Accès aux soins : un enjeu planétaire

L’échec des négociations conventionnelles pointe du doigt l’incapacité de la France à répondre à la crise que traverse son système de santé. L’herbe est-elle plus verte ailleurs ?

La France s’enorgueillit de posséder le meilleur des systèmes de santé, mais cette idée est battue en brèche tant par l’allongement des délais pour obtenir un rendez-vous médical que par les chiffres officiels indiquant que 6 millions de nos concitoyens n’ont pas de médecin traitant. La ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des professions de santé elle-même confesse que 87 % du territoire est un désert médical. (1)

On serait tenté de trouver chez nos voisins des solutions pour adapter aux besoins actuels notre système construit au lendemain de la seconde guerre mondiale. Malheureusement, force est de constater que les systèmes de santé de tous les pays occidentaux sont à bout de souffle.

La pandémie de Covid-19 n’a fait qu’accélérer ou mettre en lumière un processus perceptible depuis plusieurs années (voire des décennies) et amplifié par la crise énergétique. Partout le bilan est identique : d’un côté une explosion des besoins liée au vieillissement de la population et à l’augmentation des pathologies chroniques, de l’autre un manque patent de ressources tant humaines que financières. Aucun Etat ne semble avoir anticipé les organisations et les moyens nécessaires pour répondre aux besoins en santé des populations.

Une situation mondiale à bout de souffle

En France, les médecins font grève et rompent les négociations ; en Angleterre, certains patients, notamment les plus aisés, abandonnent (à contrecœur) le NHS (gratuit et financé par l’impôt) pour la médecine privée ; en Allemagne, des établissements de santé ferment ; aux Etats-Unis, un tiers des 25 plus grandes grèves de 2022 (au moins 1000 travailleurs) ont été le fait de professionnels du secteur de la santé, notamment les infirmiers ; en Chine, certains prônent une libéralisation du système jugé trop bureaucratique et mal organisé. Quant à l’Italie, elle connaît une telle pénurie que certaines de ses régions, comme la Calabre, font appel à des médecins étrangers en masse pour pallier le manque de praticiens.

Déshabiller les pays émergents pour renforcer les systèmes de soins des pays riches n’est toutefois pas la solution. Certains pays d’Afrique tirent en effet la sonnette d’alarme car leurs soignants se laissent tenter par les offres de pays tels que l’Angleterre, au détriment de leurs propres populations.

Si le sujet a pu être occulté pendant des décennies, il apparaît aujourd’hui que l’accès aux soins et la protection de la santé doivent faire l’objet de politiques menées sur le long terme et que ces politiques doivent être concertées et partagées entre les Etats, au même titre que les politiques concernant l’environnement et les migrations. En attendant que ce vœu pieu se réalise, les professionnels de santé, en France comme ailleurs, refusent de s’adapter à une pénurie qui aurait dû être anticipée et qui menace aujourd’hui la qualité des prises en charge.

(1) Agnès Firmin le Bodo sur le plateau de Public Sénat lors du 104e congrès de l’Assemblée des Maires de France (AMF).

Nathalie Zenou

© 1xpert

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