Régulation des dépenses de santé : le scenario de rupture du HCAAM

Le 27 mai 2021, le Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM) a adopté son rapport annuel. Comme d’autres institutions, il dénonce la gestion à court-terme de la dépense sociale et se prononce en faveur d’un scenario de rupture.

Créé en 2003, le HCAAM est une instance de réflexion et de propositions qui contribue à une meilleure connaissance des enjeux, du fonctionnement et des évolutions envisageables des politiques d’assurance maladie. Parmi ses membres figurent six représentants de l’Union Nationale des Professions de Santé (UNPS) ainsi qu’un représentant désigné par le président de la Fédération nationale des communautés professionnelles territoriales de santé (FNCPTS).

Dans son dernier rapport, il étrille la gestion à court terme de la dépense sociale et propose de structurer « une offre d’acteurs en réseau permettant d’apporter avec des moyens renforcés en proximité une réponse de qualité à l’ensemble des besoins de santé » et de consolider « les moyens les plus spécialisés et lourds pour en maintenir l’excellence ».

Le HCAAM recommande de renoncer à appréhender la dépense de soins de santé à travers une approche « en silo » pour lui substituer une politique de santé publique fondée sur une approche plurisectorielle. Pour le Haut Conseil, il est nécessaire d’intégrer la dimension de santé publique dans toutes les sphères de l’action publique et de développer les pratiques professionnelles en réseaux dans une approche pluriannuelle. 

Dans cet esprit, le HCAAM formule 19 propositions. Parmi celles-ci, le cardiologue libéral pourrait être concerné notamment par les suivantes :

Proposition 2 : Elaborer, dans un cadre interministériel, une trajectoire à cinq ans des objectifs, activités et ressources du système de santé, y compris la programmation des moyens humains, matériels et financiers pour atteindre ces objectifs. Un document unique définirait des priorités transversales telles que : réduire les inégalités d’accès aux soins, structurer les soins de proximité, agir sur les déterminants de santé, dans le cadre d’une trajectoire tenant compte du point de départ. Il définirait également les modalités de suivi (objectifs chiffrés et indicateurs) et d’évaluation de la programmation.

Proposition 3 : Cette programmation doit comporter un volet ressources humaines. Elles sont en effet une clé essentielle du changement de notre système de santé30, et une prospective à la fois quantitative (effectifs et répartition) et qualitative (compétences, missions, statuts, lieux d’exercice, attractivité31…), transversale à l’ensemble des professions, à l’échelle nationale et locale, est nécessaire. Le HCAAM cite ici les travaux de la DREES et de l’ONDPS et souligne que la démographie médicale représentera une contrainte forte au cours de la prochaine décennie, aussi bien pour la médecine libérale qu’à l’hôpital.

Proposition 13 : Le HCAAM recommande :

  • l’évolution des tarifs doit accompagner les décisions de stratégie et d’organisation (pratiques en équipes pluriprofessionnelles, suivi au long cours des patients…), et avant tout ne pas constituer de contre-incitatif aux orientations des politiques de santé (mais on ne peut pas compter sur l’outil tarifaire seul pour faire évoluer les pratiques et les organisations) ;
  • des échelles tarifaires en cohérence avec les échelles de coûts et l’accélération de la révision des nomenclatures en ville et en établissement en lien avec la création du Haut conseil des nomenclatures, ce qui nécessite de renforcer la connaissance des coûts et de leur évolution ;
  • une fixation des tarifs et des prix sur un horizon pluriannuel doit aller de pair avec la régulation pluriannuelle de l’ONDAM, afin de fournir aux acteurs la visibilité et le temps nécessaires pour réorienter éventuellement l’utilisation des ressources ; l’utilisation des tarifs comme outils ex-post de gestion budgétaire doit devenir exceptionnelle ;
  • revoir les modes de rémunérations avec des modèles mixtes et des financements incitatifs, certains pouvant être partagés entre les acteurs des territoires, dans le cadre d’un projet territorial de santé.

Proposition 14 : mettre en place un mode de pilotage transversal dans certains domaines, tels que l’insuffisance rénale chronique, la cancérologie, la santé mentale, le diabète…, accompagnant la déclinaison opérationnelle des objectifs médicaux, organisationnels, d’efficience, déclinés dans les territoires par les acteurs de terrain.

Proposition 16 : Le HCAAM réitère sa recommandation d’intégrer des dépenses de prévention en ambulatoire (éducation thérapeutique, psychologues, nutritionnistes…) dans le panier de soins, à condition qu’elles s’inscrivent dans des protocoles issus de référentiels, mis en œuvre par des organisations dont la qualité est contrôlée.

La position du SNC sur le rapport HCAAM

Le SNC ne peut que se féliciter que la prévention soit une fois de plus, mise en avant, Et que la vision et la politique court-termistes soient condamnées par le HCAAM. Il faut juste espérer que le ministère des Solidarités et de la Santé lise et applique les recommandations formulées par le Haut Conseil dans son rapport.

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