nouvelles technologies et le développement de la télémédecine tout en accordant une place centrale à la protection des données patients (le cloud de Microsoft étant certifié HDS [Hébergeur de Données Santé]).

Ce partenariat entre les deux entités a été créé pour pallier le manque de professionnels et l’obsolescence des outils de travail actuels. C’est la suite bureautique Office 365 qui a été retenue afin de permettre l’optimisation de l’exploitation des données patients afin de donner une vision unique aux soignants.




Numérique en santé : agnès buzyn tranche sur la gouvernance

Création d’une délégation ministérielle du numérique en santé

Entre numérique et ministère, ça bouge dans la Santé. Agnès Buzyn, a annoncé fin avril la création d’une délégation ministérielle du numérique en santé (DNS) et la transformation de l’Agence des systèmes d’information de santé partagés (Asip santé) en Agence du numérique en santé (ANS). Selon les termes de la ministre des solidarités et de la santé, il s’agit de « renforcer la gouvernance numérique en santé » et d’éclaircir ainsi l’avenir de l’e-santé. La DNS devrait être opérationnelle d’ici décembre 2019.

Les mission de la DNS seront de :

  • définir la politique du numérique en santé,
  • garantir la cohérence au travers de ses arbitrages,
  • soumettre annuellement à la ministre une feuille de route et les budgets associés,
  • coordonner l’ensemble des acteurs institutionnels nationaux et régionaux,
  • superviser le pilotage de l’ensemble des chantiers de transformation numérique en santé.

Une partie de la délégation à la stratégie des systèmes d’information de santé(DSSIS) et de la délégation au service public d’information en santé (SPIS) seront intégrées à la DNS.

Conseil du numérique en santé

Une instance de concertation sur le virage numérique en santé sera créée avec la relance du Conseil du numérique en santé (CNS). Celle-ci avait été créée dans le cadre de la stratégie nationale « e-santé 2020 » sous l’ère Touraine.

Cette nouvelle instance sera constituée « de représentants des différentes parties prenantes de la e-santé en France, institutionnelles, publiques et privées, dans une logique de co-construction des orientations nationales du numérique en santé », a précisé le ministère.

Des experts du numérique, qui se réuniront au sein d’une cellule, auront pour mission « de faire de l’éthique un élément central du virage numérique en santé et de garantir un cadre de valeurs humanistes ».




Les algorithmes, les médecins novices et l’Intelligence Artificielle

Présent les 10 et 11 avril au SIDO (l’événement IoT, IA & Robotique à Lyon), Artificial Insight a présenté sa solution d’aide au diagnostic médical grâce à l’IA (Intelligence Artificielle).

Partant du principe que l’approche de l’IA ne peut se faire sans un réel savoir et un investissement temps, Artificial Insight a créé une plateforme pour aider les médecins à poser leur diagnostic.

Celle-ci permet d’utiliser via le cloud, le tout sans prérequis, des algorithmes d’aide au diagnostic développés en interne ou par des fournisseurs sélectionnés afin d’offrir aux patients les meilleurs soins, quelque que soit la modalité d’acquisition des données et quel que soit la pathologie. 

Cette solution nous ramène aux propositions du rapport Villani dévoilé il y a un an afin de « transformer les voies d’accès aux études de médecine » en intégrant « davantage d’étudiants spécialisés dans le domaine de l’informatique et de l’IA ». 

Vu l’évolution de ces nouvelles technologies, il est impératif que les futurs professionnels de santé doivent trouver une formation aux usages de l’IA, des objets connectés et du big data lors de leurs études en cours du premier et deuxième cycle de médecine.

Artificial Insight est la première plateforme d’algorithme portant le marquage CE pour le monde médical, et couvre tous les domaines thérapeutiques.

Un tutoriel sous forme de vidéo présente la plateforme Artificial Insight Store et son « trois clics » : lancer une analyse, suivre son exécution, accéder aux résultats. 




Château Tour des Gendres « La gloire de mon Père » 2012

Quel rapport entre la prestigieuse appellation bourguignonne Romanée Conti et le modeste Château Bergeracois Tour des Gendres ? Bien sûr : le vin, mais aussi un nom Conti porté conjointement par la branche cadette de la maison de Bourbon, le prince Louis-François de Bourbon-Conti ayant acquis en 1760 le grand cru des Côtes de Nuits et par le fondateur de l’exploitation agricole du Périgord, Vincenzo de Conti, émigré en 1925 de Vénétie, probablement lui aussi d’origine patricienne.

Appartenant à la troisième génération, Luc de Conti, guidé par sa passion des chevaux, s’installe aux Gendres début des années 1980, récupère quelques hectares de vieilles vignes, plante, secondé par sa femme Martine, de nouvelles parcelles. Francis, son cousin, rejoint l’exploitation en 1990 amenant au domaine ses 20 ha de vignes de Saint-Julien- d’Eymet. Connue depuis le XIIe siècle comme la ferme viticole du château de Bridoire, la propriété des Gendres, située sur l’emplacement d’une villa gallo-romaine, doit son nom à son propriétaire de l’époque qui était le gendre du châtelain de Bridoire.

D’emblée, Luc de Conti affiche ses ambitions : se mesurer à ses prestigieux voisins du Libournais, démontrer que le Bergerac ne doit pas être considéré comme un « sous-bordeaux » et opter pour une viticulture bio.

