Si le syndicat n’était pas là… (1/2)

279 – A l’occasion de la fin de la NGAP, c’est un bon exercice de syndicalisme que de revenir sur ces vingt années. En effet, la pratique syndicale au jour le jour est souvent ingrate, avec des hauts, mais aussi des bas, des incompréhensions, et parfois aussi des reproches, quelquefois mal vécus par des responsables qui, bénévolement, passent une bonne partie de leur temps à la défense de leur profession.

On verra, à l’occasion de deux articles, que la force d’une structure comme la nôtre est de travailler dans la durée et comment un syndicat bien organisé peut influencer de façon positive la pratique professionnelle en agissant sur la nomenclature, en la défendant contre les conceptions restrictives de certaines caisses (on ne se rend pas toujours compte de l’énergie qu’il faut parfois dépenser simplement pour maintenir un statu quo), mais aussi en réussissant des avancées.

La NGAP va prochainement être remplacée par la CCAM. Tout ce travail accompli devient-il caduc ? Bien sûr que non car : • l’expérience acquise nous sert pour la réécriture des dispositions générales dont l’interprétation a été la principale source de litige ;

• le nouveau texte reprend un grand nombre des dispositions de l’ancien, avec simplement quelques ajustements, de sorte que la jurisprudence restera applicable ;

• nous avons acquis un savoir-faire qui de toute façon restera utile.

Un principe, une méthode, une stratégie.

La plupart des litiges ont tous fait appel à la même démarche.

Un principe

Les circulaires où les référentiels des caisses n’ont pas de valeur légale et ne sont pas opposables. Ils sont souvent rédigés comme des textes légaux, ce qui peut parfois tromper certains médecins, mais il s’agit simplement de la position des caisses qui, au départ, n’a pas de valeur juridique supérieure à la nôtre. Ces circulaires correspondent à une interprétation de la nomenclature par l’une des parties, mais la référence, c’est la nomenclature elle-même.

Une méthode

Au départ, nous n’avions aucune référence juridique, et c’est nous qui avons créé notre jurisprudence. Notre méthode était assez simpliste : c’est l’analyse de texte telle qu’on l’apprend au lycée.

Le débat a parfois porté sur le sens d’un mot. C’est ainsi par exemple, que nous avons dû démontrer qu’un acte de diagnostic n’est pas un soin, qu’une « même séance » ne peut pas être assimilée à une « même journée ». Un procès a même pu être gagné (il ne s’agissait pas de cardiologues) en argumentant sur l’emplacement d’une virgule…

Une stratégie

L’information et les décisions sont centralisées au syndicat national avec rédaction d’argumentaires.

L’exécution est décentralisée. Le cardiologue concerné participe activement à sa défense. Nous faisons évidemment appel à des experts (le plus célèbre aura été l’Académie Française pour la définition des mots « soin » et « séance »), et à des juristes, pour la procédure, mais le maître d’oeuvre doit rester le cardiologue.

Application de l’article 8 (acte global) sans le syndicat.

Lorsqu’un acte principal, qualifié d’acte global, était coté, les caisses estimaient que tous les autres actes, pratiqués immédiatement avant, ou dans les vingt jours qui suivaient, étaient inclus dans la cotation de cet acte global et devaient donc être pratiqués gratuitement !

Nous allons voir ce que serait devenue la pratique en clinique s’il n’y avait pas eu le syndicat des cardiologues pour contrer cette interprétation erronée de la nomenclature. Précisons que les exemples qui suivent ne sont pas des situations fictives, mais bien de cas concrets, qui se sont répétés à une certaine époque, et qui auraient été généralisés si nous n’avions pas pu obtenir une jurisprudence favorable.

Imaginons donc le sort du pauvre (dans tous les sens du terme…) cardiologue exerçant en clinique, s’il n’y avait pas eu son syndicat :

– après implantation de pacemakers : tous les actes de diagnostic (électrocardiogrammes, surveillances monitorisées, échocardiogrammes…) sont gratuits ;

– après angioplastie coronaire, c’est la même chose. Ainsi par exemple, après angioplastie primaire d’un infarctus, il n’est plus possible de coter de K30 pendant vingt jours. Le cardiologue de garde travaille jours et nuits pour rien ;

– électrocardiogramme postopératoire après chirurgie générale : si l’on ne peut pas prouver qu’il y a eu une pathologie intercurrente, ce qui est fréquent après appel pour un simple symptôme, c’est gratuit ;

– après un His ou une coronarographie: tout est gratuit pendant vingt jours ;

– His avant pacemaker : l’exploration doit être faite gratuitement ;

– montée de sonde avec ultérieurement implantation de pacemaker : tant pis pour le cardiologue de garde qui a monté la sonde. Il aura eu la satisfaction professionnelle de ne plus voir son malade syncoper (ce qui évidemment est essentiel), mais en ce qui concerne ses honoraires, il aura pris des rayons pour rien.

Jurisprudence concernant l’article 8

– 36 jugements de TASS. – 2 arrêts de Cours d’Appel. – 15 arrêts de la Cour de Cassation.

L’importance de cette jurisprudence témoigne de l’opiniâtreté des caisses à laquelle a répondu la nôtre.

Article 20 (C08) sans le syndicat.

Un cardiologue suit son malade en clinique. Les jours où il ne fait pas d’acte technique, il cote sa surveillance quotidienne C08. Si l’état du malade nécessite l’intervention d’un spécialiste d’une autre spécialité le cardiologue aurait dû ce jour là, s’il n’y avait pas eu le syndicat, voir son patient gratuitement.

Jurisprudence concernant l’article 20

– 6 jugements de TASS. – 1 arrêt de Cour d’Appel. – 1 arrêt de la Cour de Cassation

Électrocardiogramme en clinique sans le syndicat.

La cotation aurait été C08 + K6,5 au lieu de CS08 + K6,5.

Jurisprudence

– 12 jugements de TASS. – 2 arrêts de Cour d’Appel. – 2 arrêts de Cour de Cassation.

Une première conclusion Pour le cardiologue exerçant en clinique, la cotisation au syndicat des cardiologues a un meilleur rendement que le meilleur placement du siècle.

Il en est de même pour la cardiologie ambulatoire, ainsi que nous l’expliquons dans un second article.

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