Madame la ministre de la santé, accompagnée du directeur général de la santé, a détaillé le 4 février, elle-même, le rapport d’étape de l’enquête de l’IGAS entreprise après l’accident mortel survenu lors d’un essai clinique sur volontaires sains le 18 janvier dernier.
« Trois manquements majeurs » ont été retenus à ce stade de l’enquête par l’institution. Est reproché à la société Biotrial, entre autres décisions malencontreuses, d’avoir attendu le jeudi 14 janvier pour informer l’ANSM de l’accident soit quatre jours après l’hospitalisation du premier volontaire, celui qui décèdera, et trois jours après décision d’interruption de l’essai.
Il est bon de rappeler qu’il a fallu près de 10 ans aux mêmes autorités pour décider de l’arrêt de commercialisation du Médiator en 2009, après la première alerte lancée par un cardiologue libéral en 1999. 10 ans, alors que la molécule avait progressivement été interdite dans la plupart des pays voisins. Il est instructif de voir la différence de traitement dans les deux cas. Il se vérifie qu’il est toujours plus facile de voir la paille dans l’œil du voisin que la poutre dans le sien.
De toute évidence, ce qui est indispensable à Madame la ministre de la Santé, c’est d’apparaître aux journaux télévisés comme le censeur intransigeant d’agissements inappropriés. Quel dommage que tout, depuis sa nomination en 2012, nous montre qu’elle est plus à son affaire dans la communication que sur le chantier de modernisation de notre système de santé.
Nous sommes plus que jamais dans la société du spectacle. Quel crédit aurait eu la personnalité désignée au ministère de l’écologie, après le renoncement de Nicolas Hulot, annoncé pourtant urbi et orbi comme le « transfert du siècle » ? Madame Royal a dû rempiler… avec quelques prérogatives supplémentaires.
Le casting gouvernemental s’avère de plus en plus, à chaque remaniement, un exercice qui n’a rien à envier aux superproductions hollywoodiennes construites autour des acteurs et actrices les plus « bankables ». A l’exception du remplacement de Laurent Fabius parti au Conseil constitutionnel, aucun ministère important n’a changé de titulaire ; la montagne a accouché d’une souris…
Ce dévoiement de notre démocratie n’augure rien de bon pour l’avenir. Nous risquons de le vérifier prochainement dès l’ouverture des négociations conventionnelles. En effet, le jeu des chaises musicales, perturbé par le refus de Monsieur Hulot, n’ayant probablement pas libéré de fauteuil suffisamment large, Madame Touraine conserve son portefeuille et nous une interlocutrice peu à l’écoute des inquiétudes de la médecine libérale.
Le front uni affiché par les 5 syndicats représentatifs lors des assises de la médecine libérale le 11 février convaincra-t-il Madame Touraine qu’on a rarement raison seul contre tous ?
Rien n’est moins sûr,
Soyons prêts à tout… ou à n’importe quoi, quel gâchis !
Eric Perchicot