Aujourd’hui, le domaine s’étale sur 52 ha en appellation AOC Bergerac de 3 vignobles : les Gendres, le Grand Caillou et Saint-Julien-d’Eymet. Le terroir se répartit en croupes argilo-calcaires en pente douce sur un sous-sol de Marne de Castillon et de molasses de Monbazillac exposées plein sud très favorables au cabernet-sauvignon. Les parcelles sont entourées de bois, de haies ; la biodiversité, oiseaux, papillons, fleurs, est riche justifiant la pertinence de l’option bio. Les vignes plantées à 6 300 pieds/ha sont taillées en Guyot simple permettant un rendement de 40 hl/ha. Un rang sur 2 est enherbé, l’autre travaillé à l’intercep. Les vignes sont effeuillées 15 jours avant les vendanges, afin de diminuer le degré alcoolique du vin.

Les traitements sont purement bio, le compost est naturel. Les insectes, parfois très gênants, sont limités par confusion sexuelle, la cicadelle contenue par le blanc d’argile. Très sensibles à l’esca, les pieds sont régulièrement complantés.

Des vendanges nocturnes

Les vendanges, souvent nocturnes pour garder la fraîcheur des raisins, se déroulent pour un tiers à la main, deux tiers avec une machine trieuse qui restreint la durée de la récolte. Les raisins, transportés par des bennes à double fond pour isoler le jus, arrivent à la cave sur une table de tri, puis sont encuvés en respectant l’intégrité des baies. Les raisins rouges totalement éraflés sont envoyés dans des cuves pour une macération longue de 30 jours avec micro-oxygénation sous marc, la fermentation est naturelle avec au début plusieurs pigeages quotidiens. Après la malolactique, le vin est élevé, sur lies régulièrement bâtonnées, en barriques et foudres, dont 10 % sont neufs pendant 12 mois. Il revient en cuve pendant encore 6 mois avant un embouteillage après une filtration minimale, mais sans collage.

La cuvée « la Gloire de mon Père » assemblant 50 % de cabernet, 25 % de merlot, 25 % de malbec reflète bien la richesse et la typicité du terroir et se caractérise par sa belle maturité de fruits, sa puissance, sa fraîcheur.

Paré d’une robe rouge grenat foncé aux reflets violacés, ce Bergerac « la Gloire de mon Père » 2012 exhale d’intenses saveurs de fruits noirs : cassis, mûre, de fleur : violette, des notes balsamiques et épicées (poivre blanc, réglisse mentholé). Des nuances toastées et boisées sur le chocolat accompagnent la qualité des fruits. La bouche est généreuse avec une structure tanique encore dense et serrée. Ce vin porté par une fraîcheur remarquable offre une finale charnue sur le tabac de Havane et le sous-bois.

A priori, les cépages bordelais de ce Bergerac appellent l’agneau et, de fait, il s’accordera bien avec une selle d’agneau rosé, un gigot de 7 heures, un cari à l’indienne, un simple navarin. Mais du fait de sa persistance tanique, ce vin s’accommodera peut-être mieux de plats salivants à caractère affirmé. Ainsi son origine périgourdine incite à se tourner vers la savoureuse et roborative cuisine du sud-ouest. Ce vin « la Gloire de mon Père » s’épanouira avec une salade de gésiers confits, une grive fourrée au foie gras, des cailles à la moutarde ou au miel, un tripoxak (boudin d’agneau sur coulis de tomates), voire un cassoulet de Castelnaudary (encore qu’un Cahors me semble plus approprié). L’intensité et la structure de ce vin lui permet un accord idéal avec la mâche et l’onctuosité du canard : confit aux lentilles, magret grillé accompagné de cèpes, aiguillettes au vin rouge, caneton aux olives ou à la sauce bigarade.

Compte tenu de la hausse vertigineuse des prix dans le Bordelais, il est réconfortant de constater que certains excellents vins du Bergeracois peuvent, sans complexe, vous proposer une alternative savoureuse à doux prix.

La conclusion appartient à Luc de Conti « Nous avons conjugué tous nos talents pour que nos vins, notre appellation et notre région inspirent dynamisme et prospérité ».

Château Tour des Gendres « La gloire de mon père » 2012
Cotes de Bergerac Rouge. Famille de Conti 24240 Ribagnac



Traité de médecine – 5e édition. Tome 1

La nouvelle édition du Traité de Médecine vient d’être publiée par les éditions du Traité de Médecine. 

Cette maison d’édition créée en juin 2018 est exclusivement dédiée à la publication de cet ouvrage de renom. Ce traité est en effet depuis plus de trente-cinq ans l’ouvrage de référence en langue française des connaissances médicales, utile aux médecins généralistes, aux spécialistes, aux étudiants et, d’une façon générale, à l’ensemble du monde de la santé. Des générations  de praticiens confirmés ou en formation ont possédé ce livre, que les moins jeunes d’entre nous appelaient familièrement le « Godeau », du nom du professeur Pierre Godeau, malheureusement disparu en octobre 2018, qui le créa en 1981. Pierre Godeau a transmis cette œuvre magistrale au professeur Luc Guillevin, qui, aidé des Professeurs Mouthon et Lévesque, a entièrement remis à jour le Traité en restant fidèle à l’esprit de son créateur : remettre la séméiologie, l’interrogatoire et l’examen clinique au centre du diagnostic.

Cette cinquième édition est augmentée et complètement refondue : 3 volumes (dont 2 en cours de parution), 40 coordonnateurs, plus de 1 000 auteurs, 5 000 pages et plus de 900 chapitres, avec une maquette aérée, lisible, complétée d’un index de 200 pages contenant 30 000 entrées, avec 2 000 illustrations, schémas ou arbres décisionnels et 1 500 tableaux !

Outil indispensable pour la pratique quotidienne et l’actualisation des connaissances, le Traité regroupe l’essentiel des données scientifiques actuelles en retraçant les évolutions de la recherche fondamentale, de la pratique clinique et des avancées thérapeutiques.

