Dépassements d’honoraires : La recette des députés pour les contrer

Dans un contexte d’accroissement des dépassements d’honoraires, deux députés publient dix propositions pour restructurer la médecine libérale.

Le rapport de Yannick Monnet (PCF – 1ère circonscription de l’Allier) et Jean-François Rousset (Renaissance – 3e circonscription de l’Aveyron) rejoint le diagnostic dressé par celui de l’HCAAM : les dépassements d’honoraires en France atteignent 4,5 milliards d’euros en 2024, avec une augmentation structurelle (+7%/an depuis 2021).

Cette hausse résulte principalement de l’accroissement des installations en secteur 2 : 75% des primo-installations se font désormais en secteur 2, contre 64% en 2000. Pour les spécialistes, la part du secteur 2 est passée de 37% en 2000 à 56% en 2024.

Quatre spécialités concentrent 2/3 des dépassements : chirurgie (1 Md€), ophtalmologie (749 M€), anesthésie (546 M€) et radiologie (497 M€). Les dépassements représentent en moyenne 21% des honoraires totaux des médecins de secteur 2, mais avec de fortes disparités selon les spécialités.

S’agissant de la cardiologie, 71% des cardiologues sont conventionnés en secteur 1, 16% en secteur 2 avec OPTAM et 10% en secteur 2 sans OPTAM. Cette spécialité reste donc majoritairement en secteur 1, contrairement à d’autres spécialités comme la chirurgie ou l’ophtalmologie.

L’OPTAM : un dispositif utile mais à l’efficacité limitée

L’OPTAM (Option Pratique Tarifaire Maîtrisée) impose un taux de dépassement maximal de 100% et exige le respect d’un taux d’activité à tarif opposable personnalisé. En contrepartie, les médecins bénéficient d’une prime, d’une meilleure base de remboursement pour les patients et d’un dispositif de partage des gains lors des revalorisations tarifaires.

Près d’un médecin en secteur 2 sur deux a adhéré à l’OPTAM, ce qui a permis dans un premier temps de faire baisser les taux de dépassement et d’augmenter l’activité à tarif opposable (passée de 37,5% en 2016 à 43,4% en 2020). Cependant, le dispositif perd en efficacité depuis 2020, avec une ré-augmentation des taux de dépassement et une baisse de l’activité opposable.

Le dispositif présente plusieurs limites : il est coûteux (335 M€ en 2019 pour éviter seulement 288 M€ de dépassements), complexe dans son calcul, et peut paradoxalement favoriser le passage du secteur 1 au secteur 2 dans certaines spécialités.

Propositions principales

Le rapport propose dix recommandations dont un socle de mesures structurantes pour la médecine libérale :

  1. Rendre l’OPTAM obligatoire pour toute nouvelle inscription en secteur 2 et le réformer : instaurer un parcours progressif sur 10 ans avec 50% d’activité opposable minimum les 5 premières années ; transformer l’OPTAM en contrat de 5 ans renouvelable par l’ARS ; intégrer le taux de dépassement dans le calcul de la prime ; supprimer le partage de gains.
  2. Finaliser la révision de la CCAM (Classification Commune des Actes Médicaux) qui n’a pas été actualisée depuis 2005, puis traduire rapidement les nouveaux tarifs dans la convention, si nécessaire par voie réglementaire en cas d’échec de la négociation.
  3. Appliquer effectivement les sanctions en cas de dépassement excessif via une campagne annuelle de contrôle.
  4. Mesures ciblées : forfaitiser ou interdire les dépassements pour les actes répétés dans le cadre de pathologies chroniques et pour les actes de prévention ; conclure des accords avec les 4 spécialités principales pour supprimer les dépassements sur les actes les plus importants (notamment cancers).

Une autre mesure préconisée : ne plus rembourser les prescriptions faites en secteur 3. Ainsi, le libre choix du médecin s’accompagnerait potentiellement pour le patient d’une disparition du principe d’égalité entre les citoyens …

L’objectif global est de plafonner les dépassements tout en maintenant une forme de liberté tarifaire, dans une logique pragmatique mobilisant tous les acteurs du système de santé.

 

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