314 – Certains organismes de Sécurité Sociale et certaines mutuelles font preuve parfois d’une certaine désinvolture vis-à-vis de demandes des médecins. Cette attitude, très irritante pour les intéressés, est source de frais de relance et de temps perdu. Deux jugements du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Valenciennes établissent qu’il est inéquitable de laisser ces frais à la charge du praticien.
Honoraires réglés tardivement
Rappel des faits
Le 19 juin 2006, le Dr G., adhérent du Syndicat des Cardiologues et exerçant dans le département du Nord, pratique un acte sur une patiente relevant d’une mutuelle de fonctionnaires. Cette mutuelle, comme cela est fréquent pour cette catégorie d’assurés sociaux, bénéficie d’une délégation de l’Assurance Maladie pour le règlement des prestations.
L’acte est pratiqué en tiers payant et une feuille de soins papier est adressée à la mutuelle le 1er juillet 2006 pour règlement en Protocole Accord Local.
En l’absence de règlement, une première réclamation est effectuée par téléphone le 12 janvier 2007 et il est demandé de faxer un duplicata de la feuille de soins, ce qui est fait le jour même.
Le 13 avril 2007, une deuxième lettre de réclamation est adressée par fax à la mutuelle.
Le 4 mai 2007 à l’occasion d’une nouvelle relance téléphonique de notre confrère, il lui est demandé un deuxième duplicata, ce qui est fait une nouvelle fois le jour même.
Le 22 juin 2007, c’est-à-dire un an après la réalisation de l’acte, le Dr G. retéléphone sans succès à la mutuelle. Il tente un dernier appel qu’il confirme par un fax le 17 août 2007, et on lui précise que son appel du 22 juin « a bien été enregistré », mais toujours sans que les honoraires aient été réglés.
Mise en route d’une procédure de contentieux
De guerre lasse, le Dr G. saisit la commission de recours amiable le 6 septembre 2007. Il ne reçoit aucune réponse dans les deux mois, ce qui doit être considéré comme un rejet.
Il saisit alors le 7 novembre 2007 le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociales, avec demande d’une indemnité de 380 € au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Il aura fallu cette ultime démarche pour que la mutuelle se décide enfin, le 27 novembre 2007, c’est-à-dire dix-sept mois après la réalisation de l’acte, à en régler le montant.
Néanmoins, la justice suit son cours et l’affaire est entendue à l’audience du 18 janvier 2008.
Jugement du 14 mars 2008 du T.A.S.S. de Valenciennes
Le tribunal a condamné la mutuelle avec les attendus suivants : « Il résulte des pièces produites que des soins ont été dispensés le 19 juin 2006 par le Dr G., cardiologue, pour un montant de 53,07 € qui ne lui ont été remboursés que le 27 novembre 2007 à hauteur de 53,05 €, alors que la demande avait été formulée dès le 1er juillet 2006. Pour obtenir ce règlement plus de seize mois après la date de la prestation et postérieurement à la saisine du tribunal, le demandeur justifie avoir multiplié les démarches et avoir engagé des frais : téléphone, fax, lettres recommandées avec avis de réception, déplacement à l’audience. Au vu de ces éléments qui caractérisent la nécessité de relance et de procéder en justice pour obtenir règlement d’une créance qui n’a jamais été contestée, il serait inéquitable de laisser à la charge du Dr G. les frais qu’il a été contraint d’engager qui peuvent être évalués compte tenu des diligences invoquées à la somme de 150 €. Il y a lieu de lui allouer cette somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Absence de réponse d’une Caisse à des demandes d’information
Ce même Dr G., dont la combativité est redoutable pour les Caisses qui lui cherchent grief, n’avait obtenu aucune réponse de la C.P.A.M. de M. à des demandes répétées d’explications sur des retenues d’honoraires en clinique.
Là aussi, la Caisse a été condamnée pour son mutisme.
Jugement du 3 décembre 2004 du T.A.S.S.de Valenciennes
« Attendu que ce mécanisme de centralisation, s’il a pour objet de rationaliser les paiements informatiques des régimes d’Assurance Maladie, ne dispense pas la Caisse de la justification de l’indu, sollicitée, en l’espèce, à plusieurs reprises par le demandeur, ni de son obligation générale d’information ; …Qu’il est regrettable que le demandeur n’ait pu obtenir cette information qu’après avoir saisi le Tribunal ; …il est fondé à solliciter une indemnité au titre des frais non répétibles qu’il s’est trouvé contraint d’exposer et pour laquelle la Caisse lui paiera la somme de 150 € en application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ».
La plupart des cardiologues n’auront pas l’opiniâtreté de notre collègue pour faire valoir leurs droits.
Les indemnités qu’il a reçues sont modestes et ne compensent pas l’énergie dont il a du faire preuve et surtout le temps qu’il aura passé.
Elles ont néanmoins valeur de symbole et ont le mérite de rappeler à leurs devoirs certains organismes d’Assurance Maladie.