Le sommaire de ce premier tome est des plus alléchants puisqu’on y trouve : grands syndromes, éthique médicale,  médecine interne, hématologie, cardiologie, médecine vasculaire, médecine intensive et réanimation, urgences, cancérologie et douleur.  Les plus grands spécialistes des disciplines concernées ont participé à la rédaction ; pour ce qui nous concerne plus précisément ici en cardiologie, citons J.-P. Bourdarias, N. Clémenty, P. Guéret, N. Danchin, S. Weber, A. Cohen-Solal et bien d’autres, sous l’éminente coordination d’Olivier Dubourg.

Un monument.

Mais l’essentiel réside peut-être dans son évolutivité : l’ouvrage ne se contente plus, comme d’autres ouvrages exclusivement « papier », d’être un livre dont la durée de vie risque d’être brève, se périmant en quelque sorte d’autant plus rapidement que les connaissances médicales progressent constamment.

Le Traité est désormais publié avec un abonnement à un site internet dédié, reprenant tous les chapitres qu’il réactualise au fil du temps, en introduisant des suppléments sous forme de textes, de tableaux ou de vidéos. L’actualisation sera donc permanente.

A mettre, au plus vite, entre toutes les mains !

Auteurs : Collectif – Loïc Guillevin – Luc Mouthon – Hervé Lévesque – Pierre Godeau
Editeur : Lavoisier
Pagination : 1 680 pages
Prix public : Livre : 245,00 €




Le temple d’Auguste et de Livie à Vienne

César, le premier dans sa Guerre des Gaules cita Vienne, la nommant Vienna, la Vigenna de la table de Peutinger. La tribu gauloise des Allobroges occupa le site, connu depuis le Néolithique, à partir du quatrième siècle. Vaincu par les Romains en 121 av. J.-C. près de l’oppidum Vindalium, au confluent du Rhône et de la Sorgue, la ville se couvrit de monuments romains.

Temple d’Auguste et de Livie, Ier siècle ap. J.-C., Vienne.

L’archéologie à Vienne est née à la fin du XVIIIe siècle sous l’impulsion de Pierre Schneyder (1) avec la découverte des thermes. Puis les trouvailles se succédèrent au XIXe siècle. Le cirque, dont est toujours visible La Pyramide originelle disposée au centre de la spina, et le théâtre ancré sur la colline de Pipet, furent dégagés au XXe siècle ainsi qu’un sanctuaire dédié à Cybèle, un odéon et de nombreuses mosaïques décorant les maisons des élites locales. 

Unique monument conservé en France avec la Maison Carrée de Nîmes, le temple d’Auguste et de Livie est mentionné pour la première fois au XIe siècle. Lieu de culte consacré à la Vierge Marie, il sera jusqu’à la Révolution, à partir du XIIIe siècle, la principale paroisse de Vienne. Temple de Raison de la fin de l’an II à 1799, il devint le tribunal de Commerce, de Justice et de Paix. Musée et bibliothèque à partir de 1823 jusqu’à sa restauration de 1853, il prit le nom de temple d’Auguste et de Livie.

Façade latérale du temple d’Auguste et de Livie à Vienne, photographie, 1851, Charenton-le-Pont, Médiathèque de l’Architecture et du patrimoine.

Un édifice exceptionnel 

Le temple d’Auguste et de Livie (l. 14,75 ; L. 24,70 m ; H. 17,42 depuis le dallage antique du forum) classé depuis 1840 sur la liste des monuments historiques occupait l’ouest du forum, au demeurant mal connu, en vis-à-vis d’une basilique. Entouré d’un portique sur trois côtés, le temple hexastyle (à six colonnes cannelées en façade)  periptero sine postico (pseudo-périptère car ne disposant pas de colonnes sur la façade arrière). 

Six colonnes bordent les façades latérales avec une dernière travée pleine se prolongeant par le mur postérieur flanqué de deux pilastres engagés.  Il repose sur un podium haut de 2,5 m. Un escalier monumental de 12 marches donne accès au pronaos (vestibule) qui ouvre sur la cella reconstruite au XIXe siècle. La dernière restauration étudiant les matériaux et les décors architecturaux, entreprise en 2010, confirma que le monument fit l’objet de deux phases de construction, vers 20 apr. J.-C. puis dans la deuxième moitié du Ier siècle apr. J.-C. Certains éléments du podium, « les chapiteaux corinthiens à feuilles d’acanthes épineuses, les pilastres, et les colonnes occidentales des deux façades latérales », de style homogène, appartiennent au premier état,  « analogues avec ceux du temple de Vernègues […], de Valetudo à Saint-Rémy-de-Provence ». Détruit partiellement, la reconstruction se perçoit dans le traitement de la feuille d’acanthe qui « n’est plus épineuse, mais molle comme il est classique à l’époque impériale ». 

La corniche portant les modillons n’est pas décorée.  L’existence de deux inscriptions apposées sur le fronton « en lettre de bronze » fournit un argument supplémentaire. A ROMAE ET AUGUSTO CAESARI DIVI F(ilio), « A Rome et à César Auguste, fils du divin (Jules) » est dans un second temps ajouté ET DIVAE AUGUSTAE, et « à la divine Augusta » qui n’est autre que Livie décédée en 29 apr. J.-C. Elle sera divinisée en 42 apr. J.-C..

Localisation des phases 1 et 2 dans l’élévation du temple, d’après le rapport final d’opération d’archéologie préventive. Temple d’Auguste et de Livie.

