Interview de Pierre-Antoine Ayrivié – Le médecin évalué : « S’évaluer, c’est évoluer »

301 – Le Cardiologue Comment se lance-t-on dans une démarche d’évaluation de sa pratique ? _ Pierre-Antoine Ayrivié – La première fois, il y a deux ans, c’était une EPP dans le cadre de l’URML. Il y avait un côté pionnier, et c’est toujours agréable d’être parmi les premiers à fouler un sentier, à le défricher. Quand on m’a proposé cette forme d’évaluation, j’ai donc accepté l’expérience. C’était pour voir si c’était réalisable, pour faire le point sur mon activité : on a toujours quelque chose à modifier.

Les vingt premiers patients à l’aune de deux référentiels.

Le C. – Quel type d’EPP avez-vous suivi ? _ P.-A. A. – Nous étions cinq ou six réunis pour les explications méthodologiques des médecins habilités puis nous avions des formulaires à remplir, au cabinet, pour les vingt premiers patients vus sur deux référentiels : le dossier médical et l’HTA… je crois.

Le C. – Vous n’avez donc pas été marqué au point de vous souvenir précisément du second référentiel ? _ P.-A. A. – Non, on apprend tellement au jour le jour. J’ai suivi le protocole, j’ai fait mon référentiel, voilà. Et j’ai vu ce que je pouvais en retirer. Une modification de la manière de travailler sur deux points bien précis. Sur le dossier médical, avoir systématiquement l’adresse et le numéro de téléphone actualisés des patients. Je croyais le faire, mais je me suis aperçu que la secrétaire ou moi pouvions oublier de demander si les numéros avaient changés. Sur l’HTA, je ne précisais pas suffisamment, dans les conclusions, les objectifs à atteindre par le patient.

Le C. – Comment se sont passées les réunions avec les médecins habilités ? _ P.-A. A. –Dans la réunion qui suivait notre travail sur chacun des deux référentiels, c’étaient les réponses du groupe qui étaient évaluées. Personne n’était donc montré du doigt en cas d’écart avec le référentiel. Pourtant j’ai remarqué que chaque fois que l’un de nous était « en faute », entre guillemets, il cherchait toujours une mauvaise raison pour se justifier. Personne n’accepte facilement d’être surpris en dehors des clous. De ne pas être parfait.

Le C. – Est-ce que cette pratique d’évaluation vous a semblé naturelle ? _ P.-A. A. – Non, pas du tout. Comme les confrères, j’ai même trouvé cela déstabilisant au départ. Je trouve aussi que la finalité de la chose c’est en outre d’uniformiser les tendances. Est-ce parce que la médecine est devenue de plus en plus technique ? On s’aperçoit que l’on est obligé d’avoir des consensus pour être en mesure de dire : je soigne bien mon patient puisque que je suis dans les règles. On peut évidemment en sortir avec de bonnes raisons, mais avec le risque d’être très ennuyé si ça ne marche pas. Finalement, c’est peut-être cela l’EPP : un rappel des règles. Je crois d’ailleurs que c’est utile à tous, même à ceux qui sortent avec un diplôme tout neuf parce que l’on ne travaille pas de la même manière à l’hôpital, en formation ou en cabinet.

Lorsque l’on a pris de mauvaises habitudes, elles sont difficiles à perdre .

Le C. – Êtes-vous décidé à poursuivre l’évaluation ? _ P.-A. A. – J’en ai déjà fait une autre. Comme l’UFCV m’a proposé la même EPP, j’ai recommencé après avoir vérifié que je ne prenais la place de personne et avec pour autre motivation de voir ce qui me restait de la première. Je me suis aperçu qu’il y avait des choses que je faisais moins bien, que j’avais déjà oubliées. C’est la preuve que lorsque l’on a de mauvaises habitudes, elles sont difficiles à perdre ! C’est cela l’EPP : s’évaluer pour évoluer. Inversement, j’ai vérifié que je fais des choses depuis ma première évaluation que je ne faisais pas auparavant. Je vais aussi, dans le cadre de mon activité d’expert auprès des tribunaux, suivre un groupe de pairs. Ce n’est pas obligatoire mais je suis sûr que cela va m’aider de voir comment font les autres.

Le C. – Pas d’évaluation en ligne ? _ P.-A. A. – Je suis juste allé voir le site de l’UFCV, au début, quand les cas cliniques ont été mis en ligne. J’ai fait deux cas, c’était sympa. Je trouve cependant que c’est très tolérant. J’aurais préféré parfois que l’on me dise : « là, tu t’es trompé ».

Voir aussi l’article complet « L’EPP selon la méthode UFCV : évaluation largement positive par ceux qui l’ont vécue« 

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