Des méthodes de l’A.R.H. qui préfigurent celles de l’A.R.S. ?

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Des méthodes de l’A.R.H. qui préfigurent celles de l’A.R.S. ?

Le Syndicat Régional des Cardiologues de la région Nord-Picardie a découvert par hasard, vers la mi-janvier, un document du 23 décembre 2008 émanant de l’A.R.H. projetant une réorganisation des urgences de la région…

On ne pouvait que se féliciter des préliminaires, à savoir :

• une bonne articulation entre la médecine libérale et l’hospitalisation publique pour la permanence des soins ;

• la nécessité, pour l’orientation des malades, de se faire vers des établissements de santé dont le plateau technique et les équipements sont adaptés à chacune des pathologies et dont l’équipe médicale est en nombre suffisant pour assurer une prise en charge 24 h sur 24 ;

• le principe d’une concertation approfondie.

C’est donc avec la plus grande surprise que l’on découvrait sur l’annexe 3 du projet la liste des établissements autorisés à pratiquer les angioplasties coronaires la nuit, le dimanche et les jours fériés : seuls les hôpitaux publics seraient autorisés, et aucun établissement privé ne figure sur la liste !

Cela fait pourtant plus de 30 ans que les unités de soins intensifs cardiologiques de ces établissements assurent la prise en charge des urgences cardiologiques de la région, parallèlement aux hôpitaux publics, et même d’ailleurs en concertation dans certains secteurs, en respectant les critères de qualité exigés à juste titre par le projet, notamment en ce qui concerne les plateaux techniques, les équipements adaptés et l’équipe médicale.

Le texte ne précise pas sur quels critères est fondé ce choix.

L’A.R.H. contactée ultérieurement a précisé que son objectif est de centraliser toutes les urgences sur uniquement quelques gros centres, qui auraient les capacités de tout faire, notamment en raison de la nécessité de limiter le nombre d’astreintes rémunérées et des problèmes de démographie des chirurgiens dans les hôpitaux publics.

Nous n’avons toujours pas compris en quoi cela concerne les urgences cardiologiques et, à ce jour, aucune explication ne nous a été donnée. _ _

Le projet de l’A.R.H. témoigne d’une conception technocratique de l’organisation de la santé

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L’idée de créer de très gros centres polyvalents peut a priori apparaître comme logique, mais elle ignore la réalité qui est beaucoup plus complexe et a été mal analysée :

• la problématique des cardiologues n’est pas celle des chirurgiens : – les problèmes démographiques sont moins marqués actuellement, – la cardiologie, contrairement à d’autres spécialités, maîtrise elle-même toute sa filière d’urgence : imagerie, actes interventionnels, U.S.IC., – les astreintes des cardiologues interventionnels sont bénévoles, et le maintien du système actuel ne coûte pas plus à la collectivité ;

• les cliniques, qui seraient interdites d’urgences la nuit ou le dimanche, ont une très grosse activité d’angioplastie, supérieure à celle du CHU pour l’une d’elles, proche pour d’autres. _ Le projet de l’ARH de tout faire adresser uniquement à l’hôpital public risque donc de le saturer et de déstabiliser nos collègues praticiens hospitaliers déjà en surcharge de travail ;

• la prévalence des maladies cardiovasculaires dans la région est nettement supérieure à la moyenne nationale. Ainsi, par exemple pour le bassin de vie de l’Artois (2 000 angioplasties coronaires par an, réparties de façon égale sur deux établissements, l’un privé, l’autre public), l’index comparatif de mortalité (source : O.R.S.) pour les décès prématurés (âge inférieur à 65 ans) par cardiopathie ischémique dans le secteur de Lens est de 214 (base 100 pour la France) et juste à côté, pour le secteur de Hénin- Beaumont-Carvin, de 224. Si l’on schématise, on y meurt un peu plus de deux fois plus que dans le reste de la France et le projet de l’ARH prévoit d’y réduire de moitié les capacités d’angioplastie coronaire en urgence. _ _

La manière est également très technocratique

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• Les cardiologues, pourtant très concernés, n’étaient pas destinataires du texte du projet.

• Nous avons écrit pour demander des explications, mais nous avons été informés oralement que nous n’aurons pas de réponse.

• La date d’application prévue était très proche : mars 2009. Les réactions, et notamment celles qui ont été suscitées par le Syndicat Régional Nord-Picardie, ont permis un report à début 2010.

• Malgré nos demandes formulées par différents canaux, nous n’avons toujours pas eu d’explication sur la logique de ce projet en ce qui concerne la cardiologie interventionnelle. _ _

Préfiguration des ARS et nécessité d’un syndicalisme régional structuré

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Il aura fallu une réaction rapide du syndicat régional pour éviter une application presque immédiate des décisions de l’A.R.H. Cela aura nécessité du temps passé et de l’énergie de la part de quelques responsables syndicaux. Il en faudra encore dans les semaines ou les mois qui viennent, car l’objectif est d’extraire les urgences cardiologiques du projet global.

Cette expérience préfigure les adaptations auxquelles doit se préparer le syndicalisme médical.

La mission des A.R.S. sera de décliner au niveau régional les grandes décisions de la politique de santé du pays. Cela signifie que nombre de problèmes professionnels qui, jusqu’à présent, étaient gérés au niveau national devront l’être à l’échelon régional.

La structure du Syndicat des Cardiologues permettra cette évolution, car elle repose sur des syndicats régionaux, qui pourront s’appuyer sur l’expertise du syndicat national. _ Il faut savoir néanmoins que cette mutation nécessitera le concours de davantage de cadres syndicaux formés et disponibles.

Depuis soixante ans qu’il existe, notre syndicat a toujours su s’adapter aux situations nouvelles, pour la défense de ses adhérents. Gageons qu’il saura garder les mêmes capacités.

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