Un temple dédié au culte impérial

Portant le titre de Grand Pontife (2) en 63 av. J.-C., César prétendait descendre de Vénus et d’Enée, le fondateur de Rome selon la légende. En divinisant César, Auguste sera à l’origine du culte de l’imperator, intermédiaire entre les dieux et les hommes. De Rome, il se répandit dans tout l’Empire. Véritable dieu vivant, les villes les plus riches lui construisirent spontanément un temple dédicatoire soit par reconnaissance, soit par adulation. Une fois par an les représentants des soixante peuples de la Gaule se réunissaient autour d’un autel, le 1er août dans le sanctuaire situé sur les pentes de Fourvière à Lyon, pour célébrer ce rite. Mis en place dans les cités provinciales par les autorités municipales, trois collèges de prêtres se partageaient à Vienne la responsabilité du culte : les flamines, les flaminiques, citoyens et citoyennes romains et les sévirs, apparus au Ier siècle, affranchis ou descendants d’affranchis. « Ils étaient élus par groupe de six, chaque année, par les décurions ». L’objet du culte se limitait à la personne des empereurs morts, « divinisés après l’épreuve de leur règne », mais rarement lorsqu’ils étaient encore vivants.

Situation du temple de Vienne dans le forum, d’après le rapport final d’opération d’archéologie préventive. Temple d’Auguste et de Livie.

La situation religieuse à Vienne au cours des deux premiers siècles

Outre le culte impérial, les divinités honorées avaient des origines diverses, une illustration du polythéisme romain. Deux collèges de prêtres dirigeaient la religion officielle, celui des Pontifes et celui des Augures qui rendaient les auspices. Un troisième groupe était attaché spécifiquement au culte de Mars. Si le panthéon gréco-romain (notamment un temple de Mars, d’Apollon et un stibadeion bachique) apparaît important, il existait des divinités gauloises (les Matrae, « déesses mère », Sucellus, le dieu au maillet) et des cultes originaires de l’Orient. Vienne possédait dès le milieu du 1er siècle un sanctuaire métroaque (dédié à Cybèle) de plus de trois mille mètres carrés. Il était composé d’un temple sur podium in antis, d’un théâtre des mystères, un unicum dans le monde romain et une domus à péristyle (habitat des prêtres ?). La Dea Vienna, divinité tutélaire, protégeait la cité. La persécution de 177 apr. J.-C. décrite dans une lettre rapportée par Eusèbe de Césarée de Palestine, est la première mention du christianisme. Cette communauté se réunissait, comme dans la grande majorité des cas au premier temps de l’Eglise, sans doute dans une maison privée. Les sources sont pratiquement inexistantes avant le début du Ve siècle.

(1) D’origine allemande il était professeur de dessin.
(2) Elu à vie, le Grand Pontife nommait les flamines et les vestales, et surveillait le culte privé.

Bibliographie

1/ FORMIGÉ, Jules, « L’inscription du temple de Rome et d’Auguste à Vienne », Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 1924, 68-4, p. 275-279.
2/ BESSIERE, Fabrice, Vienne. Temple d’Auguste et Livie. Rapport final d’opération d’archéologie préventive, Chaponnay, novembre 2011, http://archeodunum.ch/rapports/38_Vienne_Temple_2011.pdf, site consulté le 15 juin 2018.
3/ PELLETIER, André, Vienna, Vienne, Lyon, Presses Universitaires de Lyon, 2001, 188 p.
4/ PELLETIER, André, « Paganisme et Christianisme à Vienne au début du IIe siècle ap. J.-C. », Archéologia, 1977, 111, p. 28-35.
5/ RÉMY, Bernard, « Loyalisme politique et culte impérial dans la cité de Vienne au Haut Empire d’après les inscriptions », Revue archéologique de Narbonnaise, 2003, 36, p. 361-375.
6/ Vienne Colonie Romaine, Coll., Archéologia, 1975, 88, p. 8-54. 




L’Apple watch approuvée par la FDA

L’AW dans sa version 4 est un appareil médical de la classe 2 de la Food and Drug Administration (FDA). (1)  il est considéré comme un dispositif médical doté de la détection des chutes et de trois nouvelles capacités de surveillance cardiaque : alerte de la fréquence cardiaque basse, détection du rythme cardiaque et moniteur électrocardiogramme (ECG) personnel.

(1) Classe II : Ce sont des dispositifs plus élaborés, tels les tests de grossesse, les implants faciaux ou les cathéters, qui nécessitent des contrôles spécifiques pour tester leur conformité. Lorsque ces tests ont été effectués en plus des contrôles généraux, les dispositifs de classe II sont soumis à la même procédure de Premarket notification [510(k)] que ceux de classe I.




La course à L’e-CG

Une équipe de chercheurs (1) s’est penchée durant un an sur la fiabilité des capteurs de fréquence cardiaque inclus dans les montres connectées et particulièrement l’Apple Watch (AW). L’étude portait essentiellement sur la fibrillation atriale (FA).

Cette étude, financée par Apple et portée par près de 400 000 personnes équipées de l’AW et connectées à l’application Apple Heart Study, devait répondre essentiellement à trois points :

  • les mesures effectives de fibrillation atriale Apple Watch/ECG ;
  • le nombre de participants consultant un médecin après une notification ; 
  • le niveau de fiabilité de l’Apple Watch par rapport à l’ECG.

La recette était simple : dès qu’un rythme cardiaque irrégulier était détecté, l’Apple Watch envoyait une notification à l’application afin que le volontaire consulte par vidéoconférence l’un des médecins participant à cette étude. 

Au cours de cette expérience, 2 000 personnes ont reçu une notification de rythme cardiaque irrégulier (0,5 %) avec une détection de fibrillation atriale chez un tiers d’entre-elles, soit environ 670 personnes. 

Suite à ces consultations, les volontaires concernés ont reçu un capteur ECG ambulatoire en parallèle de l’Apple Watch afin d’enregistrer leur rythme cardiaque durant une semaine.

La comparaison Apple Watch versus ECG a été de ce fait intéressante, la précision de la montre étant proche de l’ECG : 71 % de FA détectée par l’Apple Watch contre 84 % pour l’ECG.

