Négociations conventionnelles : les raisons de la crispation

Cette course de lenteur finit par faire sortir de leurs gonds ses plus fidèles alliés. Les syndicats médicaux signataires ont, eux, un besoin impératif d’engranger les dividendes de leur signature avant de se présenter aux urnes, en mai prochain, pour les élections des administrateurs d’URML. La logique voudrait donc que ce psycho- drame se termine au plus tôt sur des engagements d’augmentations d’honoraires programmés courant mars.

Mais la logique électorale des uns ne croise pas obligatoirement la logique comptable des autres. Et si les postures se raidissent, des deux côtés de la table, ce n’est pas seulement du théâtre. Il est indéniable que se joue en ce début d’année la crédibilité de la politique conventionnelle.

1 – D’abord, il y a cette histoire d’engagements financiers. Les syndicats signa- taires avaient embarqué la communauté médicale dans le dispositif de la «maîtrise médicalisée»; 980 millions d’économies à produire, dont l’essentiel est bien là, pas précisément où elles étaient attendues, mais enfin «le compte y est»… Ã quelques jours près, et compte tenu du fait qu’aucun effort n’a été simultanément engagé à l’hôpital, à l’origine de 20% des prescriptions de ville, médicaments, IJ, ambulance… Deux petites augmentations auraient dû mécaniquement tomber à l’anniversaire de la signature conventionnelle : 1€ sur la MSC (majoration de soins coordonnés) et 3€pour les enfants de 2 à 6 ans. Transitoirement retardées donc, pour cause de différence comptable mineure, en regard des enjeux. Il y a là une question de principe sur laquelle Michel Chassang ne peut se permettre de transiger sauf à se faire accuser de se faire piéger dans une mécanique purement comptable.

2 – Il y a ensuite le zèle mis par les caisses à harceler les médecins à tout propos: les généralistes qui ont ouvert leurs portes aux DAM – les « VM » de la Caisse – doivent maintenant prendre au téléphone les médecins-conseils venus leur parler, qui des statines, qui des benzodiazépines… Les spécialistes, de leur côté, n’en peuvent plus des retours de FSE (ou formulaires papier renvoyés directement au patient) pour des soi-disant erreurs de codage/cotation. Les dits documents sont refoulés par l’informatique sans qu’un interlocuteur soit tou- jours en mesure d’en livrer l’explication au téléphone. Et puis, il y a l’insupportable problème des majorations refusées à l’intérieur du parcours «apparent», à tel ou tel malade qui a «oublié» de s’inscrire chez le médecin traitant. Quand il s’agit d’un malade en CMU, donc en tiers-payant complet, le médecin préfère généralement ne pas s’em- barrasser de paperasserie fastidieuse et renonce à toute velléité de récupérer la totalité de son dû… Cumulées, ces tracasseries tissent un climat malsain qui peut prendre une dimension carrément conflictuelle, comme dans la Caisse de Cergy où une directrice intérimaire avait décidé d’appliquer des pénalités sur les prescriptions de médicaments selon que le malade était ou non dans le parcours. Certains confédérés – qui s’estiment légitimement copropriétaires de l’idée du parcours – en viennent à parler de «dévoiement» par les Caisses qui n’auraient en tête qu’une idée de filière.

3 – Les délégations médicales – CSMF, SML, UCCSF – sont d’autant plus fondées à hausser le ton que les élections aux URML vont se transformer en «référendum pour ou contre la Convention» et qu’elles apprécieraient que les caisses ne jouent pas le jeu de leurs adver- saires. Il leur faut donc à la fois engranger quelques augmentations et aussi ramener le dialogue conventionnel sur le terrain de la maîtrise médicalisée. Ainsi ont-elles fini par conclure, au terme d’un laborieux périple, passant à trois reprises devant «les Sages» de la Haute-Autorité de Santé, un Accord de Bon Usage des anti-agrégants plaquettaires. Sa complexité nous oblige ànel’analyser que dans le prochain numéro.

Restera donc, le 25 janvier, à finaliser le programme 2006, à le doter d’objectifs, à négocier/contractualiser les moyens… C’est à l’aune de cette production-là que les électeurs jugeront aussi de la capacité des signataires à défendre la place des médecins dans le grand concert de la maîtrise.

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