La potion amère de la Cour des Comptes

Dans un rapport de plus de 200 pages qui n’est pas passé inaperçu, publié le 29 novembre 2017, la Cour des Comptes fustige la situation de l’Assurance Maladie alors que Marisol Touraine avait tenté de faire croire que, grâce à son action, le malade était guéri de ses déficits chroniques.

Certes le déficit de la Sécurité Sociale a bien été réduit en 2016 à 7,2 Milliards d’euros contre 10,8 milliards l’année précédente, mais en grande partie par une astuce comptable et des recettes exceptionnelles non reconductibles. Le déficit de l’Assurance Maladie s’élève à lui seul à 5,5 milliards, stable par rapport à 2015. Et la dette sociale cumulée reste à un niveau dangereux de 151 milliards.

2017 devrait voir le déficit de l’Assurance Maladie continuer de se ralentir autour de 4,1 milliards mais les projections pour 2018 sont de nouveau à la hausse.

Le retour à l’équilibre, jamais atteint depuis 25 ans, est pour la Cour des Comptes impératif d’autant plus, le reconnait-elle, qu’il faudra faire face au vieillissement de la population, à l’accroissement des pathologies chroniques et à l’augmentation du coût des produits de santé.

Le remède proposé est radical, introduire dans la loi de financement de la Sécurité Sociale une règle d’équilibre de l’Assurance Maladie. Des économies sont attendues dans le prix des médicaments, la structuration et l’organisation de l’hôpital, mais c’est surtout la médecine libérale et plus particulièrement les spécialistes qui sont visés. Sanctions renforcées jusqu’au déconventionnement pour ceux dont les dépassements d’honoraires sont excessifs, conventionnement sélectif subordonné à la recertification et aux besoins des territoires, élargissement des paiements aux forfaits, généralisations des transferts de tâches, rémunérations des médecins conditionnées à la participation à la permanence des soins et à l’amplitude d’ouverture des cabinets, mais aussi limitation de leurs revenus par des enveloppes régionales !

La Cour des Comptes est dans son rôle quand elle nous alarme sur la dérive financière de l’Assurance Maladie et son risque de bombe à retardement pour les comptes de la Nation.

Mais les solutions qu’elle préconise sont le catalogue concentré des vieilles ficelles du passé qui ont toutes échoué.

Jamais elle ne s’interroge sur les raisons structurelles de ce déficit chronique issu d’un système essentiellement et de plus en plus géré par l’Etat et où le poids de l’hôpital public, 40 % des dépenses de santé, est un des plus importants dans les pays de l’OCDE.

Pire, alors qu’elle fait le constat de la faillite de l’Etat dans son pilotage de l’Assurance Maladie, elle préconise de le renforcer en régions par le biais des ARS et de créer une Agence nationale de santé regroupant les compétences du Ministère de la Santé et de l’Assurance Maladie.  Une logique bien difficile à suivre…

Jean-Pierre Binon

Président du SNSMCV

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