Par contre, seuls 57 % des personnes ayant reçu une notification ont consulté un médecin.

Cette étude devrait être suivie par d’autres recherches dans le domaine des technologies connectées ainsi que leur utilisation.

Consultations connectées

Certains médecins, et cardiologues en particulier, ont déjà été confrontés à l’arrivée de sportifs munis d’une multitude de données, ceux-ci étant particulièrement sensibles à ces dispositifs, contrairement aux patients « grand public », pour qui il n’existe pas encore de véritable course aux données, la fiabilité des trackers personnelles toujours aléatoire étant le point négatif et donc non mesurable.

Toujours est-il que l’on peut s’interroger sur les prochaines étapes de l’évolution du système de Santé : téléconsultation, prétraitement grâce au matériel connecté avant une consultation physique. Ce qui sous-entend une évolution de la communication des données des objets connectés au médecin.

L’Apple Watch avertit de toute situation anormale et permet d’agir sans attendre, selon la partition de la firme à la pomme. Mais le système est actuellement impossible à mettre en place, car si chaque personne équipée d’un matériel connecté décroche son téléphone à la moindre alerte pour consulter son médecin, la saturation va être vite de mise…

En 2024, le marché des balances, trackers d’activités et objets connectés devrait représenter environ 370 milliards de dollars (à lire ici). L’e-santé s’appuie notamment sur la très forte croissance des maladies cardioneurovasculaires, le diabète et les cancers. Les GAFAM ne s’y sont d’ailleurs pas trompés avec les investissements colossaux réalisés ces dernières années.




Qare veut s’imposer dans la télémédecine

On sait que la télémédecine a le vent en poupe, notamment depuis le remboursement des téléconsultations en septembre dernier. Voir notre précédent numéro

Qare vient de lever 20 millions d’euros  grâce au fonds d’investissement de l’assureur AXA afin d’imposer sa solution de téléconsultation. La start-up a lancé sa solution en 2017, mise aujourd’hui sur une forte croissance pour concurrencer Doctolib afin de séduire les praticiens et de se faire connaître auprès du grand public.

Contrairement à Doctolib qui est parti, à l’inverse, d’un marché de prises de rendez-vous (elle a lancé récemment un service de téléconsultation médicale grâce à une levée de 150 millions d’euros), Qare a développé une plateforme uniquement dédiée à la téléconsultation. Elle revendique aujourd’hui plus de 10 000 consultations pour 300 professionnels équipés, que ce soit en médecine générale ou autre spécialité.

D’ici 2020, c’est à dire demain, Qare compte travailler avec environ 15 000 professionnels de santé pour un abonnement mensuel de 75 euros.

Pour en arriver à ce chiffre, la start-up a créé Qare Academy, une plateforme de formation afin de familiariser les médecins aux spécificités de la téléconsultation, une démarche qui permettra sans aucun doute à nombre de médecins d’accéder à la téléconsultation.




Apnées du sommeil : les enfants tiennent leur algorithme

En partant du principe que l’IA pouvait aider à l’identification des Syndromes d’Apnées Hypopnées Obstructives du Sommeil (SAHOS)  et que les places n’étaient pas suffisantes dans le monde pour réaliser des polysomnographies, une équipe internationale de chercheurs chinois, espagnol et américain (1) a développé un algorithme de machine learning (2) basé sur l’oxymétrie permettant de détecter avec précision la sévérité des apnées obstructives du sommeil chez des enfants qui ronflent. 

La polysomnographie a été réalisée sur une nuit complète. Un oxymètre relevait les données et, connecté à un smartphone par bluetooth, les transmettait au cloud pour qu’elles soient traitées de manière automatique par l’algorithme afin d’obtenir une estimation de l’Indice d’Apnées-Hypopnées (IAH).

L’algorithme ainsi développé a permis d’identifier avec une précision supérieure à 79 % l’ensemble des SAHOS, de 88,2 % pour un IAH de plus de dix arrêts respiratoires par heure, (3) avec une spécificité particulièrement élevée (92,7 %) et une sensibilité de 73,5 %. Seulement 4,7 % de résultats faux négatifs ont été répertoriés, où 0,6 % des enfants présentaient en réalité un syndrome modéré ou sévère.

Cette étude monocentrique algorithme vs polysomnographie a été réalisée auprès de plus de 400 enfants de 2 à 15 ans qui avaient une suspicion de SAHOS (ronflements réguliers au moins trois nuits par semaine). Même si elle est limitée par son approche (un seul appareil avec des mesures réalisées en une seule nuit), cette étude apporte une première analyse sur la précision diagnostique d’un oxymètre portable dont les données peuvent être analysées à distance par un algorithme de machine learning.

A termes, l’évolution de cette analyse devrait permettre de proposer aux patients une approche différente et permettre ainsi de surmonter les difficultés d’accès aux centres pédiatriques du sommeil et réduire les coûts du diagnostic du SAHOS chez l’enfant.

(1) European Respiratory Journal.
(2) Le machine learning, entendu comme l’ensemble des algorithmes qui permettent d’apprendre en identifiant des relations entre des données et de produire des modèles prédictifs de manière autonome, avec des Start up comme I’m OK et la gestion des pics d’activité dans la restauration.
(3) Cet index permet d’évaluer le degré de sévérité du problème d’apnée par événements respiratoires par heure (léger : 5 à 15 ; modéré : 15 à 30 ; sévère : plus de 30).




