342 – Le premier Livre Blanc du diabète vient d’être publié sous l’égide de la Société francophone de diabétologie (SFD). Il analyse dans tous ses aspects, et toute son ampleur, cette pathologie, qui concerne largement les cardiologues libéraux, puisque 37 % des diabétiques de type 2 les consultent. Sept propositions concrètes sont faites par les auteurs pour endiguer l’inquiétante progression de cette « épidémie silencieuse ».
Pourquoi un Livre Blanc du diabète ? les chiffres du diabète sont la meilleure réponse à la question. En moins de dix ans, la prévalence du diabète traité en France est passée de 2,6 à 4,4 %, et le nombre de personnes atteintes de 1,6 million à 2,9 millions. Dans le même temps, son coût a doublé et s’élève aujourd’hui à quelques 14 milliards d’euros, tous régimes d’Assurance Maladie confondus. C’est 10 % des dépenses de santé, dont 40 % sont imputables aux hospitalisations. Les personnes diabétiques ont en moyenne 65 ans, 55 % d’entre elles ont plus de 65 ans, et un quart a plus de 75 ans. La très grande majorité est en ALD, au titre du diabète ou d’une autre pathologie. Dans 92 % des cas, il s’agit d’un diabète de type 2, mais la prévalence du diabète de type 1 augmente de 3 à 4 % par an. Plus des deux tiers de diabète sont diagnostiqués à l’occasion d’un dépistage (bilan, prise de sang, grossesse), 18 % sur la base de symptômes évocateurs et 15 % à l’occasion d’une complication, c’est-à-dire trop tardivement.
Parmi les complications du diabète, les pathologies cardiovasculaires sont fréquentes. Les résultats des études ENTRED (Echantillon National Témoin REprésentatif des personnes Diabétiques) qui ont porté sur les périodes 2001-2003 puis 2007-2010, le risque vasculaire des patients diabétiques, bien qu’en diminution, reste élevé. En 2007, 59 % des diabétiques de type 2 ont un risque très élevé, 26 % un risque élevé et 14 % un risque modéré. Quant à la fréquence des complications du diabète, elle augmente légèrement. Un antécédent d’angor ou d’infarctus est rapporté par 16,7 % des personnes diabétiques de type 2, chiffre stable depuis 2001. En revanche, depuis cette date, la fréquence des revascularisations coronariennes a augmenté de 5 points et concerne 13,9 % des patients, ce qui porte au total la fréquence des complications coronariennes (en incluant les revascularisations) à 20,8 % (+ 3 points). Si le suivi des diabétiques est majoritairement assuré par les médecins généralistes, l’étude Entred montre que le recours aux cardiologues libéraux a nettement progressé entre 2001 et 2007, puisque 37 % des malades les consultent (+ 5 points).
A ces quelques chiffres piochés parmi tant d’autres dans le Livre Blanc, et qui suffisent à expliquer l’enjeu que représente une prise en charge plus efficiente de cette maladie chronique, s’ajoute une certitude : le nombre de personnes diabétiques de type 2 va continuer d’augmenter, notamment en raison du nombre important de patients en surpoids et obèses. Le défi à relever est donc multiple : améliorer le dépistage quantitativement et qualitativement (on estime que 50 000 personnes ignorent qu’elles sont diabétiques), organiser et coordonner l’intervention des différents professionnels de santé pour augmenter l’efficience de la prise en charge des patients et réduire les coûts, notamment en évitant les hospitalisations inutiles. L’enjeu est de taille, puisque, hormis la spécificité de certains soins, la plupart des propositions émises dans le Livre Blanc du diabète sont largement extrapolables à d’autres maladies chroniques.
Les 7 propositions du Livre Blanc
1 Inventer pour réduire l’impact du diabète. Sur les trois millions de diabétiques, seuls 500 000 nécessitent vraiment le recours au plateau technique hospitalier. Pour les 2,5 millions de patients pour lesquels le passage par l’hôpital ne s’impose pas, il est primordial d’inventer une nouvelle offre de soins. C’est à quoi doivent œuvrer les ARS en s’appuyant sur l’expérience de professionnels de santé de terrain, pour réduire les inégalités d’accès aux soins, mieux dépister et prendre en charge les diabétiques et développer l’ETP.
2 Médiatiser le diabète pour mieux le prévenir. Parce qu’elle est silencieuse et indolore, la pathologie diabétique n’effraye pas et l’on en parle peu. Beaucoup de diabétiques ignorent qu’ils le sont. Il importe donc d’initier des campagnes nationales de prévention et de dépistage, et informer sur les complications du diabète et la mortalité associée, en particulier sur les maladies cardiovasculaires qu’il peut induire. L’information doit se faire à travers les campagnes liées à l’alimentation, auprès des professionnels de l’agroalimentaire, et en direction de cibles prioritaires en fonction des facteurs de risque.
