FMC & EPP : comment cumuler ses 250 « crédits » en 5 ans ?

Pour que le dispositif de la double obligation – FMC et EPP – soit définitivement opérationnel, il manque encore une brique juridique et une ligne budgétaire. La brique juridique, c’est celle qui doit créer officiellement les Conseils Régionaux de l’Ordre. Ce sont ces structures administratives, à créer et surtout à installer, qui hébergeront les Conseils Régionaux de FMC lesquels auront la tâche de colliger les certificats attestant que les médecins se sont acquittés de leur obligation. Ces instances n’ont en effet pas de personnalité morale et elles devront être « adossées » (formule officielle) à une structure en disposant… La ligne budgétaire la plus facile est celle que le ministère devra affecter au fonctionnement de tout le dispositif. Curieusement, c’est celle qui pose le moins de problème puisqu’une enveloppe est déjà provisionnée, mais l’administration est ainsi faite que le déblocage de crédits votés obéit toujours à un protocole complexe à base d’autorisations préalables et d’exhaustivité du processus administratif… C’est ainsi que Bercy réalise, au passage, quelques menues économies d’un exercice budgétaire à l’autre.

La ligne budgétaire la plus difficile n’est d’ailleurs pas connue dans son montant : c’est la somme des subventions que l’industrie pharmaceutique met sur la table des associations depuis des années. Ce « parrainage » – aussi vieux que la médecine libérale – devrait désormais obéir à une « Charte éthique » dont la rédaction s’avère délicate. Et s’avèrera délicate tant que la même industrie aura le sentiment – fondé – de servir de « variable d’ajustement » aux impératifs comptables du budget de la Sécu.

Double obligation et double tutelle, cohérence difficile

Le juridique et le financier, voilà au moins deux hypothèques qui grèvent encore un peu l’horizon de la FMC/EPP à son échéance théorique de 2007. Enfin M. Xavier BERTRAND vient d’assurer (Quotidien du Médecin du 27 juin) qu’il était attelé à trouver une solution respective. Il convient donc de lui faire confiance. Le dossier le mérite car il restera dans les annales comme un sujet qui a, particulièrement, pris les chemins de traverse. Formellement l’obligation de formation médicale continue (FMC) des médecins libéraux remonte aux Ordonnances-Juppé de 1995. Deux lois récentes ont à la fois confirmé et complexifié le dispositif : – la loi du 4 mars 2002, dite « Droits des malades » a confirmé l’obligation de la FMC ; – la loi du 11 août 2004, dite « de réforme de l’assurance maladie » (ou encore « Loi-Douste-Blazy », du nom du ministre qui l’a portée) y a ajouté l’obligation d’Évaluation des Pratiques Professionnelles (EPP).

Le cadre législatif est donc le suivant : – la FMC est mise sous « la tutelle » de la profession organisée au sein d’un Conseil National de FMC « qui statue sur avis de la Haute Autorité de Santé » ; – l’EPP est organisée par la Haute Autorité de Santé (HAS) qui se prononce, réciproquement, après l’avis du Conseil de la FMC.

Il est évident que la double obligation – sous une double tutelle – génère une compétition assez préjudiciable à la cohérence du dispositif. Sa lisibilité par les médecins, premiers concernés, vient d’être, en revanche, bien éclairée par la publication – au J.O. du 9 août dernier – d’un arrêté du 13 juillet portant « barème » des diverses actions à portée des médecins.

Ce texte apporte des confirmations, amendements à la marge, des rumeurs qui courraient depuis quelques mois et laisse encore dans le « flou » quelques points.

• Confirmation donc que l’obligation se juge sur 5 ans ; il est évidemment conseillé de s’en acquitter « au fil de l’eau », année après année, et de ne pas attendre la dernière pour faire la course aux points. Ã noter d’ailleurs que l’on parle désormais de « crédits » (à l’américaine) et non plus de « points » selon une formule sans doute jugée trop « scolaire ».

• Confirmation toujours que FMC et EPP relèvent bien d’une seule et même obligation mais apparemment selon des calendriers différents. Début juillet la Haute Autorité de Santé célébrait ainsi le « premier anniversaire » de l’EPP légale sans préciser combien de praticiens s’y étaient engagés. L’EPP « pèse » ainsi 100 des 250 crédits quinquennaux exigés. Autre confirmation, la notion ancienne d’EPP « ponctuelle » et « pérenne » semble avoir été portée par pertes et profits au profit d’une démarche « continue » : l’UFCV, qui compte parmi les premiers organismes officiellement agréés pour l’EPP, a pris le parti de commencer le processus soumis aux cardiologues par une EPP « ponctuelle » pour le continuer par une EPP « pérenne ». Il n’empêche que des précisions sont attendues de la HAS pour clarifier le sujet…

• Amendements à la marge : les points respectivement attribués aux divers modules de FMC « présentielle » : ce sera donc 8 crédits par jour et… 4 par demi-journée ou par soirée. Le ministre a donc – et c’est heureux – considéré qu’une soirée après une journée de travail valait bien une demi-journée sur des bancs de faculté. Toute la profession lui en saura gré ! Au final, l’obligation de formation « présentielle » (qu’on pourrait aussi bien qualifier de « traditionnelle ») équivaut à un peu moins d’une semaine en FMC, soit sensiblement ce qui se pratique déjà hors obligation.

• Confirmation enfin : une seule catégorie de FMC ne suffira pas ; il faudra aller chercher quelques autres dizaines de crédits dans la formation « individuelle » – presse écrite, livre, télématique – et si possible agréée par les CNFMC (c’est-à-dire avec comité de lecture, pré ou post-tests validés). La liste des revues agréées dans toutes les spécialités devrait être publique avant la fin de l’année.

• Amendement enfin : l’exclusion des essais de phase IV de médicaments et/ou matériels ; et la reconnaissance – en catégorie 3 – des situations professionnelles formatrices. Les postes électifs sont de cette nature ainsi que, d’une matière générale, tout engagement associatif (FMC des généralistes, pédagogie auprès d’élèves, ou de patients…) ou professionnel (réseau de soins). En un mot tout ce qui sort de la pratique habituelle quotidienne et qui oblige le praticien à se documenter, à se former.

• Lorsque les « méthodes modernes » de formation/évaluation (e-learning, podcasting…) sont réalisées par des organismes agréés, il est appliqué le même barème que pour la catégorie 1.

Jean-Pol Durand

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