Les battements du cœur rechargent les pacemakers

Une équipe de l’université du Texas (1) vient de rendre public ses travaux sur un dispositif susceptible de recharger indéfiniment la batterie d’un pacemaker grâce aux battements du cœur. Le module  en question se compose d’un film polymère (2) dont la structure poreuse convertit en électricité les mouvements du filament en plomb qui relie le stimulateur cardiaque au cœur.
Même si l’idée d’exploiter la piézoélectricité n’est pas nouvelle, les chercheurs de l’université du Texas sont allés plus loin en testant avec de bons résultats leur appareil sur des animaux vivants. Les  phases d’évaluation devraient encore durer deux ans avant l’accès aux tests sur des volontaires humains. Ce système, qui pourrait être prêt pour une commercialisation d’ici à cinq ans ferait également office de capteur pour un suivi en temps réel des patients.

(1) Dartmouth College et du Health Science Center de l’université du Texas.
(2) Un film polymère à effet piézoélectrique a été développé par le Japonais Kuraray, ouvrant la voie à des applications de capteurs dans le médical. Il avait été présenté au Sensors Japan Expo, le salon des capteurs, qui s’était tenu en novembre 2010.

Source : Futura Santé




Santenay blanc 1er Cru Beaurepaire 2012

J’ai déjà, à plusieurs reprises dans cette revue, exprimé mon admiration pour les chardonnays de Côte d’Or, région qui, je le réaffirme, produit les plus grands vins blancs du monde.

Ceux-ci (Corton-Charlemagne, Montrachet et ses vassaux : Chevalier, Batard, Bienvenue) atteignent, à l’instar des grands crus rouges, des prix fabuleux, mais il est encore possible de dénicher, dans de plus petites appellations, d’excellents blancs à des tarifs abordables, tels ceux d’Antoine Olivier.

Créé en 1967, le domaine Olivier puise ses origines dans quelques vignes laissées par Mr Moreau-Chevalier à son petit-fils Hervé, le père d’Antoine. Basé à Santenay, le domaine s’est étendu, pour atteindre maintenant 12 ha, dont 5 en blanc, ce qui est une exception dans l’appellation qui produit seulement 10 % de vins blancs. Antoine Olivier, ayant succédé à son père depuis 2003, s’est attaché à la mise en valeur des terroirs anciens historiquement réputés pour la production de Santenay blanc.

Un microclimat favorable 

Santenay, tout au sud de la Côte de Beaune, protégé à l’ouest par la montagne des 3 Croix, jouit, grâce à son exposition sud, sud-est, d’un microclimat favorable pour les vignes plantées sur des sols de calcaire oolithique et de marnes qui assurent un excellent drainage. Le 1er cru Beaurepaire, sur des versants atteignant 350 m avec des sols très caillouteux idéalement exposés, est réputé pour la qualité et la finesse de ses vins, aussi bien rouges que blancs.

Antoine Olivier, qui se présente comme un grand quadra dynamique, sympathique, blagueur, voire farceur, a fait le choix d’une production bio sans la revendiquer en excluant tout produit de synthèse, pesticide ou désherbant, pour mettre en valeur ses terroirs, respecter l’environnement, transmettre un patrimoine sain. Il privilégie les labours, pour favoriser les échanges entre la plante et son terroir. Une grande attention est portée à la végétation : taille pendant l’hiver pour pérenniser les plants, ébourgeonnage pour contrôler les rendements, palissage pour guider la vigne, effeuillage pour favoriser l’ensoleillement des grappes et améliorer l’état sanitaire des raisins.

Des vendanges manuelles

Les vendanges totalement manuelles sont transportées en petites caisses et triées systématiquement sur table dès la réception. Les raisins destinés aux vins blancs sont lentement pressés mécaniquement pour extraire l’ensemble du jus. Après une clarification rapide (débourbage), les moûts sont mis directement en fûts, où aura lieu la fermentation naturelle sur plusieurs semaines. Pendant toute celle-ci, plusieurs batonnages remettent en suspension les lies fines jusqu’à la malolactique. Les vins vont ensuite rester 12 mois en fûts de chêne, neufs pour un quart d’entre eux, sur leurs lies sans soutirage. L’élevage est terminé en cuves pendant encore 6 mois. La mise en bouteille sans collage s’effectue après une légère filtration qui assure brillance et limpidité.

Une merveille d’équilibre

Ce Santenay Beaurepaire 2012 (excellent millésime pour les bourgognes blancs), paré d’une robe or pale cristalline et brillante aux éclats argentés, délivre des arômes de fleurs blanches : chèvrefeuille, acacia, de fruits : citron vert, pomme, mûre, poire. Le chardonnay joue sur les habituelles notes de toast beurré, de miel fin, d’amandes, de noisettes grillées et prend de la hauteur avec une texture généreuse, opulente, mais gardant fraîcheur et vivacité. Gras, séveux en bouche, il réalise une merveille d’équilibre à la fois fraîche, minérale et satinée. Des saveurs de craie, pierre mouillée, herbe fraîche dynamisent sa longue finale onctueuse.

Ce vin qui, plutôt qu’un Santenay, évoque les prestigieux voisins : Chassagne ou Puligny-Montrachet, offre de nombreux et riches accords culinaires. Il s’harmonise parfaitement avec la texture délicate des poissons nobles : sole meunière, dorade au four, loup à la crème de poivrons, feuilleté de saumon. Des quenelles de brochet Nantua subliment son côté brioché. Il s’accordera également avec des crevettes sautées au gingembre, écrevisses à la nage, noix de St-Jacques truffées. Ce Santenay, comme tous les bourgognes blancs, supplante largement les vins rouges, pour accompagner les volailles et viandes blanches : poule au riz, volaille en sauce crémée et morilles, blanquette de veau, noix de veau braisé, bouchées à la reine. Gardez-en une gorgée pour certains fromages : Ossau Iraty, comté et surtout chèvres demi-secs : chavignol, pélardon, charolais.