3 Centrer l’organisation sur le malade et non sur la maladie. Projet de vie, milieu socioculturel, capacité à être autonome, besoins, la prise en compte de tous ces éléments est essentielle pour optimiser la prise en charge des personnes diabétique.
4 Améliorer la qualité de vie des malades. Cela passe notamment par le recours à la télémédecine, formidable outil pour prévenir l’hospitalisation.
5 Orchestrer les synergies et mises en réseau des professionnels. La multiplicité des compétences dans le domaine du diabète nécessite une réelle organisation entre les structures hospitalières et ambulatoire, les 74 réseaux qui existent actuellement en France, et les services sociaux. Pour cela, le Livre Blanc préconise que le diabétologue (hospitalier ou libéral) soit au centre du dispositif de soin et oriente le patient, en partenariat avec le généraliste et/ou un réseau de soins le patient, vers le praticien, le réseau ou le service le mieux adapté. A lui aussi de définir des indicateurs de structures, de processus et de résultats pur optimiser le parcours de soins et éviter les hospitalisations.
6 Mieux former les professionnels de santé à l’ETP. Après sa reconnaissance la loi HPST, il reste à former les professionnels de santé à l’ETP et à concevoir un mode de rémunération adapté, qui pourrait être un forfait. Les pouvoirs publics pourraient instaurer un « label qualité » pour les structures impliquées dans l’ETP.
7 Innover vers une démarche translationnelle et transversale commune à la majorité des maladies chroniques et explorer de nouvelles voies. Résultant de l’observation des patients, la recherche translationnelle est une recherche fondamentale qui impose de favoriser la proximité avec les patients afin d’assurer l’application rapide des connaissance au bénéfice du malade, en termes de diagnostic comme de traitement. Le Livre Blanc suggère qu’après l’ETP, les diabétologues fassent des sciences cognitives leur nouveau cheval de bataille. Leur pratique permettrait de sensibiliser la population aux risques encourus par certains comportements et de sélectionner les campagnes de santé publique les plus efficaces.
Le diabète en France
Publié sous l’égide de la Société Francophone du Diabète (SFD), le premier Livre Blanc du diabète, diffusé à 5 000 exemplaires, vient d’être présenté à la presse. Dans cet ouvrage qui s’appuie également sur les contributions de nombreux experts, les auteurs Alain Coulomb (consultant), le Pr Serge Halimi (CHU de Grenoble), et Igor Chaskilevitch (administrateur) tirent la sonnette d’alarme sur la croissance galopante du diabète, l’épidémie silencieuse du XXIe siècle. Cette maladie chronique, invalidante et coûteuse, est associée à de lourdes complications. Longtemps préservée, la France, en moins de dix ans, a vu le nombre de diabétiques passer de 1,6 à 2,9 millions de personnes, « un chiffre qui dépasse les prévisions les plus pessimistes », a souligné le président de la SFD, le Pr Bringer, lors de la présentation de l’ouvrage. Les diabétiques qui s’ignorent seraient de l’ordre de 600 000. Son coût a doublé en moins de dix ans et approche les 14 milliards d’euros en 2009, soit 10 % des dépenses de santé. L’hôpital coûtait, en 2007, 4,7 milliards d’euros par an pour le seul diabète, soit beaucoup plus que chez nos voisins. L’explosion du nombre de patients est liée principalement à l’épidémie parallèle d’obésité, doublée d’une tendance croissante à la sédentarité. « Il y a une concordance des courbes de progression de l’obésité et du diabète depuis 12 ans », souligne le Pr Bringer.
Adressé aux pouvoirs publics et aux parlementaires, le Livre Blanc contient sept propositions pour tenter « d’infléchir la progression de cette épidémie, d’en atténuer les formes sévères et de favoriser des alternatives à l’hospitalisation ». Il s’agit d’inventer une nouvelle offre de soins pour réduire l’impact du diabète avec le concours des ARS, médiatiser le diabète pour mieux le prévenir, centrer l’organisation sur le malade et non pas sur la maladie, améliorer la qualité de vie des malades notamment par la télémédecine, orchestrer les synergies et mises en réseau des professionnels pour assurer une meilleure prise en charge des patients, mieux former les professionnels de santé à l’éducation thérapeutique (ETP), innover vers une recherche translationnelle et transversale commune à la majorité des maladies chroniques et explorer de nouvelles voies.