Ainsi ce Santenay Beaurepaire, dont la douceur du prix n’est pas le moindre attrait, offre, à l’image de son vigneron, un visage enjoué et rayonnant, si bien que très justement Antoine Olivier espère « que vous aurez autant de plaisir à déguster mes vins que j’en ai eu à les produire ».

Domaine Antoine Olivier
5 Rue Gaudin, 21590 Santenay
Téléphone : 03 80 20 61 35




De Toumai à Homo ergaster-erectus (2e partie)

Une bipédie associée au déplacement dans les arbres

L’angle entre le foramen magnum et le plan orbitaire au delà de 90° pour les Préhomo, laisse supposer la bipédie. Cet angle n’est que de 55° chez les chimpanzés. Il atteint 90° à 105° pour le genre homo. Les Préhomo conservent cependant une aptitude arboricole. La morphologie du bassin de Lucy et de son fémur lui assurait une bipédie pratiquement permanente, mais plus chaloupée que celle d’homo sapiens. 

La découverte d’un quatrième métatarsien d’australopithèque afarensis ayant une courbure voisine de celle de l’homme actuel confirmerait le caractère quasi humain de la marche de cet espèce. 

Les cinquante quatre empreintes de pied de Laetoli en Tanzanie, datées de 3,5 Ma, sont celles d’un homme et d’une femme ou d’un enfant. Le caractère légèrement divergent du gros orteil imprimé dans le sol volcanique, rapproche ces traces de celles de l’homme actuel. 

« Les empreintes de Laetoli tombent complètement dans la gamme normale de l’homme moderne » selon le savant américain David Raichlen (département d’anthropologie de l’université d’Arizona). 

Empreintes de pied. (6)

Toutefois, cet avis n’est pas partagé par tous les savants. Yvette Deloisson du CNRS considère « qu’ils devaient marcher en bipède à la manière des grands singes, chimpanzés ou gorilles ».  

Utilisation d’outils ?

Certains singes actuels se servent également d’outils, mais ce sont des objets disponibles. Ils ne les façonnent pas et les jettent après utilisation. Jusqu’alors les premières traces d’outils utilisés par les hominidés dataient de 2,5 Ma et étaient attribués à australopithecus Garhi. 

La découverte à Dikika, en Ethiopie, en 2009, d’ossements (la côte ou le fémur d’un animal) qui auraient servi pour le découpage de la viande, il y a 3,4 Ma, aux australopithecus afarensis (seule espèce présente en ce lieu), fit grand bruit. Les chercheurs trouvèrent au microscope électronique de minuscules morceaux de rocher enchâssés dans l’os, preuves de la percussion. 

Cette analyse reste fort controversée malgré la nouvelle étude dirigée par l’anthropologue Jessica Thompson : « Notre analyse montre avec une certitude statistique que les marques sur les os en question ne sont pas causées par le piétinement ou une morsure de crocodile […] Les entailles ressemblent plus à des marques faites par une découpe de boucherie ».  

Reconstitution de l’environnement et de la faune d’Olduvai en Tanzanie, il y a 1,8 Ma. (7)

Une nourriture en majeure partie végétarienne

Les australopithèques et les paranthropes vivaient dans un milieu boisé à la lisière de la savane arborée, près d’un point d’eau, et côtoyaient les grands prédateurs (lions, hyènes, tigres à dents de sabre, léopards, panthères). Les mâles restaient sur leur lieu de naissance alors que les femelles quittaient leur tribu évitant ainsi les risques liés à la consanguinité. 

Essentiellement végétariens, ils consommaient des insectes, des reptiles et des petits mammifères. Ils pratiquaient le charognage, se servant après les grands carnivores, une nécessité pour l’augmentation de leur cerveau : « l’évolution des humains étant probablement liée à plus de protéines ». Il ne cuisait pas leurs aliments, les premières traces d’argile brulée remontent à 1,5-1,3 Ma. 

Ce feu a peut-être été entretenu par un homo erectus suite à un incendie de forêt, car il ne le produisit et ne réalisa des foyers aménagés que vers 400 000 ans avant notre ère. Selam, l’enfant australopithèque afarensis de trois ans découvert à Dikika, possédait une ébauche d’os hyoïde. 

Indispensable au langage articulé, un seul os hyoïde complet a été retrouvé en Israël dans la grotte de Kebara. Il appartient à un homme de Neandertal qui avait la possibilité d’émettre des sons articulés comme le prouve une étude ADN sur des os de fémur datant de 49 000 ans BP.  

Homo habilis apparaît il y a 2,4 Ma. Il vécut en Ethiopie dans la vallée de l’Omo, sur les rives du lac Turkana au Kenya, dans les gorges d’Olduvai en Tanzanie et en Afrique du Sud à Swartkans et Sterkfontein. 

Pendant des milliers d’années, il cohabita avec les derniers australopithèques, les paranthropes et les homo erectus-ergaster. Un nouveau genre était né, à l’origine d’une formidable expansion hors d’Afrique dont le point d’aboutissement sera l’homo sapiens, l’homme actuel.

(6) Préhistoire de Toumaï et Lucy à Ötzi et Homère, Jean Marc Perino, dir., Vic-en-Bigorre, MSM, 2013, p. 21.
(7) D’après : https://www.hominides.com/html/actualites/environnement-paranthropus-boisei-et-habilis-1018.php

 

Bibliographie

(1) Préhistoire de Toumaï et Lucy à Ötzi et Homère, Jean Marc Perino, dir., Vic-en-Bigorre, MSM, 2013, 336 p. Une documentation riche sans doute la meilleure synthèse actuelle avec un tableau sur « La longue marche buissonnière des hominines » montrant de façon imagée l’évolution de notre espèce.
(2) Les Hominidés, site internet, www.hominides.com., sans doute le meilleur site sur nos ancêtres.
(3) Origines et évolution de l’homme, coll. Paris, Paris, Laboratoire de Préhistoire du Musée de l’Homme, 255 p.
(4) Pic, Pascal, Au commencement était l’homme. De Toumaï à Cro-Magnon, Paris, Odile Jacob, 2003, 257 p.
(5) Coppens, Yves, Le genou de Lucy, Paris, Odile Jacob, 1999, 251 p., le livre du découvreur.
(6) Lumley, Henri de, L’homme premier. Préhistoire, évolution, culture, Paris, Odile Jacob, 1999, 248 p.
(7) 3 millions d’années d’aventure humaine. Le CNRS et la préhistoire, Yves Coppens, dir., cat. expos. Paris, Musée de l’homme, 25 janvier-31 mai 1979, Paris, CNRS, 1978, 73 p.




La loi et l’e-Santé connecté

Le classement des objets connectés

Selon l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM), les objets connectés de santé sont classés dans la catégorie des dispositifs médicaux.
Mais l’ANSM précise que « tout instrument, appareil, équipement, logiciel, matière ou autre article, utilisé seul ou en association, y compris le logiciel destiné par le fabricant à être utilisé spécifiquement à des fins diagnostique et/ou thérapeutique, est nécessaire au bon fonctionnement de celui-ci. Le dispositif médical est destiné par le fabricant à être utilisé chez l’homme à des fins de diagnostic, prévention, contrôle, traitement ou atténuation d’une maladie, d’une blessure ou d’un handicap ; mais aussi d’étude ou de remplacement ou modification de l’anatomie ou d’un processus physiologique. Son action principale voulue dans ou sur le corps humain n’est pas obtenue par des moyens pharmacologiques ou immunologiques ni par métabolisme, mais sa fonction peut être assistée par de tels moyens » (directive européenne 93/42/CEE).

La protection des données de santé

La protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel est un droit fondamental.
L’Union européenne a adopté depuis 2018 une définition légale qui précise les données de santé comme « des données à caractère personnel relatives à la santé physique ou mentale d’une personne physique, y compris les prestations de services, de soins de santé qui révèlent des informations sur l’état de santé de cette personne. »

La réforme de la protection des données poursuit trois objectifs :

  • Renforcer les droits des personnes, notamment par la création d’un droit à la portabilité des données personnelles et de dispositions propres aux personnes mineures ;
  • Responsabiliser les acteurs traitant des données (responsables de traitement et sous-traitants) ;
  • Crédibiliser la régulation grâce à une coopération renforcée entre les autorités de protection des données, qui pourront notamment adopter des décisions communes lorsque les traitements de données seront transnationaux et des sanctions renforcées.

Pascal Wolff




L’intelligence artificielle et les bases de données

Les budgets colossaux outre-Atlantique impressionnent, mais sont en accord avec l’intérêt majeur que portent à la Santé les géants mondiaux du numérique. L‘IA est en première ligne et les données de Santé en ligne de front, elles sont la base logistique de la Santé de demain. Sans elles, point de salut.

Si vous y regardez de plus près, par exemple le Système National d’Information Inter-Régimes de l’Assurance-maladie (SNIIRAM), l’organisme qui collecte les remboursements de la Sécurité sociale de la population française, vous serez surpris de voir qu’elle travaille sur 20 milliards de lignes de prestations. Jusqu’à maintenant, cette base, ainsi que d’autres en France, n’était que peu ou pas sollicitée par des demandes extérieures, mais à l’avenir, tout va changer.

Les algorithmes et l’IA, à la demande de la Caisse Nationale de l’Assurance-maladie (CNAM), sont passés à l’action à la SNIIRAM, à des fins de statistiques (détection de médecins ou pharmaciens qui prescrivent trop facilement des substituts aux drogues, identification des médicaments qui augmentent le risque de chutes…) [1]

Mais cette masse de données ne sera pas suffisante pour l’Intelligence Artificielle, car l’IA a besoin de masses colossales de lignes, ce que l’on voit d’ailleurs bien dans le fonctionnement des GAFAM.

En France, les bases de données, si elles existent bien, n’ont pas de structures organisationnelles solides, exceptés certains secteurs comme la radiologie, la biologie et la génomie. Il ne faut pas non plus oublier la grande richesse des hôpitaux, des laboratoires, des universités,… mais sans ligne transversale ni interopérabilité, rien ne peut être possible.

Il y a également un autre problème – et de taille –, la protection des données qui, en France, dépend de la loi de janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés (2) avec un encadrement strict. Même si toutes les informations de Santé collectés par des organismes publics ont été regroupées au sein du Système National des Données de Santé (SNDS), il faut transmettre demandes et dossiers aux organismes accrédités qui donneront leurs avis avant d’envoyer leurs conclusions à la CNIL qui donnera son accord (ou pas).

La compatibilité de l’IA avec la loi est donc difficilement conciliable, car l’un des intérêts de l’Intelligence Artificielle est justement d’être libre comme un électron et lancé sans objectif précis dans les méandres des lignes algorythmétriques

Le marché de la Santé connectée est évalué à 4 milliards d’euros d’ici deux ans uniquement en France. (3) Ce montant considérable doit faire prendre la mesure de ce que notre pays doit être en passe de réaliser afin de rester dans la course à l’Intelligence Artificielle et trouver son équilibre entre droit fondamental, éthique et collecte des données.

Il faut également que la France définisse une stratégie industrielle afin d’avoir une maîtrise complète de ces technologies déterminantes pour l’avenir et se tourner vers l’Europe pour son marché économique.

Pascal Wolff

(1) Les Echos
(2) www.cnil.fr
(3) D’après le bureau d’études Xerfi